Responsabilité de l’Avocat : 13 décembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 22/06026

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Responsabilité de l’Avocat : 13 décembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 22/06026
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N° R.G. Cour : N° RG 22/06026 – N° Portalis DBVX-V-B7G-OPUI

COUR D’APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DU 13 Décembre 2022

Contestations

d’honoraires

DEMANDERESSE :

Mme [N] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Alexis PELLICER, avocat au barreau de LYON (toque 3257)

DEFENDERESSE :

S.E.L.A.R.L. GOURION [X] ET PARTENAIRES

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Maître [G] [X] (SELARL GOURION [X] & Partenaires) avocat au barreau de LYON (toque 889)

Audience de plaidoiries du 08 Novembre 2022

DEBATS : audience publique du 08 Novembre 2022 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du septembre 2017, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée publiquement le 13 Décembre 2022 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;

signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

””

EXPOSE DU LITIGE

Mme [N] [P] épouse [E] a pris attache avec la SELARL Gourion [X] et partenaires (Gourion [X]), représentée par Me [X], en février 2017 après avoir été condamnée par la cour d’appel de Lyon à payer différentes sommes en sa qualité de caution de la société Crèche cabane et gourmandise au CIC Lyonnaise de banque.

Le 5 novembre 2021, Mme [E] a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon d’une contestation d’honoraires.

Celui-ci par décision du 28 juillet 2022 a notamment :

– fixé le solde des honoraires dus par Mme [E] au cabinet Gourion [X] :

au titre de la procédure de première instance à la somme de 2 950 € TTC,

au titre de la procédure d’appel à la somme de 1 688,40 € TTC,

– dit que Mme [E] doit régler au cabinet Gourion [X] la somme totale de 4 638,40 € TTC, outre 75 € à titre de remboursement partiel des frais que l’avocat a dû acquitter dans la procédure,

– ordonné l’exécution provisoire à hauteur de 1 500 € TTC.

Cette décision a été notifiée à Mme [E] et à la SELARL Gourion [X] le 4 août 2022.

Par courrier recommandé du 23 août 2022 reçu au greffe le 26 août 2022, le conseil de Mme [E] a formé un recours contre cette décision.

A l’audience du 8 novembre 2022 devant le délégué du premier président, les parties s’en sont remises à leurs écritures, qu’elles ont soutenues oralement.

Dans son courrier de recours, le conseil de Mme [E] n’a pas mentionné les motifs de son recours.

Dans son courrier du 26 octobre 2022, la SELARL Gourion [X] fait parvenir deux comptes détaillés relatifs à la procédure en première instance et à l’appel devant le juge de l’exécution.

Dans son mémoire déposé lors de l’audience, Mme [E] sollicite l’infirmation de la décision du bâtonnier et demande au délégué du premier président de :

à titre principal,

– fixer le montant des honoraires définitivement dus à Me [X] à la somme de 4 050 € TTC correspondant à la procédure de première instance devant le juge de l’exécution, montant d’ores et déjà réglé,

– fixer les honoraires dus au titre de la procédure d’appel, en considération notamment des usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté du litige, des frais de l’avocat, de la notoriété de celui-ci et des diligences accomplies,

– réduire à de plus justes proportions la facture n°202170 de 1 688,40 € TTC au titre du dossier n°2021048 pour la procédure d’appel,

– lui accorder le cas échéant des délais de paiement,

à titre subsidiaire,

– réduire à de plus justes proportions les honoraires restant dus à Me [X],

– lui accorder des délais de paiement à hauteur de 24 mois,

à titre infiniment subsidiaire,

– lui accorder des délais de paiement à hauteur de 24 mois,

en tout état de cause,

– débouter Me [X] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– condamner Me [X] à lui payer la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Dans son mémoire déposé au greffe le 4 novembre 2022, la SELARL Gourion [X] demande au premier président :

sur l’appel principal,

– déclarer irrecevable la demande nouvelle de délai de paiement sur le fondement de l’article 564 du Code de procédure civile,

– déclarer irrecevables les demandes formulées contre Me [X] sur le fondement de l’article 14 du Code de procédure civile,

– débouter Mme [E] de sa demande de réformation,

– débouter Mme [E] de ses demandes principale, subsidiaire, et infiniment subsidiaire,

sur l’appel incident,

– réformer la décision du 28 juillet 2022,

– fixer à la somme de 3 593,58 € TTC le montant des honoraires restant dus à la SELARL Gourion [X] et partenaires dans le dossier 2021013 par Mme [E],

– fixer à la somme de 1 688,40 € TTC le montant des honoraires restant dus à la SELARL Gourion [X] et partenaires dans le dossier 2021048 par Mme [E],

– condamner Mme [E] à payer à la SELARL Gourion [X] et partenaires la somme de 5 281,98 € TTC, outre la somme de 100 € à titre de remboursement des frais acquittés dans le cadre de la procédure de première instance.

La SELARL Gourion [X] affirme que la convention signée par Mme [E] prévoyait des honoraires au temps passé comme cela avait été expliqué oralement dès le 22 janvier 2021.

Elle mentionne un courriel du 3 mars 2021 faisant un état de situation compte tenu du dépassement de la provision de 1 000 € avec détail des temps passés sur la période du 22 janvier 2021 au 26 février 2021 et joint différents échanges avec Mme [E] pour justifier des relances qu’elle a faites pour que cette dernière signe la convention d’honoraires.

Elle soutient que Mme [E] a été informée des diligences accomplies par l’envoi des factures et affirme qu’elle a assumé le début de la procédure d’appel et notamment du dépôt des conclusions d’appel jusqu’au 11 août 2021. Elle rappelle que le dessaisissement ne remet pas en cause la convention d’honoraires à raison d’une clause stipulant les effets du dessaisissement.

Elle prétend que le temps passé à ce dossier est de 17 heures 58 et estime que la situation personnelle de Mme [E] ne justifie pas une réduction d’honoraires.

Lors de l’audience, Mme [E] a précisé que sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile était bien dirigée contre la SELARL Gourion [X] et non contre Me [X], comme indiqué par erreur dans son mémoire.

Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux mémoires régulièrement déposés et ci-dessus visés.

MOTIFS

Attendu que la recevabilité du recours formé par Mme [E] n’est pas discutée et les dates de notification et de recours ne peuvent y conduire ;

Attendu qu’à titre liminaire, il convient de rappeler qu’en application de l’article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, dans sa rédaction issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, et de la convention d’honoraires applicable, et non pas de l’article 11.2 du règlement intérieur national des barreaux visé par le bâtonnier et par Mme [E] qui ne peut constituer qu’un guide d’interprétation de ces texte et contrat, le rôle du juge de l’honoraire est en l’espèce de déterminer l’amplitude horaire nécessaire pour accomplir les diligences facturées ;

Attendu que le bâtonnier a été saisi par le conseil de Mme [E] d’une contestation des honoraires figurant sur quatre factures émises par la SELARL Gourion [X] entre le 26 février et le 13 décembre 2021, sa référence à l’intervention de cette SELARL au cours de l’année 2017 qui a motivé une facture alors intégralement réglée ne correspondant qu’à sa discussion sur la quantification des diligences engagées en exécution de la convention d’honoraires datée du 29 janvier 2021 ;

Sur le respect par la SELARL Gourion Soubeyand de son obligation d’information

Attendu qu’il est également rappelé que le juge de l’honoraire ne peut pas se prononcer directement ou indirectement sur la responsabilité de l’avocat ou sur le respect de ses obligations déontologiques ; qu’il ne lui appartient pas davantage de déterminer les éventuelles fautes disciplinaires invoquées par son client comme cela a été rappelé lors de l’audience ;

Que le premier président ou son délégué saisi d’un recours contre sa décision, exerçant alors comme le bâtonnier les pouvoirs du juge de l’honoraire déterminés par l’article 174 du décret du 27 novembre 1971, ne dispose pas plus de pouvoir juridictionnel que le bâtonnier pour statuer sur des allégations concernant le respect par l’avocat de ses obligations et en particulier celle résultant des articles 11.1 et 11.2 du règlement intérieur national des barreaux ;

Attendu que le reproche fait par Mme [E] concernant l’absence de respect d’une obligation déontologique d’information par rapport à l’évolution prévisible de ses honoraires n’a pas être apprécié dans ce cadre alors que ce moyen ne vient d’ailleurs au soutien d’aucune prétention et ne peut conduire à une quelconque réfaction des honoraires ;

Que les développements des parties sur ce point sont inopérants et ne sont pas examinés ;

Sur la convention d’honoraires signée par les parties

Attendu qu’aux termes de l’alinéa 3 de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971 «Sauf en cas d’urgence ou de force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’avocat conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.» ;

Qu’en l’espèce, Mme [E] ne conteste pas avoir été engagée par la convention d’honoraires datée du 29 janvier 2021 et qui a été retenue par le bâtonnier, qui n’est pas discuté sur ce point, comme ayant été signée en mars 2021, le courriel émis par la cliente le 11 mars 2021 manifestant son consentement ;

Attendu que cette convention d’honoraires a prévu la mission suivante :

«Le client a chargé le cabinet d’avocats d’une mission de conseil, d’assistance et de représentation dans le cadre d’un litige l’opposant à la société Lyonnaise de banque et relatif à l’exécution d’un jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon le 15 juin 2015 et d’un arrêt de la cour d’appel de Lyon rendu le 23 février 2017 et d’un arrêt de la cour de cassation rendu le 3 avril 2019 et ses suites procédurales» ;

Que les honoraires ont été stipulés «au temps passé» comme devant être fixés de la manière suivante :

«Les honoraires sont fixés par référence au temps passé par le cabinet d’avocats pour le traitement du dossier et en exécution de la mission :

– Avocat associé : taux horaire de 180 € HT,

– Avocat collaborateur : taux horaire de 160 € HT,

– Secrétariat : taux horaire de 80 € HT,

Ces honoraires couvriront toutes les diligences accomplies dans le cadre des négociations et des procédures telles que : ouverture de dossier, rendez-vous, étude du dossier au regard des pièces communiquées par le client et les adversaires, des textes et de la jurisprudence applicables, conseils et assistance, rédaction et mise au point des écritures, communication des pièces, gestion du dossier, appels téléphoniques, rédaction de courrier, gestion de la procédure, audiences de procédure et de plaidoiries. Ils ne couvriront ni les débours, ni les dépens, ni les frais.» ;

Attendu qu’il n’est pas discuté par les parties que Mme [E] a dessaisi la SELARL Gourion [X] par un courriel du 28 juillet 2021, postérieurement à la décision rendue par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Lyon le 6 juillet 2021 et à la déclaration d’appel régularisée par cette SELARL le 23 juillet 2021 ;

Attendu que Mme [E] soutient qu’une nouvelle convention d’honoraires était nécessaire pour missionner son avocat au titre de la procédure d’appel, alors que la SELARL Gourion [X] relève avec pertinence que les termes mêmes de la convention d’honoraires de mars 2021 ne cantonnaient pas cette mission à la seule défense des intérêts de sa cliente devant le juge de l’exécution ;

Que la clause susvisée est en effet claire et non équivoque en ce qu’elle confie à l’avocat une mission générale de défense des intérêts de Mme [E] «dans le cadre d’un litige l’opposant à la société Lyonnaise de banque et relatif à l’exécution» de condamnations prononcées par le tribunal de commerce de Lyon, malgré l’intervention d’un appel et d’un pourvoi en cassation ;

Attendu que le fait que l’avocat ait indiqué à sa cliente qu’il «ouvrait un nouveau dossier» et qu’un nouveau numéro lui ait été affecté spécifiquement pour la procédure d’appel est inopérant à caractériser la nécessité de la signature d’une nouvelle convention d’honoraires pour la procédure d’appel alors que la convention ne limitait pas l’intervention de l’avocat à la première instance devant le juge de l’exécution ;

Attendu que les parties ne s’opposent pas sur le fait que le dessaisissement de l’avocat était de nature à rendre caduque la convention mais uniquement en ce qui concerne la clause prévoyant spécifiquement cette situation de dessaisissement ;

Attendu qu’il est en effet constant au regard de la force légale des conventions, et en l’absence de toute disposition la prohibant, une telle stipulation peut et en l’espèce doit recevoir application pour régir les rapports entre les parties en cas de fin prématurée ;

Attendu que la convention d’honoraires a en effet prévu :

«Article 8 – Dessaisissement

Dans l’hypothèse où le client souhaiterait dessaisir le cabinet d’avocats et transférer son dossier à un autre avocat, le client s’engage à régler sans délai les honoraires au temps passé, ainsi que les frais, débours et dépens dus au cabinet d’avocats pour les diligences effectuées antérieurement au dessaisissement.

Les parties conviennent que la présente convention restera applicable en cas de dessaisissement du cabinet d’avocats, même si l’instance est en cours au moment du dessaisissement (Cass. 2è civ, 6 juillet 2017, n°16-15.299)» ;

Attendu que la SELARL Gourion [X] était ainsi fondée à facturer les diligences qu’elle avait accomplies jusqu’à son dessaisissement en vertu des stipulations de la convention d’honoraires qui demeuraient applicables en vertu de la clause ci-dessus rappelée ;

Attendu qu’alors qu’elle n’invoque aucun vice du consentement, l’effet obligatoire des conventions ne permet pas à Mme [E] de revendiquer une appréciation du coût horaire convenu avec son avocat au titre de l’indemnisation de ses diligences, le pouvoir modérateur du juge de l’honoraire qu’elle invoque dans son mémoire ne concernant d’une part que l’éventuel honoraire de résultat susceptible d’être disproportionné par rapport au service rendu et d’autre part que l’appréciation souveraine du temps nécessaire pour accomplir chaque diligence effectuée ;

Qu’en effet, si le juge de l’honoraire apprécie souverainement d’après les conventions des parties et les circonstances de la cause le montant de l’honoraire dû à l’avocat, il ne lui appartient pas de le réduire dès lors que le mode de calcul et le principe de l’honoraire ont été acceptés par le client dans le cadre d’une convention d’honoraires ;

Attendu que tout en appliquant la convention d’honoraires, le bâtonnier n’avait ainsi pas à apprécier l’adéquation des taux horaires contractuels aux capacités financières de Mme [E] ; que cette question relève uniquement des obligations déontologiques insusceptibles d’être examinées par le juge de l’honoraire ;

Attendu que si Mme [E] fait état de la faculté du juge de l’honoraire d’écarter les honoraires réclamés pour une diligence manifestement inutile, c’est-à-dire insusceptible d’avoir un quelconque effet juridique, elle ne précise pas les diligences qui seraient susceptibles de correspondre à cette définition ;

Qu’elle n’est en tout état de cause pas fondée à soutenir uniquement que la mission confiée à son avocat ne revêtait pas un niveau de difficulté suffisamment important pour justifier autant de diligences, ce qui ne correspond en rien aux diligences inutiles seules susceptibles d’être écartées de la facturation ;

Sur les honoraires facturés par la SELARL Gourion [X] entre le 26 février et le 13 décembre 2021

Attendu que Mme [E] discutent le coût des diligences de cette SELARL dans le cadre des quatre factures émises successivement le 26 février 2021 pour un montant de 2 499 € HT soit 2 998,80 € TTC et sur laquelle un solde de 148,80 € TTC est réclamé, le 30 avril 2021 pour un montant de 1 524,32 € HT soit 1 829,18 € TTC, le 28 mai 2021 pour un montant de 1 346,33 € soit 1 615,60 € TTC et le 13 décembre 2021 pour un montant de 1 407 € HT soit 1 688,40 € TTC correspondant aux diligences engagées dans le cadre de la procédure d’appel ;

Attendu qu’il appartient à la SELARL Gourion [X] de rapporter la preuve des diligences qu’elle a facturées ;

Attendu qu’il convient d’abord de relever que trois des factures discutées ont été improprement calculées s’agissant du taux horaire applicable aux diligences du secrétariat pris en compte de 100 € HT alors que la convention a prévu un taux de 80 € HT, seule celle du 10 décembre 2021 prenant en compte ce taux ;

Attendu que la facture du 26 février 2021 fait état, sans détail des volumes de diligences facturées de :

– 19 heures 13 pour celles engagées par l’avocat associé,

– une heure engagée par le secrétariat ;

Que la SELARL Gourion [X] a fourni un relevé des temps passés par Me [X] entre le 29 janvier, date du début de son intervention et le 26 février 2021, date de sa facturation faisant état d’une durée totale de diligences à hauteur de 20 heures 28 ;

Attendu que cette durée comprenait celle de 5 heures dites correspondantes à la rédaction de la convention d’honoraires, dont la SELARL Gourion [X] a reconnu qu’elle était erronée, sa durée devant être retenu pour 5 minutes ; qu’elle indique d’ailleurs dans son mémoire que cette durée totale doit être retenue pour 15 heures 28 ;

Attendu que Mme [E] discute la durée facturée à hauteur totale de 6 heures 45 au titre de la rédaction de l’assignation ayant cette fois effectivement saisi le juge de l’exécution, au regard de son contenu et surtout de l’existence d’un projet d’assignation rédigé au cours de l’année 2017 ;

Que la lecture de cette assignation délivrée en 2021 permet de vérifier qu’elle comporte 14 pages et vise 18 pièces, mais également que son contenu jusqu’à la page 10 est par nature identique à celle qui avait été préparée en 2017, comme relatant l’historique des condamnations subies par Mme [E] ; que seules les pages suivantes prenant en compte l’évolution financière et personnelle de cette dernière ont nécessité une analyse et une attention nouvelle ;

Attendu que la SELARL Gourion [X] avait d’ores et déjà facturé et obtenu le paiement de son intervention de 2017 comportant ce projet d’assignation à hauteur de 1 000 € HT en application d’une convention d’honoraires prévoyant ce coût pour sa rédaction faisant suite à une autre convention prévoyant un forfait de 500 € HT pour la rédaction d’une consultation ;

Attendu qu’une durée de trois heures était suffisante pour mettre à jour et modifier cette assignation initialement rédigée ;

Attendu que l’examen du relevé des temps, dont la majeure partie n’est ni discutée dans l’existence des diligences ni au niveau même du temps passé, n’objective pas que la durée qui y est mentionnée pour chaque diligence soit exagérée ;

Attendu que concernant cette facture, la SELARL Gourion [X] était fondée à facturer une durée totale de 12 heures 45 depuis le début pour l’intervention de Me [X], à laquelle s’ajoute l’heure de secrétariat qui n’est pas discutée ;

Attendu que la facture du 30 avril 2021 fait état, sans détail des volumes de diligences facturées pour la période postérieure à la facture précédente de :

– 7 heures 52 pour celles engagées par l’avocat associé,

– une heure et cinq minutes engagées par le secrétariat ;

Que la SELARL Gourion [X] a fourni au moins dans le cadre du présent recours un relevé des temps passés par Me [X], pour l’intégralité de la période de son intervention qui permettait à sa cliente d’en apprécier la pertinence, ce relevé permettant de constater qu’entre le 26 février et le 30 avril 2021 les temps suivants ont été consacrés notamment aux diligences ci-dessous listées :

– courriels avec la cliente pour 1 heure 44,

– courriels avec le juge de l’exécution et le confrère adverse pour 55 minutes,

– appels avec la cliente pour 2 heures 15,

– établissement de la facturation pour 10 minutes,

– enrôlement RPVA pour 15 minutes,

– rédaction des bordereaux de communication de pièces 1 et 2 pour 10 minutes,

– notification conclusions adverses pour 5 minutes,

– rédaction notes sur saisie immobilière pour 45 minutes et recherches sur saisie immobilière pour une heure,

– rédaction description procédure saisie immobilière pour 30 minutes ;

Que les 45 minutes à nouveau imputées pour la rédaction de l’assignation sont insusceptibles d’être retenues ;

Attendu que ce relevé de temps produit n’a pas été critiqué par Mme [E] qui relève cependant avec pertinence que la SELARL Gourion [X] ne justifie pas de ses diligences ;

Attendu que les investigations et notes établies par l’avocat concernant la saisie immobilière ne rentrent pas naturellement dans la mission prévue dans la convention d’honoraires, alors qu’aucun des courriels échangés ne fait état d’une telle problématique ni même d’une information fournie à la cliente sur ce sujet ; que surtout ces notes et recherches ne sont pas produites ;

Que seule la lecture des conclusions d’appel ensuite déposées dans le cadre du recours contre la décision du juge de l’exécution ayant refusé les délais de paiement objective la survenance d’un commandement de saisie immobilière délivré le 20 avril 2021 ;

Attendu, surtout, qu’en l’état des contestations opposées par Mme [E], la SELARL Gourion [X] ne produit aucune pièce de nature à justifier les 2 heures 15 imputées à ce sujet sur la facture du 30 avril 2021 ;

Qu’en cet état cette durée ne peut être retenue ;

Attendu que s’agissant des autres diligences non discutées dans leur existence ou même leur durée, il convient comme le bâtonnier de considérer comme pertinents et proportionnés les temps passés pour les différents échanges avec la juridiction, les courriels, courriers et appels téléphoniques ;

Attendu que pour cette facture, une durée de cinq heures est fixée comme correspondant aux diligences justifiées par l’avocat, alors que la durée d’une heure et cinq minutes imputée concernant le secrétariat n’est pas contestée ;

Attendu que la facture du 28 mai 2021 fait état, sans détail des volumes de diligences facturées pour la période postérieure à la facture précédente de :

– 7 heures 26 pour celles engagées par l’avocat associé,

– cinq minutes engagées par le secrétariat ;

Que la SELARL Gourion [X] a fourni un relevé des temps passés par Me [X] entre le 3 et le 28 mai 2021, faisant état d’une durée totale de diligences à hauteur de 7 heures 41 ;

Attendu que Mme [E] n’a pas critiqué ce tableau sauf à mettre en avance un volume horaire qu’elle qualifie d’excessif ;

Que les durées imputées aux différents échanges ont été retenues à juste titre par le bâtonnier comme étant proportionnées et la lecture des conclusions en réponse qui ont été déposées le 1er juin 2021 devant le juge de l’exécution, d’une longueur de 15 pages et visant 24 pièces, comportant trois pages dédiées à la réponse aux moyens et arguments adverses, objective de la même manière la durée facturée de 2 heures 15 ;

Attendu que la durée horaire facturée le 28 mai 2021 est considérée comme justifiée ;

Attendu, enfin, que la facture du 13 décembre 2021 d’un montant de 1 688,40 € TTC fait état des durées suivantes pour la période postérieure à la facture précédente et jusqu’au dessaisissement :

– 7 heures 09 pour celles engagées par l’avocat associé,

– 1 heure et 30 minutes engagées par le secrétariat ;

Attendu que cette facture retrace à la fois des diligences concernant la procédure devant le juge de l’exécution et devant la cour d’appel sur recours contre sa décision, le montant sollicité au bâtonnier pour la seule procédure d’appel correspondant de manière étonnante à celui de cette facture ;

Attendu que la SELARL Gourion [X] a fourni dans le cadre du présent recours des relevés des temps passés par Me [X], permettant de constater que depuis le 28 mai 2021 les temps suivants ont été consacrés notamment aux diligences correspondant à l’audience devant le juge de l’exécution et au lancement de la procédure d’appel et en particulier, s’agissant de la procédure devant le juge de l’exécution :

– préparation du dossier de plaidoirie pour 30 minutes,

– audience devant le juge de l’exécution du 1er juin 2021 pour une heure,

alors que pour cette période également, les temps notés comme correspondant aux échanges avec la cliente et l’adversaire sont pertinents notamment en ce qu’ils particulièrement porté sur l’orientation de la défense de Mme [E], l’analyse de la décision rendue par le juge de l’exécution et la discussion sur l’opportunité de former un appel ;

Attendu qu’il n’est pas discuté que la SELARL Gourion [X] a régularisé une déclaration d’appel le 23 juillet 2021 à l’encontre de la décision du juge de l’exécution rendue le 6 juillet 2021 et a commencé la rédaction des conclusions d’appel comme le suivi de la procédure devant la cour d’appel ;

Que la durée de 30 minutes dite consacrée à la formalisation de la déclaration d’appel par l’intermédiaire du RPVA est proportionnée comme celle de 2 heures 30 correspondant à la rédaction du projet de conclusions devant la cour d’appel ;

Attendu que le relevé global de temps produit par la SELARL Gourion [X] permet d’identifier les durées totales de diligences suivantes pour la période postérieure au 28 mai :

– jusqu’au dessaisissement de 5 heures et 42 minutes,

– jusqu’à la rédaction de la facture définitive et du compte détaillé de 8 heures et 27 minutes ;

Attendu qu’en ne prenant en compte que les diligences postérieures au 6 juillet 2021, date du jugement susvisé, les durées mentionnées jusqu’au 13 décembre 2021 au total de 4 heures 13 minutes ne permettent en rien de déterminer des honoraires de 1 688,40 € TTC pour la seule procédure d’appel, la simple multiplication de cette durée avec le taux horaire de 200 € TTC (180 € HT pour ce qui ne concerne d’ailleurs que les diligences de Me [X]) ne conduisant qu’à un montant de 843,33 € ;

Que cette facture doit ainsi être intégrée dans l’ensemble des honoraires réclamés, régis par la même convention d’honoraires ;

Attendu que les diligences postérieures au dessaisissement, au regard de ce qu’il est justifié que le nouvel avocat de Mme [E] s’est constitué en appel dès le 11 août 2021, ne peuvent être imputées à la cliente en dehors du temps passé à la transmission du dossier au confrère et à la rédaction de la facture finale ;

Qu’une durée d’environ 6 heures est retenue comme pertinente et proportionnée pour les diligences engagées par l’avocat associé au titre de la fin de la procédure devant le juge de l’exécution et le début de la procédure d’appel, qu’une durée d’une heure est retenue pour les diligences du secrétariat, notamment s’agissant des courriers concernant la procédure de surendettement postérieurs au dessaisissement et dont la SELARL Gourion [X] souligne qu’il était prévu que Mme [E] s’en occupe seule ;

Attendu que la durée imputée pour la confection de la facture (1 heure 30) au regard celle dite consacrée de 45 minutes pour lister les diligences doit être réduite ;

Attendu qu’il convient dès lors de retenir les durées suivantes :

– 31 heures après arrondi, compte tenu d’un calcul amenant à un 11ème d’heure en sus de cette durée, pour les diligences accomplies par l’avocat, soit 5 580 € HT (31 X 180 €)

– 3 heures 10 pour les diligences accomplies par le secrétariat soit 252,80 € HT (taux horaire de 80 € HT,

soit un total arithmétique de 6 999,36 € TTC arrondi à 7 000 € TTC desquels doivent être déduits les règlements à hauteur de 4 050 € non discutés par les parties ;

Attendu que la décision du bâtonnier doit dès lors être réformée et les honoraires de l’avocat sont fixés à ce montant de 7 000 € TTC et le solde restant dû par Mme [E] est limité à 2 950 € TTC ;

Sur les délais de paiement et sur l’incompatibilité invoquée de la facturation avec la situation personnelle

Attendu qu’il a déjà été rappelé plus haut que l’effet obligatoire de la convention d’honoraires et le défaut de pouvoir juridictionnel du juge de l’honoraire pour statuer les obligations déontologiques d’information du client et de modération dans la fixation des honoraires ne permettaient pas de remettre en cause l’accord exprès passé entre l’avocat et sa cliente sur le mode de détermination de ses honoraires ;

Qu’il est encore rappelé que cette question n’est en l’espèce pas de nature à entraîner une réfaction des honoraires ;

Attendu que Mme [E] sollicite dans le cadre de son recours l’octroi de délais de paiement en expliquant se trouver dans une situation financière inextricable accentuée par la perte récente de son emploi ; qu’elle ajoute avoir déposé un dossier de surendettement ;

Attendu que la SELARL Gourion [X] soutient à tort l’irrecevabilité de cette demande de délais sur le fondement de l’article 564 du Code de procédure civile car comme l’a relevé Mme [E] lors de l’audience, il résulte des termes des articles suivants du même code qu’elle tend aux mêmes fins que celles présentées au bâtonnier et constitue l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire de la contestation des honoraires ;

Attendu que cette prétention, pour n’avoir été présentée par Mme [E] que dans le cadre de son recours, est déclarée recevable ;

Attendu qu’aux termes de l’article 1343-5 du code civil «Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.» ;

Attendu qu’il ressort des documents produits par Mme [E] que sa demande de surendettement a été déclarée recevable par une décision de la commission de surendettement des particuliers du Rhône rendue le 21 septembre 2021 et qu’une phase de conciliation a été engagée ;

Que Mme [E] se trouve ainsi interdite de rembourser les dettes qu’elle a fait figurer dans sa demande de surendettement et comme le rappelle le texte visé au bas du courrier de la commission du 23 septembre 2021, l’article L. 722-5 du Code de la consommation prévoit pendant un délai de deux ans la suspension des poursuites et qu’aucun recouvrement forcé n’est susceptible d’être engagé pendant ce délai ;

Attendu qu’en l’état de ce que Mme [E] bénéficie de ce moratoire et n’a pas justifié avoir intégré la créance de la SELARL Gourion [X] dans sa saisine de la commission de surendettement, il n’y a pas lieu de lui accorder des délais de paiement ; que si tel est le cas le plan préparé par la commission lui permettra de payer son avocat de manière plus échelonnée ;

Sur les dépens et les frais dont ceux prévus par l’article 700 du Code de procédure civile

Attendu que compte tenu de ce que chacune des parties succombe pour une part, elles doivent garder la charge de leurs propres dépens engagés dans le cadre de ce recours, Mme [E] devant supporter les éventuels dépens consécutifs à une exécution forcée ;

Que pour ce motif, les demandes présentées au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ne peuvent prospérer alors même que le dernier état des demandes de Mme [E] rend sans objet l’irrecevabilité soulevée par la SELARL Gourion [X] au visa de l’article 14 du Code civil ;

Attendu que la demande présentée par la SELARL Gourion [X] au titre des frais versés à son ordre au titre de la procédure de taxation a été acceptée par le bâtonnier à hauteur de 75 € et aucun élément ne permet de retenir que les 100 € sollicités correspondent à la somme effectivement versée par l’avocat, alors surtout que sa succombance partielle ne peut conduire à l’en défrayer en totalité ;

Que cette autre prétention est ainsi rejetée, mais la somme allouée par le bâtonnier à ce titre est confirmée ;

PAR CES MOTIFS

Le délégué du premier président, statuant publiquement et par ordonnance contradictoire,

Faisant droit partiellement au recours de Mme [N] [P] épouse [E],

Infirmons la décision rendue le 28 juillet 2022 par le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Lyon fixant le montant des honoraires dus à la SELARL Gourion [X] et partenaires et le solde d’honoraires que Mme [N] [P] épouse [E] reste devoir et statuant à nouveau sur ces points :

Taxons à 7 000 € TTC le montant total des honoraires de la SELARL Gourion [X] et partenaires,

Disons que Mme [N] [P] épouse [E] est tenue de payer à la SELARL Gourion [X] et partenaires un solde d’honoraires de 2 950 €,

Déclarons recevable, mais rejetons la demande de délais de paiement présentée par Mme [N] [P] épouse [E],

Confirmons la décision du bâtonnier en ce qu’elle a fixé à 75 € le remboursement partiel des frais que l’avocat a dû acquitter dans la procédure de taxation,

Disons que chaque partie garde la charge de ses propres dépens mais disons que Mme [N] [P] épouse [E] devra supporter les éventuels dépens inhérents au recouvrement forcé des honoraires,

Rejetons les demandes respectives présentées au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE

 


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