M. [G] [Z] a engagé la SARL […]-[J] pour la réfection de la couverture de sa maison, remplaçant des ardoises fibro-cimentées par des ardoises naturelles, pour un montant de 10.903,68 euros, réglé en septembre 2017. En novembre 2017, M. [Z] a signalé des problèmes concernant la pose des crochets de fixation des ardoises. La SARL a accepté de remplacer les crochets en juin 2018, mais les travaux n’ont pas été réalisés. Un expert mandaté par l’assureur de M. [Z] a conclu à la responsabilité de l’entreprise en raison de l’inadéquation des crochets. M. [Z] a alors assigné la SARL en référé pour obtenir une expertise judiciaire, qui a été ordonnée en novembre 2018. Le rapport de l’expert a été déposé en mai 2019. En octobre 2019, M. [Z] a assigné la SARL pour obtenir des réparations, et le tribunal a rendu un jugement en septembre 2020, condamnant la SARL à payer des sommes pour les travaux de reprise et un préjudice de jouissance, tout en déboutant les autres demandes. M. [Z] a fait appel de ce jugement, tandis que la SARL a interjeté appel incident. Les deux parties ont formulé des demandes et prétentions dans le cadre de l’appel, y compris des demandes de remboursement et d’indemnités.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
D’ANGERS
CHAMBRE A – CIVILE
IG/LL
ARRET N°
AFFAIRE N° RG 20/01464 – N° Portalis DBVP-V-B7E-EXAB
Jugement du 07 Octobre 2020
TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de SAUMUR
n° d’inscription au RG de première instance : 11-19-0004
ARRET DU 17 SEPTEMBRE 2024
APPELANT :
Monsieur [G] [Z]
né le 03 Août 1969 à [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Régine GAUDRE de la SELARL CAPPATO GAUDRE, avocat au barreau d’ANGERS
INTIMEE :
S.A.R.L. […]-[J]
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Paul HUGOT de la SELARL LEXCAP, avocat au barreau de SAUMUR – N° du dossier 20S00049
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue publiquement, à l’audience du 14 Mai 2024 à 14 H 00, Mme GANDAIS, conseillère ayant été préalablement entendue en son rapport, devant la cour composée de :
Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente
Madame GANDAIS, conseillère
Madame ELYAHYIOUI, vice-présidente placée
qui en ont délibéré
Greffière lors des débats: Madame GNAKALÉ
Greffier lors du prononcé : Monsieur DA CUNHA
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 17 septembre 2024 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MULLER, conseillère faisant fonction de présidente et par Tony DA CUNHA, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Suivant devis en date du 5 avril 2017, M. [G] [Z] a confié à la SARL […]-[J] la réfection complète de la couverture de sa maison d’habitation, située [Adresse 6] à [Localité 3] (49).
Les travaux consistant à remplacer les anciennes ardoises fibro-cimentées par les ardoises naturelles ont été exécutés courant du mois de septembre 2017 et facturés le 21 septembre 2017 pour un montant de 10.903,68 euros TTC, qui a été intégralement réglé.
Courant du mois de novembre 2017, le maître d’ouvrage s’est plaint de désordres s’agissant de la pose des crochets de fixation des ardoises aux liteaux et a saisi son assureur protection juridique, la MAIF.
Par courrier en date du 20 février 2018, la SARL […]-[J] a fait part à l’assureur de M. [Z] de son accord pour procéder au remplacement des crochets ardoises courant juin 2018.
En l’absence de reprise de l’ouvrage, l’assureur a mandaté un expert, le cabinet Texa, qui s’est rendu sur les lieux et qui a établi son rapport le 20 septembre 2018, concluant à la responsabilité de l’entreprise de couverture du fait du caractère inadapté des crochets utilisés pour fixer les ardoises aux liteaux.
Le 21 septembre 2018, M. [Z] a fait assigner l’entreprise de couverture devant le juge des référés du tribunal d’instance de Saumur aux fins d’obtenir l’organisation d’une mesure d’expertise judiciaire.
Suivant ordonnance rendue le 21 novembre 2018, le juge d’instance a fait droit à cette demande d’expertise judiciaire et a commis à cette fin, M. [H] [B].
Ce dernier a déposé son rapport définitif le 23 mai 2019.
Par exploit d’huissier en date du 7 octobre 2019, M. [Z] a fait assigner la SARL […]-[J] devant le tribunal d’instance de Saumur sur le fondement des articles 1792-6 et subsidiairement 1231-1 et suivants du code civil, aux fins d’obtenir à titre principal sa condamnation à lui payer le coût des travaux de remise en état et à titre subsidiaire l’organisation d’une nouvelle mesure d’expertise judiciaire.
Suivant jugement du 7 septembre 2020, le tribunal judiciaire de Saumur a :
– dit que la responsabilité de la SARL […]-[J] est engagée sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun ;
– condamné la SARL […]-[J] à payer à M. [Z] les sommes suivantes :
* 5.194,59 euros TTC au titre du coût des travaux de reprise en toiture (remplacement des crochets), ceci avec indexation sur l’indice BT 01 du coût de la construction à compter du 13 juin 2019, date d’établissement du devis Devaud ;
* 500 euros en réparation de son préjudice de jouissance ;
– débouté les parties de leurs autres demandes, fins et prétentions ;
– condamné la SARL […]-[J] à payer à M. [Z] la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la SARL […]-[J] aux entiers dépens de l’instance, en ce compris les dépens relatifs à l’instance de référé ainsi que les honoraires de l’expert judiciaire ;
– ordonné l’exécution provisoire de la décision.
Suivant déclaration reçue au greffe de la cour le 28 octobre 2020, M. [Z] a relevé appel du jugement en toutes ses dispositions sauf en celles ayant dit que la responsabilité de la SARL […]-[J] est engagée sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun, lui ayant alloué une somme de 500 euros en réparation de son préjudice de jouissance et celles relatives aux dépens ; intimant la SARL […]-[J].
Suivant conclusions signifiées le 31 mars 2021, la SARL […]-[J] a fait appel incident de cette même décision, sollicitant le débouté de l’appelant de toutes ses demandes.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 avril 2024, reportée au 7 mai 2024 et l’affaire a été retenue à l’audience du 14 mai 2024, conformément à l’avis adressé par le greffe aux parties le 22 février 2024.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 9 avril 2024, au visa des articles 1231-1 et suivants du code civil et à titre subsidiaire, de l’article 144 du code de procédure civile, M. [Z] demande à la cour de :
– à titre principal :
– ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture au jour de l’audience des plaidoiries;
– le déclarer recevable en son appel du jugement rendu le 7 septembre 2020 par le tribunal judiciaire de Saumur et l’y disant bien fondé ;
– condamner la SARL […]-[J] à lui verser, au titre des travaux relatifs de mise en conformité et selon devis actualisé de la société Devaud en date du 29 mars 2024, la somme de 10.683,70 euros HT soit 11.752,07 euros TTC, ce avec indexation sur l’indice BT 01 du coût de la construction au jour de l’arrêt à intervenir ;
– à titre subsidiaire, ordonner une expertise judiciaire confiée à un nouvel expert avec, pour mission, connaissance prise des documents de la cause :
* de chiffrer les travaux de la mise en conformité et de dire, notamment, si leur coût peut être retenu selon le devis de la société Devaud en date du 29 mars 2024, devis comprenant les travaux de renforcement non estimés par l’expert judiciaire ;
* de dire si le poids des ardoises naturelles ayant remplacé les ardoises en composite nécessite un renforcement de la charpente, et, en cas de réponse positive, de préconiser et chiffrer les travaux correspondants ;
– confirmer le jugement en toutes ses autres dispositions ;
– condamner la SARL […]-[J] à lui verser, en réparation de son préjudice de jouissance, la somme de 500 euros ;
– condamner la SARL […]-[J] aux entiers dépens, lesquels comprendront ceux inhérents à la procédure de référé expertise et les honoraires de M. [B] ;
– condamner la SARL […]-[J] à lui verser une indemnité de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en première instance et la même indemnité de 2.500 euros, sur ce même fondement, en cause d’appel ;
– condamner la SARL […]-[J] aux entiers dépens en cause d’appel.
Aux termes de ses dernières écritures déposées le 23 avril 2024, la SARL […]-[J] demande à la présente juridiction de :
– à titre principal :
– ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture au jour de l’audience des plaidoiries;
– débouter M. [Z] de toutes ses demandes et la recevoir en son appel incident ;
– lui donner acte de ce qu’elle est offrante de payer la somme de 2.890 euros TTC au titre du seul coût de remplacement des crochets en inox et dire cette offre satisfactoire et débouter M. [Z] du surplus de ses demandes formées au titre des travaux relatifs à la mise en conformité de la toiture selon devis de la SARL Devaud en date du 13 juin 2019, au titre du préjudice de jouissance et du préjudice moral ;
– à titre subsidiaire, réduire les sommes sollicitées dans d’importantes proportions ;
– condamner M. [Z] à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d’appel.
Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 494 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions ci-dessus mentionnées.
À titre liminaire, il y a lieu de constater qu’il n’y a pas lieu de statuer sur la demande des parties tendant à ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture au jour de l’audience des plaidoiries, devenue sans objet puisque l’ordonnance de clôture a été rendue le 7 mai 2024, soit postérieurement à la remise des dernières écritures de chacune des parties.
Par ailleurs, la cour observe que M. [Z] n’a pas critiqué dans sa déclaration d’appel la disposition du jugement qui ‘dit que la responsabilité de la SARL […]-[J] est engagée sur le fondement de la responsabilité contractuelle de droit commun’ et que l’intimée, pour sa part, dans le cadre de son appel incident, conclut au débouté de M. [Z] relativement à ses demandes indemnitaires et ne sollicite pas l’infirmation du jugement en quelque disposition que ce soit, ne remettant dès lors pas en cause la déclaration de responsabilité précitée qui la concerne.
La responsabilité contractuelle de l’intimée au titre des désordres constatés sur la toiture de la maison d’habitation de l’appelant en suite des travaux qu’elle a réalisés en septembre 2017 est donc définitivement tranchée.
I- sur les demandes indemnitaires
– au titre du coût des travaux de reprise
Le tribunal a accordé à M. [Z] une somme de 5.194,59 euros au titre du coût des travaux de reprise de la toiture, constatant que l’estimation proposée par l’expert et se limitant au remplacement des crochets pour une somme de 2.890 euros, apparaît sous-évaluée puisqu’elle ne tient pas compte de l’ensemble des frais de main-d »uvre et du coût d’installation d’un nouvel échafaudage. Le premier juge n’a toutefois pas retenu dans sa totalité le devis de la société Devaud du 13 juin 2019 produit par le demandeur, considérant que celui-ci va au-delà de la simple réparation des dommages avec une reprise complète de la toiture et non un simple remaniage, intégrant des prestations qui ne correspondent pas strictement à la reprise des désordres imputables à l’entreprise de couverture. C’est dans ces conditions que le tribunal a écarté les postes de la dépose et repose à neuf d’un faîtage en terre cuite à emboîtement, de la reprise des rives latérales, de la dépose et repose à neuf d’un entourage de cheminée en zinc naturel et de la fourniture et pose d’un renforcement de la charpente. Sur ce dernier poste, le tribunal a jugé que même en retenant un manquement de l’entreprise de couverture dans l’absence de vérification préalable de la charpente et notamment de la capacité de celle-ci à supporter le surpoids découlant de la pose d’ardoises naturelles, l’expert judiciaire n’a pas conclu à la nécessité de procéder au renforcement de la charpente suite au remplacement des ardoises fibrocimentées par des ardoises naturelles. Il a souligné que seule la question d’un éventuel renforcement a été évoquée par l’expert judiciaire et que le second devis produit par le demandeur ne prévoyait d’ailleurs pas une telle prestation, laquelle n’était pas prévue au devis initial. En tout état de cause, le tribunal a observé que le demandeur ne fait état d’aucun préjudice directement en lien avec ce manquement contractuel. Enfin, il a été jugé qu’il n’y avait pas lieu de statuer sur la demande subsidiaire d’organisation d’une nouvelle expertise judiciaire présentée par M. [Z] au motif qu’elle n’est pas nécessaire à la résolution du litige.
Aux termes de ses dernières écritures, l’appelant expose que l’évaluation de l’expert judiciaire était manifestement inférieure au prix du marché, ne tenait pas compte du coût de la main-d »uvre ainsi que celui de l’installation du chantier, de la prise des mesures, de l’approvisionnement des matériaux, de l’échafaudage, du complément d’ardoises en cas d’ardoises cassées, de la repose des sorties de toit, d’un faîtage neuf en terre cuite, de la voltige à neuf au faîtage etc… L’appelant reproche au tribunal de ne pas lui avoir accordé l’indemnité totale sollicitée sur la base du devis de la société Devaud du 13 juin 2019. Il produit devant la cour un devis actualisé de la même société ainsi que les explications de celle-ci sur chacun des postes écartés sans raisons particulières par le tribunal bien que justifiés dans le cadre des travaux de reprise en toiture par remplacement des crochets. S’agissant du renforcement de la charpente, l’appelant soutient que l’intimée doit répondre du support sur lequel reposent les nouvelles ardoises, lesquelles représentent un poids nettement plus important que les anciennes. Il s’appuie sur le rapport d’expertise judiciaire pour réaffirmer qu’il appartenait bien à l’entreprise de couverture de s’assurer que la charpente pouvait recevoir la surcharge d’1,7 tonne constituée par l’emploi d’ardoises naturelles. L’appelant souligne que la nécessité de renforcer la charpente est confirmée tant par la société Devaud que par l’expert amiable, lequel a par ailleurs validé l’ensemble des autres prestations au titre des travaux de reprise.
Aux termes de ses dernières écritures, la SARL […]-[J] fait valoir que le coût de certains travaux réclamés par l’appelant ne peut être mis à sa charge dès lors que ceux-ci ne sont nullement l’objet de son engagement pris le 20 février 2018 de procéder au remplacement des seuls crochets d’ardoises et qu’il s’agit en tout état de cause de travaux étrangers à la reprise des désordres qui lui sont imputables. Elle considère que le chiffrage effectué par l’expert judiciaire hauteur de 2.890 euros ne saurait être critiqué, indiquant que les autres prestations figurant au devis de la société Devaud ne sont nullement nécessaires. S’agissant de la pose d’un tasseau intermédiaire aux fins de renforcement de la charpente, l’intimée souligne qu’en sus de son caractère inutile, cela ne fera qu’entraîner un poids supplémentaire sur celle-ci. Elle souligne que l’expert judiciaire qui n’a pas explicité ses modalités de calcul, s’est manifestement trompé en indiquant que le remplacement des ardoises fibrociment en ardoises naturelles occasionnerait un surpoids de 10 kg par m². Elle calcule pour sa part un surpoids, entraîné par le changement d’ardoises, de 71,40 kg pour la totalité de la couverture de 170 m², ce qui ne met nullement la charpente existante en péril. L’intimée relève que l’expert judiciaire n’a d’ailleurs constaté aucun désordre s’agissant de la charpente après la pose des ardoises naturelles qui remonte à septembre 2017.
Sur ce, la cour
Il importe de rappeler qu’aux termes de son rapport définitif, l’expert judiciaire a indiqué, dans la partie ‘constatations des désordres’ que :
– ‘La charpente est en bon état d’usage malgré sa conception très économique mais couramment utilisée dans les années 80/90. En revanche, l’emploi d’ardoises naturelles en lieu et place d’ardoises composites engendre un surpoids d’environ 10kg/m². Il appartient à M. [J] [gérant de la SARL […]-[J]] de s’assurer que le support, c’est-à-dire que la charpente, puisse recevoir cette surcharge. Dans le cas contraire, il doit mettre en ‘uvre un matériau de poids identique, c’est-à-dire de l’ardoise composite.’
– ‘Les crochets utilisés sont destinés à des liteaux d’une épaisseur de 16 mm et non de 25 mm. Cela a obligé M. [J] à déformer manuellement chaque crochet au niveau de l’agrafe pour réaliser sa prestation. Lorsque l’ardoise présente un défaut de planéité, nous constatons que le crochet ne recouvre pas la partie inférieure du liteau et n’assure pas son maintien. L’ouverture est trop importante au niveau de l’agrafe, le crochet ne permet pas d’assurer la fixation au liteau et glisse sur la face arrière.’
Il a encore précisé que ‘le crochet d’ardoise a pour fonction de maintenir l’ardoise sur son support (liteau ou volige) afin de résister aux intempéries (vent, neige, grêle…) ainsi qu’au poids propre de l’ardoise’. Il a ajouté que la modification des crochets, constitutive d’une malfaçon, peut engendrer de nombreux dommages : l’arrachement d’une ou de plusieurs ardoises voire de l’ensemble de la toiture en cas d’intempéries, l’absence de garanties par les assureurs au regard de la malfaçon, le risque que cette malfaçon soit qualifiée de vice caché en cas de vente immobilière. L’expert judiciaire concluait qu’il était nécessaire de remplacer les crochets, ‘après s’être assuré de la résistance de la charpente, puisque l’ardoise naturelle représente un surpoids d’environ 1,7 tonne par rapport à l’ancienne ardoise (travaux éventuels du renforcement de la charpente non évalués par l’expert)’.
Sur les travaux de remise en état, l’expert judiciaire, ‘en l’absence de devis, dûment réclamé à l’entreprise […]-[J]’ a évalué le remplacement des crochets à la somme de 2.890 euros.
D’une part, l’intimée ne peut valablement exciper de son engagement pris par courrier du 20 février 2018, indiquant à l’assureur de l’appelant qu’il remplacerait les crochets ardoise aux alentours du mois de juin 2018 dès lors que celui-ci, intervenu avant l’assignation en référé, est demeuré vain et que le tribunal a retenu sa responsabilité contractuelle, non pour l’inexécution de cet engagement mais pour un défaut d’exécution – non discuté – dans la réalisation des travaux de couverture réalisés en septembre 2017. L’intimée ne saurait dans ces conditions donner une quelconque portée à ce document du 20 février 2018 et ainsi limiter son obligation à réparation qui s’étend à l’ensemble des conséquences dommageables causés par le manquement à son obligation contractuelle de réaliser des travaux dans les règles de l’art.
D’autre part, il est exact, comme l’a relevé le premier juge, que l’estimation faite par l’expert judiciaire ne correspond, en l’absence de précisions, qu’au remplacement des crochets de fixation aux liteaux et n’intègre pas le coût de prestations qui s’avèrent indispensables telles que la main d’oeuvre pour procéder aux travaux de remaniement d’une toiture de 170 m² ainsi que la pose d’un échafaudage.
L’absence de prise en compte des dépenses afférentes à ces prestations dont la nécessité n’est aucunement discutée par l’intimée, conduit d’ores et déjà la cour, ainsi que l’a fait le tribunal, à ne pas retenir cette seule estimation expertale qui apparaît insuffisante
à réparer l’entier préjudice subi par l’appelant.
Ce dernier, qui a produit en première instance, un devis de la société Devaud du 13 juin 2019 portant sur un montant de 7.612,66 euros, qui a été retenu partiellement par le tribunal à hauteur de 5.194,59 euros, verse en appel un devis actualisé au 29 mars 2024 pour un montant de 11.752,07 euros, établi par la même société, reprenant à l’identique les divers postes ainsi qu’un courrier de ladite société du 9 octobre 2020 explicitant les travaux devisés, dans le cadre d’un ‘remaniage de couverture suite à malfaçon’.
Il importe tout d’abord, en l’absence de toute critique de la part de l’intimée, d’approuver le premier juge ayant retenu les postes suivants:
– installation de chantier, prise des mesures et approvisionnement des matériaux,
– échafaudage multidirectionnel compris protection de la terrasse,
– remaniage de la couverture en ardoise pour remplacement à neuf des crochets en inox pour liteaux de 25 m/m d’épaisseur existant.
S’agissant du complément d’ardoises à prévoir, de la reprise des ardoises pour les rives latérales et horizontales ainsi que la main-d »uvre afférente, la société Devaud précise que ‘les ardoises de rive ont été clouées en alignement des ardoises entières avec les crochets à forcer. Pour un alignement avec les nouveaux crochets, il faut donc les démonter’, soulignant qu’à la dépose, les ardoises clouées cassent inévitablement, d’où la nécessité de prévoir un complément d’ardoises.
S’agissant de la dépose et repose des sorties de toit, la société Devaud explique que celles-ci sont posées en recouvrement des ardoises clouées et qu’il faut donc les démonter pour remplacer les crochets et réaligner les ardoises.
L’intimée n’apporte aucun élément de contradiction à la cour s’agissant de ces prestations dont il n’apparaît pas possible de remettre en cause leur utilité au vu des précisions données par l’entreprise de couverture Devaud. En effet, il s’avère que la réalisation de ces travaux est directement en lien avec la malfaçon imputable à l’intimée. Ces deux postes doivent dès lors être retenus.
S’agissant de la dépose et repose d’un faîtage en terre cuite à emboîtement, la société ayant devisé les travaux indique que ‘le faîtage étant cloué ou vissé, il n’est pas toujours possible de tout récupérer à la dépose. Il existe beaucoup de tuiles faîtières différentes qui ne s’emboîtent pas entre elles. Il faut donc remplacer la totalité.’
L’intimée fait valoir que ce faîtage constitue une partie totalement démontable qui peut être reposée, par la suite, les tuiles étant agrafées.
La cour observe que ce n’est pas le caractère démontable du faîtage qui pose difficulté mais le risque de bris de tuiles faîtières à la dépose, sur lequel l’intimée n’apporte aucune objection. Pour ce qui est du défaut d’emboîtement de nombreuses tuiles faîtières mis en évidence par la société Devaud, il n’est pas démontré que cette anomalie résulterait de la pose par l’intimée de crochets de fixation inadaptés aux liteaux. Le remplacement de la totalité de ces tuiles ne saurait ainsi être mis à la charge de l’intimée qui, au vu de la casse prévisible de certaines de celles-ci à la dépose, supportera le coût de ce poste dans la limite de 50%.
Les parties s’opposent sur le poste ‘fourniture et pose d’un renforcement par une contrelatte en 29 x 50 fixée dessous le lattage existant entre chaque fermette’ et de manière subséquente sur les travaux de dépose et repose de la volige à neuf au faîtage qui permet précisément de réaliser le renfort des liteaux par le haut.
La société Devaud, pour justifier de la nécessité de ces travaux, indique ‘les fermettes sont posées entre un axe de 80 cm ce qui est important, l’ardoise naturelle étant plus lourde au m², il est important de relier tous les liteaux entre eux afin d’éviter leur déformation’.
L’intimée considère pour sa part que la pose d’un tasseau intermédiaire aux fins de renforcer la charpente n’est nullement nécessaire et que l’expert judiciaire s’est trompé dans ses calculs puisque le surpoids généré par le remplacement de la toiture par des ardoises naturelles n’est que de 71,40 kg.
La cour relève que l’expert a précisé que l’emploi d’ardoises naturelles en lieu et place d’ardoises composites engendre un surpoids d’environ 10 kg/m², soit environ 1,7 tonne pour l’ensemble de la couverture dont il n’est pas discuté qu’elle mesure 170 m². Si l’intimée produit aux débats deux photographies faisant chacune apparaître une ardoise sur une balance, mentionnant pour la première un poids de 838 grammes et pour la seconde un poids de 853 grammes, la cour ne peut tirer aucun enseignement de ces pièces dès lors que ces pesées ont été effectuées de manière non contradictoire et dans des circonstances où l’on ignore tout du matériel utilisé et des caractéristiques des ardoises.
Au surplus, il importe d’observer que le pré-rapport de l’expert judiciaire transmis aux parties le 27 février 2019 et mentionnant déjà un surpoids de 1,7 tonne au niveau de la couverture, n’a fait l’objet d’aucun dire sur ce point de la part de l’intimée.
Aucun élément ne justifie dès lors de remettre en cause l’indication ainsi donnée par l’expert judiciaire.
Ce dernier a bien mentionné dans son rapport la nécessité de s’assurer de la résistance de la charpente avant de procéder au remplacement des crochets, précisant qu’il n’évaluait pas les travaux éventuels de renforcement de la charpente. L’expert a, recueillant les déclarations du gérant de l’intimée, précisé que ce dernier n’a pas pénétré à l’intérieur du comble lors de la visite préalable à la rédaction du devis, seuls les éléments visibles de l’extérieur ont été vérifiés à savoir la dimension de l’ardoise et la longueur des crochets estimée au regard des crochets supportant la gouttière.
En définitive, il s’infère du rapport d’expertise judiciaire complété par les explications de la société Devaud que le surpoids occasionné par la pose de nouvelles ardoises impose, pour éviter la déformation des liteaux, de renforcer la charpente.
Néanmoins, cette prestation complémentaire non prévue au devis de l’intimée n’est pas en lien avec le manquement contractuel de cette dernière, invoqué par l’appelant et retenu par le tribunal, à savoir le défaut d’exécution dans la pose des crochets de fixation des ardoises aux liteaux. S’il appartenait effectivement à l’intimée d’examiner le support de la nouvelle couverture pour la compatibilité des travaux qui lui étaient confiés, c’est au titre de son devoir de conseil que sa responsabilité est alors encourue. De surcroît, l’appelant aurait dû assumer en tout état de cause le coût de cette prestation nécessaire qui ne lui a pas été facturée. Au bénéfice de ce qui précède, le lien de causalité entre le manquement de l’intimée et le dommage allégué par l’appelant tenant à la prise en charge de travaux de confortement de la toiture, n’est pas établi. Les deux postes précités en lien avec ces travaux s’élevant à la somme totale de 1.022,34 euros TTC, suivant devis actualisé du 29 mars 2024, seront ainsi écartés et ce, sans qu’il y ait lieu d’ordonner une nouvelle expertise judiciaire au vu des considérations qui précèdent. Ainsi, l’appelant sera débouté de cette demande de mesure d’instruction et il sera ajouté en ce sens au jugement.
Enfin, s’agissant du poste ‘dépose et repose à neuf d’un entourage de cheminée en zinc naturel compris bavette basse et bandes port solins’, la société Devaud indique que ‘l’entreprise [[…]-[J]] n’ayant pas remplacé les noquets zinc, les bavettes de chaque côté des rampants et l’entourage de cheminée n’étant pas conforme, il convient donc de le reprendre à neuf’.
Si l’intimée ne formule aucune observation relativement à ce poste, la cour observe que ces travaux sont totalement étrangers à la problématique des crochets de fixation inadaptés puisqu’ils concernent une prestation portant sur la souche de la cheminée avec la mise en place de bandes d’étanchéité. Or, celle-ci prévue au devis de l’intimée et facturée comme telle n’a fait l’objet d’aucune réclamation de la part de l’appelant qui n’a fait état d’aucun désordre pour ces travaux devant les experts amiable et judiciaire. Dans la mesure où il n’est justifié d’aucune malfaçon, la cour ne peut qu’écarter ce poste s’élevant à la somme de 192,50 euros.
Du tout, il résulte que le devis de la société Devaud en date du 29 mars 2024 peut être retenu partiellement pour les postes suivants :
– installation de chantier, prise des mesures et approvisionnement de matériaux (175 euros HT)
– échafaudage multidirectionnel compris protection de la terrasse (650 euros HT)
– remaniage de la couverture en ardoise pour remplacement à neuf des crochets en inox pour liteaux de 25 m/m d’épaisseur existant compris bâchage avec fourniture et remaniage (6.471,40 euros HT)
– main-d »uvre pour reprise des rives latérales (742,40 euros HT)
– complément d’ardoises pour les rives latérales, horizontales et ardoises cassées (697 euros HT)
– dépose et repose à neuf d’un faîtage en terre cuite à emboîtement (573,50 euros HT /2 )
– dépose et repose des sorties de toit (215 euros HT)
– fixations diverses (55 euros HT)
soit un total de 9.292,55 euros HT, soit 10.221,80 euros TTC.
Il convient en conséquence, par voie de réformation du jugement, de condamner l’intimée à payer à l’appelant la somme de 10.221,80 euros au titre du coût des travaux de reprise de la toiture. S’agissant d’une évaluation actualisée du dommage au jour du présent arrêt, il n’y a pas lieu à indexation suivant l’indice BT 01 du coût de la construction, la condamnation prononcée bénéficiant de droit des intérêts au taux légal, lequel sera majoré en cas d’inexécution. L’appelant sera débouté de cette demande d’indexation de la somme lui bénéficiant.
– au titre du préjudice de jouissance
Le tribunal a alloué à M. [Z] la somme sollicitée de 500 euros au motif que la nécessité de procéder au remaniage de la toiture va causer à ce dernier un préjudice de jouissance du fait de la gêne occasionnée pendant toute la durée des travaux et notamment du fait de la mise en place d’un nouvel échafaudage.
Au titre de son appel incident, l’intimée conclut au débouté pur et simple de l’appelant sur sa demande indemnitaire, l’estimant nullement fondée ou justifiée, sans autre développement.
Aux termes de ses dernières écritures, l’appelant conclut à la confirmation du jugement, faisant état d’un préjudice de jouissance pendant le temps des travaux, du fait de la gêne liée tant à la présence d’un échafaudage que la disponibilité dont il devra à nouveau faire preuve.
Sur ce, la cour
Ainsi que l’a justement relevé le premier juge, la durée des travaux de reprise de la couverture, nécessitant une dépose complète des ardoises ainsi que la mise en place d’un échafaudage vont occasionner une gêne conséquente pour l’appelant. L’indemnité de 500 euros sollicitée par ce dernier et retenue par le tribunal apparaît ainsi tout à fait justifiée au titre de la réparation de son préjudice.
Le jugement sera ainsi confirmé sur ce point.
II- Sur les dépens et frais irrépétibles
L’intimée, partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel.
Il convient de confirmer le jugement en ses dispositions relatives à l’article 700 du code de procédure civile et de condamner l’intimée à payer à l’appelant une somme de 2.500 euros au titre de ses frais irrépétibles d’appel. L’intimée, pour sa part, sera déboutée de sa demande indemnitaire formée du même chef.
La Cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,
DIT n’y avoir lieu à statuer sur la demande de la SARL […]-[J] et de M. [G] [Z] tendant à ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture au jour de l’audience des plaidoiries,
CONFIRME, dans les limites de sa saisine, le jugement du tribunal judiciaire de Saumur du 7 septembre 2020 sauf en sa disposition condamnant la SARL […]-[J] à payer la somme de 5.194,59 euros au titre des travaux de reprise de la toiture,
Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,
CONDAMNE la SARL […]-[J] à payer à M. [G] [Z] la somme de 10.221,80 euros au titre du coût des travaux de reprise de la toiture,
DEBOUTE M. [G] [Z] de sa demande tendant à assortir la condamnation qui précède d’une indexation suivant l’indice BT 01 du coût de la construction,
DEBOUTE M. [G] [Z] de sa demande subsidiaire d’expertise judiciaire,
CONDAMNE la SARL […]-[J] à payer à M. [G] [Z] la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,
DEBOUTE la SARL […]-[J] de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la SARL […]-[J] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE
T. DA CUNHA C. MULLER