Responsabilité décennale de la société AGIR pour des désordres d’assainissement rendant l’immeuble impropre à son usage

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Responsabilité décennale de la société AGIR pour des désordres d’assainissement rendant l’immeuble impropre à son usage

Résumé de l’affaire

Monsieur [T] [W] a confié à la SAS AGIR une prestation en matière d’assainissement pour un montant de 5654 euros. Se plaignant de malfaçons, il a fait réaliser un constat d’huissier et a assigné la SAS AGIR en référé pour une expertise judiciaire. Suite au rapport de l’expert, il a assigné au fond la SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED pour obtenir réparation de son préjudice. Monsieur [W] demande des indemnités pour son préjudice matériel, financier et moral. La SAS AGIR conteste les demandes et demande à la Compagnie ACASTA de la garantir. La Compagnie ACASTA demande le rejet des demandes de Monsieur [W]. L’affaire a été clôturée le 24 novembre 2023.

L’essentiel

Responsabilité décennale de la société AGIR et de la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED

Monsieur [W] a fondé ses demandes sur l’article 1792 du Code civil, qui établit la responsabilité de plein droit du constructeur d’un ouvrage en cas de dommages compromettant sa solidité ou le rendant impropre à sa destination. L’expert judiciaire a confirmé l’existence de désordres affectant l’immeuble, rendant celui-ci impropre à son usage. La société AGIR, en tant que constructeur de l’ouvrage, est donc responsable de ces désordres de nature décennale.

Réparation des préjudices matériels de Monsieur [W]

Monsieur [W] a sollicité le remboursement des travaux réalisés pour réparer les désordres, ainsi que des dépenses engagées pour ces réparations. L’expert judiciaire a validé le montant des travaux réparatoires et des dépenses exposées par Monsieur [W]. La SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED sont donc condamnées à payer à Monsieur [W] la somme correspondante.

Réparation du préjudice locatif de Monsieur [W]

Monsieur [W] a également demandé une indemnisation pour la perte de loyers due au départ de locataires en raison des désordres. L’expert judiciaire a confirmé l’impact des désordres sur l’habitabilité de l’immeuble, justifiant ainsi l’indemnisation de Monsieur [W]. La Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED est tenue de garantir ce préjudice, malgré ses arguments de résiliation de l’assurance.

En conclusion, la responsabilité décennale de la société AGIR et de la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED est établie, et elles sont condamnées à réparer les préjudices matériels et locatifs subis par Monsieur [W].

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

30 juillet 2024
Tribunal judiciaire de Bordeaux
RG
22/08394
N° RG 22/08394 – N° Portalis DBX6-W-B7G-XBHJ

7EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
7EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 30 Juillet 2024
54G

N° RG 22/08394
N° Portalis DBX6-W-B7G-XBHJ

Minute n° 2024/

AFFAIRE :

[T] [W]
C/
S.A.S.U. AGIR,
Compagnie d’assurance ACASTA EUROPEAN INSURANCE

Grosse Délivrée
le :
à
Avocats :
Me David BENSAHKOUN
la SELARL CABINET HOULGARD-AVOCATS
la SCP DELAVALLADE – RAIMBAULT

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Lors des débats et du délibéré :
Madame Marie-Elisabeth BOULNOIS, Vice-Présidente,
statuant en Juge Unique.

Lors des débats et du prononcé :
Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier

DEBATS :

à l’audience publique du 28 Mai 2024

JUGEMENT :

Contradictoire
En premier ressort
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe

DEMANDEUR

Monsieur [T] [W]
né le 11 Juillet 1949 à [Localité 6] (ALGÉRIE)
de nationalité Française
[Adresse 5]
[Localité 2]

représenté par Maître Alice HOULGARD de la SELARL CABINET HOULGARD-AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant

DEFENDERESSES

S.A.S.U. AGIR
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Me David BENSAHKOUN, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant
N° RG 22/08394 – N° Portalis DBX6-W-B7G-XBHJ

ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED, société de droit étranger
[Adresse 4]
GIBRALTAR GX11 1AA

représentée par Maître Xavier DELAVALLADE de la SCP DELAVALLADE – RAIMBAULT, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat plaidant
*********************************

Suivant devis en date du 12 octobre 2018, Monsieur [T] [W] a confié à la SAS AGIR, assurée auprès de la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED, une prestation en matière d’assainissement consistant notamment en « raccordement et étanchéité, regards », « station de relevage eaux usées domestiques », « comblage sable » et main d’œuvre pour un montant de 5654 euros.

Se plaignant de ce que le raccordement aux eaux usées n’avait pas été correctement effectué, Monsieur [W] a fait procéder à un constat d ‘huissier le 14 mars 2019.

Il a fait réaliser un raccordement au réseau d’assainissement des eaux usées par la société d’assainissement de BORDEAUX METROPOLE le 28 octobre 2019.

Par acte en date du 26 avril 2019, il a fait assigner la SAS AGIR en référé devant le Tribunal judiciaire aux fins de solliciter l’organisation d’une expertise judiciaire. Par ordonnance de référé en date du 9 septembre 2019, il a été fait droit à sa demande et Monsieur [D] [H] a été désigné en qualité d’expert judiciaire. L’expert a rendu son rapport le 17 août 2021.

Suivant actes signifiés les 26 septembre et 26 octobre 2022, Monsieur [W] a fait assigner au fond devant le Tribunal judiciaire la SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED devant le Tribunal judiciaire aux fins de solliciter l’indemnisation d’un préjudice.

Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 juin 2023, Monsieur [T] [W] demande au Tribunal de :

Vu les dispositions des articles 1792 et suivants du Code Civil,
– DIRE l’action engagée par Monsieur [T] [W] recevable et bien fondée et y faire droit ;
– DECLARER la Société AGIR responsable des désordres qu’elle a causés ;
– ENGAGER sa responsabilité au titre de la garantie décennale ;
– CONSTATER que la Société AGIR était assurée par la ACASTA EUROPEAN INSURANCE au moment des faits et, en conséquence DIRE qu’il y aura lieu de prononcer les condamnations solidairement ;
– CONDAMNER solidairement la Société AGIR et son assureur, la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE, à verser à Monsieur [W] la somme de 6.077,44 € au titre de son préjudice matériel ;
– CONDAMNER solidairement la Société AGIR et son assureur, la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE, à verser à Monsieur [W] la somme de 6.200 € au titre de son préjudice financier lié aux pertes d’exploitation ;
– CONDAMNER solidairement la Société AGIR et son assureur, la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE, à verser à Monsieur [W] la somme de 10.000 € au titre de son préjudice moral ;
– CONDAMNER solidairement la Société AGIR et son assureur, la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE, à verser à Monsieur [W] la somme de 5.000 € au titre de son préjudice matériel ;
– ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 mai 2023, la SAS AGIR demande au Tribunal de :

Vu l’article 1792 du Code civil
A TITRE PRINCIPAL, DEBOUTER Monsieur [W] de l’ensemble de ses demandes
A TITRE SUBSIDIAIRE, CONDAMNER la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE, ès qualité d’assureur décennal de la société AGIR, à garantir et relever indemne la société AGIR de l’ensemble des condamnations formulées à son encontre

Suivant dernières conclusions notifiées par voie électronique le 10 août 2023, la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED demande au Tribunal de :

Vu les articles 9, 16, 233 du Code de procédure civile,
Vu les articles A. 243-1 Annexe I, L.124-5 du Code des assurances,
DEBOUTER Monsieur [W] de l’ensemble de ses demandes dirigées à l’encontre de la société ACASTA
CONDAMNER Monsieur [W] à payer à la société ACASTA la somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, outre aux entiers dépens
A TITRE SUBSIDIAIRE :
RAMENER largement à de plus justes proportions les demandes de Monsieur [W] ;
DECLARER opposable à la société AGIR les exclusions contractuelles de garantie, outre les franchises contractuelles et les plafonds de garantie.
DEBOUTER en tant que de besoin la société AGIR de sa demande de garantie formulée contre la société ACASTA.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 24 novembre 2023

MOTIFS :

Monsieur [W] fonde ses demandes sur le seul fondement de l’article 1792 du Code civil en application duquel, tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, des dommages, même résultant d’un vice du sol, qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui, l’affectant dans l’un de ses éléments constitutifs ou l’un de ses éléments d’équipement, le rendent impropre à sa destination.
L’article 1792-1 précise qu’est réputé constructeur de l’ouvrage :
1°tout architecte, entrepreneur, technicien, ou autre personne liée au maitre de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage ;
2° toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu’elle a construit ou fait construire ;
3° toute personne qui, bien qu’agissant en qualité de mandataire du propriétaire de l’ouvrage, accomplit une mission assimilable à celle d’un locateur d’ouvrage.
L’action en responsabilité se prescrit par 10 ans à compter de la réception des travaux et le désordre doit être caché au moment de la réception.

L’expert judiciaire a indiqué que les désordres n’ont pu être constatés par lui-même dans la mesure où des travaux avaient été réalisés pour y remédier à la date de son expertise. Il a néanmoins indiqué avoir constaté la présence du poste de relevage mis en place par la société AGIR et qui ne servait plus à la date de l’expertise. Il a constaté qu’un regard de branchement spécifique à l’immeuble avait été réalisé par la Lyonnaise des Eaux-Suez, sur lequel avaient été ensuite raccordées en gravitaire l’ensemble des évacuations des eaux usées de l’immeuble.

L’expert judiciaire s’est ensuite basé sur les déclarations de Monsieur [P], présent à l’expertise aux côtés du Conseil de Monsieur [W], dont personne n’explique à quel titre, outre du constat d’huissier en date du 14 mars 2019, dont l’ensemble lui a paru cohérent, et a indiqué que les travaux réalisés par la société AGIR n’avaient pas permis de résoudre la problématique d’évacuation des eaux usées de l’immeuble pour deux raisons :
– la canalisation du poste de relevage a été raccordée sur l’ancienne conduite qui était défectueuse
– la société AGIR, malgré ses recherches (trous dans le sol constatés par l’huissier) n’a pas trouvé l’évacuation du logement du rez de chaussée, qui s’est donc trouvé non raccordé au réseau d’évacuation général (poste de relevage).

L’expert judiciaire a précisé que la cause initiale du désordre relevait d’une mauvaise conception d’origine de la prestation, un devis ayant été établi sur des hypothèses verbales de la Lyonnaise des Eaux, qui se sont avérées fausses, de raccordement sur le réseau public, et sans évaluation suffisante des prestations à réaliser. Il a ajouté que la société AGIR, entreprise spécialisée, aurait dû exiger du propriétaire qu’il fasse réaliser par la Lyonnaise des Eaux un branchement spécifique à l’immeuble et qu’elle aurait également dû s’enquérir de la profondeur de ce branchement futur, afin de proposer un raccordement gravitaire des évacuations de l’immeuble, ce qui s’avérait réaliste et efficient, tandis qu’elle avait proposé un poste de relevage, solution plus onéreuse et plus complexe.

L’expert judiciaire a relevé que les désordres rapportés ne pouvaient compromettre la solidité de l’ouvrage mais l’avaient rendu impropre à destination, « puisque des locataires sont partis à cause de l’insalubrité des lieux ».

Dans son procès-verbal de constat du 14 mars 2019, dressé en présence toujours de Monsieur [P] sans aucune indication de sa qualité, l’huissier de justice a indiqué qu’il avait constaté, depuis l’entrée de l’immeuble, une odeur nauséabonde. Il a constaté également dans le premier appartement situé en rez-de-chaussée à gauche la présence de traces noirâtres dans le bac à douche au sujet desquelles Monsieur [P] lui avait indiqué qu’il s’agissait du reflux des canalisations. Dans la cave de l’immeuble, l’huissier de justice a constaté la présence d’un premier ouvrage maçonné, à l’intérieur duquel était visible une eau trouble, et, à proximité, celle d’un deuxième ouvrage maçonné à l’intérieur duquel se trouvait également une eau trouble. Monsieur [P] lui indiquait que le premier ouvrage maçonné correspondait à l’emplacement de la fosse et le second à celui du puisard. Dans une pièce attenante de la cave, l’huissier de justice a constaté l’existence de plusieurs trous non rebouchés creusés dans le sol et qu’un liquide noirâtre dégageant une odeur nauséabonde était visible à l’intérieur de l’un d’eux, les autres trous étant vides. Monsieur [P] indiquait à l’huissier que ces trous avaient été creusés par la société AGIR pour tenter de localiser une canalisation. L’huissier de justice a également constaté dans la cave la présence d’une brouette, d’une rallonge et de tuyaux qui selon Monsieur [P] auraient été abandonnés par la société AGIR. Il a noté que l’un des tuyaux était raccordé à une pompe. Dans l’arrière cour, l’huissier de justice a constaté que la terrasse en béton brut était inondée par un liquide trouble et, sur la façade de l’immeuble, l’existence d’un tuyau de descente qui s’encastrait dans une autre canalisation, à l’extrémité de laquelle il constatait la présence de déchets collés et de coulures marrons collées. Il a ajouté que cette canalisation entrait à l’intérieur du mur et communiquait dans la cave où elle se prolongeait et était raccordée à un autre réseau d’écoulement. L’huissier de justice a relevé que plus en aval de cette canalisation, l’ouvrage présentait des traces marrons collées sur la paroi extérieure, outre des traces marrons encore luisantes et des traces sur le mur de l’immeuble. Monsieur [P] lui indiquait qu’un nouveau raccordement au niveau de l’évent avait été réalisé par la société AGIR.

Les travaux réalisés par la société AGIR se caractérisant notamment par l’incorporation de tuyaux avec percement des murs et concernant le réseau d’assainissement de l’ensemble de l’immeuble peuvent être qualifiés d’ouvrage au sens de l’article 1792 du code civil. Il convient de fixer la date de réception de l’ouvrage au 30 octobre 2018, date non contestée et justifiée du règlement des travaux et alors qu’aucun élément ne permet d’établir un abandon de chantier.

La SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED font valoir que les désordres ne sont pas établis en ce que, les travaux réparatoires ayant été effectués, l’expert judiciaire n’a pu les constater.

Cependant, il résulte des constatations de l’huissier sus visées qui ont été validées par l’expert judiciaire et soumises à la discussion contradictoire que la réalité des désordres est établie, la présence d’eaux noirâtres, de traces marrons, d’eaux troubles et d’odeurs nauséabondes, le tout renvoyant à la présence d’excréments, étant en lien direct avec le défaut d’évacuation du réseau d’assainissement, outre que ces désordres sont imputables à l’intervention de la société AGIR, l’existence de la pompe de relevage et du raccordement réalisé étant conformes à son devis alors que l’expert judiciaire indique qu’ils sont à l’origine des désordres.

La Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED fait ensuite valoir qu’il n’est pas établi que les désordres ont rendu l’immeuble impropre à son usage, en ce qu’il n’est pas prouvé que « les locataires sont partis à cause de l’insalubrité des lieux ».

Certes, Monsieur [W] ne produit aucun élément relativement au départ de locataires. Il ressort du constat d’huissier que l’ensemble de l’immeuble présentait à l’entrée une odeur nauséabonde. Pour le surplus, l’expert judiciaire a constaté un désordre affectant la douche à l’intérieur d’un appartement et des désordres au niveau de la cave de l’immeuble et d’une terrasse en extérieur. Faute de constatations à l’intérieur des autres appartements, la répercussion des désordres à l’intérieur de ceux-ci n’est pas connue. Cependant, non seulement la présence d’une odeur nauséabonde généralisée mais le fait que l’assainissement ait été inefficace après la prestation de la société AGIR, ne permettant notamment pas l’évacuation des excréments, constituent un désordre qui a pour conséquence de rendre l’immeuble dans sa totalité impropre à son usage, non de location, mais d’habitation, usage qui n’est pas contesté.

Enfin, il n’est pas contesté que le désordre était caché à la réception des travaux et ne s’est révélé qu’ensuite.
N° RG 22/08394 – N° Portalis DBX6-W-B7G-XBHJ

Il s’agit en conséquence d’un désordre de nature décennale dont la SAS AGIR est responsable de plein droit en application de l’article 1792 du code civil et elle en sera tenue à réparation.

La Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED, son assureur décennal à l’ouverture des travaux, est tenu à garantie s’agissant des travaux réparatoires en application de l’article L 241-1 du code des assurances et elle sera tenue in solidum avec son assurée à la réparation du désordre en application de l’article L. 124-3 du code des assurances.

Monsieur [W] sollicite en réparation de son préjudice matériel le remboursement de la somme de 4864 euros réglés à la SAS AGIR pour la réalisation des travaux. Cependant, il ne fonde sa demande ni sur une répétition de l’indu, ni sur une exception d’inexécution et cette somme ne correspond pas à un coût de travaux réparatoires alors que la société AGIR a exécuté sa prestation. S’il invoque un défaut de conseil, la réparation du préjudice en résultant ne peut non plus consister dans le remboursement des prestations. Il sera en conséquence débouté de cette demande.

Monsieur [W] sollicite en outre en réparation de son préjudice matériel le règlement d’une somme de 1213, 44 euros correspondant à des dépenses qu’il a exposées pour faire réparer les désordres. Il produit à l’appui des tickets de carte bleue pour des achats de matériaux et/ou outils courant juin et juillet 2019 et jusqu’au 14 août 2019, expliquant avoir effectué les travaux par ses propres moyens, le tout pour le montant sollicité.

L’expert judiciaire auquel ont été soumises les facturettes a validé le montant des travaux réparatoires. Il doit cependant être précisé que le montant total des facturettes produites atteint la somme de 1186, 14 euros et non 1213, 44 euros. Il conviendra en outre d ‘en déduire l’achat de deux détecteurs de fumée pour un coût de 14, 40 euros qui apparaît sans lien avec l’assainissement alors que pour le surplus, tel que validé par l’expert et tel que cela ressort des matériaux et outils achetés, ils sont en lien avec des travaux d’assainissement et les désordres, les sommes peu élevées exposées au titre de la réfection d’un sol apparaissant justifiées dans leur quantum et leur nature eu égard aux désordres établis.

La SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED seront ainsi condamnées in solidum à payer à Monsieur [W] la somme de 1186,14 euros au titre des travaux réparatoires.

La Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED sera condamnée à en garantir et relever indemne son assurée. S’agissant d’une garantie obligatoire, elle ne sera autorisée à opposer sa franchise contractuelle qu’à son assuré, conformément à sa demande, en application de l’annexe I à l’article A 243-1 et de l’article L. 112-6 du code des assurance.

Monsieur [W] sollicite en outre l’octroi d’une somme de 6200 euros correspondant à 10 mois de loyer au titre de ses « pertes d’exploitations » et en réalité d’un préjudice locatif. Il fait valoir que sur les 4 locataires qui occupaient l’immeuble, deux sur quatre ont abandonné leur logement dès octobre 2018. Il produit à l’appui un contrat de location en date du 8 août 2019 pour un appartement situé au rez-de-chaussée et pour un loyer de 620 euros.

La SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED font valoir que ce préjudice n’est pas établi faute d’être démontré.

Si Monsieur [W] affirme que deux de ses locataires sont partis, il sollicite en réalité le montant d’un loyer de 620 euros sur une période de 10 mois, soit d’un seul loyer.
N° RG 22/08394 – N° Portalis DBX6-W-B7G-XBHJ

Il résulte du constat d’huissier du 14 mars 2019 corroboré par l’expert judiciaire que le bac de la douche de l’appartement du rez-de-chaussée était en mars 2019 plein de traces noirâtres et inutilisable. Il ressort en outre du contrat de location que l’appartement est de type 2 et ne dispose donc nécessairement pas d’une deuxième salle de bain. L’expert judiciaire a en outre indiqué que la SAS AGIR n’avait pas trouvé l’évacuation du logement du rez de chaussée qui s’était trouvé non raccordé au réseau d’évacuation général. Il en résulte que cet appartement est devenu inhabitable suite au désordre d’assainissement et n’a pu l’être à nouveau qu’une fois le désordre réparé, soit en août 2019. Il convient ainsi d’accorder à Monsieur [W] en réparation du préjudice locatif une somme de 5580 euros correspondant à la perte de 9 mois de loyers entre novembre 2018 et juillet 2019.

La Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED fait valoir qu’elle ne doit pas sa garantie, s’agissant d’une garantie facultative, sa police d’assurance ayant été résiliée le 31 décembre 2018, date du « run off de la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED ».

Force est cependant de constater que la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED ne produit aucune pièce justifiant d’une quelconque résiliation de l’assurance ni permettant d ‘établir de quoi il s’agit concernant le « run off » invoqué.

En outre, elle ne produit pas sa police d’assurance alors qu’il ressort de l’attestation d’assurance produite par Monsieur [W] que la société AGIR avait également souscrit des garanties annexes concernant les dommages immatériels consécutifs. Elle ne justifie d’aucune exclusion de garantie.

En conséquence, il apparaît qu’elle doit sa garantie pour le préjudice immatériel consécutif aux désordres de nature décennale et elle en sera tenue in solidum à réparation en application de l’article L. 124-3 du code des assurances.

La SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED seront ainsi condamnées in solidum à payer à Monsieur [W] la somme de 5580 euros en réparation de son préjudice locatif.

La Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED sera condamnée à en garantir et relever indemne son assurée. S’agissant d’une garantie facultative, conformément à sa demande, elle sera autorisée à lui opposer sa franchise contractuelle en application de l’article L. 112-6 du code des assurance.

S’agissant d’un préjudice moral, Monsieur [W] ne produit aucune pièce permettant d’établir une atteinte psychologique, une atteinte à ses sentiments d’affection, d »honneur ou de considération résultant des désordres et il sera débouté de sa demande à ce titre.

La SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED qui succombent seront tenus in solidum aux dépens, en ce compris ceux du référé et le coût de l’expertise judiciaire. Au titre de l’équité, ils seront condamnés in solidum à payer à Monsieur [W] la somme de 3500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED sera condamnée à garantir et relever indemne son assurée de ces condamnations.

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

CONDAMNE in solidum la SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED à payer à Monsieur [T] [W] la somme de 1186, 14 euros au titre des travaux réparatoires.

CONDAMNE la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED à garantir et relever indemne la SAS AGIR de cette condamnation.

AUTORISE la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED à opposer sa franchise contractuelle à la SAS AGIR sur le montant de cette condamnation.

CONDAMNE in solidum la SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED à payer à Monsieur [T] [W] la somme de de 5580 euros en réparation de son préjudice locatif.

CONDAMNE la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED à garantir et relever indemne la SAS AGIR de cette condamnation.

AUTORISE la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED à opposer sa franchise contractuelle à la SAS AGIR sur le montant de cette condamnation.

CONDAMNE in solidum la SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED à payer à Monsieur [T] [W] la somme de 3500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED à garantir et relever indemne la SAS AGIR de cette condamnation.

DEBOUTE Monsieur [T] [W] du surplus de ses demandes.

DEBOUTE la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED du surplus de ses demandes.

CONDAMNE in solidum la SAS AGIR et la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED aux dépens, en ce compris ceux du référé et le coût de l’expertise judiciaire.

CONDAMNE la Compagnie ACASTA EUROPEAN INSURANCE COMPANY LIMITED à garantir et relever indemne la SAS AGIR de cette condamnation.

RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.

La présente décision est signée par Madame Marie-Elisabeth BOULNOIS, la Présidente, et Monsieur Eric ROUCHEYROLLES, Greffier.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


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