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N° R.G. Cour : N° RG 22/05985 – N° Portalis DBVX-V-B7G-OPQ3
COUR D’APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCEDU 25 Avril 2023
DEMANDERESSE :
Mme [K] [L]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Alain DUFLOT de la SELARL DUFLOT & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/016533 du 22/09/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de LYON)
DEFENDERESSE :
S.E.L.A.R.L. DDW AVOCATS
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me PRELOT Olivia substituant Me Martine DI PALMA de la SELARL DDW AVOCATS, avocat au barreau de LYON
Audience de plaidoiries du 14 Mars 2023
DEBATS : audience publique du 14 Mars 2023 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 janvier 2023, assistée de Sylvie NICOT, Greffier.
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée publiquement le 25 Avril 2023 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;
signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
””
EXPOSE DU LITIGE
Mme [K] [L] a pris attache avec la SELARL DDW Avocats (DDW), représentée par Me [E] [M], dans le cadre d’une procédure de contestation de décisions d’assemblée générale de sa copropriété.
Aucune convention d’honoraire n’a été régularisée entre les parties.
Mme [L] a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon d’une contestation d’honoraires le 10 novembre 2021.
Celui-ci par décision du 10 juillet 2022 a rejeté la contestation de Mme [L].
La décision du bâtonnier a été notifiée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception à Mme [L] le 26 juillet 2022 et à la SELARL DDW le 29 juillet 2022.
Par lettre recommandée du 22 août 2022, Mme [L] a formé un recours contre cette décision.
A l’audience du 14 mars 2023 devant le délégué du premier président, les parties s’en sont remises à leurs écritures, qu’elles ont soutenu oralement.
Dans son mémoire déposé au greffe le 30 septembre 2022, Mme [L] demande au délégué du premier président :
– d’annuler la décision du bâtonnier,
– d’ordonner la restitution par le cabinet DDW du montant de la facture de 1 506,74 €,
– de mettre à la charge du cabinet DDW le remboursement des frais divers engagés par Mme [L] et à ce titre condamner le cabinet DDW à payer à Mme [L] la somme de 2 000 € par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile.
Elle invoque sa bonne foi et affirme qu’elle a loyalement et rapidement payé la facture de la SELARL DDW.
Elle fait état de l’absence de retour sur les observations formulées par rapport au projet d’assignation ainsi que de l’absence d’informations sur le suivi de la procédure et sur la décision rendue dans le cadre de l’instance, raison pour laquelle elle conteste les honoraires a posteriori.
Elle sollicite le remboursement du montant de la facture de 106,34 € correspondant à des prestations dont elle n’a eu aucun détail.
Dans son mémoire déposé au greffe par RPVA le 13 janvier 2022, la SELARL DDW demande au délégué du premier président de confirmer la décision du bâtonnier, de rejeter l’intégralité des demandes de Mme [L] et de condamner cette dernière à régler la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Elle affirme que la facture a été payée sans difficulté et soutient ne pas comprendre les demandes de remboursement de Mme [L].
Elle assure que la facture, réglée après services rendus, rend impossible sa révision.
Elle souligne que Mme [L] lui reproche de ne pas avoir obtenu la radiation alors qu’elle était saisie afin de contester une assemblée générale.
Elle prétend que l’assignation a été validée par Mme [L] et la facture payée.
Elle estime justifier des diligences entreprises correspondant à 6 heures de travail et d’un taux horaire de 200 € HT.
Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux mémoires et conclusions régulièrement déposés ci-dessus visés.
MOTIFS
Attendu que la recevabilité du recours formé par Mme [L] n’est pas discutée et les dates de notification et de recours ne peuvent y conduire ;
Attendu que Mme [L] sollicite de manière erronée l’annulation de la décision du bâtonnier car elle n’invoque aucun moyen de nullité de cette décision et ceux qu’elle soutient ne tendent d’ailleurs qu’à sa réformation ;
Attendu qu’il y a lieu de rappeler comme l’a motivé le bâtonnier que le juge de l’honoraire n’est pas juge de la qualité de la prestation de l’avocat et ne peut se prononcer directement ou indirectement sur la responsabilité de l’avocat ou sur le respect de ses obligations professionnelles ou déontologiques ; qu’il en résulte qu’aucune réduction et a fortiori aucune restitution des honoraires ne peut être motivée par les manquements allégués par le client à son encontre, fussent-ils établis, alors que seule l’absence de toute prestation peut conduire à une restitution ;
Attendu que les arguments de Mme [L] concernant l’absence de réponse de son conseil à ses demandes ou à ses questions, notamment sur l’avancement de la procédure ou sur la teneur de l’assignation finalement délivrée ou de la décision rendue ne sont ainsi pas de nature à permettre un remboursement global de la facture payée, cette prétention confinant d’ailleurs à une demande indemnitaire échappant tout autant au pouvoir juridictionnel du bâtonnier ou du premier président statuant à sa suite en qualité de juges de l’honoraire ; qu’ils ne sont pas examinés ;
Attendu qu’il appartient à Mme [L] de faire son affaire personnelle auprès des autorités ou juridictions compétentes pour statuer sur ses reproches adressés à la SELARL DDW et notamment pour obtenir le résultat de l’assignation délivrée le 4 août 2014 ;
Attendu que Mme [L] critique le bâtonnier en ce qu’il a retenu qu’elle a procédé au paiement de la facture émise par la SELARL DDW après service rendu et relève que cette facture correspond à des prestations dont elle n’a eu aucun détail, ni dans leur contenu, ni dans leurs conséquences ; qu’elle estime être de bonne foi et avoir fait confiance à son avocat en réglant des prestations dont elle ignore la réalité et l’efficacité ;
Attendu qu’il résulte des articles 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et 1103 du code civil, que le paiement après service rendu, dont la remise en cause est interdite, n’est pas subordonné à la fin de la mission de l’avocat et peut s’entendre des diligences facturées au fur et à mesure de leur accomplissement ;
Que le paiement d’une facture doit être fait librement et en connaissance de cause au regard de mentions précises qui doivent y figurer ;
Attendu qu’en l’espèce, Mme [L] ne conteste pas avoir librement payé le 28 novembre 2016 la facture de 1 506,75 € TTC émise le 23 novembre 2016 par la SELARL DDW, car elle évoque clairement ce paiement volontaire dans son mémoire déposé à l’appui de son recours ;
Attendu que la facture de l’avocat doit contenir des précisions essentielles telles la quantité, la dénomination précise, et le prix unitaire hors TVA des services rendus ou des frais engagés ;
Attendu qu’il ressort de la facture litigieuse qu’ont été facturés :
«Frais et honoraires relatifs à la procédure devant le tribunal de grande instance de Lyon, à l’encontre du Syndicat de copropriété de l’immeuble [Adresse 5]. Contestation de l’assemblée des copropriétaires du 14 mai 2014»
pour des montants HT de 1 200 € outre frais à hauteur de 47,08 € ;
Attendu que ces mentions sont défaillantes à préciser les diligences effectivement engagées, et au regard des pièces que produit la SELARL DDW à faire état de la rédaction et de la délivrance de l’assignation, et d’autre part au rendez-vous d’une durée d’une heure trente qu’elle met en avant ;
Que le bâtonnier a ainsi retenu à tort que le paiement a été effectué par Mme [L] en toute connaissance de cause et qu’elle était infondée à contester la facture ;
Attendu que si la loi du 6 août 2015 prévoit l’obligation de soumettre à la signature du client une convention d’honoraires sauf urgence ou force majeure, cette convention ne constitue pas une condition de validité de la demande d’honoraires mais un mode de preuve de l’accord des parties sur les modalités de rémunération de l’avocat ;
Attendu qu’en l’absence de convention, les honoraires sont fixés selon les critères de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971 soit les usages, la situation de fortune du client, les difficultés du litige, les frais de l’avocat, sa notoriété et les diligences accomplies ;
Attendu que s’agissant du taux horaire pratiqué de 200 € HT, il a été retenu à juste titre par le bâtonnier dans sa motivation alors surabondante car il se trouve proportionné à la difficulté du litige et au coût inhérent au fonctionnement d’un cabinet et en l’absence de quelconques éléments mis en avant par Mme [L], assistée d’un conseil, concernant sa situation de fortune ; que la décision du bureau d’aide juridictionnelle qu’elle mentionne dans son mémoire n’est pas produite et ne correspond pas nécessairement à la situation de fortune de Mme [L] au moment de l’émission de la facture discutée ;
Que surtout, Mme [L] a reconnu dans son courrier de recours du 22 août 2022 avoir réglé deux factures précédentes émises par la SELARL DDW sans pour autant relever que l’avocat ait majoré le coût de ses interventions dans sa dernière facture ;
Attendu que les diligences mises en avant par la SELARL DDW ne sont pas discutées dans leur existence même s’agissant en particulier du rendez-vous initial d’une durée d’une heure trente ; que les reproches faits par Mme [L] tiennent dans l’absence d’informations données par son avocat postérieurement à la rédaction et à la délivrance de l’assignation ayant saisi le tribunal de grande instance d’une contestation d’assemblée générale de copropriété ;
Que les pièces fournies par la SELARL DDW comportent cette assignation délivrée le 4 août 2014 à l’encontre du syndicat des copropriétaires ;
Attendu que la SELARL DDW détaille ainsi ses diligences :
– rendez-vous client : 1 heure 30,
– rédaction de l’assignation et préparation du dossier : 4 heures,
– délivrance de l’assignation : communication avec l’huissier : 30 minutes,
soit une durée totale de 6 heures de diligences ;
Attendu que l’assignation délivrée comporte 4 pages et vise deux pièces ce qui permet de retenir comme proportionnée la durée de quatre heures annoncée surtout au regard des documents produits par Mme [L] qui objectivent l’existence d’échanges avec l’avocat pour modifier le projet ou discuter de la marche à suivre (courriels des 22 et 25 juillet 2014 comportant des pièces jointes) ;
Que le temps annoncé pour s’entretenir avec l’huissier de justice est proportionné et a été à juste titre retenu par le bâtonnier ;
Attendu, enfin, que s’agissant des frais d’un montant de 47,08 € HT, ils n’ont pas été discutés par Mme [L] et correspondent manifestement au coût de la délivrance de l’assignation par l’huissier de justice ;
Attendu que le bâtonnier a retenu avec pertinence que les frais et honoraires de la SELARL DDW payés depuis plusieurs années par Mme [L] correspondaient aux diligences et dépenses réalisées pour cette cliente ;
Attendu qu’en conséquence, le recours de Mme [L] est rejeté ;
Attendu que Mme [L] succombe et doit supporter les dépens, de nature à être recouvrés conformément aux dispositions de la loi sur l’aide juridictionnelle dans la limite de la justification de la décision dite rendue par le bureau d’aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Lyon le 22 septembre 2022 ;
Que l’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la SELARL DDW ;
PAR CES MOTIFS
Le délégué du premier président, statuant publiquement et contradictoirement,
Rejetons le recours formé par Mme [K] [L] contre la décision prononcée le 10 juillet 2022 par le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon,
Condamnons Mme [K] [L] aux dépens inhérents à son recours et rejetons la demande présentée par la SELARL DDW Avocats au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE