Émission du titre de recettesLe 15 septembre 2021, la Ville de Paris a émis un titre de recettes n° 207837 à l’encontre de la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France, d’un montant de 115 166,40 euros, pour des dégradations causées à 13 arbres lors du chantier de rénovation du siège de l’association Médecins sans Frontières. Demande d’annulationLe 12 novembre 2021, la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France a saisi le tribunal administratif de Paris pour demander l’annulation de ce titre. Le tribunal a rejeté la requête le 9 février 2023, déclarant qu’il n’était pas compétent pour connaître de l’affaire. Assignation devant le tribunal judiciaireLe 6 mars 2023, la société a assigné la Ville de Paris devant le tribunal judiciaire de Paris pour obtenir l’annulation du titre de recettes et la décharge de la somme due. L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 octobre 2023. Prétentions des partiesDans ses conclusions du 15 novembre 2023, la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France a demandé l’annulation du titre, la décharge de la somme, le rejet de la demande de dommages et intérêts de la Ville de Paris, ainsi qu’une indemnité de 3 000 euros. La Ville de Paris, dans ses conclusions du 9 novembre 2023, a demandé le déboutement de la société et, à titre subsidiaire, la condamnation de celle-ci à verser des dommages et intérêts. Incompétence du signataire de l’acteLa société a contesté la régularité du titre en raison de l’incompétence de son signataire, arguant que la Ville de Paris n’avait pas prouvé la publication de l’arrêté de délégation de signature. La Ville a produit des documents attestant de la délégation de signature à Monsieur [K] [D], ce qui a été jugé suffisant pour établir la régularité de l’acte. Violation des dispositions légalesLa société a également soutenu que le titre de recettes ne mentionnait pas correctement la qualité du signataire et n’était pas signé. La Ville a démontré que le titre mentionnait la qualité du signataire et que seul le bordereau devait être signé, ce qui a été respecté. Absence d’indication des bases de liquidationLa société a fait valoir que le titre ne précisait pas les bases de liquidation de la créance. La Ville a répondu que le titre mentionnait les dommages causés aux arbres et les tarifs applicables, ce qui a été jugé suffisant pour informer la société des bases de la créance. Bien-fondé de la créanceLa société a contesté la responsabilité des dégradations, affirmant que la Ville n’avait pas prouvé que les travaux étaient à l’origine des dommages. La Ville a soutenu que la société était responsable en tant qu’entreprise générale du chantier. Cependant, le tribunal a conclu que la Ville n’avait pas établi la responsabilité de la société pour les dégradations alléguées. Frais du procèsLa Ville de Paris, partie perdante, a été condamnée aux dépens et à verser à la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Décision du tribunalLe tribunal a annulé le titre de recettes n° 207837 émis le 15 septembre 2021, prononcé la décharge de la somme, débouté la Ville de Paris de sa demande de condamnation et condamné la Ville aux dépens ainsi qu’à verser 3 000 euros à la société. |
Quelle est la compétence juridictionnelle pour contester un titre de recettes émis par une collectivité territoriale ?
La compétence juridictionnelle pour contester un titre de recettes émis par une collectivité territoriale est régie par le principe de la séparation des compétences entre les juridictions administratives et judiciaires.
En vertu de l’article L. 211-1 du code de justice administrative, les litiges relatifs aux actes des collectivités territoriales, y compris les titres de recettes, relèvent généralement de la compétence des tribunaux administratifs.
Cependant, dans le cas présent, le tribunal administratif de Paris a rejeté la requête de la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France, considérant qu’il n’était pas compétent pour connaître de cette affaire.
Cela a conduit la société à saisir le tribunal judiciaire, ce qui soulève des questions sur la compétence appropriée pour traiter ce type de litige.
Il est donc essentiel de déterminer si le titre de recettes contesté relève d’un acte administratif ou d’un acte de gestion, ce qui influencerait la juridiction compétente.
Quelles sont les conditions de validité d’un titre de recettes émis par une collectivité territoriale ?
Les conditions de validité d’un titre de recettes émis par une collectivité territoriale sont principalement régies par le code général des collectivités territoriales, notamment l’article L. 1617-5.
Cet article stipule que le titre de recettes doit comporter certaines mentions obligatoires, telles que les nom, prénoms et qualité de la personne qui l’a émis, ainsi que les voies et délais de recours.
Il est également précisé que seul le bordereau de titres de recettes doit être signé pour être produit en cas de contestation.
Dans le cas présent, la Ville de Paris a produit un arrêté de délégation de signature, ce qui a permis de justifier la signature du titre de recettes par Monsieur [K] [D].
De plus, le titre doit être fondé sur une créance certaine, liquide et exigible, ce qui implique que le redevable doit être informé des bases de la liquidation de la créance.
En l’espèce, le titre de recettes contesté mentionne les dommages causés à 13 arbres et fait référence à une délibération du Conseil de Paris, ce qui semble respecter les conditions de validité.
Quels sont les recours possibles contre un titre de recettes émis par une collectivité territoriale ?
Les recours possibles contre un titre de recettes émis par une collectivité territoriale sont principalement prévus par le code de justice administrative et le code général des collectivités territoriales.
En vertu de l’article R. 421-1 du code de justice administrative, le recours en annulation d’un acte administratif, tel qu’un titre de recettes, doit être introduit devant le tribunal administratif dans un délai de deux mois à compter de la notification de l’acte.
Le redevable peut également contester le montant de la créance en invoquant des moyens tels que l’irrégularité de la procédure, l’incompétence de l’auteur de l’acte ou l’absence de justification du montant réclamé.
Dans le cas présent, la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France a contesté le titre de recettes devant le tribunal administratif, puis a saisi le tribunal judiciaire après le rejet de sa requête.
Il est également possible de demander une décharge de la somme due, ainsi que des dommages et intérêts en cas de préjudice subi en raison de l’émission du titre de recettes.
Quelles sont les conséquences d’une annulation d’un titre de recettes par le tribunal ?
L’annulation d’un titre de recettes par le tribunal a plusieurs conséquences juridiques importantes.
Tout d’abord, l’annulation entraîne la disparition rétroactive de l’acte, ce qui signifie que la créance qui en découle est considérée comme n’ayant jamais existé.
Cela implique que le redevable n’est plus tenu de payer la somme mentionnée dans le titre de recettes, comme cela a été décidé dans le jugement rendu par le tribunal.
De plus, l’annulation peut également donner lieu à une demande de remboursement des sommes déjà versées, si le redevable a effectué un paiement en vertu du titre annulé.
En l’espèce, le tribunal a prononcé la décharge de la somme de 115 166,40 euros, ce qui signifie que la Ville de Paris ne peut plus exiger ce montant de la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France.
Enfin, l’annulation peut également avoir des implications sur les frais de justice, comme le paiement des dépens et des sommes au titre de l’article 700 du code de procédure civile, qui peuvent être mis à la charge de la partie perdante.
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :
■
1/1/1 resp profess du drt
N° RG 23/03566 – N° Portalis 352J-W-B7H-CZHYK
N° MINUTE :
Assignation du :
06 Mars 2023
JUGEMENT
rendu le 13 Novembre 2024
DEMANDERESSE
S.A.S. DEMATHIEU ET BARD BÂTIMENT ILE DE FRANCE
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Béatrice NICOLAS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1541
DÉFENDERESSE
Commune VILLE DE PARIS
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Stéphane DESFORGES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #K0131
Décision du 13 Novembre 2024
1/1/1 resp profess du drt
N° RG 23/03566 – N° Portalis 352J-W-B7H-CZHYK
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Cécile VITON, Première vice-présidente adjointe
Présidente de formation,
Madame Marjolaine GUIBERT, Vice-présidente
Madame Valérie MESSAS, Vice-présidente
Assesseurs,
assistées de Monsieur Gilles ARCAS, Greffier lors des débats et de Madame Marion CHARRIER, Greffier lors du prononcé
DÉBATS
A l’audience du 16 Octobre 2024
tenue en audience publique
JUGEMENT
Prononcé par mise à disposition
Contradictoire
en premier ressort
Le 15 septembre 2021, la Ville de Paris a émis à l’encontre de la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France un titre de recettes n° 207837 à hauteur de 115 166,40 euros au titre des dégradations causées à 13 arbres situés [Adresse 7] et [Adresse 5]) par le chantier de rénovation du siège de l’association Médecins sans Frontières.
Par requête du 12 novembre 2021, la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France a demandé l’annulation de ce titre au tribunal administratif de Paris.
Par jugement du 9 février 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté la requête de la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Par acte de commissaire de justice délivré le 6 mars 2023, la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France a assigné la Ville de Paris devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins d’annulation du titre de recettes émis le 15 septembre 2021 d’un montant de 115 166,40 euros et de décharge de la somme qui y figure.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 octobre 2023.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par conclusions du 15 novembre 2023, la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France demande au tribunal de :
– annuler le titre de recettes n° 207837/2021 émis le 15 septembre 2021 d’un montant de 115 166,40 euros ;
– prononcer la décharge de la somme qui y figure ;
– rejeter la demande de condamnation au paiement de la somme de 115 166,40 euros à titre de dommages et intérêts, formée par la Ville de Paris à l’encontre de la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France ;
– condamner la Ville de Paris à payer à la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Par conclusions du 9 novembre 2023, la Ville de Paris demande au tribunal :
– de débouter la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France de toutes ses demandes ;
– à titre subsidiaire, au cas où le tribunal annulerait le titre de recettes litigieux, de condamner la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France à verser à la Ville de Paris la somme de 115 166,40 euros à titre de dommages et intérêts ;
– en tout état de cause, de condamner la société demanderesse à verser à la Ville de Paris la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
1. Sur l’incompétence du signataire de l’acte
La société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France fait valoir que le titre de recettes est entaché d’une irrégularité tenant à l’incompétence de son signataire aux motifs que la Ville de Paris ne démontre pas avec certitude que l’arrêté municipal du 9 avril 2021 portant délégation de signature a été publié au Bulletin officiel de la Ville de Paris du 16 avril 2021 comme elle l’indique, que cet arrêté ne comporte aucune référence de sorte qu’il n’est pas possible de rattacher cet acte à la notification FAST (N° 21_17758_DFA) et que la Ville de Paris ne démontre pas que Monsieur [K] [D] aurait réceptionné le courriel qui lui a été adressé le 16 avril 2021.
La Ville de Paris fait valoir qu’elle produit l’arrêté de la Maire de Paris du 9 avril 2021 publié au Bulletin officiel de la Ville de Paris du 16 avril 2021 qui donne une délégation de signature à Monsieur [K] [D], que cet arrêté a été transmis le 9 avril 2021 au préfet de Paris, préfet de la Région d’Ile-de-France et que cet arrêté a été notifié à Monsieur [K] [D] par courriel du 16 avril 2021.
Aux termes de l’article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales : » Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l’Etat dans le département, le maire est chargé, d’une manière générale, d’exécuter les décisions du conseil municipal et, en particulier : (…) / 3° De préparer et proposer le budget et ordonnancer les dépenses, de les imputer en section d’investissement conformément à chacune des délibérations expresses de l’assemblée pour les dépenses d’équipement afférentes à des biens meubles ne figurant pas sur les listes et d’une valeur inférieure à un seuil fixé par arrêté des ministres en charge des finances et des collectivités locales ; (…) « .
En l’espèce, le titre de recettes litigieux a été signé par Monsieur [K] [D], agissant par délégation. La Ville de Paris produit aux débats :
– l’arrêté du 9 avril 2021 aux termes duquel la signature de la Maire de Paris a été déléguée à Monsieur [K] [D], adjoint au chef de service pour les bordereaux, titre de recettes et pièces justificatives annexées sur le budget général et les budgets annexes de la Ville de Paris ;
– la notification FAST Numéro 21_17758_DFA de la transmission d’un » arrêté délégation signature DFA » du » 9 avril 2021 » ;
– le courriel adressé le 16 avril 2021 aux chefs de bureaux et adjoints pour la transmission du » nouvel arrêté de délégation de signature publié au BOVP ce jour » avec en pièces jointes des documents intitulés » 2021 04 16 BOVP 030 « , » Arrêté délégation signature DFA » et » Notification FAST réception d’un accusé de réception sur l’acte 21 17758 DFA « .
Ces éléments sont suffisants pour établir que Monsieur [K] [D] bénéficiait d’une délégation de signature pour signer le titre de recettes litigieux. Par suite, il convient de rejeter ce moyen d’irrégularité de l’acte.
2. Sur la violation des dispositions du 4° de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales
La société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France fait valoir que :
– la fonction de Monsieur [D] n’est pas précisée, la mention » Adjoint au chef du » étant insuffisante et peu important que le bordereau où figure le titre de recettes n° 207837 indique pour sa part » adjoint au chef du SEC » ;
– le titre n’est pas signé, et ce alors que rien ne démontre que le bordereau, non produit pas la Ville, soit signé.
La Ville de Paris fait valoir que :
– le titre contesté mentionne la qualité de Monsieur [D], signataire du titre de recettes et le bordereau où figure le titre de recettes indique pour sa part » adjoint au chef du SEC « , comme l’indique l’attestation de signature de ce bordereau ;
– seul le bordereau de titres de recettes doit être signé, ce qui est le cas.
Aux termes de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : » (…) 4° Quelle que soit sa forme, une ampliation du titre de recettes individuel ou de l’extrait du titre de recettes collectif est adressée au redevable. L’envoi sous pli simple ou par voie électronique au redevable de cette ampliation à l’adresse qu’il a lui-même fait connaître à la collectivité territoriale, à l’établissement public local ou au comptable public vaut notification de ladite ampliation. / En application des articles L. 111-2 et L. 212-1 du code des relations entre le public et l’administration, le titre de recettes individuel ou l’extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l’a émis ainsi que les voies et délais de recours. / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation. (…) »
La Cour de cassation juge qu’il résulte de l’article L. 1617-5, 4° du code général des collectivités territoriales que si le titre de recettes individuel doit comporter les nom, prénoms et qualité de la personne qui l’a émise, à peine de nullité, il est possible de suppléer l’irrégularité formelle du titre par une information équivalente donnée au débiteur par un autre document. (Com., 10 mai 2024, pourvoi n° 21-16.180).
En l’espèce, le titre de recettes n° 207837 émis le 15 septembre 2021 mentionne le nom et prénom de la personne qui l’a émis, ce qui n’est pas contesté par la société demanderesse, puis la mention suivante : » ADJOINT AU CHEF DU « . Ce titre n’est pas signé.
La Ville de Paris produit aux débats l’arrêté du 9 avril 2021 de la Maire de Paris donnant délégation de signature à Monsieur [K] [D], adjoint au chef de service pour les bordereaux, titre de recettes et pièces justificatives annexées sur le budget général et les budgets annexes de la Ville de Paris.
La Ville de Paris produit également aux débats en pièce n° 15 intitulée » Attestation de signature du bordereau du titre de recette « , un document adressé par le responsable client du service Docaposte Fast attestant que le flux suivant a été télétransmis en trésorerie : Fichier » contenant des bordereaux signés électroniquement par [K] [D] le 15/09/2021, télétransmis à Hélios le même jour « . Le certificat utilisé pour la signature mentionne » [K] [D], Adjoint au chef du SEC « .
Il résulte de tout ce qui précède que le titre de recettes émis par la Ville de Paris envers la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France est régulier dès lors que celle-ci a pu en identifier l’auteur et que la Ville de Paris justifie que les bordereaux signés le 15 septembre 2021 par Monsieur [K] [D] l’ont été par voie électronique.
3. Sur l’absence d’indication des bases de liquidation
La société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France fait valoir que le titre de recettes n’indique pas les bases de liquidation de la créance et ne comporte pas de référence à un document joint à celui-ci ou qui lui aurait précédemment adressé.
La Ville de Paris fait valoir que le titre de recettes précise qu’il s’agit du recouvrement, selon les tarifs fixés par une délibération du Conseil de Paris 2014-DEVE-1106 du 09 septembre 2021 des dommages causés à 13 arbres par le chantier de l’immeuble de Médecins sans frontières dont l’adresse est mentionnée, l’ensemble de ces informations ayant déjà été porté à la connaissance de la société demanderesse par courriers des 23 mars et 20 août 2021.
Il est constant que le titre exécutoire délivré par un comptable public ne peut l’être que pour une créance certaine, liquide et exigible. Le redevable doit être informé des bases de la liquidation de la créance qui lui est réclamée.
En l’espèce, le titre délivré à la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France est ainsi libellé » RECOUV TVX ELAGAGE 13 ARBRES DOMMAGES CHANTIER AV J JAURES ET RUE A CARREL 19EME IMM MEDECINS S/FRONTIERES CONSTATES LE 29/01/2020 TARIFS SELON DELIB 2014 DEVE 1106 DFA-09/09/2021 « .
Ce titre fait suite à une lettre en date du 23 mars août 2021 adressée par la Ville de Paris à la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France qui ne conteste pas l’avoir reçue. Dans cette lettre, la Ville de Paris faisait état de dommages causés à 13 arbres, propriété du domaine public de la ville, lors de la tenue du chantier de construction de l’immeuble » Médecins sans Frontières » situé [Adresse 5] et [Adresse 7] (19è), constatés le 29 janvier 2020 et demandait la prise en charge du préjudice matériel s’élevant à 115 166,40 euros comme cela était précisé dans l’état des débours joint.
La référence aux travaux sur les 13 arbres endommagés, le lieu du dommage et les circonstances liés à la réalisation d’un chantier, la date de constatation du dommage et le tarif appliqué rendait possible la vérification par la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France du bien fondé de la réclamation de la Ville de Paris. Par suite, le titre de recettes émis par la Ville de Paris précisait suffisamment les bases de liquidation de sa créance.
4. Sur le bien-fondé de la créance
La société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France fait valoir que la Ville de Paris n’établit pas que les travaux réalisés par la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France sont à l’origine des désordres allégués en l’absence d’éléments établissant la date de survenance des désordres ni leur cause, et que le préjudice invoqué n’est pas justifié, dans son principe et dans son montant.
La Ville de Paris fait valoir que la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France est intervenue en qualité d’entreprise générale du chantier et est donc responsable des désordres causés par les travaux dont elle avait la charge, que dès le 6 septembre 2018, la Ville avait signalé au maître d’ouvrage la dégradation de sept arbres situés dans l’emprise de son chantier, que les autres dégradations ont été constatées le 29 janvier 2020 à la fin du chantier, que l’ensemble des arbres dégradés se situe dans l’emprise du chantier et que le préjudice a été évalué sur la base du barème pour l’évaluation des dégâts des arbres annexé à la délibération du Conseil de Paris n° 2014 DEVE 1106 DFA des 15 et 16 septembre 2014.
Il est constant que le titre exécutoire délivré par un comptable public ne peut l’être que pour une créance certaine, liquide et exigible.
En l’espèce, la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France est intervenue en qualité d’entreprise générale en charge des travaux tout corps d’état sur le chantier de rénovation du siège de l’association Médecins sans Frontières situé [Adresse 7] et [Adresse 5] à [Localité 6]. Parmi les treize arbres concernés par les dommages allégués, neuf sont situés sur le trottoir de la [Adresse 7] et quatre sont situés sur le trottoir de l'[Adresse 5].
Les neuf arbres situés [Adresse 7] se trouvent le long de l’emprise de l’immeuble à réhabiliter à un endroit où une zone de protection avait été instaurée sur le domaine public de la Ville afin de permettre l’accès et le stationnement pour livraison et stockage, des véhicules et engins de chantier des différents intervenants à l’opération de rénovation, ce que ne conteste pas la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France. Au contraire, les quatre arbres situés sur le trottoir de l'[Adresse 5] ne sont pas dans la zone de protection précitée.
Sur le procès-verbal de réunion d’ouverture de chantier du 26 janvier 2018, il était uniquement mentionné : » Préconisation DEVE pr arbres (base vie incluse) « .
Dans un courriel adressé le 6 septembre 2018 à un salarié de Médecins sans Frontières, le responsable du secteur du DEVE – service de l’arbre et des bois de la Mairie de Paris a indiqué avoir constaté la veille des dégradations sur sept arbres situés dans l’emprise de ce chantier, avec des chocs sur les troncs et bris de branche. Toutefois, ce courriel a été adressé à Médecins sans Frontières et non à la société Demathieu et Bard, la localisation et les dégradations constatées sur chacun de ces arbres ne sont pas précisées et la Ville de Paris ne produit pas aux débats le constat mentionné dans ce courriel et qui aurait été effectué en présence de l’un des responsables du chantier. La production aux débats de sept photographies d’arbres est insuffisante à établir qu’il s’agit des sept arbres concernés par le courriel du 6 septembre 2018 et faisant l’objet du titre de recettes litigieux et que la société Demathieu et Bard est responsable de ces dégradations.
Les dégradations constatées le 31 janvier 2020 ne l’ont pas été contradictoirement avec la société Demathieu et Bard ou le maître d’ouvrage.
Au contraire, la société Demathieu et Bard produit aux débats des courriels échangés au cours de la réalisation des travaux et faisant état de dégradations sur des arbres à la suite de mauvaises conditions climatiques ou de l’intervention d’une autre entreprise. Ainsi, le 28 juillet 2018, un salarié de la société Demathieu et Bard informait la société Egis et le cabinet d’architecte de ce qu’une branche d’un arbre s’était cassée dans l’emprise du chantier suite aux forces précipitations et au vent sur Paris le 27 juillet. Le 22 février 2019, un salarié de la société Demathieu et Bard informait la société Egis que des branches avaient été endommagées par l’évacuation des terres par la CPCU.
Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la Ville de Paris n’établit pas que les travaux d’élagage faisant l’objet du titre de recettes litigieux sont dus à des dégradations imputables à la société Demathieu et Bard Ile de France. Par suite, il convient d’annuler le titre de recettes n° 207837 émis le 15 septembre 2021 d’un montant de 115 166,40 euros, de prononcer la décharge de la somme qui y figure et de rejeter la demande subsidiaire de la Ville de Paris de condamnation de la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France au paiement de la somme de 115 166,40 euros à titre de dommages et intérêts.
5. Sur les frais du procès
La Ville de Paris, partie perdante, sera condamnée aux dépens et à verser à la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort,
ANNULE le titre de recettes n° 207837/2021 émis le 15 septembre 2021 d’un montant de 115 166,40 euros et PRONONCE la décharge de la somme qui y figure.
DÉBOUTE la Ville de Paris de sa demande de condamnation à l’encontre de la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France.
CONDAMNE la Ville de Paris aux dépens.
CONDAMNE la Ville de Paris à payer à la société Demathieu et Bard Bâtiment Ile de France la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Fait et jugé à Paris le 13 Novembre 2024
Le Greffier Le Président
Marion CHARRIER Cécile VITON