Responsabilité contractuelle et obligations de l’entrepreneur en matière de réception des travaux et de garantie de parfait achèvement

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Responsabilité contractuelle et obligations de l’entrepreneur en matière de réception des travaux et de garantie de parfait achèvement

M. [L] [C] et Mme [B] [C] ont entrepris la construction d’une maison sur leur terrain, engageant plusieurs entreprises pour des études et des travaux. La réception des travaux a eu lieu le 7 mars 2017 avec des réserves concernant l’étanchéité du sous-sol. Les époux ont ensuite fait réaliser des travaux supplémentaires à leurs frais et ont mis en demeure la société de construction de lever les réserves. Un expert amiable a été désigné, confirmant des désordres liés à des malfaçons. Les époux ont assigné le maître d’œuvre et la société de construction en justice pour obtenir des dommages-intérêts. Par la suite, des actions en garantie ont été engagées entre les différents intervenants. Les époux demandent réparation pour les désordres affectant le sous-sol, tandis que les défendeurs contestent les responsabilités et les préjudices allégués. La procédure est en cours, avec une audience de plaidoirie prévue pour avril 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

19 septembre 2024
Tribunal judiciaire d’Orléans
RG
19/00669
N° RG 19/00669 – N° Portalis DBYV-W-B7D-FEZM – décision du 19 Septembre 2024

ST/ N° de minute :

TRIBUNAL JUDICIAIRE D’ORLÉANS

JUGEMENT DU 19 SEPTEMBRE 2024

N° RG 19/00669 – N° Portalis DBYV-W-B7D-FEZM

DEMANDEURS :

Monsieur [L] [C]
Né le 30 Mai 1961 à [Localité 12] (HAUTE VIENNE)
Nationalité Française
Demeurant [Adresse 2] – [Localité 7]

Madame [B] [C] née [R]
Née le 21 Novembre 1961 à [Localité 11] (SARTHE)
Nationalité Française
Demeurant [Adresse 2] – [Localité 7]

Représentés par Maître Antonio DA COSTA de la SELARL DA COSTA-DOS REIS, avocat au barreau d’ORLEANS

DÉFENDEURS :

La SARL MENEAU GERIN
Immatriculée au RCS d’ORLEANS sous le N° B 433 301 504
Dont le siège social est sis [Adresse 15] – [Localité 4]
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

Représentée par Maître Edouard BARBIER SAINT HILAIRE de la SELARL BERGER-TARDIVON-GIRAULT-SAINT-HILAIRE, avocat au barreau d’ORLEANS

La SARL ASSURNETT
Immatriculée au RCS d’ORLEANS sous le N° B 411 492 572
Dont le siège social est sis [Adresse 8] – [Localité 6]
Agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Angeline PARIS de la SELARL NADAUD DEBEAUCE PARIS, avocat postulant au barreau d’ORLEANS, Maître Béatrice LOUPPE de la SELARL KL2A, avocat plaidant au barreau de PARIS

Monsieur [K] [X]
Né le 11 Février 1953 à [Localité 13]
Nationalité Française
Demeurant [Adresse 1] – [Localité 6]

Représenté par Maître Angeline PARIS de la SELARL NADAUD DEBEAUCE PARIS, avocat postulant au barreau d’ORLEANS, Maître Béatrice LOUPPE de la SELARL KL2A, avocat plaidant au barreau de PARIS

Copies exécutoires le : Copies conformes le :
à : à :

Monsieur [I] [J]
Né le 15 Mars 1963 à [Localité 14]
Nationalité Française
Demeurant [Adresse 9] – [Localité 5]

Représenté par Maître Michel-Louis COURCELLES de la SCP PACREAU COURCELLES, avocat au barreau d’ORLEANS

La SARL 3D CONSTRUCTION
Immatriculée au RCS d’ORLEANS sous le N° 509 307 435
Dont le siège social est sis [Adresse 10] – [Localité 3]
Agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Magalie CASTELLI MAURICE, avocat au barreau d’ORLEANS

DÉBATS : à l’audience publique du 04 Avril 2024,

Puis, la Présidente de l’audience a mis l’affaire en délibéré et dit que le jugement serait prononcé le 06 Juin 2024 par sa mise à disposition au greffe de cette juridiction.

Le délibéré a été prorogé au 19 Septembre 2024.

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Madame Bénédicte LAUDE
Assesseur : Madame Sylvie RAYMOND
Assesseur : Monsieur Sébastien TICHIT
Greffier : Madame Heimaru FAUVET

EXPOSE DU LITIGE

En vue de la construction d’une maison d’habitation sur leur terrain situé [Adresse 2] [Localité 7], M. [L] [C] et Mme [B] [C] née [R] (ci-après « les époux [C] ») ont :
fait réaliser une étude thermique par la société EKO’HOME le 5 octobre 2015 ; signé un contrat de maîtrise d’œuvre avec M. [I] [J] le 9 octobre 2015 ; confié les travaux de construction à la SARL 3D CONSTRUCTION, par devis en date du 22 juillet 2015, accepté le 5 janvier 2016 ; fait réaliser une étude de sols par la société GINGER CEBTP le 20 janvier 2016.
La déclaration d’ouverture de chantier a été effectuée le 5 février 2016.

La réception des travaux a été prononcée le 7 mars 2017 avec réserves, dont : « reprise de l’ensemble de l’étanchéité du VS [vide sanitaire] et cave. Travaux achevés pour le mardi 15 mars 2017 (3D CONSTRUCTION) ».

Les époux [C] ont fait réaliser à leurs frais la pose d’un drain par l’entreprise MENEAU GERIN en mars 2017.

Selon courrier en date du 24 août 2017, les époux [C] ont mis en demeure la SARL 3D CONSTRUCTION de lever les réserves non levées.

Les époux [C] ont, de manière unilatérale, fait appel à un expert amiable (M. [U]) qui a rendu un rapport, aux termes d’opérations contradictoires, le 6 juin 2018.

Par actes séparés en date des 19 et 20 mars 2019, les époux [C] ont fait assigner M. [I] [J] et la SARL 3D CONSTRUCTION devant le Tribunal judiciaire d’Orléans aux fins de condamnations à des dommages-intérêts résultant des réserves non levées (RG 19/699).

Par actes séparés en date des 18 et 19 décembre 2019, M. [I] [J] a fait assigner la SARL ASSURNETT et la SARL MENEAU GERIN devant le Tribunal judiciaire d’Orléans aux fins de garantie (RG 20/221).

Par décision en date du 12 février 2020, le juge de la mise en état a prononcé la jonction des instances RG 19/699 et RG 20/221.

Par acte en date du 6 janvier 2022, M. [I] [J] a fait assigner M. [K] [X] devant le Tribunal judiciaire d’Orléans aux fins de garantie (RG 22/124).

Par ordonnance en date du 15 avril 2022, le juge de la mise en état a prononcé la jonction des instances RG 19/699 et RG 22/124.

Suivant conclusions, notifiées par RPVA le 9 janvier 2024, M. [L] [C] et Mme [B] [C] née [R] sollicitent, sur le fondement des articles 1147 et suivants du code civil et des articles 1231-1 et suivants du code civil, de :
Juger que Monsieur [J] et la SARL 3D CONSTRUCTION ont engagé leur responsabilité professionnelle respective au titre des désordres affectant le sous-sol de l’immeuble des époux [C].Condamner in solidum Monsieur [J] et la SARL 3D CONSTRUCTION et, le cas échéant, leurs assureurs respectifs à payer à Monsieur et Madame [C] les sommes suivantes :35.225,86 € TTC au titre des travaux de réparation avec indexation sur l’indice du coût de la construction, l’indice de référence étant le dernier publié au jour du rapport d’expertise.100 € par mois en réparation de leur préjudice de jouissance à compter de la date de la réception le 7 mars 2017, jusqu’à la réalisation des travaux de réparation. Le Tribunal liquidera provisoirement ce poste de préjudice au jour du jugement et condamnera les parties déclarées responsables à régler la somme correspondante à valoir sur l’indemnisation définitive.1.500,00 € en réparation du préjudice moral.8.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du CPC intégrant le coût de l’expertise amiable.Condamner Monsieur [J] à rembourser à Monsieur et Madame [C] la somme de 2.450,00 € TTC correspondant aux travaux qu’il avait inutilement préconisés avec intérêts de retard au taux légal à compter du jugement à intervenir.Condamner in solidum les défendeurs aux entiers dépens et accorder à la SELARL DA COSTA – DOS REIS le droit prévu par l’article 699 du CPC.
Au soutien de leurs prétentions, les époux [C] exposent que :
L’expert amiable, après avoir accompli sa mission au contradictoire des parties, a confirmé la réalité de désordres en ayant constaté la présence avérée d’humidité dans le sous-sol (traces de moisissure) et en soubassement des murs du vide sanitaire, ce qui n’a jamais été remis en cause par les parties puis confirmé par l’expert de la société TEXA ; Selon l’expert, les désordres ont plusieurs origines, à savoir d’une part des malfaçons et non conformités aux règles de l’art imputables à la SARL 3D CONSTRUCTION (absence de mise en œuvre d’un sous enduit sous le produit bitumeux devant assurer l’étanchéité ; absence de mise en œuvre de calcaire alors que cette prestation figurait au devis ; insuffisance de ventilation du vide sanitaire et du sous-sol favorisant l’humidité), et d’autre part, des manquements imputables au maître d’œuvre, Monsieur [J] (suivi insuffisant du chantier ; défaut de préconisation d’un drain périphérique résultant d’un défaut de prise en compte des résultats de l’étude de sol ; défaut d’assistance du maître d’ouvrage pour la levée des réserves signalées à la réception) ; les époux [C] avaient exigé un sous-sol étanche pour pouvoir y stocker des meubles anciens et pour l’utiliser en tant que salle de sport ; le permis de construire accordé aux époux [C] mentionne que le sous-sol, qui représente 52 m² devait être traité comme une pièce habitable à l’exclusion des 8 m² destinés à abriter la cave ;contrairement à ce que soutiennent les défendeurs, l’accès au sous-sol se fait par un escalier en béton construit par la société 3D CONSTRUCTION et non par une trappe ; dans ces conditions, Monsieur [J] et la société 3D CONSTRUCTION ne peuvent soutenir que les époux [C] ont modifié la destination de la cave à leur insu.
Sur les responsabilités, les époux [C] soutiennent, s’agissant de la SARL 3D CONSTRUCTION, que :
La société 3D CONSTRUCTION avait soutenu avoir utilisé un produit de marque PAREX LANKO type 201 LANKOBLACK directement appliqué sur le parpaing, alors que le rapport du cabinet TEXA indique que le produit utilisé était de type « FLINKOT » qui nécessitait la mise en œuvre d’un sous enduit sous le produit bitumeux devant assurer l’étanchéité du soubassement des murs extérieurs ce qui n’a pas été réalisé par la société 3D CONSTRUCTION ; alors que la pose d’un film polyane figurait au devis, l’expert a constaté que cette prestation n’avait pas été réalisée, de l’aveu même de la société 3D CONSTRUCTION qui n’a pas obtenu l’aval des maîtres d’ouvrage pour effectuer cette modification ; ces désordres ont été signalés lors de la réception et n’ont pas été levés, de sorte que l’entrepreneur, la société 3D CONTRUCTION, doit remédier aux imperfections et malfaçons, et que les maîtres d’ouvrage sont autorisés à engager la responsabilité contractuelle de droit commun du constructeur, sans que celui-ci puisse lui opposer la prescription annale de la garantie de parfait achèvement.
S’agissant de M. [I] [J], les époux [C] font valoir que :
au stade de l’expertise, Monsieur [J] avait admis sa responsabilité ; le maitre d’œuvre demeure débiteur d’une obligation d’assistance à l’égard du maître de l’ouvrage jusqu’à la levée des réserves, et que M. [J] n’a rien fait à ce titre, en laissant le maitre d’ouvrage se « débrouiller seul » avec la société 3D CONSTRUCTION ; la responsabilité du maître d’œuvre pour manquement à son devoir de conseil est aussi engagée puisqu’il aurait dû vérifier que la société 3D CONSTRUCTION avait bien mis en œuvre dans le respect des règles de l’art tous les moyens de protection préconisés par les normes techniques ; M. [I] [J] reconnaît qu’il a négligé les conclusions de l’étude de sol en s’abstenant de préconiser l’installation d’un drainage périphérique pour protéger les parties enterrées de la construction.
Au stade des préjudices, les époux [C] soutiennent que :
Les travaux de réparation sont détaillés dans le rapport d’expertise ; Ils sont aussi fondés à réclamer la condamnation de Monsieur [J] à leur rembourser les travaux de pose d’un drain en façade nord par l’entreprise MENEAU GERIN, qui ont été déclarés inefficaces par l’expert ; Ils supportent aussi un préjudice de jouissance, puisqu’ils ne sont toujours pas en mesure d’utiliser ce sous-sol pour les usages prévus ; Ils subissent un préjudice moral.

Aux termes de conclusions, notifiées par RPVA le 10 janvier 2024, M. [I] [J], demande, sur le fondement des articles 1792 et suivants, 1134 ancien et suivants, 1231-1 et suivants du code civil, de :

AU PRINCIPAL
DÉBOUTER Monsieur et Madame [L] [C] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions.CONDAMNER Monsieur et Madame [L] [C] aux dépens.
SUBSIDIAIREMENT, POUR LE CAS OÙ LA DEMANDE DE MONSIEUR ET MADAME [L] [C] SERAIT RETENUE,
CONDAMNER la Société 3D CONSTRUCTION et la Société MENEAU GÉRIN à garantir intégralement Monsieur [I] [J] (et très subsidiairement à hauteur de 90 %) du montant des condamnations prononcées au profit de Monsieur et Madame [L] [C] en principal, intérêts, frais et dépens.DÉCLARER Monsieur [I] [J] recevable et bien-fondé en son action en responsabilité à l’encontre de la Société ASSURNETT et de Monsieur [K] [X] exerçant à l’enseigne CABINET [K] [X].CONDAMNER la Société ASSURNETT solidairement avec Monsieur [K] [X], exerçant à l’enseigne CABINET [K] [X], à garantir Monsieur [I] [J] de toutes sommes qui resteraient définitivement à sa charge en principal, intérêts, frais et dépens.CONDAMNER tous succombants (à l’exception de Monsieur et Madame [L] [C]) à verser à Monsieur [I] [J] la somme de 5 000.00 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, et aux dépens.
S’agissant du rapport de M. [U], M. [I] [J] soutient que :
ce rapport a été commandé par les époux [C] et ne constitue pas un rapport d’expertise judiciaire ; les rapports précédents et tout particulièrement de celui d’IXI mandaté par la Société AXA FRANCE IARD, assureur de la Société 3D CONSTRUCTION, n’ont pas été communiqués à M. [U] ; le rapport d’IXI indique que la SARL 3D CONSTRUCTION a de nouveau appliqué un enduit bitumineux en surépaisseur de celui existant, et qu’elle serait de nouveau intervenue après la réception du 14 mars 2017 ; M. [U] n’a pas été mis en mesure d’examiner et apprécier les devis communiqués par les demandeurs, ce qui en limite la portée.
Sur la nature des désordres allégués par les demandeurs, M. [I] [J] fait valoir que :
l’arrêté du permis de construire n’établit aucunement que le sous-sol se voyait conférer, et autoriser, la destination de pièces à vivre (et notamment de salle de sport) ; les infiltrations relatées par les demandeurs relèvent d’un phénomène exceptionnel intervenu en 2016 ;l’expert du cabinet TEXA indique ne pas avoir constaté d’infiltrations lors de sa visite ; la SARL 3D CONSTRUCTION conteste l’analyse des demandeurs et justifie avoir utilisé un produit bitumineux de marque SIKA ;l’expert du cabinet TEXA avait noté que la SARL 3D CONSTRUCTION avait accepté de repasser des couches d’étanchéité après réception, ce qui a été confirmé par l’expert mandaté par AXA France IARD ; les demandeurs ont procédé à un changement de destination du sous-sol ; les locaux en sous-sol, de catégorie 2 selon les normes en vigueur, tolèrent une certaine humidité à la différence des pièces d’habitation, comme l’expert d’AXA France IARD l’a indiqué ;il s’évince de ce qui précède qu’il n’existe aucune dommage en relation avec la destination du sous-sol tel qu’il fut déclaré et autorisé par l’arrêté de permis de construire.Aux termes de conclusions, notifiées par RPVA le 6 novembre 2023, la SARL 3D CONSTRUCTION demande de :

DEBOUTER Monsieur et Madame [C] de l’ensemble de leurs demandes formées à l’encontre de la SARL 3D CONSTRCUTION
A tout le moins, si le tribunal ne s’estimait pas suffisamment éclairé, et avant dire droit, ORDONNER une mesure d’expertise et DESIGNER pour y procéder tel expert qu’il plaira de commettre selon pour mission détaillée dans ces conclusions
En tout état de cause,
CONDAMNER Monsieur et Madame [C] à verser à la SARL 3D CONSTRUCTION la somme de 4.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du CPC. CONDAMNER Monsieur et Madame [C] aux entiers dépens de la procédure et accorder à Maître CASTELLI-LAURICE le droit prévu par l’article 699 du CPC
Sur la responsabilité, la SARL 3D CONSTRUCTION soutient que :
fondant leur action à l’encontre de la SARL 3D CONSTRUCTION sur le fondement de la responsabilité contractuelle des constructeurs après réception, il appartient aux demandeurs d’établir et de démontrer : une faute du constructeur, un dommage et un lien de causalité entre la faute et le dommage ;or, le rapport de monsieur [U] ne peut à lui seul établir cette responsabilité contractuelle après réception, puisqu’il ne respecte pas le principe du contradictoire et qu’il est contredit par les conclusions du rapport dressé par l’expert désigné par son assureur AXA. la SARL 3D CONSTRUCTION a utilisé des produits de la marque SIKA de sorte qu’il n’existe pas de manquements aux règles de l’art il n’a jamais été prévu que le sous-sol soit destiné à accueillir une salle de sport d’autant que le permis de construire indique seulement la présence d’un sous-sol et d’une cave avec un sol en terre battue sous le garage ainsi qu’un vide-sanitaire, et que dans ces conditions elle a respecté le DTU 20.1 pour un sous-sol en cave et un vide sanitaire ; si la pose d’un film polyane n’a finalement pas été facturée, les époux [C] ont accepté et réglé la facture en déduction de ce film, étant précisé que la SARL 3D CONSTRUCTION a posé un béton hydrofuge ne nécessitant pas la pose d’un film polyane.
Aux termes de conclusions, notifiées par RPVA le 5 septembre 2023, la SARL ASSURNETT et Monsieur [K] [X] demandent, sur le fondement de l’article 1353 du code civil, de :
A titre principal, débouter Monsieur [J] et toute partie de toute demande formulée à l’encontre de la SARL ASSURNETT et de Monsieur [X]; A titre subsidiaire, écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir ; En tout état de cause, condamner Monsieur [J] ou tout succombant aux dépens et à payer à la SARL ASSURNETT la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Aux termes de conclusions, notifiées par RPVA le 5 septembre 2023, la SARL MENEAU GERIN demande, sur le fondement des articles 1792, 1382 ancien devenu 1240, 1134 ancien devenu 1231 du code civil, de :
Débouter Monsieur [J] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions dirigées à l’encontre de la SARL MENEAU GERIN.
Subsidiairement :
Ordonner un partage de responsabilité en laissant à Monsieur [J] 90 % de celle-ci et une part résiduelle de 10 % pour la société MENEAU GERIN. Condamner Monsieur [J] à payer à la SARL MENEAU GERIN la somme de 2.500 € au titre des frais irrépétibles. Le condamner également aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Edouard SAINT-HILAIRE, membre de la SELARL BERGER – TARDIVON – GIRAULT – SAINT-HILAIRE avocat aux offres de droit.
Il y a lieu de se référer aux conclusions susvisées pour un examen complet des moyens et prétentions des parties en application des dispositions des articles 455 et 768 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction est intervenue le 17 janvier 2024, par une ordonnance du même jour, avec fixation d’une audience de plaidoirie au 4 avril 2024. La décision a été mise en délibéré au 6 juin 2024, prorogé au 19 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L’ensemble des parties est représenté à l’instance. La décision sera donc contradictoire.

Sur la responsabilité de la SARL 3D CONSTRUCTION
Selon les alinéas 1 et 2 de l’article 1792-6 du code civil, « la réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l’amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.
La garantie de parfait achèvement, à laquelle l’entrepreneur est tenu pendant un délai d’un an, à compter de la réception, s’étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l’ouvrage, soit au moyen de réserves mentionnées au procès-verbal de réception, soit par voie de notification écrite pour ceux révélés postérieurement à la réception. »

En vertu de l’article 1147 du code civil, dans sa version applicable au litige, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

En application de ces textes lorsque des désordres sont réservés à la réception, l’obligation de résultat de l’entrepreneur persiste jusqu’à la levée des réserves. Ainsi, l’action en responsabilité contractuelle à l’égard du constructeur est recevable, quand bien même le délai de la garantie de parfait achèvement est expiré.

Dans ces circonstances, la charge de la preuve s’en trouve allégée au profit du maître de l’ouvrage, qui doit démontrer que la prestation accomplie ne correspond pas à celle promise dans le contrat de louage d’ouvrage, sans avoir à établir une faute du constructeur.

En vertu de l’article 16 du code de procédure civile, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties, peu important qu’elle l’ait été en présence de celles-ci.

En l’espèce, le devis signé et accepté (pièce n°12) prévoyait, pour le sous-sol, « façon d’un enduit bitumineux étanche de type Flinkoat sur murs extérieurs ».

Le procès-verbal de réception mentionnait la réserve suivante : « reprise de l’ensemble de l’étanchéité du VS [vide sanitaire] et cave ».

Les époux [C] soutiennent, rapport d’expertise non-judiciaire de M. [U] à l’appui (pièce n°7) que le sous-sol présenterait des infiltrations alors que la cave avait pour objet d’accueillir une salle de sport.

Selon cet expert, les désordres constatés auraient pour origine :
« Une absence de sous enduit sous le produit bitumeux (règle de l’art, DTU et fiche technique du produit employé) ; absence de calcaire et de polyane sous la dalle du sous-sol (règle de l’art, et non-respect du devis et facture de la société 3D Construction) ; mauvaise ventilation du vide sanitaire et du sous-sol (règle de l’art ; DTU) ; absence de drain périphérique »
Toutefois, les défendeurs rapportent des éléments venant contredire ce rapport d’expertise non-judiciaire, notamment grâce à un rapport de l’expert de l’assurance de M. [I] [J] ayant la même valeur probatoire que celui-ci (pièce n°4), qui indique que :
« les murs périphériques du sous-sol sont réalisés en parpaings semi pleins qui sont revêtus d’un enduit FLINKTOATE en deux couches croisées. Nous rappelons que de multiples interventions ont été réalisées avant et après réception sur cet enduit bitumineux » ; « il n’a pas été constaté des infiltrations alléguées par le tiers lésé » bien qu’il ait été « constaté des traces d’humidité non perlantes sur les murs enterrés qui se révèlent être compatibles avec la destination des locaux (local de catégorie 2 au sens du DTU 20.1). Cette humidité est à mettre en relation avec la faible ventilation du sous-sol. »« en l’état de nos observations, il n’y a pas lieu de considérer de remèdes dans la mesure où l’apparition de traces d’humidité est compatible avec les locaux présents en sous-sol. »
En particulier, au vu de la seule demande de permis de construire, les maîtres d’ouvrage échouent à rapporter la preuve qu’ils avaient informé leur cocontractant de la destination spécifique de la cave en salle de sport, ce qui en ferait un élément de catégorie 1 selon le DTU 20.1, alors qu’en l’état il s’agit d’un local de catégorie 2, voire 3 selon ce DTU, ce qui suppose des tolérances d’étanchéité moindres (Pièce de la SARL 3D CONSTRUCTION n°8).

Dès lors, en se fondant uniquement sur le rapport d’expertise non-judiciaire de M. [U], non-corroborés par d’autres éléments de preuve, les demandeurs échouent à rapporter la preuve que la SARL 3D CONSTRUCTION n’a pas réalisé une cave et un vide sanitaire qui ne présenteraient pas l’étanchéité conforme aux ouvrages.

Dans ces conditions, la demande de condamnation dirigée par les époux [C] contre la SARL 3D CONSTRUCTION sera rejetée.

II. Sur la demande de condamnation de M. [I] [J]

En vertu de l’article 1147 du code civil, dans sa version applicable au litige, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

En application de cet article, l’architecte qui a reçu une mission complète a une obligation générale qui naît du contrat et qui relève de sa technicité. Il est notamment tenu d’une obligation de renseignement et de conseil, et d’un devoir d’assistance auprès du maître d’ouvrage.

En l’espèce, bien que le maître d’œuvre soit tenu à un devoir d’assistance pour la réception des travaux (p.4 du contrat, pièce des époux [C] n°2), les maîtres d’ouvrage échouent à rapporter la preuve que M. [I] [J] ait été défaillant, le rapport de M. [U] étant à lui seul insuffisant surtout lorsque ce dernier expose, sans plus de détails, que « le maître d’œuvre a laissé le maître d’ouvrage se débrouiller seul ».

Par ailleurs, dans la mesure où il n’est pas démontré que le sous-sol ne présentait pas d’étanchéité conforme, les demandeurs échouent à rapporter la preuve que M. [I] [J] aurait manqué à son devoir de conseil.

Dans ces conditions, les époux [C] seront déboutés de leur demande tendant à la condamnation de M. [I] [J] à réparer leurs préjudices.

III. Sur la demande d’expertise formulée par la SARL 3D CONSTRUCTION

Au vu du rapport d’expertise d’AXA France IARD communiqué par la SARL 3D CONSTRUCTION, venant contredire les conclusions du rapport d’expertise non-judiciaire communiqué par les demandeurs, et en l’absence de demande d’expertise formulée directement par les demandeurs, il n’y a pas lieu d’ordonner une mesure d’expertise.

IV. Sur les demandes de garantie

Les demandes principales n’ayant pas abouti, les demandes de garanties dirigées contre M. [I] [J], la SARL 3D CONSTRUCTION, la SARL ASSURNETT, M. [K] [X] et la SARL MENEAU GERIN seront rejetées.

V. Sur les autres demandes

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
 
Les époux [C] qui succombent devront supporter les dépens de la présente procédure et il sera fait application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Me CASTELLI-MAURICE et Me SAINT-HILAIRE.
 
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.
 
L’équité commande de condamner :
les époux [C] à verser à la SARL 3D CONSTRUCTION et la SARL ASSURNETT la somme de 2.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; les époux [C] à verser à M. [I] [J] la somme de 4.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;M. [I] [J] à verser à la SARL MENEAU GERIN la somme de 2.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, suivant mise à disposition de la décision par le greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,

DEBOUTE M. [L] [C] et Mme [B] [C] née [R] de leurs demandes tendant à déclarer M. [I] [J] et la SARL 3D CONSTRUCTION responsables au titre des désordres affectant le sous-sol de leur propriété ;

DEBOUTE M. [L] [C] et Mme [B] [C] née [R] de leur demande de condamnation formée à l’encontre de M. [I] [J] au titre de la réparation des préjudices subis ;

DEBOUTE M. [L] [C] et Mme [B] [C] née [R] de leur demande de condamnation formée à l’encontre de la SARL 3D CONSTRUCTION au titre de la réparation des préjudices subis ;

DEBOUTE M. [I] [J] de sa demande de condamnation formée à l’encontre de la SARL 3D CONSTRUCTION, la SARL ASSURNETT, M. [K] [X] et la SARL MENEAU GERIN à le garantir de toutes condamnations ;

DEBOUTE la SARL MENEAU GERIN de sa demande de condamnation formée à l’encontre de M. [I] [J] à la garantir de toutes condamnations ;

DEBOUTE la SARL 3D CONSTRUCTION de sa demande d’expertise ;

DEBOUTE les parties de leurs plus amples demandes ;

CONDAMNE M. [L] [C] et Mme [B] [C] née [R] aux entiers dépens et fait application de l’article 699 du code de procédure civile au profit de Me CASTELLI-MAURICE et Me SAINT-HILAIRE, avocats près la cour d’appel d’Orléans ;

CONDAMNE M. [L] [C] et Mme [B] [C] née [R] à verser à la SARL 3D CONSTRUCTION la somme de 2.500 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [L] [C] et Mme [B] [C] née [R] à verser à la SARL ASSURNETT la somme de 2.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [L] [C] et Mme [B] [C] née [R] à verser à M. [I] [J] la somme de 4.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [I] [J] à verser à la SARL MENEAU GERIN la somme de 2.000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE M. [L] [C] et Mme [B] [C] née [R] de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Jugement prononcé par mise à disposition au greffe le DIX NEUF SEPTEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE et signé par Madame Bénédicte LAUDE, 1ère vice-présidente et Madame Heimaru FAUVET, greffier

LE GREFFIER LA PREMIERE VICE-PRESIDENTE


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