Responsabilité de l’Avocat : 21 avril 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 22/01190

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Responsabilité de l’Avocat : 21 avril 2023 Cour d’appel de Colmar RG n° 22/01190
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N° RG 22/01190 – N° Portalis DBVW-V-B7G-HZRR

Minute N° : 8M 20/2023

Notification par

LRAR aux parties

Copie exécutoire à

la SELARL [F] AVOCATS

le

Le greffier,

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE COLMAR

ORDONNANCE DU 21 AVRIL 2023

Audience tenue par Madame DELNAUD, première présidente de la cour d’appel de Colmar, assistée de Madame HOUSER, greffier

APPELANT :

Monsieur [S] [V]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représenté par Me Céline RICHARD, avocat au barreau de COLMAR

INTIMEE :

S.E.L.À.R.L. [F] AVOCATS, société d’avocats inscrite au barreau de Strasbourg prise en la personne de Maître [D] [F]

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée par Me Sandra WEREY, avocat au barreau de STRASBOURG

DEBATS en audience publique du 28 Février 2023

ORDONNANCE CONTRADICTOIRE du 21 Avril 2023

prononcée publiquement par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Nature de l’affaire : contestation d’honoraires d’avocat

La SELARL [F] AVOCATS, société d’avocats inscrits au barreau de Strasbourg représentée par Maître [F], est intervenue au soutien des intérêts de M. [V]-[W] pour l’assister dans le cadre des suites civiles et pénales d’une procédure de divorce.

Une lettre de mission a été signée par les parties le 3 septembre 2019, fixant le taux horaire pour la rémunération de l’avocat à 300 € TTC. Une provision de 3 000€ a été réglée.

Maître [F] a établi une facture pour un montant de 13 396,99 € TTC le 30 septembre 2019.

Le 16 janvier 2020, un avenant à la convention d’honoraires a été établi par Maître [F], par lequel M. [V]-[W] s’engageait à régler les honoraires dus à hauteur de 13 396,99 € TTC, et prévoyant l’abandon de la facturation au taux horaire au profit d’un honoraire forfaitaire supplémentaire à hauteur de 10 000 € TTC et d’un honoraire de résultat de 15% TTC des sommes économisées.

Le 29 septembre 2021 Maître [F] a saisi le Bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Strasbourg d’une demande de recouvrement d’honoraires.

Par ordonnance du 7 janvier 2022, le Bâtonnier de Strasbourg a ordonné à M. [V]-[W] de payer à la SELARL [F] AVOCATS, représentée par Maître [F], la somme de 18 930,99 € TTC, outre celle de 100 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Cette décision a été signifiée par acte d’huissier de justice à M. [V]-[W] le 23 février 2022.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 mars 2022, enregistrée au greffe de la cour d’appel de Colmar le 25 mars 2022, M. [V]-[W] a saisi le premier président d’un recours afin de solliciter l’infirmation de la décision du Bâtonnier.

Il fait tout d’abord valoir que la notification de l’ordonnance était irrégulière car faite à la mauvaise adresse alors que Maître [F] possédait son adresse mail et qu’il aurait pu l’utiliser afin de connaître sa nouvelle adresse postale. Il y relève une violation des droits de la défense et du respect du principe du contradictoire puisqu’il n’a pas été en mesure de présenter les arguments pour lesquels il conteste le bien-fondé des honoraires supplémentaires réclamés.

Il explique qu’il a décidé de changer de conseil parce qu’il était particulièrement insatisfait de la manière avec laquelle Maître [F] traitait son dossier, qu’il ne tenait pas compte de ses observations et de ses choix, qu’il ignorait des aspects fondamentaux de son dossier et ne négociait pas vraiment dans le sens de ses intérêts.

Il ajoute que Maître [F] s’attribue des mérites et des prestations qu’il n’a pas accomplies ; que les seules effectuées sont la rédaction du recours contre les décisions d’exequatur du jugement de divorce prononcé en Angleterre qui consiste en un jeu unique de conclusions sans audience de procédure ou de plaidoirie, ni conclusions en réplique, un début de négociation amiable non accepté et non abouti ainsi que l’obtention d’un ultime renvoi sans produire d’écriture, dans le cadre de la procédure pénale pour abandon de famille.

M. [V]-[W] affirme que Maître [F] n’a pas hésité à augmenter artificiellement et dans des proportions considérables, l’assiette de calcul des honoraires de résultat, de même que les honoraires qu’il réclame ; que si la convention d’honoraires comprenant une partie fixe forfaitaire et une partie variable sur le résultat obtenu n’est plus applicable, seul le temps réellement consacré à l’instruction du dossier doit prévaloir.

À ce titre, il fait valoir que Maître [F] n’a jamais précisé le temps passé et qu’au vu de la somme réclamée, soit 26 396 € TTC, cela supposerait qu’il ait passé entre 75 et 95 heures sur le dossier, ce qui n’est pas possible au vu des diligences listées précédemment et de la spécialité de Maître [F] en droit international privé.

Dans ses conclusions du 22 février 2023, la SELARL HUFFSCHMITT WEREY ET ASSOCIES, conseil de la SELARL [F] AVOCATS, indique que M. [V]-[W] s’est engagé à régler la somme forfaitaire de 23 396.99 € TTC, à laquelle devait s’ajouter les 15% d’honoraires de résultat.

La SELARL [F] AVOCATS rappelle que le juge de l’honoraire dispose d’un champ d’intervention se limitant à la question des honoraires ; qu’il est constant que Maître [F] est intervenu dans un contexte de crise, l’appelant se trouvant sous le coup d’une condamnation pour abandon de famille issue d’un jugement rendu en Angleterre, avec les risques d’incarcération et de mandat d’arrêt international.

En parallèle de la préparation de la défense pénale et de la contestation de l’applicabilité en France du divorce anglais, Maitre [F] s’était en effet vu confier des négociations afin de refondre les équilibres entre les ex- époux, interrompues depuis 2018. Dans ce cadre, il a régulièrement tenu Monsieur [V]-[W] au courant de l’avancée des négociations. L’accord a été confirmé le 24 juin 2020 à Monsieur [V]-[W] et le 25 juin 2020, une avocate a sollicité le transfert des dossiers à son profit. M. [V]-[W] expose dans ses écrits que l’accord a été signé en août 2020, ce qui démontre que les négociations étaient achevées au moment du dépôt de son mandat. Elle observe que l’appelant n’a pas informé la SELARL [F] AVOCATS du protocole final, se sachant pertinemment sous le coup de l’accord de paiement d’un honoraire de résultat de 15%.

Le 3 juillet 2020, la SELARL [F] AVOCATS a adressé une mise en demeure à Monsieur [V]-[W] portant sur les honoraires fixes de 23 396.99 € TTC, sous déduction du règlement de 4 466 € intervenu le 8 avril 2020 et de l’acompte de 3 000 € versé en septembre 2019, le solde du étant de 18 930.99 € TTC.

Dans l’hypothèse où la cour estimerait que l’avenant de janvier 2020 ne doit pas s’appliquer, la SELARL [F] AVOCATS souligne que la première lettre de mission signée fixant le taux horaire à 300 € TTC devrait s’appliquer et Monsieur [V]-[W] devrait être condamné, au titre des honoraires fixes au paiement de la somme de 13 396.66 € TTC pour l’activité déployée au 30 septembre 2019, pour laquelle le détail du temps passé est produit, augmenté de la somme de 30 575 € TTC au titre de l’activité déployée d’octobre 2019 à juillet 2020, le détail des diligences étant également produit.

Sur appel provoqué, la concluante expose qu’un honoraire de résultat s’y ajoute puisqu’un accord a été trouvé, ce qui a été révélé par les écritures de Monsieur [V]-[W]. Sur la base de ces éléments nouveaux, la SELARL [F] AVOCATS a saisi le bâtonnier d’une demande de taxation. Une ordonnance a été rendue par le Bâtonnier de l’ordre des avocats de Strasbourg, signifiée à personne le 12 décembre 2022 et n’a pas été frappée d’appel. Cette seconde ordonnance ne peut être contestée dans le cadre de la

présente instance, qui plus est par des écritures datées du 17 février 2023, soit largement postérieures à l’expiration du délai d’appel.

La SELARL [F] AVOCATS souligne la mauvaise foi et l’intention frauduleuse de M. [V]-[W] en ce qu’en dessaisissant son conseil en pleine négociation, il a clairement manifesté sa volonté délibérée de se soustraire à ses engagements et qu’il a commis un abus de droit en mettant un terme à un mandat exclusif et irrévocable. Elle ajoute que le conseil de Monsieur [V]-[W] produit des correspondances en violation des obligations et du secret professionnel, qui doivent être écartées des débats.

Il est conclu à la demande d’écarter des débats toute pièce couverte par la confidentialité des échanges entre avocats, au constat que seule la SELARL intimée est en droit de produire les éléments nécessaires à sa défense, la déclaration de l’appel interjeté par M. [V]-[W] comme étant irrecevable et non fondé et de confirmer l’ordonnance du Bâtonnier.

Sur appel provoqué, il est demandé de constater que l’accord transactionnel intervenu en août 2020 est produit et la condamnation de Monsieur [V]-[W] au paiement de la somme de 106 479,75 € TTC au titre de l’honoraire de résultats, par ordonnance rendue le 3 octobre 2022, signifiée à personne le 12 décembre 2022 et non frappée d’appel. A titre subsidiaire, il est demandé la fixation des honoraires dus à la somme de 13 664,19 € HT, soit 16 397 € TTC pour les diligences accomplies au 30 septembre 2019, la somme de 30 575€ TTC pour celles accomplies au 29 septembre 2021 et la condamnation de Monsieur [V]-[W] à payer la somme de 39 506€ TTC, acomptes de 3 000 € TTC et 4 466 € TTC déduits. Enfin, il est demandé la somme de 11 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Dans ses conclusions du 24 février 2023, Maître RICHARD, conseil de M. [V]-[W], maintient que les droits de la défense et le principe du contradictoire n’ont pas été respectés en ce que la lettre de saisine du Bâtonnier datée du 29 septembre 2021 a été adressée par l’Ordre des avocats à l’ancienne adresse de M. [V]-[W] ; que l’ordonnance du Bâtonnier a été rendue sur les seules allégations de Maître [F], sans que M. [V]-[W] ne puisse utilement faire valoir ses arguments pour contester les honoraires réclamés.

Il est ajouté que Maître [F] entend réclamer des honoraires au titre de prestations qu’il n’a pas accomplies. Ainsi, de la facture de septembre 2019 d’un montant de 16 396.66 € TTC doit être déduite la somme de 5 700 € TTC, correspondant à la rédaction d’une assignation en inopposition d’une décision étrangère dont Monsieur [V]-[W] n’a pas eu connaissance, qui n’a jamais été délivrée à la partie adverse et qui n’a pas été transmise à Maitre [Z] lorsque le dossier lui a été transmis. La facture vise également des prestations concernant l’exequatur qui résultent d’une procédure non contradictoire et qui sont intervenues le 29 octobre 2019 et donc ignorées de Monsieur [V]-[W] et Maître [F] en septembre 2019, la procédure devant le Tribunal correctionnel de Draguignan alors que Maître [F] s’est borné à solliciter un renvoi, sans produire un quelconque jeu de conclusions, ni plaider ; s’agissant du tribunal correctionnel d’Aix en Provence, il est facturé 3 600 € pour une simple demande de renvoi formée par l’avocat postulant, les conclusions rédigées n’étant pas portées à la connaissance de Monsieur [V]-[W] ni Maitre [Z] lorsqu’elle a repris le dossier.

Ainsi, les seules prestations réelles fournies par Maître [F] sont l’appel des décisions d’exequatur devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence pour lequel il a établi un jeu de conclusions et n’a jamais plaidé et un commencement de négociation amiable avec l’avocat français de Mme [G] et qu’un accord définitif n’a jamais eu lieu contrairement aux allégations de Maître [F].

Contrairement aux affirmations de Maître [F], si Monsieur [V]-[W] lui a retiré sa confiance et son mandat, c’est en raison du désaccord avec les termes de la négociation et parce qu’il refusait les modalités de facturation que voulait lui imposer Maître [F].

Enfin, il est relevé que Maître [F] réclame des honoraires en appel provoqué qui n’ont pas fait l’objet d’une ordonnance de taxation par le Bâtonnier de Strasbourg, qu’il s’agit d’une demande nouvelle et donc irrecevable et qu’en outre, les honoraires réclamés ne reposent pas sur des prestations réellement accomplies, et qu’en réalité Maître [F] a artificiellement gonflé ses factures.

Monsieur [V]-[W] sollicite l’annulation de l’ordonnance de taxation d’honoraires rendue le 7 janvier 2022, en raison de ce qu’elle a été rendue en violation du contradictoire à titre principal et à titre subsidiaire l’infirmation de l’ordonnance de taxation d’honoraires. Sur l’appel provoqué, il sollicite le rejet de la demande de production de pièce sous astreinte, celle-ci ayant été versée aux débats, que les demandes soient déclarées irrecevables car nouvelles et en tout état de cause rejeter la demande de condamnation de Monsieur [V]-[W] à verser la somme de 106 479,75 € en ce qu’elle méconnait la convention d’honoraires signée en janvier 2020, le rejet de la demande subsidiaire de fixation d’honoraires à la somme de 39 506 € et la condamnation de Monsieur [V]-[W] au paiement de ladite somme et le rejet de la demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. Enfin, il sollicite la condamnation de la SELARL [F] AVOCATS à lui payer la somme de 5 000€ sur le fondement de l’article 700 précité.

L’affaire a été retenue à l’audience du 28 février 2023 à laquelle Monsieur [V]-[W], représenté par son conseil, a repris les éléments mentionnés dans ses écritures. Il s’oppose aux honoraires de résultat, souligne l’irrégularité de la procédure de taxation pour défaut de respect du contradictoire et estime que s’agissant de la même convention d’honoraires et des mêmes parties, la première présidente doit statuer sur la demande d’honoraires de résultats. Il précise que les pièces confidentielles ont été retirées du dossier.

La SELARL [F] AVOCATS, représentée, s’en rapporte à ses écritures et souligne que l’ordonnance du bâtonnier de l’ordre des avocats de Strasbourg relative aux honoraires de résultats n’a pas été frappée d’appel et est définitive. La cour d’appel n’est saisie que de la demande relative à l’honoraire fixe. Elle précise que Monsieur [V]-[W] a souvent changé d’adresse et que les courriers sont revenus non réclamés. Elle sollicite la confirmation de l’ordonnance et à titre subsidiaire la fixation des honoraires eu égard à l’activité déployée, ne maintient pas la demande relative aux retraits des pièces confidentielles, celle-ci étant sans objet. Elle ajoute que la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile tient compte de la rédaction des conclusions, de la levée de confidentialité et de l’ensemble des déplacements et de la plaidoirie.

MOTIFS

En application de l’article 176 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat, la décision du Bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel, dans le délai d’un mois.

En l’espèce, l’ordonnance, rappelant ces dispositions réglementaires, a été signifiée le 23 février 2022 et le recours a été formé par demandeur le 23 mars 2022.

Il convient de le déclarer recevable.

Il est rappelé, à titre liminaire, que les demandes de « dire et juger » et « constater »  ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques. Il n’y a par conséquent pas lieu de statuer.

Sur le respect du contradictoire en première instance

Il ressort de l’ordonnance du 7 janvier 2022 que le courrier adressé le 30 septembre 2021 par le Batonnier de l’ordre à Monsieur [V]-[W] en vue de recueillir ses observations a été retourné par les services postaux avec la mention ‘pli avisé non réclamé’. La lettre de rappel datée du 11 octobre 2021 est restée sans réponse.

Il est constant que l’adresse ‘[Adresse 4] à [Localité 6]’ est celle utilisée par Maître [F] pour la mise en demeure du 3 juillet 2020, et qu’elle a été distribuée. Le courier du 30 septembre 2021 n’a pas été retourné avec la mention ‘n’habite pas à l’adresse indiquée’, qui serait portée si le bien était mis en location et que le nom du locataire figurait sur la boite aux lettres. Il résulte de ces élements que les diligences entreprises par le Batonnier pour permettre à Monsieur [V]-[W] d’apporter ses explications sont conformes aux exigences du débat contradictoire posées par le code de procédure civile.

Sur le fond

Le recours formé par courrier daté du 21 mars 2022 concerne l’ordonnance n°07/2022 du 7 janvier 2022, laquelle fait suite à la requête en date du 29 septembre 2021 de la SELARL [F] AVOCATS aux fins de recouvrement de ses frais et honoraires à hauteur de 26 408,99 €, déduction faite des provisions, soit 18 930,99 €.

Il ressort des pièces versées aux débats que le Bâtonnier de l’ordre a été ensuite saisi par courrier du 23 juin 2022 d’une demande de taxation des honoraires de résultat, pour laquelle une ordonnance a été rendue le 3 octobre 2022.

Cette décision est évoquée dans les conclusions au bénéfice de la SELARL [F] AVOCATS, demandant, sur appel provoqué, la condamnation de Monsieur [V]-[W] à lui payer la somme de 106 479,75 €.

Il est constant que cette demande n’est pas maintenue dans les conclusions récapitulatives d’une part et d’autre part, qu’en toute hypothèse la cour d’appel de Colmar n’a pas été destinataire d’un recours à l’encontre de la décision du 3 octobre 2022, distincte de la décision du 7 janvier 2022, qui ne peut par conséquent pas être examinée dans le cadre d’un appel incident.

La cour est par conséquent saisie du seul recours formé contre la décision du 7 janvier 2022.

L’article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 tel qu’il résulte de la modification de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 prévoit que :

‘Les honoraires de postulation, de consultation, d’assistance, de conseil, de rédaction d’actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.

Sauf en cas d’urgence ou de force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’avocat conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.

Le premier président saisi d’une demande de fixation d’honoraires d’avocats n’a pas compétence pour statuer sur la responsabilité de l’avocat vis-à-vis de son client, un tel litige relevant de la juridiction de droit commun. Monsieur [V]-[W] n’est donc pas fondé à invoquer dans le cadre de la présente instance des manquements ou incompétences éventuels, tant sur le plan du devoir d’information que sur les diligences accomplies.

Il résulte des pièces versées aux débats qu’une lettre de mission adressée le 3 septembre 2019 par la SELARL [F] AVOCATS à Monsieur [V]-[W] prévoit une assistance en matière de droit international privé et suite au « consent order » de 2017. Les honoraires sont décomptés en fin de mission au taux horaire de 300 € TTC, outre des frais de dossiers facturés 60 € TTC. Une provision de 3 000 € TTC a été versée suite à ce courrier. Une note de frais de 13 396.99 € pour la période du 21 août au 30 septembre 2019, provision déduite, a été établie le 30 septembre 2019. Cette facture est accompagnée d’un état très détaillé des 57 heures 25 minutes consacrées au dossier.

Monsieur [V]-[W] conteste la somme de 5 700 € relative à la rédaction d’une assignation en inopposition, indiquant qu’il n’a jamais eu connaissance de cette pièce, sans exposer comment il parvient à déterminer cette somme.

Il est constant qu’aucune pièce n’est produite à l’appui de la facturation de cette diligence contestée, et qu’elle n’est pas évoquée dans les conclusions de la SELARL [F] AVOCATS. Il convient de déduire la somme de 2 875 € HT, soit 3 450 € TTC, correspondant à la rédaction, relecture et finalisation de l’assignation, de la facture du 30 septembre 2019.

Les procédures pénales, qui impliquent un travail préalable même si une demande de renvoi est formulée -cette demande pouvant toujours être rejetée par la juridiction- et les appels de déclaration constatant le caractère exécutoire des décisions rendues par la Cour centrale familiale de Londres sont justifiées.

Par suite, il convient de fixer les honoraires dus au titre de la note du 30 septembre 2019 pour la période du 21 août au 30 septembre 2019, à 9 946,99 € TTC.

Un avenant a ensuite été rédigé le 16 janvier 2020 pour la période postérieure, prévoyant un honoraire fixe forfaitaire de 10 000€ TTC outre l’honoraire de résultat concernant les appels contre les décisions d’exéquatur et la négociation en vue d’une issue extra-judiciaire au litige dont la cour n’est pas saisie.

Les honoraires dûs s’élèvent par conséquent à 19 946,99 €. Il convient par conséquent d’infirmer l’ordonnance du 7 janvier 2022 et de fixer les honoraires dus à la SELARL [F] AVOCATS à cette somme.

Il n’est pas contesté que des provisions ont été payées le 8 avril 2020, la provision de 3 000 € du 9 septembre 2019 étant déjà déduite sur la facture du 30 septembre 2019, pour un montant de 4 466 € TTC selon décompte du 2 juillet 2020. La somme restant due par Monsieur [V]-[W] s’élève à 15 480,99 €.

Sur la demande au titre des frais irrépétibles

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SELARL [F] AVOCATS la totalité des frais irrépétibles engagés au cours de la présente instance. Monsieur [V]-[W] sera condamné au paiement de la somme de 15 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par décision, contradictoire, mise à disposition au greffe,

DÉCLARONS l’appel recevable

INFIRMONS l’ordonnance du Bâtonnier de l’ordre des avocats de Strasbourg du 7 janvier 2022,

Statuant à nouveau,

FIXONS le montant des honoraires dus par Monsieur [S] [V]-[W] à la SELARL [F] AVOCATS à la somme de19 946,99 € TTC.

DISONS que Monsieur [S] [V]-[W] devra payer à la SELARL [F] AVOCATS la somme de 15 480.99 €,

CONDAMNONS Monsieur [S] [V]-[W] à payer à la SELARL [F] AVOCATS la somme de 15 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNONS Monsieur [S] [V]-[W] aux dépens.

La présente ordonnance a été signée par Mme Valérie Delnaud première présidente et Mme Anne Houser, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière La première présidente

 


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