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N° R.G. Cour : N° RG 22/06309 – N° Portalis DBVX-V-B7G-OQM6
Contestations
d’honoraires
COUR D’APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE DU 14 Février 2023
DEMANDERESSE :
Mme [T] [O] [X]
[Adresse 1]
[Localité 3]
comparante
DEFENDEUR :
Me [E] [V]
[Adresse 4]
[Localité 2] (RHÔNE)
Représentée par Maître CONSTANTINO, avocat au barreau de LYON (toque 595)
Audience de plaidoiries du 15 Novembre 2022
Mise en délibéré au 17 Janvier 2023
Prorogé au 14 Février 2023
DEBATS : audience publique du 15 Novembre 2022 tenue par Isabelle OUDOT, Conseiller à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 janvier 2023, assistée de Sylvie NICOT, Greffier.
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée publiquement le 14 Février 2023 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;
signée par Isabelle OUDOT, Conseiller et Sylvie NICOT,Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
””
EXPOSE DU LITIGE
Mme [T] [O] a pris attache avec Me [E] [V] en août 2020 dans le cadre d’une procédure de divorce.
Une convention a été régularisée entre les parties, prévoyant un honoraire fixe de 2100 € HT.
Par courrier recommandé du 23 juin 2021 Maître [V] a mis fin aux relations qui la liait à Mme [O], le lien de confiance étant rompu et lui rappelait qu’elle restait redevable de la somme de 940 € dont elle demandait paiement.
Le 17 décembre 2021, Mme [O] a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon d’une demande en contestation d’honoraires.
Par décision du 16 août 2022 le bâtonnier a notamment :
– fixé à la somme de 1 000 € HT, soit 1 200 € TTC les honoraires de Me [V],
– ordonné l’exécution provisoire à hauteur de 540 €.
La décision du bâtonnier a été signifiée à Me [V] le 17 août 2022 et à Mme [O] le 17 août 2022.
Par lettre recommandée du 15 septembre 2022, Mme [O] a formé un recours contre cette décision.
A l’audience du 15 novembre 2022 devant le délégué du premier président, les parties s’en sont remises à leurs écritures, qu’elles ont soutenu respectivement et oralement.
Mme [O] reprend les termes de ses courriers régulièrement déposés et transmis. Elle demande l’infirmation de la décision et estime qu’elle ne doit rien à Me [V]. Elle sollicite des dommages et intérêts à hauteur de 2 250 € au titre du préjudice financier qu’elle subit.
Elle évoque des rendez-vous annulés ou expédiés, d’appels téléphoniques écourtés, d’un manque de connaissance du dossier. Elle estime ne pas devoir les 540 € restant dus à Me [V]. Mme [O] relève que Me [V] a omis de signer le procès-verbal d’acceptation de principe de rupture et estime que cela démontre le manque d’implication et de sérieux de Me [V].
Elle fait état d’un désistement brutal de Me [V] la veille de la date annoncée du premier jugement. Elle déplore d’importants délais dans les diligences entreprises par Me [V], une méconnaissance manifeste du dossier ainsi qu’un manque de communication. Elle assure qu’elle n’a pas été mise au courant de la proposition de conciliation amiable par la partie adverse et que Me [V] a majoré ses revenus sans aucune raison.
Maître [V] sollicite le règlement de sa facture de 1 440 € laissant un solde de 940 € après déduction des sommes déjà versées par Mme [O] [X]. A titre subsidiaire elle sollicite la confirmation de la décision du bâtonnier. Elle reprend les termes de l’argumentaire développé devant le bâtonnier et affirme qu’elle a reçu Mme [O] à trois reprises avant l’audience sur tentative de conciliation soit les 23 juillet, 03 septembre et 04 mai 2020. Elle conteste ainsi le manque de réactivité et de disponibilité invoqué par Mme [O] qui contrairement à ce qu’elle dit n’a pas été livrée à elle même mais n’a eu de cesse de critiquer la moindre de ses actions.
Elle reproche à Mme [O] de ne pas lui avoir fourni l’ensemble des éléments la concernant notamment les loyers qu’elle percevait et qu’à défaut de connaître ces éléments elle n’a pu en faire part au juge lors de l’audience.
Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile il est expressément renvoyé pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties aux mémoires régulièrement déposés.
Le conseiller a autorisé le dépôt d’une note en délibéré par me [O] et la production de pièces qu’elle souhaitait communiquer.
Par courrier du 22 novembre 2022 Mme [O] a déposé sa note dont copie a été adressée à Maître [V] par lettre recommandée selon ses dires. Dans cette note elle énumère toutes les griefs qu’elle reproche à son avocate dans la tenue de son dossier.
Par courrier du 23 décembre 2022 elle avise la juridiction que son nouveau conseil lui a fait savoir que Maître [V] aurait omis de signer le procès-verbal d’acceptation du principe de la rupture n’avait été signé lors de la tentative de conciliation. Elle reproche à nouveau à Maître [V] son manque d’implication dans son dossier.
MOTIFS
Attendu qu’il n’est pas discuté que Mme [O] a confié à Me [V] la défense de ses intérêts dans le cadre de sa procédure de divorce ;
Attendu que la convention d’honoraires prévoyait un honoraire de base fixé à 2 100 HT soit 2 520 € TTC ;
Que Maître [V] n’a pas été au bout de sa mission puisqu’elle a mis fin à la collaboration qui la liait à Mme [O] [X] le 23 juin 2021 ; Que la convention d’honoraires ne prévoit des modalités en cas de dessaisissement que lorsque le client est à l’origine du dessaisissement ; Que tel n’est pas le cas en l’espèce et que cette clause ne peut donc trouver application ce qui n’est pas discuté ;
Attendu qu’il est constant que lorsque la mission de l’avocat n’a pas été menée jusqu’à son terme, le dessaisissement de l’avocat, avant que soit intervenu un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable, rend inapplicable la convention d’honoraire initialement conclue ; Que pour autant, l’avocat a droit au paiement des diligences effectuées jusqu’à son dessaisissement ;
Attendu que les honoraires de Maître [V] seront alors fixés en application des critères énumérés à l’article 10 de la Loi du 31 décembre 1991, selon les usages, la situation de fortune du client, la difficulté de l’affaire, les frais exposés par l’avocat , la notoriété de celui-ci et les diligences accomplies jusqu’à son dessaisissement ;
Attendu qu’il n’est pas contesté que Mme [O] a versé une provision de 660 € en trois versements d’un montant de 300 € le 23 juillet 2020, de 200 € le 3 septembre 2020 et par chèque de 160 € le 25 juillet 2021 ; Qu’un second le chèque N°0101145 du 20 septembre 2021 d’un montant de 160 € a été rejeté, Mme [O] ayant fait opposition ;
Que Me [V] a adressé à sa cliente une facture datée du 31 mai 2021, d’un montant de 940 € TTC ;
Attendu qu’il convient de rappeler que le juge de l’honoraire n’est pas juge de la qualité de la prestation de l’avocat et ne peut pas se prononcer directement ou indirectement sur la responsabilité de l’avocat : Qu’il ne lui appartient pas davantage d’apprécier l’utilité ou l’inutilité de la stratégie suivie par l’avocat ;
Que dès lors tous les développements de Mme [O] qui tendent à mettre en cause la compétence, la pertinence et l’efficacité du travail accompli par Maître [V] afin d’obtenir la réduction du montant des honoraires réclamés par Me [V] ne peuvent pas utilement prospérer dans le cadre de la présente instance dés lors que ceci relève de demandes qui visent à apprécier l’existence d’une faute professionnelle ou à mettre en cause la responsabilité professionnelle de l’avocat ce qui échappe radicalement à l’appréciation du premier président statuant sur le recours contre une décision de taxation du bâtonnier ;
Attendu qu’il convient de déterminer au vu des pièces produites les diligences engagées par Me [V] ; que le bâtonnier fait état du défaut de pièces justifiant des diligences effectuées ; Que Me [V] verse désormais au débat la requête aux fins de demande en divorce modifiée à plusieurs reprises à la suite des observations de Mme [O] ; Que les enfants du couple sont majeurs et mariés et que la seule question relevait du montant de la pension alimentaire due au titre de devoir de secours ce qui ne relève pas d’une difficulté particulière pour une avocate rompue au contentieux du droit de la famille ;
Attendu qu’il n’est pas contesté que trois rendez-vous ont eu lieu, seule la durée d’une heure pour les deux derniers rendez-vous étant contestée par Mme [O] ; Qu’il n’est pas non plus contesté que le dossier a été plaidé par Me [V] le 1er juin 2021 ;
Que Me [V] affirme qu’elle n’a facturé que 5 heures pour un dossier pour lequel elle a consacré 10 heures de travail ;
Attendu que le tarif horaire de 250 € HT n’est pas disproportionné et parait adapté au regard de la nature du litige, du savoir faire de Maître [V] et de la pratique dans ce type de procédure par les avocats lyonnais ; Que si Mme [O] estime ne plus rien devoir à Me [V] elle ne tente pas pour autant de justifier de sa situation de fortune actuelle et ne justifie pas de son impécuniosité ;
Que compte tenu de ce taux horaire proportionné au coût de fonctionnement d’un cabinet d’avocat comme à la difficulté du litige , le bâtonnier a retenu de manière toute aussi proportionnée et pertinente une durée de quatre heures consacrée à cette mission ;
Que dés lors la décision entreprise qui fixe les honoraires dus à Maître [V] à la somme de 1 200 € TTC est confirmée et que déduction faite des sommes déjà versées, Mme [O] doit régler à Maître [V] la somme de 540 € ; Que les recours de Mme [O] [X] et de Maître [V] sont rejetés ;
Attendu que la demande en dommages et intérêts formée par Mme [O] [X] ne peut pas utilement prospérer dés lors qu’elle sous entend l’examen d’une faute qui aurait été commise par Maître [V] alors que ceci ne rentre pas dans les pouvoirs du juge de l’honoraire ainsi qu’il a été rappelé ci-dessus ;
Attendu que la nature de l’affaire justifie que chacune des parties conserve la charge des frais et dépens qu’elle a exposés ;
PAR CES MOTIFS
Le délégué du premier président, statuant publiquement et par ordonnance contradictoire,
Rejetons le recours formé par Mme [O],
Rejetons le recours incident formé par Maître [V],
En tant que de besoin confirmons la décision rendue par le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon le 16 août 2022 :
Déboutons Mme [O] de sa demande en dommages et intérêts ;
Disons que chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE