→ Résumé de l’affaireMonsieur [N] [V] a assigné Maître [E] [P] et son assureur responsabilité civile la société MMA devant le tribunal judiciaire de Nice pour obtenir réparation de ses préjudices, estimant que maître [E] [P] avait manqué à son devoir de conseil et d’information dans une procédure de saisie immobilière. Le tribunal a condamné Maître [E] [P] et les sociétés d’assurance responsabilité civile MMA à payer à monsieur [N] [V] une somme de 385.000 euros. Maître [E] [P] et les compagnies d’assurance ont interjeté appel du jugement et ont demandé à consigner cette somme. Les parties ont maintenu leurs prétentions lors des débats, avec des demandes de limitation de la consignation et de versement de sommes complémentaires. Monsieur [N] [V] a également demandé une aide juridictionnelle provisoire. |
→ L’essentielImpécuniosité de monsieur [N] [V] et demande de consignationSelon l’article 521 du code de procédure civile, la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires des provisions peut éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie en consignant sur autorisation du juge les espèces où les valeurs suffisantes pour garantir en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation. Dans le cas présent, les demandeurs ont exposé des craintes quant au recouvrement des sommes dues en raison de l’impécuniosité de monsieur [N] [V], bénéficiaire de l’aide juridictionnelle. Charge de la preuve et demande de consignationLa charge de la preuve des capacités de remboursement de monsieur [N] [V] repose sur maître [E] [P] et ses assureurs. Le fait que monsieur [N] [V] ait bénéficié d’une aide juridictionnelle totale ne suffit pas à établir un risque actuel de non-recouvrement des sommes mises à sa charge. Les demandeurs n’ayant pas démontré de difficultés financières à régler la somme due, la demande de consignation a été limitée à 150.000 euros. Indemnité et dépensIl est équitable de condamner maître [E] [P] et ses assureurs à verser à monsieur [N] [V] une indemnité de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles. En tant que succombants en partie, ils seront également condamnés aux dépens de l’instance. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Chambre 1-11 référés
ORDONNANCE DE REFERE
du 29 Juillet 2024
N° 2024/300
Rôle N° RG 24/00126 – N° Portalis DBVB-V-B7I-BMWQ6
[E] [P]
Compagnie d’assurance MMA IARD
Compagnie d’assurance MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES
C/
[N] [V]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me François-Xavier GOMBERT
Me Pierre-yves IMPERATORE
Prononcée à la suite d’une assignation en référé en date du 06 Mars 2024.
DEMANDEURS
Maître [E] [P], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me François-Xavier GOMBERT de la SELARL BREU-AUBRUN-GOMBERT ET ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Compagnie d’assurance MMA IARD, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me François-Xavier GOMBERT de la SELARL BREU-AUBRUN-GOMBERT ET ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Compagnie d’assurance MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me François-Xavier GOMBERT de la SELARL BREU-AUBRUN-GOMBERT ET ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
DEFENDEUR
Monsieur [N] [V], demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Pierre-yves IMPERATORE de la SELARL LX AIX EN PROVENCE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
* * * *
DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ
L’affaire a été débattue le 10 Juin 2024 en audience publique devant
Véronique NOCLAIN, présidente,
déléguée par ordonnance du premier président.
En application des articles 957 et 965 du code de procédure civile
Greffier lors des débats : Cécilia AOUADI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 29 Juillet 2024.
ORDONNANCE
Contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 29 Juillet 2024.
Signée par Véronique NOCLAIN, présidente et Cécilia AOUADI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Par acte d’huissier délivré le 26 février 2020, monsieur [N] [V] a fait assigner Maître [E] [P] et son assureur responsabilité civile la société MMA devant le tribunal judiciaire de Nice pour voir sa responsabilité civile engagée et obtenir réparation de ses préjudices, estimant que maître [E] [P] avait manqué à son devoir de conseil et d’information et à ses obligations de diligence dans une procédure engagée devant le juge de l’exécution en matière de saisie immobilière.
Par jugement contradictoire assorti de l’exécution provisoire en date du 25 janvier 2024, le tribunal judiciaire de Nice a principalement :
-condamné in solidum maître [E] [P] et les sociétés d’assurance responsabilité civile MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et MMA IARD à payer à monsieur [N] [V] la somme de 385.000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de l’assignation;
-condamné in solidum maître [E] [P] et les sociétés d’assurance responsabilité civile MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES et MMA IARD à payer à maître Pierre-Yves IMPERATORE, avocat de monsieur [N] [V], la somme de 3.500 euros en application de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle ainsi qu’aux dépens.
Maître [E] [P] et les compagnies d’assurance MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES ont interjeté appel du jugement sus-dit par déclaration du 23 février 2024.
Par acte d’huissier en date du 6 mars 2024 reçu et enregistré le 8 mars 2024, les appelants ont fait assigner monsieur [N] [V] devant le premier président au visa des articles 521 et 523 du code de procédure civile afin d’être autorisés à consigner la somme principale de 385.000 euros, augmentée des intérêts de procédure de 3.500 euros et des intérêts au taux légal à parfaire, soit entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations soit entre les mains de monsieur le Bâtonnier de l’Ordre des avocats de la cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE.
Les demandeurs, lors des débats du 10 juin 2024, ont maintenu leurs prétentions initiales reprises par écritures signifiées le 3 juin 2024 à la partie défenderesse. Elles ont au surplus sollicité le rejet des demandes de monsieur [N] [V] et à titre subsidiaire, demandé de limiter le montant de la consignation à la somme de 250.000 euros.
Monsieur [N] [V], par écritures signifiées le 6 juin 2024 et maintenues lors de l’audience, a sollicité le rejet de la demande principale de consignation, subsidiairement, demandé de constater que maître [E] [P] et ses assureurs ne démontrent pas en quoi la consignation devrait porter sur la totalité du montant des condamnations, de limiter la consignation à la somme de 150.000 euros, le surplus restant exécutoire, et en tout état de cause, a demandé de condamner in solidum maître [E] [P] et ses assureurs à verser à son conseil la somme de 2.000 euros conformément aux dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sur l’aide juridictionnelle, et de condamner in solidum maître [E] [P] et ses assureurs à verser à monsieur [N] [V] la somme de 2.000 euros conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Monsieur [N] [V] a formulé oralement lors des débats du 10 juin 2024 une demande d’aide juridictionnelle provisoire.
Il sera renvoyé aux écritures des parties pour un exposé complet des moyens soutenus.
Aux termes de l’article 521 du code de procédure civile, la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires des provisions peut éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie en consignant sur autorisation du juge les espèces où les valeurs suffisantes pour garantir en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.
L’application de ce texte n’exige pas que soit démontrée l’existence de conséquences manifestement excessives à l’exécution de la décision . La demande de consignation correspond le plus souvent à des craintes quant au recouvrement des sommes dues en cas d’infirmation de la décision. Elle relève du pouvoir discrétionnaire du premier président.
En l’espèce, les demandeurs exposent au soutien de leur demande de consignation qu’il existe un risque de non-remboursement des sommes dues eu égard à l’impécuniosité de monsieur [N] [V], qui bénéficie de l’aide juridictionnelle et de l’absence de garantie quant à sa capacité de représenter immédiatement les fonds versés; ils ajoutent que monsieur [N] [V] ne communique aucune preuve établissant sas capacités de paiement et qu’ils ont confirmé devant la cour leur demande d’infirmer le jugement déféré, ne reconnaissant aucune responsabilité de maître [E] [P] ouvrant droit à indemnisation.
En réplique, monsieur [N] [V] affirme que la charge de la preuve de son impécuniosité repose sur les demandeurs, que le fait qu’il bénéficie de l’aide juridictionnelle ne suffit pas à établir un risque de non-recouvrement, qu’il y a lieu de vérifier s’il existe ‘un motif légitime ‘à la demande, qu’en l’espèce, les demandeurs ne développent aucun argument permettant de relever l’existence d’un tel motif, qu’il y a lieu de ne pas retarder la réparation d’un préjudice relevant d’une faute commise il y a plus de 10 ans, qu’en l’espèce, il a perdu une chance du fait de la faute de maître [P], que les demandeurs admettent implicitement n’avoir aucun motif sérieux à contester le principe même de la responsabilité de maître [E] [P], que leur demande subsidiaire de limiter la consignation à la somme de 250.000 euros est contradictoire avec leur affirmation quant au fait qu’il ne dispose pas de capacités de remboursement et qu’il y a lieu, dans l’hypothèse d’une limitation de la consignation, de la fixer à la somme de 150.000 euros.
Il sera rappelé que la charge de la preuve des capacités de remboursement de monsieur [N] [V] repose sur maître [E] [P] et ses assureurs.
Le fait que monsieur [N] [V] ait bénéficié dans la procédure conduite devant le tribunal judiciaire de NICE depuis le 26 février 2020 d’une aide juridictionnelle totale ne suffit pas à établir un risque actuel de non-recouvrement des sommes mises à la charge des demandeurs, d’autant que la situation financière de monsieur [N] [V] n’a pas été précisée ni documentée dans le présent référé.
Eu égard au fait que les demandeurs ne font pas état de difficultés financières à régler la somme due ni même de l’existence d’une mise en péril de leur situation financière dans l’hypothèse de difficultés de recouvrement de la somme due, eu égard à l’ancienneté du litige, l’assignation ayant saisi la 1ère instance étant de 2020, et du fait que monsieur [N] [V] a formulé dans le présent référé une demande d’aide juridictionnelle provisoire, ce qui permet d’avoir une information sur l’existence de possibles difficultés de remboursement, il y a lieu de faire droit à la demande de consignation, toutefois limitée à la somme de 150.000 euros. Le surplus de la somme due en exécution du jugement déféré à la cour restera en conséquence exécutoire.
Monsieur [N] [V] a formulé lors des débats une demande d’aide juridictionnelle provisoire dans la présente instance mais n’a produit aucune pièce justifiant de la réalité de sa situation financière actuelle; cette demande sera donc rejetée.
Il est équitable au regard des faits de l’espèce de condamner maître [E] [P] est ses assureurs in solidum à verser à monsieur [N] [V] une indemnité de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles.
Puisqu’ils succombent en partie, maître [E] [P] et ses assureurs seront in solidum condamnés aux dépens de l’instance.
Statuant en référé, après débats en audience publique, par décision contradictoire.
– AUTORISONS maître [E] [P] et les compagnies d’assurance MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES à consigner auprès de la Caisse des dépôts et consignations la somme de 150.000 euros et ce, dans le délai d’un mois du prononcé de la présente décision;
– ECARTONS le surplus de la demande de consignation;
-ECARTONS la demande de monsieur [N] [V] tendant à bénéficie d’une aide juridictionnelle provisoire dans le présent référé;
– CONDAMNONS maître [E] [P] et les compagnies d’assurance MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES à consigner à payer à monsieur [N] [V] la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
-CONDAMNONS maître [E] [P] et les compagnies d’assurance MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES aux dépens du référé.
Ainsi prononcé par la mise à disposition de la présente décision au greffe de la cour d’appel d’Aix-en-Provence le 29 juillet 2024, date dont les parties comparantes ont été avisées à l’issue des débats.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE