Jugement du Tribunal Judiciaire de LyonLe 20 mai 2022, le tribunal a jugé que l’accident de monsieur [W] [E] survenu le 7 mai 2013 était dû à la faute inexcusable de la société [6], remplaçant l’employeur, la société [5]. Il a ordonné la majoration de la rente de la caisse primaire d’assurance maladie et a désigné un expert médical pour évaluer les préjudices. Une provision de 3 000 euros a été allouée à monsieur [W] [E], et la caisse primaire a été chargée d’avancer les frais d’expertise. Expertises MédicalesL’expert désigné a été remplacé à plusieurs reprises, avec le docteur [F] [S] déposant son rapport le 14 juin 2023. Ce rapport a évalué divers préjudices, notamment l’incapacité totale de travail de 2013 à 2017, des déficits fonctionnels temporaires et permanents, ainsi que la nécessité d’assistance par une tierce personne. Demandes de Monsieur [W] [E]Lors de l’audience du 11 septembre 2024, monsieur [W] [E] a demandé des indemnités pour souffrances endurées, préjudices esthétiques, déficits fonctionnels, perte de qualité de vie, et frais divers, totalisant plusieurs montants significatifs. Il a également demandé un complément d’expertise pour évaluer le déficit fonctionnel permanent. Réponses de la Société [5]La société [5] a contesté les montants demandés par monsieur [W] [E], demandant une réduction des indemnités et affirmant que l’action récursoire de la caisse primaire ne pouvait s’exercer que sur un taux d’incapacité de 18 %. Elle a également demandé à être déchargée de certaines demandes. Réponses de la Société [6]La société [6] a demandé le rejet des demandes de monsieur [W] [E] concernant le déficit fonctionnel permanent et d’autres préjudices, tout en demandant une réduction des montants sollicités. Observations de la Caisse Primaire d’Assurance MaladieLa caisse primaire a indiqué qu’elle s’en remettait à l’appréciation du tribunal concernant les montants alloués et a rappelé qu’elle pourrait récupérer les sommes avancées auprès de l’employeur. Indemnisation des PréjudicesLe tribunal a fixé les indemnités dues à monsieur [W] [E] pour divers préjudices, totalisant 110 267,83 euros après déduction de la provision. Il a ordonné un complément d’expertise pour évaluer le déficit fonctionnel permanent et a précisé que la caisse primaire devait avancer les sommes allouées. Action Récursoire de la Caisse PrimaireLa caisse primaire a le droit de récupérer les montants avancés auprès de l’employeur, mais uniquement sur la base du taux d’incapacité de 18 %. Garantie de l’Entreprise UtilisatriceLe tribunal a rappelé que la société [6] devait garantir la société [5] pour toutes les conséquences financières de la faute inexcusable. Décisions AccessoiresLe tribunal a statué sur les dépens et a condamné la société [5] à payer une indemnité de 2 000 euros à monsieur [W] [E] au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’exécution provisoire a été ordonnée pour deux tiers des sommes allouées. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE LYON
POLE SOCIAL – CONTENTIEUX GENERAL
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
JUGEMENT DU :
MAGISTRAT :
ASSESSEURS :
DÉBATS :
PRONONCE :
AFFAIRE :
NUMÉRO R.G :
6 Novembre 2024
Jérôme WITKOWSKI, président
Stéphanie DE MOURGUES, assesseur collège employeur
En l’absence d’un assesseur, le Président a statué seul avec l’accord des parties présentes ou représentées après avoir recueilli l’avis de l’assesseur présent conformément à l’article L 218-1 du COJ.
assistés lors des débats par Doriane SWIERC et du prononcé du jugement par Maéva GIANNONE, greffières
tenus en audience publique le 11 Septembre 2024 et prononcé le 6 novembre 2024 en audience publique
jugement contradictoire, rendu en premier ressort, le 6 Novembre 2024 par le même magistrat
Monsieur [W] [E] C/ Société [5], Société [6]
N° RG 21/00122 – N° Portalis DB2H-W-B7F-VRDX
DEMANDEUR
Monsieur [W] [E],
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Stéphanie BUREL, avocat au barreau de PARIS,
DÉFENDERESSES
Société [5],
[Adresse 2]
représentée par Me Franck DREMAUX, avocat au barreau de PARIS,
Société [6],
[Adresse 3]
représentée par Me Philippe DANESI, avocat au barreau de PARIS,
PARTIE INTERVENANTE
CPAM DU RHONE,
[Adresse 7] non comparante, ni représentée
Notification le :
Une copie certifiée conforme à :
[W] [E]
Société [5]
Société [6]
CPAM DU RHONE
Me Stéphanie BUREL, (PARIS)
Me Philippe DANESI, (PARIS)
Me Franck DREMAUX, (PARIS)
Une copie pour l’expertise
Une copie revêtue de la formule exécutoire :
[W] [E]
Me Stéphanie BUREL, (PARIS)
Une copie certifiée conforme au dossier
Par jugement du 20 mai 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, a notamment :
Jugé que l’accident dont monsieur [W] [E] a été victime le 7 mai 2013 est imputable à la faute inexcusable de la société [6] venant aux droits de la société [8], entreprise utilisatrice substituée à l’employeur, la société [5] ;Ordonné la majoration de la rente servie par la caisse primaire d’assurance maladie du Rhône au taux maximum ;Ordonné une expertise médicale aux frais avancés de la caisse primaire et désigné pour y procéder le docteur [C] [X] ;Alloué à monsieur [W] [E] une provision de 3 000 euros à valoir sur l’indemnisation des préjudices subis ;Dit que la caisse primaire d’assurance maladie doit faire l’avance des frais de l’expertise ainsi que de la provision ;Dit que la caisse primaire d’assurance-maladie pourra recouvrer l’intégralité des sommes dont elle fera l’avance, directement auprès de l’employeur ;Condamné la société [5] à payer à monsieur [W] [E] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;Dit que la société [6] doit garantir la société [5] de toutes les conséquences financières de la faute inexcusable en principal et intérêts et frais, y compris au titre de l’article 700 du code de procédure civile.Réservé les dépens.
Par ordonnance du 8 juillet 2022, l’expert initialement désigné a été remplacé par le docteur [N] [B].
Par ordonnance du 29 septembre 2022, le docteur [N] [B] a été remplacé par le docteur [H] [Z].
Par ordonnance du 9 novembre 2022, le docteur [H] [Z] a été remplacé par le docteur [F] [S].
Le docteur [F] [S] a déposé son rapport d’expertise établi le 14 juin 2023.
Sur les postes de préjudice examinés, les conclusions de l’expert sont les suivantes :
Incapacité totale de travail : Il aurait été en arrêt de travail du 7 mai 2013 au mois de septembre 2017 (document non fourni) ;Déficit fonctionnel temporaire total : Le 7 mai 2013 période d’hospitalisation en urgence ;Du 5 juin 2013 au 11 juin 2013 pour une reprise d’ostéosynthèse ; Le 2 octobre 2013 pour une arthrolyse et ablation du matériel ; Du 6 au 7 avril 2016 pour une arthrodèse du cou-de-pied ; Le 17 janvier 2022 pour l’ablation du matériel restant ;
Déficit fonctionnel temporaire partiel (DFTP) : 75 % : Du 21 mai 2013 au 5 juin 2013 ; du 12 juin 2013 au 30 juillet 2013 ; du 8 avril 2016 au 30 juin 2016 ; 60 % : 3 octobre 2013 au 15 décembre 2013 ;50 % : 31 juillet 2013 au 2 octobre 2013 ; du 1er juillet 2016 au 15 septembre 2016 ; 30 % : du 16 décembre 2013 au 6 avril 2016 ; du 16 septembre 2016 au 16 janvier 2022 ; du 18 janvier 2022 au 31 janvier 2022 ; 23 % : 1erfévrier 2022 au 27 mars 2023 ;
Assistance par une tierce personne : 2 heures par jour pendant les périodes de DFTP à 75 % (soit du 21 mai 2013 au 5 juin 2013 ; du 12 juin 2013 au 30 juillet 2013 ; du 8 avril 2016 au 30 juin 2016);1h30 par jour sur les périodes de DFTP à 60 % (soit du 3 octobre 2013 au 15 décembre 2013) ; 1 heure par jour sur les périodes de DFTP à 50 % (soit du 31 juillet 2013 au 2 octobre 2013 ; du 1er juillet 2016 au 15 septembre 2016) ; 2h30 par semaine sur les périodes de DFTP à 30 % (soit du 16 décembre 2013 au 6 avril 2016 ; du 16 septembre 2016 au 16 janvier 2022 ; du 18 janvier 2022 au 31 janvier 2022) ; Une demie journée par mois sur la période de DFTP à 23 % (soit du 1erfévrier 2022 au 27 mars 2023) ;
Aménagement de véhicule et ou de logement : La victime nécessite dorénavant un véhicule équipé de boite automatique, il n’y a pas lieu de prévoir de frais de logement.
Sur la perte d’une chance de promotion professionnelle : compte tenu du handicap induit par une arthrodèse du cou-de-pied et de la raideur de l’avant-pied gauche, l’intéressé ne peut qu’assurer des activités professionnelles sédentaires excluant le port de charges lourdes, les stations debout prolongés, le port de chaussures normales élégantes ou de sécurité ;
Souffrances endurées : 5/7 ;Préjudice esthétique temporaire : 2,5/7Préjudice esthétique permanent : 2/7 ;Préjudice d’agrément caractérisé par l’impossibilité définitive de retrouver un niveau physique permettant la reprise de la marche, du tennis et du ski ;Absence de préjudice sexuel ;Absence de perte de chance de réaliser un projet de vie familiale ;Absence de préjudice exceptionnel.
Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement lors de l’audience du 11 septembre 2024, monsieur [W] [E] demande au tribunal, à titre principal et sous le bénéfice de l’exécution provisoire, de condamner la société [5] à lui payer les sommes suivantes :
50 000 euros au titre des souffrances endurées ; 5 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ; 8 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent ; 33 795 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ; 65 550 euros au titre du déficit fonctionnel permanent ; 25 000 euros au titre de la perte de la qualité de vie ; 30 000 euros au titre du préjudice d’agrément ; 1 000 euros au titre des frais divers ; 32 668 euros au titre de la tierce personne temporaire (selon actualisation mentionnée dans la note en délibéré contradictoire du 27 septembre 2024) ; 21 497,60 euros au titre de l’aménagement de véhicule ; Mémoire pour perte de chance de promotion professionnelle ; Mémoire pour aménagement de logement ;Mémoire pour les pertes de gains futurs et incidence professionnelle ;
A titre subsidiaire, avant dire droit sur l’indemnisation du déficit fonctionnel permanent, il demande au tribunal d’ordonner un complément d’expertise visant à évaluer le déficit fonctionnel permanent et de liquider les autres postes de préjudice ou, à défaut, de lui allouer une provision de 70 000 euros à valoir sur l’indemnisation définitive des préjudices corporels.
En tout état de cause, il demande au tribunal de condamner la CPAM du Rhône à faire l’avance des sommes allouées à titre provisionnel et définitif, de déclarer que les sommes allouées porteront intérêt à taux légal à compter de la demande de reconnaissance de la faute inexcusable, d’ordonner la capitalisation des intérêts, de condamner la société [5] à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, de la condamner aux dépens de l’instance, de la débouter de ses demandes contraires et de déclarer le jugement à intervenir commun à la CPAM du Rhône et opposable à la société [6].
Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement lors de l’audience du 11 septembre 2024, la société [5] demande au tribunal de réduire à de plus justes proportions les quantums alloués, de dire et juger que l’action récursoire de la CPAM ne pourra s’exercer que sur le seul taux d’IPP de 18 % initialement attribué et de déclarer en toute hypothèse les demandes non-conformes aux dispositions de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale irrecevables et débouter monsieur [W] [E] de ces dernières.
Enfin, elle demande au tribunal de condamner la société [6] à la garantir de toutes les conséquences financières qui résulteraient de la reconnaissance de la faute inexcusable, tant en principal qu’en intérêts et frais, y compris au titre de l’article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens.
En toute hypothèse, la société [5] demande au tribunal de débouter l’ensemble des parties de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions formulées à son encontre.
Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement lors de l’audience du 11 septembre 2024, la société [6] demande au tribunal de débouter monsieur [W] [E] de ses demandes formulées au titre du déficit fonctionnel permanent et de la perte de qualité de vie, du préjudice d’agrément, de la perte de chance de promotion professionnelle, de l’aménagement du logement, de la perte de chance de promotion professionnelle, de la perte de gains futurs, de l’incidence professionnelle et de la perte de droits à la retraite, ainsi que de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle demande au tribunal de limiter l’indemnisation au titre du déficit fonctionnel temporaire à la somme de 29 715,50 euros et de ramener à de plus justes proportions les demandes d’indemnisations formulées par monsieur [W] [E] au titre des souffrances endurées, du préjudice esthétique temporaire et définitif, de l’assistance par une tierce personne temporaire et de l’aménagement de son véhicule.
En tout état de cause, elle demande au tribunal de condamner monsieur [W] [E] à lui verser 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses observation écrites transmises au tribunal par courrier réceptionné par le greffe le 11 septembre 2024 et soumises au débat contradictoire en application de l’article R.124-10-4 alinéa 2, la caisse primaire d’assurance maladie du Rhône s’en remet à l’appréciation du tribunal sur le quantum des sommes allouées et demande qu’il soit rappelé que les sommes avancées à la victime au titre de la majoration de la rente, des préjudices indemnisés et des frais d’expertise, seront recouvrées auprès de l’employeur en application des articles L.452-2 et L.452-3 du code de la sécurité sociale.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux conclusions susvisées conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile.
Sur l’indemnisation des préjudices de monsieur [W] [E]
En application de l’article L 452-3 du code de la sécurité sociale, la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle imputable à la faute inexcusable de l’employeur peut prétendre à l’indemnisation des souffrances physiques et morales, du préjudice esthétique, du préjudice d’agrément et du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle.
Par décision n 2010-08 QPC du 18 juin 2010, le conseil constitutionnel a reconnu au salarié victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle imputable à la faute inexcusable de l’employeur, le droit de réclamer devant les juridictions de sécurité sociale, outre la réparation des préjudices susvisés, la réparation de l’ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.
Monsieur [W] [E], né le 4 mars 1984, était âgé de 29 ans au jour de l’accident survenu le 7 mai 2013.
Aux termes de son rapport, le docteur [F] [S] indique que l’accident du travail a entraîné une fracture luxation de l’avant pied, une luxation dorsale du 2ème métatarsien et une luxation spatulaire (articulation entre l’arrière pied et l’avant-pied), une fracture du 1er et 2ème cunéiforme et une fracture de la tête du 2ème et du 3ème métatarsien, outre le constat d’une peau contuse à la face de l’avant pied.
A titre liminaire, sur la date de consolidation
Le tribunal constate que, dans son rapport d’expertise (page 16), le docteur [F] [S] a retenu une date de consolidation fixée au 1er juillet 2017, correspondant à la reprise du travail, sans pour autant en tenir compte dans l’évaluation des préjudices temporaires (avant consolidation) et permanents (après consolidation).
Par note en délibéré, autorisée par le tribunal et soumise au principe du contradictoire, la CPAM du Rhône indique qu’à la suite de l’accident du travail du 10 mai 2013, monsieur [W] [E] a été consolidé le 1er juin 2015 avec attribution d’un taux d’incapacité permanente partielle de 18 %, révisé à 23 % sur décision du tribunal du contentieux de l’incapacité.
Le 4 mars 2016, il a été victime d‘une rechute prise en charge au titre de la législation professionnelle, consolidée le 31 mai 2017 avec retour à l’état antérieur.
Au vu de ces éléments et en l’absence de recours formé par l’assuré pour contester la date de consolidation fixée par le service médical de la caisse, le tribunal liquidera le préjudice de monsieur [W] [E] en retenant une date de consolidation au 31 mai 2017.
Le tribunal prend acte que monsieur [W] [E], aux termes de sa note en délibéré, maintient les demandes initialement formulées et, subsidiairement, actualise ses demandes à hauteur de :
17 419,50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ;18 857 euros au titre de l’assistance par une tierce personne temporaire.
A titre liminaire, sur la formulation des demandes de monsieur [W] [E]
En matière de faute inexcusable, en application de l’article L.452-3 alinéa 3 du code de la sécurité sociale, il n’appartient pas au tribunal de condamner l’employeur à payer à la victime de la faute inexcusable les sommes allouées en indemnisation du préjudice subi, mais de fixer le montant de cette indemnisation, dont la caisse primaire d’assurance maladie doit faire l’avance, à charge pour elle d’exercer l’action récursoire à l’encontre de l’employeur.
La demande de condamnation formulée par monsieur [W] [E] à l’encontre de la société [5] s’analyse donc une demande de fixation du quantum des divers postes de préjudice sollicités, dont la caisse primaire d’assurance maladie devra faire l’avance, à charge pour elle d’exercer l’action récursoire à l’encontre de l’employeur.
En outre, la mention « pour mémoire » dans le dispositif des conclusions ne saisit pas le tribunal.
Lors de l’audience du 11 septembre 2024, monsieur [W] [E] n’a pas davantage formulé de demande au titre de la perte de chance de promotion professionnelle, de l’incidence professionnelle et la perte de gains professionnels futurs et des frais de logement adapté.
Le tribunal n’est donc pas valablement saisi d’une quelconque demande au titre de ces postes de préjudices.
Sur les souffrances endurées
Ce poste de préjudice a pour objet de réparer toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que les troubles associés que doit endurer la victime par suite de l’atteinte à son intégrité physique jusqu’à la consolidation, étant précisé que les souffrances endurées après la consolidation sont indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent.
En l’espèce, la consolidation est intervenue plus de 4 ans après l’accident, la période de convalescence ayant été particulièrement longue.
L’expert a évalué les souffrances endurées à 5/7, tenant compte notamment des circonstances traumatiques de l’accident (écrasement du pied par Fenwick), de la nature des lésions initiales (fractures et luxation du pied), des douleurs post-opératoires, des cinq interventions chirurgicales antérieures à la consolidation.
Il est également établi par le rapport d’expertise que monsieur [W] [E] a été contraint de se déplacer à l’aide de béquilles de façon prolongée et d’une canne sur plusieurs années et qu’il a bénéficié de prescriptions d’antalgiques au long cours jusqu’à son intervention d’arthrodèse le 6 avril 2016 et le 17 janvier 2022.
Enfin, outre les douleurs physiques, il est établi qu’il a été victime d’une dépression réactionnelle accompagnée de troubles du sommeil, accompagnée d’une perte d’élan vital et qu’il a bénéficié d’un traitement psychotrope jusqu’en juin 2016.
Vu l’ensemble de ces éléments, les souffrances endurées seront indemnisées à hauteur de 35 000 euros.
Sur le préjudice esthétique
Ce poste de préjudice a pour objet de réparer l’altération de l’apparence physique de la victime avant et après la consolidation. Ainsi, le préjudice esthétique temporaire est un préjudice distinct du préjudice esthétique permanent et doit être évalué en considération de son existence avant consolidation de l’état de la victime.
Sur le préjudice esthétique temporaire
Le préjudice esthétique temporaire subi de l’accident à la date de consolidation, soit durant plus de quatre ans, a été évalué par l’expert à 2,5 sur 7, caractérisé selon l’expert par « de multiples dommages esthétiques temporaires, représentés par des plaies traumatiques et opératoires du pied, les cannes et les plâtres, peu exposées cependant à la vue d’autrui, dans les conditions habituelles de l’hospitalisation et de la convalescence ».
En conséquence, le préjudice esthétique temporaire, sera indemnisé à hauteur de 3 500 euros.
Sur le préjudice esthétique permanent
Le préjudice esthétique permanent (après consolidation) a été évalué par l’expert à 2 sur 7, caractérisé par « trois cicatrices traumatiques de bonne qualité sauf celle de M2 responsable d’une hyposensibilité. Non exposé, cependant, dans les conditions usuelles de la vie sociale à l’exception de la période estivale et la déformation séquellaire de, l’arrière-pied en valgus ainsi que l’affaissement de la voute plantaire ».
Ce préjudice esthétique concernant une partie du corps exposée à la vue des tiers, notamment l’été, sera indemnisé à hauteur de 4 000 euros.
Sur le déficit fonctionnel temporaire
Ce poste de préjudice a pour objet d’indemniser l’invalidité subie par la victime dans sa sphère personnelle jusqu’à sa consolidation. Cette invalidité correspond aux périodes d’hospitalisation de la victime, mais aussi à la perte de qualité de vie et à celle des joies usuelles de la vie courante que rencontre la victime durant la convalescence, la privation temporaire des activités privées ou d’agrément auxquelles la victime se livrait habituellement et le préjudice sexuel avant consolidation.
Comme évoqué à titre liminaire, la date de consolidation de l’état de santé de monsieur [W] [E] ayant été fixée au 31 mai 2017, il convient de cantonner l’indemnisation de ce poste de préjudice aux périodes évaluées par l’expert avant cette date.
Outre les périodes à retenir, le taux journalier applicable est débattu entre les parties (30 euros selon le salarié, 25 euros selon les défendeurs).
Compte tenu des lésions initiales et des soins nécessaires, monsieur [W] [E] a subi une gêne certaine dans l’accomplissement des actes de la vie courante et une perte temporaire de qualité de vie, qui seront indemnisées à hauteur de 28 euros par jour d’incapacité temporaire totale afin de tenir compte du préjudice d’agrément temporaire et en l’absence de préjudice sexuel spécifiquement relevé par l’expert, soit :
Sur le déficit fonctionnel temporaire total (100 %), du 7 mai au 20 mai 2013 ; du 5 juin au 11 juin 2013 ; le 2 octobre 2013 et du 6 avril au 7 avril 2013, l’indemnisation s’élève à 24 jours x 28 euros = 672 euros.
Sur le déficit fonctionnel temporaire partiel de 75 %, du 21 mai 2013 au 5 juin 2013 ; du 12 juin 2013 au 30 juillet 2013 et du 8 avril 2016 au 30 juin 2016, l’indemnisation s’élève à 149 jours x 28 euros x 75 % = 3 129 euros.
Sur le déficit fonctionnel temporaire partiel de 60 % du 3 octobre 2013 au 15 décembre 2013, l’indemnisation s’élève à 74 jours x 28 euros x 60 % = 1 243,20 euros.
Sur le déficit fonctionnel temporaire partiel de 50 %, du 31 juillet 2013 au 2 octobre 2013 et du 1er juillet 2016 au 15 septembre 2016, l’indemnisation s’élève à 141 jours x 28 euros x 50 % = 1 974 euros.
Sur le déficit fonctionnel temporaire partiel de 30% du 16 décembre 2013 au 6 avril 2016 et du 16 septembre 2016 au 31 mai 2017, l’indemnisation s’élève à 1 100 jours x 28 euros x 30 % = 9 240 euros.
En conséquence, le déficit fonctionnel temporaire sera indemnisé à hauteur de 16 258,20 euros.
Sur le déficit fonctionnel permanent
Aux termes de deux arrêts rendus en assemblée plénière, la Cour de cassation a jugé que le capital ou la rente versée à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle en application des articles L.434-1 ou L.434-2 du code de la sécurité sociale, ainsi que la majoration prévue à l’article L.452-2 du même code, ne réparent pas le déficit fonctionnel permanent subi par la victime (Ass. plén., 20 janvier 2023, pourvois n° 21-23.947 et n° 20-23.673, publiés).
En cas de faute inexcusable de l’employeur, la victime est donc fondée à solliciter l’indemnisation complémentaire du déficit fonctionnel permanent en application des dispositions de l’article L.452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu’interprété par le conseil constitutionnel par décision du 18 juin 2010.
Ce préjudice résulte de la réduction définitive après consolidation du potentiel physique et psychosensoriel ou intellectuel du fait de l’atteinte à l’intégrité anatomo-physiologique, à laquelle s’ajoutent d’une part les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques, notamment le préjudice moral et d’autre part les troubles dans les conditions d’existence personnelles, familiales et sociales de la victime.
Le taux de déficit fonctionnel permanent est évalué, pour sa dimension relative à l’atteinte à l’intégrité anatomo-physiologique, au barème indicatif d’évaluation des taux d’incapacité en droit commun publié par le concours médical, ce poste de préjudice ayant vocation à indemniser les incidences du dommage qui touchent exclusivement à la sphère personnelle de la victime.
Il est distinct du taux d’incapacité permanente évalué par le service médical de la caisse, évalué selon des modalités différentes précisées à l’article L.434-2 du code de la sécurité sociale d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, selon des barèmes indicatifs d’invalidité distincts du barème précédent et annexés au livre IV du code de la sécurité sociale.
Dès lors, le taux d’incapacité permanente partielle fixé par le service médical de la caisse primaire d’assurance maladie ne saurait servir de base à l’évaluation du déficit fonctionnel permanent éventuellement subi par la victime.
En l’espèce, l’évaluation du déficit fonctionnel permanent n’a pas été prévue dans le cadre de la mission initiale d’évaluation des préjudices confiée à l’expert judiciaire.
Il ne peut, en l’état, être fait droit à la demande indemnitaire de monsieur [W] [E], calculée sur la base du taux de 23 % retenu par le médecin conseil de la caisse primaire d’assurance maladie au titre de l’incapacité permanente partielle.
Pour autant, le docteur [F] [S] fait état de séquelles physiques et psychologiques. Il en résulte que l’existence d’un déficit fonctionnel permanent subi par monsieur [W] [E] ne peut être exclue et la demande formulée à ce titre ne peut donc être rejetée d’emblée.
L’existence d’un déficit fonctionnel permanent à la date de consolidation, soit le 31 mai 2017, doit être appréciée et, au besoin, évaluée dans le cadre d’une mesure d’expertise complémentaire, qui sera donc ordonnée selon les modalités prévues au dispositif de la présente décision.
Il est donc sursis à statuer sur cette demande.
Sur le préjudice d’agrément
Le préjudice d’agrément est constitué par l’impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs qu’elle pratiquait antérieurement au dommage et par la limitation ou la difficulté, y compris d’ordre psychologique, à poursuivre la pratique antérieure de ladite activité.
Il est précisé que le préjudice d’agrément temporaire, c’est-à-dire antérieur à la consolidation, est indemnisé au titre du déficit fonctionnel temporaire.
Enfin, la prise en compte d’un préjudice d’agrément n’exige pas la démonstration d’une pratique de l’activité en club, une pratique individuelle antérieure étant suffisante dès lors qu’elle est justifiée par tout moyen.
En l’espèce, monsieur [W] [E] fait valoir qu’avant l’accident, il pratiquait le tennis au sein du tennis club de [Localité 4] et que du fait de son état, il ne peut plus s’adonner à cette activité.
Il verse à ce titre une attestation dudit club sportif indiquant qu’il était adhérent du club de l’année 2011 à 2013.
Monsieur [W] [E] verse également aux débats une attestation de son frère, monsieur [T] [E], attestant d’une pratique sportive régulière au sein de ce club sportif.
Monsieur [W] [E] produit en outre aux débats une attestation de madame [M] [A] attestant d’une pratique régulière de la course à pied avant la survenance de l’accident du 7 mai 2013, ainsi qu’une attestation de monsieur [O] [R] [J], indiquant qu’avant l’accident de travail de monsieur [W] [E], celui-ci l’accompagnait souvent le week-end à la montagne afin d’y pratiquer différentes activités sportives (ski, randonnée, ski de fond).
Le docteur [F] [S] confirme que les séquelles décrites sont de nature à rendre définitivement impossible toute reprise d’une activité de marche, de tennis ou de ski.
Le préjudice d’agrément est donc établi et, compte tenu du jeune âge de monsieur [W] [E] des multiples activités anciennes et régulières dont il est privé, ce préjudice sera indemnisé à hauteur de 20 000 euros.
Sur les frais divers
Les frais et honoraires engagés par la victime afin d’être assistée d’un médecin lors des opérations d’expertise ne sont pas couverts par les dispositions du Livre IV du code de la sécurité sociale et doivent donc être indemnisés, dès lors qu’ils sont la conséquence directe du risque professionnel survenu par la faute inexcusable de l’employeur.
Monsieur [W] [E] justifie de la note d’honoraires dont il s’est acquitté auprès du docteur [I] [U] afin d’être assisté au cours des opérations d’expertise (pièce n° 26).
Il y a donc lieu de faire droit à sa demande sur ce point et de lui allouer la somme de 1 000 euros.
Sur les frais d’assistance par une tierce personne
Si l’article L.452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu’interprété par le conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010 – 8 QPC du 18 juin 2010, dispose qu’en cas de faute inexcusable de l’employeur, la victime peut demander à celui-ci, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d’autres chefs de préjudice que ceux qui y sont énumérés, c’est à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts, même partiellement ou sous conditions, par le livre IV du code de la sécurité sociale.
L’article L.434-2 alinéa 3 du code de la sécurité sociale dispose que « La victime titulaire d’une rente, dont l’incapacité permanente est égale ou supérieure à un taux minimum, a droit à une prestation complémentaire pour recours à tierce personne lorsqu’elle est dans l’incapacité d’accomplir seule les actes ordinaires de la vie. Le barème de cette prestation est fixé en fonction des besoins d’assistance par une tierce personne de la victime, évalués selon des modalités précisées par décret. Elle est revalorisée au 1er avril de chaque année par application du coefficient mentionné à l’article L. 161-25 ».
Ainsi, l’assistance par une tierce personne à titre temporaire, c’est-à-dire avant consolidation, n’est pas couverte au titre du livre IV et peut donc être indemnisée à titre complémentaire en cas de faute inexcusable de l’employeur.
En revanche, au-delà de la date de consolidation, l’assistance par une tierce personne est couverte au titre du livre IV, sous certaines modalités fixées par décret. Elle ne peut donc faire l’objet d’une indemnisation complémentaire en cas de faute inexcusable de l’employeur, y compris lorsque l’assuré ne remplit pas les conditions règlementaires fixées.
En l’espèce, l’expert judiciaire a retenu la nécessité d’une tierce personne pour assister monsieur [W] [E], scindant les périodes en fonction des besoins, y compris au-delà de la consolidation fixée au 31 mai 2017.
Seules les périodes antérieures à la consolidation seront indemnisées à titre complémentaire.
Entre l’accident et la date de consolidation, l’expert a retenu les besoins suivants :
2 heures par jour du 21 mai 2013 au 5 juin 2013 ; du 12 juin 2013 au 30 juillet 2013 et du 8 avril 2016 au 30 juin 2016, soit 298 heures ;1h30 par jour sur la période du 3 octobre 2013 au 15 décembre 2013, soit 111 heures ; 1 heure par jour sur la période du 31 juillet 2013 au 2 octobre 2013 puis sur la période du 1er juillet 2016 au 15 septembre 2016, soit 141 heures ; 2h30 par semaine sur les périodes de DFTP à 30% (soit du 16 décembre 2013 au 6 avril 2016 ; du 16 septembre 2016 au 31 mai 2017), soit (1 100 / 7) x 2,5 = 392 heures ;
Soit au total : 942 heures.
Si les périodes et les besoins retenus par l’expert ne font l’objet d’aucune contestation (hors débat sur l’indemnisation de la période post-consolidation), les parties s’opposent sur le montant de l’indemnisation et notamment la fixation du taux horaire, qui doit s’élever à 20 euros selon l’assuré et 10 euros selon l’employeur.
Sur ce, tenant compte de l’incapacité du requérant et de ses conditions de vie décrites par l’expert, le tribunal retient un taux horaire de 20 euros et alloue en conséquence à monsieur [W] [E] la somme totale de 18 840 euros (942 heures x 20 euros) sur l’ensemble de la période ayant justifié l’assistance d’une tierce personne avant consolidation.
Sur la demande d’indemnisation des frais de véhicule adapté
Il s’agit d’un poste de préjudice non couvert par le Livre IV du code de la sécurité sociale dont l’assuré victime d’un accident du travail imputable à la faute inexcusable de son employeur, peut solliciter indemnisation.
L’indemnisation des frais d’aménagement de véhicule est fondée sur le surcroît de dépenses au niveau de l’achat même du véhicule, par rapport à la valeur de celui dont se satisfaisait ou se serait satisfait la victime avant l’accident, auquel on ajoute le coût de l’adaptation lorsque la conduite est possible.
Il doit également être tenu compte, le cas échéant, de la valeur de revente du véhicule devenu inutilisable par l’assuré au moment de son remplacement.
Dans son rapport d’expertise le docteur [F] [S] retient la nécessité d’un aménagement du véhicule avec nécessité de prévoir l’équipement d’une boite automatique.
Monsieur [W] [E] verse aux débats deux devis de véhicules d’entrée de gamme l’un sans boite automatique, l’autre avec boite automatique, dont il résulte un différentiel de 1 600 euros justifié par cet aménagement. Il décompte selon la méthode des arrérages annuels à compter de la naissance du besoin en 2014 et pour un renouvellement tous les cinq ans à compter de 2020.
Pour sa part, la société [5] expose que la méthode de calcul proposée par le requérant est biaisée et qu’il n’y a pas lieu de retenir les frais d’aménagement du véhicule par référence à un comparatif entre deux véhicules neufs et demande au tribunal de débouter monsieur [W] [E] de sa demande à ce titre ou, subsidiairement, de retenir une périodicité de remplacement d’une dizaine d’années et non cinq ans comme le sollicite monsieur [W] [E].
Sur ce, le tribunal retiendra une fréquence de remplacement du véhicule tous les sept ans et retient le surcoût d’un véhicule équipé d’une boîte automatique à 1 600 euros, montant justifié par le demandeur et qui apparaît raisonnable.
Ainsi, l’investissement de départ, valable pour une durée de sept ans, soit jusqu’en 2021 s’élève à 1 600 euros.
Puis à compter de l’année 2021, année du premier renouvellement, l’arrérage annuel est de (1 600 / 7), soit 228,57 euros, qui sera capitalisé par application d’un taux multiplicateur de 57,180 selon le barème de capitalisation de la Gazette du Palais 2022, soit un montant capitalisé 13 069,63 euros.
L’aménagement du véhicule sera indemnisé à hauteur de 14 669, 63 euros.
2. Sur l’action récursoire de la caisse primaire d’assurance maladie
Si la caisse primaire d’assurance maladie est fondée, en application de l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, à récupérer auprès de l’employeur le montant de la majoration du capital ou de la rente d’accident du travail attribuée à la victime en raison de la faute inexcusable de l’employeur, son action ne peut s’exercer que dans les limites tenant à l’application du taux notifié à celui-ci conformément à l’article R. 434-32 du code de la sécurité sociale.
En conséquence, s’agissant de la majoration de la rente allouée à l’assuré, le tribunal juge que la caisse primaire d’assurance maladie du Rhône ne peut exercer son action récursoire à l’encontre de l’employeur que sur la base du taux d’incapacité permanente partielle de 18 % notifié à l’employeur lors de la consolidation de monsieur [W] [E].
La caisse primaire d’assurance maladie du Rhône, qui assure en outre l’avance des indemnisations ci-dessus allouées à l’assuré, sous déduction de la provision de 3 000 euros précédemment accordée, pourra en poursuivre le recouvrement à l’encontre de la société [5] sur le fondement de l’article L.452-3 du code de la sécurité sociale.
Les frais d’expertise avancés par la caisse seront également mis à la charge définitive de la société [5].
3. Sur la demande de garantie de l’entreprise utilisatrice formulée par l’employeur
Aux termes de son jugement du 20 mai 2022, le tribunal a déjà statué sur cette demande et dit que la société [6] doit garantir la société [5] de toutes les conséquences financières de la faute inexcusable en principal, intérêts et frais, y compris au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Cette garantie sera simplement rappelée au dispositif du présent jugement.
4. Sur les demandes accessoires
En matière de liquidation du préjudice, il est tenu compte du temps écoulé jusqu’au jugement qui y procède et le cas échéant statué sur les préjudices futurs mais certains endurés par la victime selon des barèmes de capitalisation régulièrement actualisés. Il n’y a en conséquence pas lieu d’assortir les indemnités allouées à la victime des intérêts au taux légal à compter de la demande de reconnaissance de la faute inexcusable, ni a fortiori d’ordonner la capitalisation des intérêts.
Les dépens sont mis à la charge de la société [5].
En outre, la société [5] sera condamnée à payer à monsieur [W] [E] une indemnité de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Enfin, s’agissant des décisions rendues en matière de sécurité sociale, l’exécution provisoire est facultative, en application de l’article R.142-10-6 du code de la sécurité sociale.
En l’espèce, l’exécution provisoire, compatible avec la nature de la décision et l’ancienneté du litige, sera ordonnée à hauteur des deux tiers des sommes allouées au titre de l’indemnisation des préjudices et intégralement sur la somme allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, statuant publiquement, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort,
Vu le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lyon du 22 mai 2022,
Vu le rapport d’expertise du docteur [F] [S] du 14 juin 2023,
Fixe le montant des indemnités revenant à monsieur [W] [E] aux sommes suivantes :
35 000 euros au titre des souffrances endurées ;3 500 euros au titre du préjudice esthétique temporaire ;4 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent ;16 258,20 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire ;20 000 euros au titre du préjudice d’agrément ;1 000 euros au titre des frais divers ; 18 840 euros au titre de l’assistance par une tierce personne temporaire ;14 669,63 euros au titre des frais d’aménagement de véhicule ;
Dit qu’il convient de déduire la provision allouée à hauteur de 3 000 euros, soit un solde à régler de 110 267,83 euros ;
Dit n’y avoir lieu d’assortir cette somme des intérêts au taux légal à compter de la demande de reconnaissance de la faute inexcusable, ni a fortiori d’ordonner la capitalisation des intérêts ;
Avant dire droit sur le déficit fonctionnel permanent :
Ordonne un complément d’expertise médicale de monsieur [W] [E] ;
Désigne pour y procéder le docteur [F] [S], domicilié [Adresse 9] ;
Lui donne mission complémentaire, après avoir convoqué les parties, de :
Dire si la victime subit, du fait de l’accident et après consolidation, fixée au 31 mai 2017, un déficit fonctionnel permanent, en évaluer l’importance et en chiffrer le taux globalement, en précisant néanmoins le taux retenu pour : La réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l’atteinte à l’intégrité anatomo-physiologique, évaluée sur la base du barème indicatif d’évaluation des taux d’incapacité en droit commun publié par le concours médical ; Les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques ; Les troubles dans les conditions d’existence (personnelles, familiales et sociales) ;
Dit que l’expert devra prendre en considération les observations ou réclamations des parties, qu’il devra les joindre à son avis lorsqu’elles sont écrites et que les parties le demandent, et qu’il devra faire mention des suites qu’il leur aura données ;
Dit que l’expert déposera son rapport au greffe du pôle social du tribunal judiciaire de Lyon dans le délai de six mois à compter de sa saisine et en transmettra une copie à chacune des parties ;
Sursoit à statuer sur la demande d’indemnisation au titre du déficit fonctionnel permanent ;
Au surplus :
Dit que la caisse primaire d’assurance maladie du Rhône doit faire l’avance de la majoration de la rente, du solde des sommes revenant à la victime en réparation de ses préjudices, ainsi que des frais d’expertise et qu’elle dispose du droit d’en recouvrer le montant auprès de la société [5], dans les limites tenant à l’application du taux de 18 % notifié à celle-ci concernant la majoration de la rente ;
Condamne la société [5] aux dépens de l’instance ;
Condamne la société [5] à payer à monsieur [W] [E] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelle que la société [6] doit garantir la société [5] de toutes les conséquences financières de la reconnaissance de la faute inexcusable en ce compris des frais dus au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement à hauteur des deux tiers des sommes allouées au titre de l’indemnisation des préjudices et intégralement sur la somme allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Ainsi jugé et prononcé le 6 novembre 2024 en audience publique et signé par le président et la greffière.
LA GREFFIERE LE PRÉSIDENT