→ Résumé de l’affaireMonsieur et Madame [J] ont confié des travaux de rénovation des terrasses de leur maison et piscine à la société DUBAÏ PISCINE en 2020. Suite à des réserves et malfaçons constatées, malgré une expertise amiable et une mise en demeure, les époux [J] ont demandé une expertise judiciaire. L’expert a déposé son rapport en octobre 2022. Les époux [J] ont assigné la société DUBAÏ PISCINE devant le tribunal judiciaire de Bordeaux pour obtenir réparation de leur préjudice. La société n’ayant pas comparu, l’ordonnance de clôture a été prononcée en mars 2024. |
→ L’essentielIrrégularité de la procédureAux termes de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée. Responsabilité décennale du constructeurL’article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d’un ouvrage est, pendant dix ans à compter de la réception, responsable de plein droit envers le maître de l’ouvrage des dommages non apparents à réception qui compromettent sa solidité ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou d’équipement le rendent impropre à sa destination. Si les dommages invoqués ne revêtent pas un caractère décennal, le maître de l ouvrage peut rechercher la responsabilité contractuelle de droit commun du constructeur par application de l’article 1231-1 du code civil, à charge pour lui de rapporter la preuve d’un manquement ou d’une faute, d’un préjudice et d’un lien causal. Travaux non conformes et responsabilité de l’entrepriseEn l’espèce, les travaux réalisés par la société DUBAÏ PISCINE présentent des malfaçons et des défauts d’exécution. Ces désordres, tels que des margelles de piscine mal posées, des skimmers détériorés et des carreaux de carrelage décollés, compromettent la solidité et la destination des ouvrages. La responsabilité décennale de l’entreprise est donc engagée, et elle est tenue de réparer le préjudice subi par les époux [J] en réalisant les travaux de réparation nécessaires. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 30 Juillet 2024
54G
N° RG 22/09667
N° Portalis DBX6-W-B7G-XJYM
Minute n° 2024/
AFFAIRE :
[U] [J],
[K] [J]
C/
S.A.S. DUBAI PISCINE
Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
la SELARL BOERNER & ASSOCIES
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et du délibéré :
Madame Alice VERGNE, Vice-Présidente,
statuant en Juge Unique.
Lors des débats et du prononcé :
Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier
DEBATS :
à l’audience publique du 26 Mars 2024,
délibéré au 04 Juin 2024, prorogé au 02 et au 30 Juillet 2024.
JUGEMENT :
Réputé contradictoire
En premier ressort
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe
DEMANDEURS
Monsieur [U] [J]
né le 07 Décembre 1973 à [Localité 5] (HAUTES PYRÉNÉES)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Maître Jean-David BOERNER de la SELARL BOERNER & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX, avocats plaidant
Madame [K] [J]
née le 21 Février 1975 à [Localité 6] (HAUTES PYRÉNÉES)
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Maître Jean-David BOERNER de la SELARL BOERNER & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX, avocats plaidant
N° RG 22/09667 – N° Portalis DBX6-W-B7G-XJYM
DEFENDERESSE
S.A.S. DUBAI PISCINE
[Adresse 4]
[Localité 3]
défaillant
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [U] [J] et Madame [K] [J] sont propriétaires d’une maison avec piscine sise [Adresse 1] à [Localité 2].
Courant 2020, ils ont confié à la société DUBAÏ PISCINE des travaux de rénovation des terrasses entourant leur maison et leur piscine.
Les travaux ont été réalisés en mars 2021.
Par un mail du 14 mars 2021, Monsieur [U] [J] a fait état de réserves et malfaçons s’agissant des travaux réalisés.
Déplorant l’absence de reprise des désordres par l’entreprise malgré une expertise amiable et une mise en demeure de solutionner le litige par courrier recommandé du 8 décembre 2021 avec avis de réception signé le 10 décembre 2021, les époux [J] ont sollicité l’organisation d’une expertise judiciaire.
Par une ordonnance du 4 avril 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux a désigné Monsieur [F] [E] en qualité d’expert, lequel a déposé son rapport le 12 octobre 2022.
Par exploit du 15 décembre 2022, Monsieur et Madame [J] ont assigné la SAS DUBAÏ PISCINE devant le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins de :
– la voir condamner à leur payer la somme de 30.549,98 euros en réparation de leur préjudice
– lui voir enjoindre de communiquer les noms et coordonnées de son assureur responsabilité civile et responsabilité civile décennale sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir
– la voir condamner à leur payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens y compris ceux de l’instance en référé comprenant les frais d’expertise.
Ils fondent leur demande principale sur les dispositions des articles 1792 et 1231-1 du code civil, faisant valoir que les désordres constatés par l’expert engagent la responsabilité, décennale pour certains, contractuelle pour les autres, de la société DUBAÏ PISCINE laquelle, en procédant à une exécution défectueuse des travaux, a commis une faute et doit les indemniser du coût des travaux propres à remédier aux désordres.
Régulièrement assignée selon les modalités de l’article 658 du code de procédure civile, la SAS DUBAÏ PISCINE n’a pas comparu.
N° RG 22/09667 – N° Portalis DBX6-W-B7G-XJYM
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 26 mars 2024.
Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la demande indemnitaire des époux [J]
L’article 1792 du code civil dispose que tout constructeur d’un ouvrage est, pendant dix ans à compter de la réception, responsable de plein droit envers le maître de l’ouvrage des dommages non apparents à réception qui compromettent sa solidité ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou d’équipement le rendent impropre à sa destination.
Si les dommages invoqués ne revêtent pas un caractère décennal, le maître de l’ouvrage peut rechercher la responsabilité contractuelle de droit commun du constructeur par application de l’article 1231-1 du code civil, à charge pour lui de rapporter la preuve d’un manquement ou d’une faute, d’un préjudice et d’un lien causal.
En l’espèce, les travaux commandés à la société DUBAÏ PISCINE comprenaient :
– la fourniture et pose d’un carrelage anti-dérapant sur la dalle béton existante autour de la maison
– après dépose du carrelage et des margelles existantes, la fourniture et pose d’un carrelage anti-dérapant et de margelles autour de la piscine
– outre des travaux supplémentaires suite au constat de l’affaissement de la dalle en béton le long du mur des skimmers de la piscine : remplacement de dalles, travaux de carrelage au sol.
Ces travaux n’ont pas donné lieu à la réalisation d’un ouvrage au sens de l’article 1792 précité, mais affectent des éléments d’équipement de la maison, terrasse et piscine.
Aucune réception des travaux n’a été formalisée.
Le mail de Monsieur [J] à l’entreprise listant les réserves et malfaçons et la justification du règlement de l’intégralité de la facture Carrelage n° 1440 d’un montant de 4.852,80 euros, de la somme de 4.188 euros sur le montant total de la facture Démolition et Pose n° 1524 de 4.688 euros et de l’intégralité de la facture Dalle Affaissement + Drainage n° 1523 d’un montant de 1.840 euros, soit de 95,6 % du marché global, permettent de constater que les époux [J] étaient d’accord pour que la réception des travaux intervienne à la date du 14 mars 2021.
Il ressort du rapport d’expertise qu’ont été constatés les désordres suivants :
– margelles de piscine :
Elles présentent des malfaçons, les travaux sont inachevés : l’entreprise DUBAÏ PISCINE, qui a mis en œuvre 3 types de carrelage, n’a pas rattrapé l’épaisseur entre la margelle et le carrelage et les joints entre les margelles et le profil d’arrêt du liner n’ont pas été finis.
N° RG 22/09667 – N° Portalis DBX6-W-B7G-XJYM
Ce désordre n’affecte pas l’ouvrage pour l’instant mais pourrait créer des infiltrations d’eau créant des décollements de carrelages ou des désordres au liner.
Les malfaçons et travaux inachevés étaient visibles à la fin des travaux et ont fait l’objet de réserves à la réception.
Ce désordre, qui résulte de malfaçons dans l’exécution des travaux, est de nature à engager la responsabilité contractuelle de droit commun de la société DUBAÏ PISCINE, tenue de réaliser des travaux exempts de vice.
– détérioration des skimmers :
Suite à l’intervention de l’entreprise DUBAÏ PISCINE pour refaire une dalle béton armée sur la « façade » des skimmers, le skimmer de gauche et le skimmer de droite sont tous deux fissurés sur 2 côtés, le calage du skimmer et du carrelage le recouvrant ne sont pas achevés et le coulage du béton semble avoir comprimé le skimmer et le balai d’ouverture est bloqué en position fermée à plus de 50% bloquant son fonctionnement.
Ce désordre n’était pas visible par un profane à la réception.
Il peut rapidement engendrer une fuite d’eau de la piscine et en conséquence la rendre impropre à sa destination.
Ce désordre, qui résulte de malfaçons dans l’exécution des travaux par la société DUBAÏ PISCINE qui n’a pas pris de précaution lors du coulage de la dalle béton pour assurer la bonne tenue des skimmers sans qu’ils puissent se déformer avec la pression du béton mis en œuvre, est de nature à engager sa responsabilité décennale.
– l’absence de joints de dilatation en sols :
Sur la tranche de l’allée en béton, 6 joints de dilatation n’ont pas été traités par l’entreprise lors de la pose du carrelage. Les joints de carrelage fissurent donc à ces endroits.
Ce désordre, apparu depuis la fin des travaux, n’était pas visible par un profane à la réception.
Il n’affecte pas l’ouvrage à ce jour mais peut créer, à terme, des soulèvements de carreaux de sols avec risque de chute des personnes et rendre en conséquence la terrasse impropre à sa destination.
Il résulte de malfaçons dans l’exécution des travaux par la société DUBAÏ PISCINE qui n’a pas respecté les règles de l’art imposant de respecter dans le revêtement carrelage les mêmes joints de dilatation que ceux existant sur la dalle support en béton et est de nature à engager sa responsabilité décennale.
– le décollement de carreaux de carrelage de sol :
La largeur des joints de carrelage est aléatoire (1mm, 3mm, 4mm), 49 carreaux de sol mis en œuvre par l’entreprise DUBAÏ PISCINE sont décollés et/ou fissurés au droit des coupes faites, le caniveau entre deux zones de carrelage ne fait pas son office et cause des infiltrations sous carrelages, ce qui engendre des décollements de ce dernier, des décollements sont visibles au droit des joints de dilatation non faits et il y a potentiellement un risque de décollement rapide de carreaux qui cassent avec risque de coupure.
Ce désordre, apparu depuis la fin des travaux, n’était pas visible par un profane à la réception.
Il peut rendre à terme la circulation dangereuse avec risque de chute des personnes et rendre en conséquence la terrasse impropre à sa destination.
Il résulte de malfaçons dans l’exécution des travaux par la société DUBAÏ PISCINE, qui n’a pas respecté les règles de l’art et est de nature à engager sa responsabilité décennale.
La société DUBAÏ PISCINE est donc tenue de réparer le préjudice des époux [J], constitué du coût des travaux propres à remédier aux désordres constatés.
L’expert judiciaire a évalué les dits travaux, sur la base de divers devis produits par les demandeurs, aux sommes suivantes :
– 2.697 euros HT soit 3.236,40 euros TTC pour la réparation des skimmers
– 22.103,25 euros HT soit 24.313,58 euros TTC pour la réfection des terrasses et margelles de piscine avec dépose des existants et réfections à neuf
– 2.500 euros HT soit 3.000 euros TTC pour la mission de maîtrise d’œuvre
pour un coût total de 27.300,25 euros HT soit 30.549,98 euros TTC.
La société DUBAÏ PISCINE sera en conséquence condamnée à payer aux époux [J] la dite somme de laquelle il y a lieu de déduire les 500 euros retenus par les demandeurs sur le paiement du marché global, soit 30.049,98 euros.
Sur les autres demandes
Les époux [J] ne justifiant pas avoir précédemment réclamé à la défenderesse la communication des noms et coordonnées de son assureur responsabilité civile et responsabilité civile décennale, il sera fait injonction à la société DUBAÏ PISCINE de les communiquer, sans astreinte.
La SAS DUBAÏ PISCINE, partie perdante, supportera les dépens, en ce compris les dépens de référé et le coût de l’expertise judiciaire et paiera aux époux [J] une somme que l’équité commande de fixer à 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le tribunal,
CONSTATE la réception tacite des travaux par les époux [J] le 14 mars 2021 ;
CONDAMNE la SAS DUBAÏ PISCINE à payer à Monsieur [U] [J] et Madame [K] [J] la somme de 30.049,98 euros au titre du coût des travaux de reprise ;
ENJOINT la SAS DUBAÏ PISCINE de communiquer à Monsieur [U] [J] et Madame [K] [J] les noms et coordonnées de son assureur responsabilité civile et responsabilité civile décennale ;
CONDAMNE la SAS DUBAÏ PISCINE à payer à Monsieur [U] [J] et Madame [K] [J], ensemble, la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
DEBOUTE Monsieur [U] [J] et Madame [K] [J] pour le surplus ;
CONDAMNE la SAS DUBAÏ PISCINE aux dépens, en ce compris les dépens de référé et le coût de l’expertise judiciaire ;
RAPPELLE que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire.
La présente décision est signée par Madame Alice VERGNE, la Présidente, et Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,