Responsabilité de l’Avocat : 9 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00211

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Responsabilité de l’Avocat : 9 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 21/00211
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 9

ORDONNANCE DU 09 MARS 2023

Contestations d’Honoraires d’Avocat

(N° /2023, 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/00211 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDPGF

NOUS, Michel RISPE, Président de chambre à la Cour d’Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Eléa DESPRETZ, Greffière présente lors des débats ainsi que lors du prononcé de l’ordonnance.

Vu le recours formé par :

Madame [N] [W]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Comparante en personne, assistée de Me Emilie TADEO, avocat au barreau de PARIS, toque : C752

Demandeur au recours,

contre une décision du Bâtonnier de l’ordre des avocats de PARIS dans un litige l’opposant à :

Maître [O] [C]

Avocat à la Cour

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Dorothée LANTER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0298

Défendeur au recours,

Par décision contradictoire, statuant par mise à disposition au Greffe, après avoir entendu les parties présentes à notre audience publique du 09 Février 2023 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,

L’affaire a été mise en délibéré au 09 Mars 2023 :

Vu les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;

****

RÉSUMÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Vu le recours formé par Mme [N] [W] auprès du Premier Président de cette cour, par remise au greffe le 16 avril 2021, à l’encontre de la décision rendue le 06 mars 2021 par le délégataire du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Paris, qui lui a été notifiée le 20 mars 2021 et qui a notamment :

‘ fixé à la somme de 2.455 euros hors taxes, le montant des honoraires dus par Mme [N] [W] à Me [O] [C],

‘ constaté le versement d’une somme de 750 euros à titre de provision,

‘ condamné en conséquence Mme [N] [W] à payer à Me [O] [C] la somme de 1.705 euros hors taxes en deniers ou quittances avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de la décision, outre la taxe sur la valeur ajoutée et les débours en cas de signification de la décision,

‘ débouté les parties du surplus de leurs demandes;

‘ prononcé l’exécution provisoire.

Vues les convocations adressées le 22 novembre 2022 aux parties par le greffe afin qu’elles comparaissent à l’audience du 09 février 2023;

Entendue à ladite audience, où elle assistée par son conseil, Mme [N] [W] a fait plaider l’infirmation de la décision du bâtonnier, alors que toutes les factures émises par Me [O] [C] avaient été réglées, ce que celle-ci avait refusé de reconnaître devant le bâtonnier de l’ordre des avocats ; se référant à ses conclusions écrites notifiées par voie électronique le 02 février 2022, elle a demandé à cette juridiction de statuer à nouveau en constatant le versement de l’intégralité des honoraires facturés par Me [O] [C] et de débouter cette dernière de toute demande en paiement formulée à son encontre ;

En réponse, lors de la même audience, se référant à ses conclusions écrites notifiées par voie électronique le 08 février 2022 Mme [N] [W] a demandé à cette juridiction de :

‘ dire mal fondé et sans objet l’appel relevé par Mme [N] [W],

‘ dire que la cour d’appel est incompétente pour statuer sur l’exécution des condamnations prononcées en derniers ou quittances,

‘ confirmer la décision querellée en ce qu’elle a fixé les honoraires dus par Mme [N] [W] à Me [O] [C] à la somme de 2.455 euros hors taxes,

‘ confirmer la décision querellée en ce qu’elle a constaté le versement de la somme de 750 euros (sept cent cinquante euros), à titre de provision,

‘ confirmer la décision querellée en ce qu’elle a condamné Mme [N] [W] à payer à Me [O] [C] à la somme de 1.705 euros hors taxes au titre de ses honoraires, en deniers ou quittances,

‘ infirmer la décision querellée en ce qu’elle a débouté Me [O] [C] de sa demande d’article 700 du code de procédure civile à hauteur de 2.000 euros et y faire droit au titre de la procédure de première instance,

‘ confirmer la décision querellée en ce qu’elle a mis à la charge de Mme [N] [W] les frais d’huissier de justice de signification,

‘ débouter Mme [N] [W] de l’ensemble de ses Me [O] [C] la somme de 1.500 euros au visa de l’article 700 du code de procédure civile outre aux dépens.

Puis, l’affaire a été mise en délibéré au 09 mars 2023.

SUR CE

La présente décision sera rendue contradictoirement entre les parties, toutes deux comparantes à l’audience.

En matière de contestations relatives à la fixation et au recouvrement des honoraires des avocats, les règles prévues par les articles 174 à 179 du décret n° 91-1197 du 27 novembre1991 organisant la profession d’avocat doivent recevoir application, alors qu’elles sont d’ordre public et instituent une procédure obligatoire et exclusive (cf. Cass. 2ème Civ., 1er juin 2011, pourvoi n° 10-16.381, Bull. n 124 ; 2 Civ. , 13 septembre 2012, P. pourvoi n° 10-21.144).

Dans ce cadre, il appartient au bâtonnier de l’ordre des avocats et, en appel, au premier président, à qui une contestation d’honoraires est soumise d’apprécier, d’après les conventions des parties et les circonstances de la cause, le montant de l’honoraire dû à l’avocat.

En outre, la procédure spéciale ainsi mise en ‘uvre n’étant applicable qu’aux contestations relatives au montant et au recouvrement des honoraires des avocats, le bâtonnier et, sur recours, le premier président ou son délégataire, n’ont pas à connaître, même à titre incident, de la responsabilité de l’avocat à l’égard de son client, qui résulterait d’un manquement à l’un quelconque de ses devoirs.

”’

Il est constant que le recours formé par Mme [N] [W] est recevable, pour avoir été formé dans le délai requis, soit celui d’un mois à compter de la notification de la décision du bâtonnier attaquée, conformément aux prévisions de l’article 176 du décret du 27 novembre 1991 précité.

”’

Saisi par Mme [N] [W] par courrier du 26 juin 2020, le délégataire du bâtonnier a notamment retenu dans sa décision, à l’encontre de laquelle le recours a été formé que :

‘Sur le principe d’un honoraire.

1 – Procédure disciplinaire :

– II n’est ni contesté ni contestable que des diligences ont été accomplies par Maître [C] dans l’intérêt de Madame [W], et dans ces conditions, des honoraires sont dus à Maître [C] pour les prestations établies.

Sur le montant de l’honoraire.

– Une convention d’honoraires a été établie le 18 juillet 2018.

– Cette convention prévoyait des honoraires sur une base forfaitaire, et il était convenu que ceux-ci s’élèveraient à la somme de 950 euros HT pour la procédure devant la juridiction ordinale.

– Cette convention prévoyait qu’en cas de dessaisissement, le taux horaire de l’avocat s’élevait à 350 euros HT.

– Cette convention s’analyse en un contrat, et il appartient à Monsieur le Bâtonnier de vérifier si les diligences prévues ont ou non été accomplies par Maître [C].

– L’examen des documents versés aux débats permet d’observer que Maître [C] a établi deux mémoires qui ont été adressés à la Chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins.

– Un premier mémoire a été transmis le 18 juillet 2019, puis en réponse aux observations du praticien, un second mémoire, le 22 octobre 2019.

– Ces deux mémoires sont circonstanciés et ont nécessité un travail approfondi.

– Les honoraires facturés à hauteur de la somme de 905 euros sont donc parfaitement justifiés.

– Il convient de préciser que la facture correspondant à ces honoraires a été transmise par Madame [W] à son assureur protection juridique.

– Devant le rapporteur, les parties sont en désaccord sur le point de savoir si cette somme a ou non été réglée par l’assureur protection juridique.

– Maître [C] indique n’avoir jamais reçu le chèque, et Madame [W] prétend, sans en apporter la moindre preuve, que son assureur protection juridique aurait fait le nécessaire pour ordonnancer le paiement.

-Il apparaît que l’assureur protection juridique aurait établi une lettre de désistement afin qu’un nouveau chèque puisse être établi au bénéfice de Maître [C], de sorte que la difficulté sur ce point devrait être prochainement résolue.

– La somme de 905 euros est due à Maître [C] et la condamnation sera prononcée sur ce point en deniers ou quittances.

2 – Référé expertise :

– Une seconde procédure a été engagée à la demande de Madame [W] devant la juridiction des référés, afin qu’un Expert Judiciaire puisse être désigné.

– Maître [C] a informé sa cliente du fait qu’elle solliciterait, à ce titre, la somme de 750 euros au titre de ses honoraires, et Madame [W] a expressément manifesté son accord sur ce point.

– Maître [C] a établi une assignation devant la juridiction des référés, a plaidé le dossier et une ordonnance a été rendue désignant un médecin expert.

– La somme de 750 euros au titre des honoraires sollicités par Maître [C] est donc parfaitement justifiée.

– Au surplus, cette somme a fait l’objet d’un règlement par l’assureur protection juridique de Madame [W].

3 – Expertise :

– A la suite de la désignation de l’Expert Judiciaire, Madame [W] a souhaité être assistée par son avocat, lors de la réunion d’expertise.

– Maître [C] a fait parvenir un devis à Madame [W] qui a manifesté son accord sur ce point.

– Maître [C] s’est rendue à la réunion d’expertise et a assisté aux opérations.

– Elle a, conformément au devis, accepté par Madame [W], fait parvenir à cette dernière une facturation à hauteur de 800 euros HT.

– Madame [W] s’est refusée à procéder au règlement de cette facture, et il ne semble pas que cette facture ait été prise en charge, dans le cadre du contrat par la protection juridique de cette dernière.

-Il résulte des explications pour le moins confuses de Madame [W], que c’est la somme de 800 euros qui poserait un problème, dans la mesure où elle n’aurait pu obtenir de son assureur protection juridique, le remboursement ou la prise en charge de cette somme.

– Madame [W] a estimé que la réunion d’expertise avait duré trop de temps du fait de la négligence de l’Expert Judiciaire et a, dans un premier temps, écrit à l’expert judiciaire pour lui demander de prendre à sa charge le montant des honoraires dont elle était redevable auprès de son avocat.

– Pareil comportement n’a pas manqué de surprendre l’Expert Judiciaire qui s’en est ému auprès du Juge du contrôle des expertises.

– II apparaît dans ce dossier que Maître [C] a fait parvenir un devis pour son intervention, devis qui a été accepté par Madame [W].

– Maître [C] s’étant rendue à la réunion d’expertise, a facturé ses honoraires sur la base convenue.

– Il y a donc lieu d’accueillir la demande formulée par Maître [C], et de fixer à la somme de 800 euros HT le montant des honoraires dus pour l’assistance à la réunion d’expertise.

– Au vu de cet ensemble d’éléments, il y a lieu de valider les facturations de Maître [C], à hauteur de la somme de 2 455 euros HT. (905 + 750 + 800)

-En tenant compte de la somme de 750 euros perçue par Maître [C], convient de relever l’existence d’un solde s’élevant à 1 705 euros HT.

– Il n’y a pas lieu d’accueillir les demandes formulées au titre des frais de photocopies de timbres, ces points devant faire partie du montant des honoraires.

– Maître [C], dans son mémoire et devant le rapporteur, demande à ce que ses honoraires soient fixés à la somme de 6 800 euros HT, et pour ce faire, elle se fonde sur les dispositions de la convention, prévoyant qu’en cas de dessaisissement, ses honoraires seraient facturés sur la base d’un taux horaire retenu à hauteur 350 euros HT.

– Cette demande n’a toutefois pas été adressée à Madame [W] par Maître [C] préalablement à la saisine du Bâtonnier et pareille réclamation articulée devant Monsieur le Bâtonnier dans le cadre de la contestation émise par Madame [W] est irrecevable.

Eu égard à la situation matérielle de Madame [W] il n’y a pas lieu de faire dr la demande articulée au titre de l’article 700 du CPC.’.

”’

A hauteur d’appel, Mme [N] [W] fait valoir que contrairement à ce qu’énonce la décision du délégataire du bâtonnier, en réalité, elle a payé l’intégralité des honoraires à son ancienne avocate, soit directement, soit par le biais de son assurance de protection juridique, la société Solucia. Elle observe que désormais Me [O] [C] ne conteste pas avoir reçu ces règlements.

Me [O] [C] remarque que, dans le cadre de la procédure d’appel, Mme [N] [W] ne conteste nullement le montant des honoraires convenus et entend que par voie de conséquence, la décision rendue soit confirmée en ce qu’elle a fixé les honoraires dus par Mme [N] [W] à hauteur de la somme de 2.455 euros hors taxes. Elle relève que le paiement de ses honoraires n’est intervenu qu’après la décision du délégataire du bâtonnier dont elle sollicite la confirmation en ce qu’il a retenu qu’à la date du 05 février 2021, la somme de 750 euros hors taxes avait bien été réglée.

Il sera rappelé à ce stade que le bâtonnier de l’ordre des avocats n’étant pas une juridiction, il n’avait pas compétence pour accorder une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

De ce qui précède, il résulte que Mme [N] [W] ne conteste pas le montant des honoraires qui a été fixé par le délégataire du bâtonnier, mais critique contre la condamnation en quittances ou deniers prononcée par celui-ci au vu des pièces lui ayant permis de faire les comptes entre les parties.

Elle ne démontre cependant pas que le bâtonnier disposait d’éléments autres que ceux sur lesquels il s’est appuyé.

En tout cas, il apparaît que la décision du délégataire du bâtonnier doit être confirmée sauf en ce qu’elle a condamné Mme [N] [W] au paiement d’une somme de 1.705 euros hors taxes à Me [O] [C], avec intérêts au taux légal, après avoir constaté le versement d’une provision de 750 euros.

Statuant à nouveau, il convient de constater que l’intégralité des honoraires dus par Mme [N] [W] à Me [O] [C] a été versée.

Les dépens seront partagés par moitié entre les parties qui conserveront à leur charge les frais irrépétibles qu’elles ont chacune exposés.

Il y a lieu de rejeter le surplus des demandes

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement en dernier ressort, par ordonnance contradictoire, prononcée par mise à disposition au greffe,

Confirme la décision déférée sauf en ce qu’elle a condamné Mme [N] [W] au paiement d’une somme de 1.705 euros hors taxes à Me [O] [C], avec intérêts au taux légal, après avoir constaté le versement d’une provision de 750 euros;

Statuant à nouveau sur ces chefs du dispositif,

Constate que l’intégralité des honoraires dus par Mme [N] [W] à Me [O] [C] a été versée ;

Partage les dépens d’appel par moitié entre Mme [N] [W] et Me [O] [C];

Rejette toute demande plus ample ou contraire des parties.

Dit qu’en application de l’article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, la décision sera notifiée aux parties par le greffe de la cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception;

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

 


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