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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 9
ORDONNANCE DU 11 MAI 2023
Contestations d’Honoraires d’Avocat
(N° /2023, 8 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/00406 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEBV5
NOUS, Michel RISPE, Président de chambre, à la Cour d’Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Axelle MOYART, Greffière présente à l’audience et de Eléa DESPRETZ Greffière présente au prononcé de l’ordonnance.
Vu le recours formé par :
Madame [H] [Y]
[Adresse 5]
[Localité 1]
Représentée par Me Rémi ANTOMARCHI, avocat au barreau de PARIS, toque : C1289
Demandeur au recours,
contre une décision du Bâtonnier de l’ordre des avocats de PARIS dans un litige l’opposant à :
La SELARL DB AVOCATS CONSEILS
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Nadia BORRULL, avocat au barreau de PARIS, toque : E0470
Défendeur au recours,
Par décision contradictoire, statuant par mise à disposition au greffe,
et après avoir entendu les parties présentes à notre audience publique du 28 Mars 2023 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,
L’affaire a été mise en délibéré au 11 Mai 2023 :
Vu les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;
****
Par un courrier adressé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception en date du 12 novembre 2020, Mme [H] [Y] a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats de Paris d’une demande de contestation des honoraires dus à la Selarl DB avocats conseils, à qui elle avait confié la défense de ses intérêts.
”’
Après avoir recueilli les observations des parties, par décision rendue le 22 juin 2021, le délégataire du bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Paris a :
‘ fixé à la somme de 16.800 euros toutes taxes comprises, le montant total des honoraires dus à la Selarl DB avocats conseils par Mme [H] [Y], dont il a constaté le règlement intégral,
‘ dit que les frais éventuels de signification de la présente décision demeureront à la charge de la partie qui en aura pris l’initiative,
‘ débouté les parties de toutes autres demandes, plus amples complémentaires..
”’
Suivant lettre recommandée avec demande d’avis de réception postée le 21juillet 2021, Mme [H] [Y] a formé un recours à l’encontre de ladite décision, auprès du Premier président de cette cour.
Des convocations ont été adressées le 27 décembre 2022 aux parties par le greffe afin qu’elles comparaissent à l’audience du 28 mars 2023.
”’
Lors de ladite audience, Mme [H] [Y] a fait plaider qu’elle demandait le bénéfice de ses conclusions écrites remises au greffe, aux termes desquelles elle a sollicité de cette juridiction qu’elle infirme la décision entreprise en tous points sauf en ce qu’elle a écarté 6,5 heures de prestations pour ne retenir que 51 heures et statuant à nouveau :
‘ rectifie la décision du bâtonnier quant au total des honoraires retenus à savoir 51 x 250 et non 150 soit 12.750 euros hors taxes soit 15.300 euros;
‘ condamne la Selarl DB avocats conseils à lui restituer 1.500 euros au titre des honoraires versés en trop;
‘ juger qu’en l’absence de factures répondant aux exigences de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971, le paiement des honoraires ne peut valoir acceptation de ces derniers;
‘ juger que la Selarl DB avocats conseils a manqué à son devoir de transparence dans le cadre des honoraires pratiqués et a violé ses obligations déontologiques;
‘ juger que la Selarl DB avocats conseils a diligenté une procédure vouée à l’échec et donc totalement inutile en sollicitant la désignation d’un géomètre dans le but de constituer une copropriété alors que seul un administrateur ad hoc avait ce pouvoir en l’absence d’assemblée générale;
‘ juger que la Selarl DB avocats conseils a engagé des diligences inutiles en assignant Mme [D] sans vérifier la qualité de propriétaire de cette dernière qui ne l’était manifestement pas;
‘ juger que la Selarl DB avocats conseils a facturé des honoraires indûment s’agissant de la procédure devant l’ordre des avocats pour un litige avec un confrère;
‘ juger que la Selarl DB avocats conseils a facturé des honoraires pour des conclusions formalisant des demandes reconventionnelles dans le cadre d’une procédure radiée (la première) et sur laquelle elle n’a pas sollicité le réenrôlement pour que lesdites demandes aboutissent soit des diligences inutiles;
‘ juger que Mme [H] [Y] a réglé la somme de 16.800 euros toutes taxes comprises sur les 16.950 euros toutes taxes comprises réclamés par son précédent conseil;
‘ juger que le bâtonnier a ramené le nombre d’heures facturables à 51 soit 15.300 euros toutes taxes comprises selon le décompte effectué dans sa décision soit :
Analyse documents : 7 h
Procédure référé engagée par M. [F] : 11 h
Réclamation ordinale : 3 h
Aspect pénal du décès du concubin de Mme [H] [Y] : 3 h
Diligences pour la seconde procédure : 27 h
‘ confirmer que les montants sollicités en première instance par l’intimée concernant les échanges clients dont la facturation n’a jamais été annoncée avant le décompte du mois de juillet 2020 et dont la preuve n’est pas rapportée pour une durée de 6 h sont bien écartés (soit 1.500 euros hors taxes soit 1.800 euros toutes taxes comprises)
‘ fixer les honoraires dus par Mme [H] [Y] à la Selarl DB avocats conseils à la somme totale de 4.800 euros toutes taxes comprises et condamner la Selarl DB avocats conseils au remboursement de la somme de 10.500 euros toutes taxes comprises (en sus des 1.500 euros toutes taxes comprises sollicités compte tenu de l’erreur matérielle commise en 1ère instance) pour les raisons ci-après exposées;
‘ juger que Mme [H] [Y] est légitime à solliciter que les honoraires soient fixés en écartant les prestations inutiles d’un montant de 9.900 euros toutes taxes comprises à savoir :
– Les conclusions en réponse dans le cadre de la première affaire (5 h soit 1250 euros hors taxes et 1.500 euros toutes taxes comprises) pour une procédure radiée dont elle n’a pas sollicité, sans référer à sa cliente de cette possibilité, le réenrôlement ou rétablissement de l’affaire rendant ces diligences parfaitement inutiles;
– Diligenter la deuxième procédure pour un montant total de 6.750 euros hors taxes (27 h) soit 8.100 euros toutes taxes comprises pourtant vouée à l’échec donc totalement inutile sachant en outre que dans cette affaire, 2 h 30 ont été facturées pour des recherches de jurisprudence alors même que l’assignation n’en comporte aucune (Cf. pièce n°4);
‘ juger que la Selarl DB avocats conseils ne pouvait facturer des honoraires pour la procédure devant l’Ordre (3 h soit 750 euros hors taxes et 900 euros toutes taxes comprises ) qui ne concerne pas Mme [H] [Y] et pour laquelle elle n’avait aucun mandat de cette dernière;
‘ juger que les diligences facturables par l’intimée doivent être limitées comme suit :’1.750 euros hors taxes pour l’analyse des documents dans le cadre de la première procédure,
‘1.500 euros hors taxes pour la première procédure (1ère conclusions et saisine postulant),
‘ 0 euro pour la procédure devant l’Ordre,
‘ 750 euros hors taxes pour les diverses diligences de 2019 (soit 3h correspondant aux diligences relatives à l’aspect pénal du concubin et 3h relatif à l’analyse des documents),
‘ 0 euro pour la deuxième procédure
‘ 0 euro pour les échanges clients
Soit un total de 4.000 euros hors taxes soit 4. 800 euros toutes taxes comprises.
‘ condamner la Selarl DB avocats conseils au remboursement de la différence à savoir 16.800 – 4. 800 = 12.000 euros toutes taxes comprises au profit de Mme [H] [Y];
‘ en tout état de cause, condamner la Selarl DB avocats conseils à [payer] la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du CPC [code de procédure civile].
Mme [H] [Y] a expliqué qu’elle avait un conflit de voisinage à raison duquel elle avait confié la défense de ses intérêts à Me [T], sans que cette dernière ne lui propose de convention d’honoraire, ni ne justifie de ses diligences facturées. Elle a précisé avoir cependant payé à chaque fois.
Elle a fait valoir que son avocate avait commis plusieurs erreurs car elle n’avait pas vérifié si la cave n’est pas enclavée mais surtout parce que sa demande visait à considérer que le chemin faisait partie des parties communes. Selon elle, la procédure diligentée par l’avocate était vouée à l’échec, à défaut d’intérêt à agir. Elle a ajouté qu’il n’y avait aucune preuve des diligences, soulignant que plus de 16.000 euros d’honoraires avaient été réglés, sans résultat obtenu.
En réponse, lors de la même audience, la Selarl DB avocats conseils a demandé à cette
juridiction le bénéfice de ses conclusions écrites remises au greffe, aux termes desquelles elle a sollicité de cette juridiction qu’elle confirme la décision entreprise, rejette les prétentions adverses et condamne Mme [H] [Y] à lui payer une indemnité de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle a rappelé le contexte de conflit de voisinage particulièrement vif dans le cadre duquel Mme [H] [Y] l’avait saisie, ainsi que les faits saillants de l’espèce. Elle a réfuté les allégations de Mme [H] [Y] quant à la prétendue inutilité des diligences entreprises et quant à la réduction du temps passé, observant que le bâtonnier de l’ordre des avocats avait bien retenu 56 heures.
”’
Puis, l’affaire a été mise en délibéré au 11 mai 2023.
SUR CE
La présente décision sera rendue contradictoirement entre les parties, toutes deux comparantes à l’audience.
”’
Préliminairement, il convient de rappeler qu’en application de l’article 4 du code de procédure civile, l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties, sans que les demandes de constatation ou de donner acte puissent constituer des prétentions au sens de cet article, en sorte qu’il n’y a pas lieu de statuer sur celles-ci.
”’
En matière de contestation d’honoraires d’avocats, l’article 53, 6° de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques a renvoyé au pouvoir exécutif le soin de prévoir la procédure applicable, dans le respect de l’indépendance de l’avocat, de l’autonomie des conseils de l’ordre et du caractère libéral de la profession, au moyen de décrets en Conseil d’Etat.
Cette procédure est actuellement régie par le décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat, dont la section V est intitulée ‘Contestations en matière d’honoraires et débours’.
En ce domaine, regroupées dans la section V dudit décret, les dispositions des articles 174 à 179 doivent dès lors recevoir application, alors qu’elles sont d’ordre public et instituent une procédure obligatoire et exclusive (cf. Cass. 2ème Civ., 1er juin 2011, pourvoi n° 10-16.381, Bull. n 124 ; 2 Civ. , 13 septembre 2012, P. pourvoi n° 10-21.144). L’article 277 de ce décret prévoit en outre qu’ ‘Il est procédé comme en matière civile pour tout ce qui n’est pas réglé par le présent décret.’.
Dans ce cadre, il appartient au bâtonnier de l’ordre des avocats et, en appel, au premier président, à qui une contestation d’honoraires est soumise d’apprécier, d’après les conventions des parties et les circonstances de la cause, le montant de l’honoraire dû à l’avocat.
En effet, selon l’article 10, alinéa 3, de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, dans sa version issue de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, applicable à l’espèce, ‘Sauf en cas d’urgence ou de force majeure ou lorsqu’il intervient au titre de l’aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, l’avocat conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés.’
Reste que le défaut de signature d’une convention ne prive pas l’avocat du droit de percevoir pour ses diligences, dès lors que celles-ci sont établies, des honoraires qui sont alors fixés en tenant compte selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci ( cf. Cass. 2ème Civ., 18 mai 2017, pourvoi n° 16-17.271, 2ème Civ., 29 juin 2017, pourvoi n° 16-18.459 et 2ème Civ., 14 juin 2018, pourvoi n° 17-19.709).
Il est constant que dans de telles circonstances et donc à défaut d’une telle convention réglant les honoraires revenant à l’avocat, l’évaluation qui doit être effectuée ne porte que sur le seul le travail réalisé et l’adéquation de celui-ci avec la nature et l’importance du dossier.
En effet, le juge de l’honoraire n’a pas le pouvoir d’apprécier le bien-fondé des diligences effectuées par l’avocat, sauf s’il est démontré que celles-ci auraient été manifestement inutiles.
En outre, dans le cadre de cette procédure spéciale, le bâtonnier et, sur recours, le premier président ou son délégataire, n’ont pas à connaître, même à titre incident, de la responsabilité de l’avocat à l’égard de son client, qui résulterait d’un manquement à l’un quelconque de ses devoirs.
Dès lors, ils ne peuvent pas être amenés à sanctionner un avocat à l’encontre duquel une faute est opposée. Ils ne peuvent pas davantage réparer un préjudice allégué par le client à raison du comportement de l’avocat.
Il en est notamment ainsi alors qu’est allégué un manquement de l’avocat à ses obligations d’informer sa cliente ( cf. Cass. 2ème Civ., 6 mai 2010, Bull. n 87 ; 2ème Civ., 10 juin 2010, n°09-11.914 ; 2ème Civ., 26 mai 2011, n° 10-12.728 ; 2ème Civ., 4 octobre 2012, n°11-23.642 , 2ème Civ., 6 mars 2014, n°13-15.513 ).
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Il n’est pas discuté que le recours formé par Mme [H] [Y] est recevable, pour avoir été intenté dans le délai requis, soit celui d’un mois à compter de la notification de la décision du bâtonnier attaquée, conformément aux prévisions de l’article 176 du décret du 27 novembre 1991 précité.
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Saisi par le courrier de Mme [H] [Y] évoqué ci-avant, le bâtonnier de l’ordre des avocats, après avoir recueilli les explications des parties, a rendu sa décision, à l’encontre de laquelle le présent recours a été formé, en retenant exactement :
‘A défaut de convention écrite entre les parties, les honoraires sont fixés conformément aux dispositions de l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971, modifiée par la loi du 10 juillet 1991, celles de l’article 10 du décret du 12 juillet 2005, de l’article 11.2 du règlement intérieur national, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de la notoriété et des diligences de celui-ci et, au regard des éléments sus-énoncés, des faits constatés ainsi que des diligences accomplies et vérifiées.
Madame [Y] reproche à Maître [T] des fautes professionnelles et des défauts de conseils qui l’ont conduit à engager une procédure inutile mais il convient de rappeler que le Bâtonnier n’est pas compétent pour apprécier les éventuelles fautes professionnelles commises par un avocat dans la mesure où seules les juridictions de l’ordre judiciaires sont compétentes pour statuer sur l’éventuelle responsabilité professionnelle d’un avocat dans le cadre de son activité et si la partie demanderesse est en mesure de rapporter la preuve d’une faute ce qui, en l’espèce, ne parait pas être le cas.
Il convient également de rappeler que le Bâtonnier n’est pas compétent pour apprécier et statuer sur les difficultés nées des relations professionnelles opposant un avocat et son client.
En revanche le Bâtonnier demeure compétent pour fixer les honoraires au regard des dispositions des décrets du 27 novembre 1991 et 12 juillet 2005.
Maître [T] justifie par les pièces versées aux débats avoir conseillé et être intervenue pour assister et représenter Madame [Y] dans les litiges suivants l’opposant à ses voisins
‘ Analyse de documents pour déterminer l’origine de la propriété de canalisations d’eau contestée par les occupants de l’immeuble :7 H
‘ Procédure de référé engagée par Monsieur [F] devant le TGI de Bastia avec incidents, suivis de procédure et préparation de conclusions : 11 H
‘ Réclamation ordinale dirigée contre Maître [T] à l’initiative de l’avocat adverse et finalement rejetée : 3 H
‘ Aspect pénal du décès du concubin de Madame [Y] : 3 H
‘ Diligences exécutées pour la seconde procédure de référé engagée à l’initiative de Madame [Y] avant dessaisissement de l’avocat :27 H
Ce nombre total d’heures, justifié par les pièces versées aux débats ne parait ni exagéré, ni excessif.
Maître [T] a ainsi facturé plus de 56 heures de prestations au taux horaire de 150 euros H.T. qui lui ont été réglées pour un montant de 16.800 euros T.T.C. et ce montant sera définitivement retenu pour la fixation des honoraires de la la Selarl DB avocats conseils.
Il n’apparaît pas équitable d’allouer aux parties l’indemnité par elles sollicitée au titre de l’article 700 du CPC.
Les frais de signification de la présente décision, s’il y a lieu, demeureront à la charge de la partie qui en prendra l’initiative’.
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A hauteur d’appel, Mme [H] [Y] a réitéré les prétentions qu’elle avait précédemment soumises au bâtonnier de l’ordre des avocats.
Comme l’a retenu à juste titre le bâtonnier de l’ordre des avocats, en l’absence de convention d’honoraires conclue entre les parties, les dispositions rappelées ci-avant trouvaient à s’appliquer, à savoir qu’il y a lieu de déterminer la rémunération de l’avocat en faisant application de l’article 10, alinéa 4 de la loi précitée du 31 décembre 1971, dans sa version applicable à l’espèce, aux termes duquel ‘Les honoraires tiennent compte, selon les usages, de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci.’.
Il s’ensuit qu’il y avait bien lieu en application de ces dispositions de procéder à une évaluation concrète portant sur le travail effectivement réalisé par l’avocat, en adéquation avec la nature et l’importance du dossier, pour apprécier le temps qui, raisonnablement, devait y être consacré, étant observé que le taux horaire résultant de l’accord des parties n’est pas discuté.
En premier lieu, Mme [H] [Y] considère que la décision du délégataire du bâtonnier serait entachée d’une erreur alors que le détail des diligences reprises correspond à 51 heures et non pas à 56 heures. Toutefois, force est d’observer que le dispositif de la décision du bâtonnier n’est pas équivoque à cet égard alors que celui-ci a fixé le montant total des honoraires à 16.800 euros.
De plus, Mme [H] [Y] élève des critiques concernant des diligences qui selon elles devraient être incontestablement retirées, soulignant qu’il revenait à l’avocat de rapporter la preuve de la réalité de ses diligences et d’alerter son client sur le coût de ses prestations et notamment un appel téléphonique.
Aussi, elle entend que soit écartée la facturation de 6 heures au titre des échanges téléphoniques.
Toutefois, il est constant que les relations entre le cabinet d’avocat situé à [Localité 4] et la cliente établie en Corse ont pris la forme de communications tant par voie électronique que téléphoniques.
Alors que le cabinet a évalué à 27 heures sur quatre ans le temps passé à ces échanges, il n’a facturé que 6 heures à ce titre à sa cliente, soit 1 heure 30 par an. Dans ces conditions et après avoir examiné les pièces produites, le temps ainsi facturé à hauteur de six heures pour quatre années en tout apparaît parfaitement proportionné à la réalité et à la complexité de l’affaire.
Mme [H] [Y] conteste encore un temps de 3 heures facturé au titre d’une procédure devant l’Ordre pour un litige avec un confrère ne pouvant permettre la facturation du client puisque le conseil est titulaire d’un simple mandat et qu’il sera bien évidemment dans l’incapacité de rapporter la preuve que Mme [H] [Y] a donné mandat de se défendre devant l’ordre pour une procédure à laquelle elle n’est pas partie.
Toutefois, il apparaît que l’incident ayant ainsi donné lieu à cette facturation résulte d’une plainte de Me [R], conseil de la partie adverse ( M. [F]) contre la Selarl DB avocats conseils, avocat de Mme [H] [Y] dans la procédure de référé, dont le caractère très conflictuel est constant.
Cette plainte a été adressée tant au bâtonnier de l’ordre des avocats de Bastia qu’au juge des référés saisi du litige et elle se fondait sur la prétendue méconnaissance par la Selarl DB avocats conseils de règles processuelles, soit celles prévues par les articles 15 et 16 du code de procédure civile, avant de donner lieu à un rejet et à une invitation à reprendre des rapports apaisés.
Les diligences ainsi facturées ne sauraient, dès lors, être considérées comme étrangères au mandat confié par Mme [H] [Y] à la Selarl DB avocats conseils, alors qu’au contraire, elles s’y rattachent directement.
Par ailleurs, Mme [H] [Y] conteste d’autres prestations au titre desquelles elle sollicite une diminution des honoraires.
Alors que Mme [H] [Y] soutient que son avocate aurait accompli des diligences décidées seule et sans accord, outrepassant son mandat, il sera constaté que celle-ci ne remet cependant pas en cause l’existence même du mandat de représentation en justice qu’elle a confié à la Selarl DB avocats conseils, professionnel du droit, tenu à un devoir de diligences.
Surtout, Mme [H] [Y] soulève la multiplicité des carences de la Selarl DB avocats conseils, notamment dans la vérification de la qualité de propriétaire de Mme [D] et afin de vérifier la réalité de l’état d’enclavement. Elle soutient encore l’existence d’un manquement de son avocat à son devoir d’information en ce que celui-ci ne l’a pas alertée des difficultés de la procédure. Elle lui reproche encore de ne pas avoir axé les demandes sur la réparation du chauffe-eau.
Elle en déduit que ce faisant, la Selarl DB avocats conseils a engagé sa cliente dans une procédure vouée à l’échec et partant totalement inutile, qui a eu pour conséquence l’absence de résolution du problème rencontré pour son chauffe-eau et sa condamnation à verser à chaque partie adverse la somme de 2.000 euros.
Néanmoins, de la sorte, Mme [H] [Y] articule divers griefs contre la Selarl DB avocats conseils, lesquels renvoient essentiellement à une problématique relevant du champ de la responsabilité civile dont seul le juge de droit commun peut connaître. Il doit ici être rappelé qu’il n’entre pas dans les pouvoirs du juge de l’honoraire de se prononcer sur une demande tendant à la réparation, par la voie de la diminution des honoraires ou de l’allocation de dommages et intérêts, de fautes professionnelles ou déontologiques éventuelles de l’avocat.
Quant au prétendu caractère vain allégué de la plus grande partie des diligences, celui-ci ne saurait se déduire de l’absence de succès, voire de l’échec de la procédure entreprise.
Il appartenait, en revanche, à Mme [H] [Y] de démontrer l’inutilité manifeste desdiligences critiquées, telle qu’elle épuise tout débat et toute discussion sur celle-ci.
Ainsi, Mme [H] [Y] soutient vainement qu’à l’occasion de la première procédure en référé afin d’obtenir notamment que soit ordonnée une mesure d’instruction, les conclusions responsives, dont la rédaction a été facturée pour cinq heures par son avocat, correspondraient à un travail inutile, au motif que les demandes n’ont pas abouti.
Et, c’est encore en vain que Mme [H] [Y] prétend, concernant la seconde procédure engagée devant le juge des référés aux mêmes fins, qu’en l’absence de nomination d’un administrateur provisoire, la demande servait simplement à pallier la carence dans la procédure à mettre en ‘uvre et qu’en l’absence d’intérêt à agir pour solliciter la nomination d’un géomètre-expert en charge d’établir les contours d’une copropriété, la demande de désignation au visa de l’article 145 du code de procédure civile était vouée à l’échec.
Aussi, de ce qui précède et en considération des pièces justificatives des diligences accomplies produites au débat, il apparaît que le montant de la rémunération à ce titre retenu par le bâtonnier de l’ordre des avocats est des plus raisonnables, au regard de la nature du litige et de sa complexité.
Par voie de conséquence, il convient de confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions.
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Sur les demandes accessoires
Les dépens seront mis à la charge de Mme [H] [Y], qui a échoué dans son recours.
En équité et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, il n’est pas justifié d’allouer d’indemnité au titre des frais irrépétibles.
Il y a lieu de rejeter le surplus des demandes
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, en dernier ressort, par ordonnance contradictoire, prononcée par mise à disposition au greffe,
Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions ;
Condamne Mme [H] [Y] aux dépens ;
Dit qu’en application de l’article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, la décision sera notifiée aux parties par le greffe de la cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception;
Rejette toute demande plus ample ou contraire des parties.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE