M. [O] [G] a confié à la SASU Art Escaliers la fabrication et la pose d’un escalier métallique en colimaçon et la pose d’un parquet flottant, pour des montants respectifs de 8.441,36 euros et 5.595,70 euros. Des désordres ont été signalés concernant ces travaux, entraînant un non-paiement total des sommes dues. Un protocole d’accord proposé par la SASU Art Escaliers a été refusé par M. [O] [G]. Ce dernier a ensuite sollicité une expertise qui a conclu à la responsabilité de la SASU pour des défauts de préparation et de pose. Une expertise contradictoire a été réalisée, mais aucun accord n’a été trouvé. M. [O] [G] a mis en demeure la SASU de lui rembourser 22.156,90 euros, puis a saisi le juge des référés, qui a condamné la SASU à verser une provision. D’autres expertises ont suivi, et M. [O] [G] a assigné la SASU Art Escaliers-Art Floor Design pour obtenir la reprise de l’escalier et le remboursement des sommes versées. Les demandes de M. [O] [G] incluent des arrhes, des dommages et intérêts, et des frais d’expertise, tandis que la SASU réclame le paiement d’un solde de facture et des frais d’expertise. L’affaire a été mise en délibéré après l’audience du 3 juillet 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUGEMENT DU : 18 Septembre 2024
DOSSIER N° : N° RG 22/02199 – N° Portalis DBZE-W-B7G-IILN
AFFAIRE : Monsieur [O] [G] C/ S.A.S.U. ART ESCALIERS – ART FLOOR DESIGN
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANCY
POLE CIVIL section 6
JUGEMENT
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
PRESIDENT : Madame Sandrine ERHARDT, Vice-Présidente
Statuant par application des articles 812 à 816 du Code de Procédure Civile, avis préalablement donné aux Avocats.
GREFFIER : Madame Emilie MARC
PARTIES :
DEMANDEUR :
Monsieur [O] [G], né le 24 février 1977 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]
représenté par Maître Anne-laure TAESCH de la SCP GASSE CARNEL GASSE TAESCH, avocats au barreau de NANCY, avocats plaidant, vestiaire : 11
DEFENDERESSE :
S.A.S.U. ART ESCALIERS – ART FLOOR DESIGN inscrit au RCS de METZ sous le n° 794 951 749, dont le siège social est sis [Adresse 3] agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié ès qualité audit siège
représentée par Maître Sébastien GRAILLOT de la SCP SEBASTIEN GRAILLOT AVOCAT, avocats au barreau de NANCY, avocats plaidant, vestiaire : 18
Clôture prononcée le : 04 juin 2024
Débats tenus à l’audience du : 03 juillet 2024
Date de délibéré indiquée par le Président : 18 septembre 2024
Jugement prononcé par mise à disposition au greffe du 18 septembre 2024
le
Copie+grosse+retour dossier : Maître Anne-laure TAESCH
Copie+retour dossier : Maître Sébastien GRAILLOT
Suivant devis en date du 21 mai 2016, M. [O] [G] a confié à la SASU Art Escaliers-Art Floor Design (ci-après la SASU Art Escaliers) la fabrication et la pose d’un escalier métallique en colimaçon dans son habitation située [Adresse 1] pour un montant total de 8.441,36 euros TTC.
Suivant devis en date du 14 juin 2016, M. [O] [G] a également confié à la SASU Art Escaliers la pose d’un parquet flottant pour un montant total de 5.595,70 euros TTC.
Les travaux concernant l’escalier n’ont pas été réglés dans leur totalité, M. [O] [G] se plaignant de désordres affectant tant l’escalier que le parquet.
Le 11 juillet 2017, la SASU Art Escaliers a adressé un protocole d’accord à M. [O] [G], lequel l’a refusé le 02 septembre 2017.
M. [O] [G] a saisi son assurance protection juridique qui a mandaté le cabinet Sieler Experts aux fins de réaliser une expertise. Les opérations d’expertise se sont déroulées hors la présence de la SASU Art Escaliers. Le rapport d’expertise daté du 29 décembre 2017 concluait en l’engagement de la responsabilité de la SASU Art Escaliers en raison d’une préparation inadaptée du sol à la pose du parquet et d’une pose inadaptée de l’escalier.
La SASU Art Escaliers a, quant à elle, saisi son assureur qui a fait réaliser une expertise par le cabinet Cunningham Lindsey, laquelle s’est déroulée le 18 juillet 2018 en présence du cabinet Sieler, expert de M. [O] [G]. Le rapport contenait une proposition d’accord de la SASU Art Escaliers. Par mail du 08 août 2018 adressé au cabinet Cunningham Lindsey, M. [O] [G] a formulé une contre proposition.
Aucun accord n’a finalement été trouvé.
Se fondant sur le rapport du cabinet Sieler Experts, M. [O] [G] a, par l’intermédiaire de son expert, mis en demeure, le 17 décembre 2018, la SASU Art Escaliers de lui régler la somme de 22.156,90 euros TTC, comprenant le remboursement des arrhes versés pour l’escalier d’un montant de 5.936,57 euros TTC.
Puis, M. [O] [G] a saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Metz, lequel par décision du 14 mai 2019, a condamné la SASU Art Escaliers, et non la SASU Art Escaliers-Art Floor Design, à verser à ce dernier une provision de 15.641,60 euros, ce qui a conduit M. [O] [G] à saisir de nouveau le juge des référés.
Par ordonnance du 08 octobre 2019, la demande de versement d’une provision formée à l’encontre de la SASU Art Escaliers-Art Floor Design était rejetée et une mesure expertise était confiée par le juge des référés du tribunal judiciaire de Metz à M. [V] [W].
L’expert a déposé son rapport le 07 octobre 2020.
M. [O] [G] a ensuite eu recours à l’expertise de M. [U] qui, après avoir réalisé ses constats hors la présence de la SASU Art Escaliers, a établi un rapport technique le 21 mars 2022.
Par acte d’huissier de justice en date du 03 août 2022, M. [O] [G] a fait assigner devant le présent tribunal la SASU Art Escaliers-Art Floor Design aux fins d’obtenir sa condamnation principalement à reprendre l’escalier et lui restituer la somme versée.
Par dernières conclusions transmises par voie électronique le 25 janvier 2024, M. [O] [G] sollicite, au visa de l’article 1231-1 du code civil, de condamner la SASU Art Escaliers à déposer ou faire déposer à ses frais l’escalier litigieux après concertation pour la fixation de la date de reprise sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai d’un mois à compter de la signification de la décision et de lui payer les sommes suivantes :
– 5.936,57 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 17 décembre 2018 au titre des arrhes versés
– 2.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice moral
– le coût de l’expertise de M. [U]
– 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
ainsi qu’aux entiers dépens comprenant les frais d’expertise judiciaire, le tout sous le bénéfice de l’exécution provisoire.
Par dernières conclusions transmises par voie électronique le 15 avril 2024, la SASU Art Escaliers sollicite de débouter M. [O] [G] de ses demandes et de le condamner à lui payer les sommes suivantes :
– 2.141,36 euros au titre du solde de la facture due pour l’escalier
– 2.000 euros au titre des frais d’expertise
– 3.600 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens de l’instance en ce compris ceux de la procédure de référé.
Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 04 juin 2024. L’affaire a été appelée à l’audience du 03 juillet 2024. Après des dépôts des dossiers de plaidoirie, la décision a été mise en délibéré pour être rendue le 18 septembre 2024.
Sur la responsabilité contractuelle de la SASU Art Escaliers
M. [O] [G] fonde ses réclamations sur la responsabilité contractuelle de l’entrepreneur.
En application de l’article 1231-1 du code civil (ancien article 1147 du code civil), le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.
En l’espèce, il est à noter que le litige ne porte que sur les désordres allégués par M. [O] [G] affectant l’escalier métallique en colimaçon fabriqué et posé par la SASU Art Escaliers.
Il résulte des échanges entre la SASU Art Escaliers et M. [O] [G] que ce dernier a manifesté une volonté non équivoque de ne pas réceptionner les travaux.
Dans ces conditions, la SASU Art Escaliers est susceptible de voir sa responsabilité contractuelle engagée et est à ce titre tenue à l’obligation de résultat de fournir une prestation exempte de vice.
La SASU Art Escaliers reconnaît qu’elle devait fixer l’escalier au sol par percement avec scellement chimique, arguant qu’elle en a été empêchée par M. [O] [G].
La SASU Art Escaliers évoque ainsi la propre turpitude de M. [O] [G] pour obtenir le paiement du solde des travaux de l’escalier.
D’une part, il résulte de la chronologie figurant dans un courrier adressé le 02 septembre 2017 à l’entreprise la SASU Art Escaliers par M. [O] [G] que ce dernier a permis l’intervention à plusieurs reprises de l’entreprise à son domicile pour la reprise de l’escalier en 2016-2017.
Ces multiples interventions ont eu lieu dans un contexte particulier, dès lors que l’épouse de M. [O] [G] était enceinte, ce qui constitue indéniablement un motif de tension, ayant pu générer un refus d’intervention ultérieure de l’entreprise.
Par ailleurs, la confiance en l’entreprise a pu s’émousser au fil des mois, en raison de l’absence de résultat probant des reprises de peinture malgré les multiples intervention de l’entreprise, ce qui a été confirmé par l’expert, et alors que la réclamation de M. [O] [G] ne portait pas uniquement sur un problème de finition de l’escalier, mais sur l’ensemble des travaux réalisés par la SASU Art Escaliers en ce compris ceux portant sur le parquet.
Il résulte enfin des échanges de mail sur la fin de l’année 2018 que M. [O] [G] avait accepté la proposition d’accord de la SASU Art Escaliers concernant l’escalier qui n’était pas celle de permettre une ultime intervention de l’entreprise, mais de rembourser l’acompte versé et de déposer l’escalier. A cet égard, la SASU Art Escaliers avait indiqué consentir exceptionnellement au démontage et à la livraison de l’escalier par une autre société, comprenant la position de M. [O] [G]. Le point d’achoppement portait sur les autres points de l’accord concernant le parquet.
Dans ces conditions, la SASU Art Escaliers ne saurait invoquer le refus d’intervention par M. [O] [G] comme constitutif d’une force majeure l’exonérant de son obligation de résultat de fournir un escalier exempt de vice.
L’expert judiciaire a relevé que la fixation du fût de l’escalier est inadaptée, l’étude du système de fixation étant insuffisante et mal adaptée aux contraintes générées par un cycle de montée et descente. Il a noté qu’un pied de renfort sous la première marche aurait été recommandé. Il a observé que les visseries étaient sous dimensionnées et que le fût est mis en place sur support de faux niveau, outre l’inesthétisme de l’assemblage des trois parties du fût, des soudures et de la mise en peinture.
La SASU Art Escaliers ne conteste pas l’absence de fixation du pied de l’escalier, relevée par l’expert judiciaire et par M. [U], lequel reprend pour une grande part les conclusions de ce dernier.
Dans ces conditions, la SASU Art Escaliers engage sa responsabilité contractuelle.
M. [O] [G] sollicite la réparation proposée par la SASU Art Escaliers dans le protocole d’accord, soit déposer ou faire déposer l’escalier aux frais de cette dernière et obtenir le remboursement de l’acompte de 5.936,57 euros versé.
Cette réparation n’apparaît pas disproportionnée, alors que le cabinet Sieler et M. [U] l’ont préconisée, outre le fait que la SASU Art Escaliers l’avait jugée, dans le cadre d’un accord amiable, acceptable.
Dans ces conditions, il sera fait droit à la demande de M. [O] [G], dans les conditions précisées au dispositif de la présente décision et la SASU Art Escaliers sera déboutée du paiement du solde de sa facture.
M. [O] [G] ne démontre pas l’existence d’un préjudice moral, alors qu’il aurait pu accélérer le règlement de ce litige en acceptant une résolution partielle amiable concernant le seul volet de l’escalier.
Il sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts.
S’agissant du paiement de l’expertise de M. [U], outre le fait que son coût n’est pas déterminé et qu’elle a été réalisée non contradictoirement après le dépôt du rapport de l’expertise judiciaire, elle n’était pas indispensable à la solution du litige, dès lors qu’elle a confirmé les conclusions de l’expert judiciaire.
Dans ces conditions, M. [O] [G] conservera la charge de ce coût.
Sur les demandes accessoires
Aux termes de l’article 696 du Code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, partie perdante, la SASU Art Escaliers supportera la charge des entiers dépens, comprenant ceux de la procédure de référé et incluant les frais d’expertise judiciaire.
Aux termes de l’article 700 du Code de procédure civile, dans toutes les instances le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent.
Il est équitable que la SASU Art Escaliers soit condamnée à payer à M. [O] [G] une indemnité de 1.500 euros en compensation des frais, non compris dans les dépens, qu’il a du exposer pour sa défense.
Partie tenue aux dépens et partie perdante, la SASU Art Escaliers ne peut prétendre à une indemnité au titre des frais irrépétibles. Sa demande doit être rejetée.
L’article 514 du code de procédure civile applicable aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020 dispose que les décisions de première instance sont de droit exécutoires à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.
Il n’existe pas d’éléments de nature à écarter l’exécution provisoire de droit de la présente décision.
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe et susceptible d’appel :
Condamne la SASU Art Escaliers-Art Floor Design à déposer ou faire déposer à ses frais l’escalier litigieux en concertation avec M. [O] [G] pour convenir d’une date de reprise, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision, et ce pendant une durée de 60 jours ;
Condamne la SASU Art Escaliers-Art Floor Design à payer à M. [O] [G] la somme de 5.936,57 euros au titre de l’acompte, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;
Condamne la SASU Art Escaliers-Art Floor Design à payer à M. [O] [G] la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SASU Art Escaliers-Art Floor Design aux entiers dépens, comprenant ceux de l’instance en référé, outre les frais de l’expertise judiciaire ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
Dit n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de droit attachée à la présente décision.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 18 septembre 2024, le présent jugement étant signé par la présidente et la greffière.
LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE