Responsabilité contractuelle et charge de la preuve : enjeux et conséquences dans le cadre d’une expertise amiable.

·

·

Responsabilité contractuelle et charge de la preuve : enjeux et conséquences dans le cadre d’une expertise amiable.
Ce point juridique est utile ?

Monsieur [V] [K] a assigné la SARL SP Auto devant le tribunal judiciaire de Nantes, demandant divers remboursements et indemnités suite à des travaux jugés inutiles et inappropriés sur son véhicule BMW. Il a confié son véhicule au garage le 12 juin 2023 pour des problèmes de fuite d’huile et de puissance, avec un devis de 3 146,92 euros pour des réparations. Après avoir récupéré le véhicule, il a constaté des problèmes de surchauffe. Malgré un paiement de 2 430,39 euros pour les travaux, il n’a reçu aucune nouvelle du garage et a mis en demeure la société sans succès. Une expertise a révélé que les réparations effectuées étaient inappropriées et que le véhicule était inutilisable. Monsieur [K] a également souligné des conseils mensongers de la part du gérant du garage, entraînant des préjudices professionnels. La SARL SP Auto n’ayant pas constitué avocat, le jugement a été rendu en son absence, déboutant Monsieur [K] de toutes ses demandes et le condamnant aux dépens.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

12 septembre 2024
Tribunal judiciaire de Nantes
RG n°
24/00343
IC

G.B

LE 12 SEPTEMBRE 2024

Minute n°

N° RG 24/00343 – N° Portalis DBYS-W-B7H-MVQC

[V] [K]

C/

S.A.R.L. SP AUTO (SIRET ST NAZAIRE 92193357800012)

Le 12/09/24

copie exécutoire
copie certifiée conforme
délivrée à :
– Me Serge Ndeko

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
———————————————-

PREMIERE CHAMBRE

Jugement du DOUZE SEPTEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE

Composition du Tribunal lors des débats et du délibéré :

Président : Géraldine BERHAULT, Première Vice-Présidente,
Assesseur : Florence CROIZE, Vice-présidente,
Assesseur : Marie-Caroline PASQUIER, Vice-Présidente,

Greffier : Isabelle CEBRON

Débats à l’audience publique du 23 MAI 2024 devant Géraldine BERHAULT, 1ère vice-présidente, siégeant en juge rapporteur, sans opposition des avocats, qui a rendu compte au Tribunal dans son délibéré.

Prononcé du jugement fixé au 12 SEPTEMBRE 2024, date indiquée à l’issue des débats.

Jugement Réputé Contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe.

—————

ENTRE :

Monsieur [V] [K]
né le 10 Août 1975 à [Localité 4] (YONNE), demeurant [Adresse 2]
Rep/assistant : Me PIERRE LADOUCEUR-BONNEFEMME, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant
Rep/assistant : Me Serge flavien NDEKO, avocat au barreau de NANTES, avocat postulant

DEMANDEUR.

D’UNE PART

ET :

S.A.R.L. SP AUTO (SIRET ST NAZAIRE 92193357800012), dont le siège social est sis [Adresse 1]

NON comparant, NON représenté,

DEFENDERESSE.

D’AUTRE PART

EXPOSE DU LITIGE

Par acte d’huissier du 26 décembre 2023, Monsieur [V] [K] a assigné la SARL SP Auto devant le tribunal judiciaire de Nantes, aux fins de :

Déclarer M. [K] bien fondé et recevable en ses demandes,

A titre principal,
Condamner le garage SP Auto au remboursement à M. [K] de la somme de 3 146,92 euros au titre de travaux inutiles et inappropriés,

Condamner le garage SP Auto au remboursement à M. [K] de la somme 2 430,39 euros au titre de travaux jamais réalisés,

Condamner le garage SP Auto au paiement de 1 500 euros pour avoir dégradé le véhicule litigieux, constaté par expertise contradictoire,

Condamner le garage SP Auto au paiement de la somme de 4 800 euros (20x30x8) au titre du préjudice de perte de jouissance à parfaire au jour du jugement à intervenir,

Condamner le garage SP Auto au paiement de la somme de 3 600 euros (30x30x4) au titre du préjudice matériel,

Condamner le garage SP Auto au paiement de la somme de 4000 euros au titre du préjudice moral,

Condamner le garage SP Auto au paiement de 2000 euros pour violation de son devoir de conseil et pour avoir prodiguer des conseils mensongers,

Assortir l’obligation de payer des intérêts au taux légal,

En tout état de cause,
Condamner la défenderesse au paiement de 3 500 euros au titre de l’article 700 ainsi qu’aux entiers dépens.

M. [K] expose que le 12 juin 2023, il a confié son véhicule de marque BMW, modèle Série 3, immatriculé [Immatriculation 3] au garage SP Auto, “pour une fuite d’huile moteur et manque de puissance”.
Il précise que le garage SP Auto a établi un devis correspondant au “remplacement des 4 filtres, des plaquettes de frein AR avec les témoins d’usure, des 6 bougies d’allumage et des 6 bobines d’allumage (…) et le joint spy vilebrequin accompagné du kit embrayage et volant moteur”, pour un montant total de 3 146,92 euros.
Le demandeur souligne qu’après avoir récupéré son véhicule “prétendument réparé” auprès du garage SP Auto, il a constaté “une surchauffe au niveau du compartiment moteur”.
M. [K] explique que le 21 juin 2023, le gérant du garage SP Auto, M. [W], est venu “reprendre le véhicule” et a constaté que “le bocal de liquide de refroidissement (était) sous pression”, rapatriant “le véhicule par la route sans usage d’une dépanneuse”.
Le demandeur assure qu’il a effectué un virement bancaire de la somme de 2 430,39 euros correspondant au devis du garage SP Auto, mais que “depuis cette date”, il a été “sans nouvelle du garagiste”.
M. [K] indique que le 1er septembre 2023, il a vainement mis en demeure la SARL SP Auto “de l’informer sur l’état d’avancement des travaux et connaître le délai pour la restitution du véhicule”.
Le demandeur rappelle qu’une expertise s’est tenue le 18 octobre 2023 qui a fait l’objet d’un rapport le 6 novembre 2023.

Se fondant sur l’expertise amiable, M. [K] considère que le garagiste “n’a pas correctement évalué l’origine des dysfonctionnements”, ses réparations “ont été totalement inutiles” et a un “sérieux doute sur le changement du joint spy et du volant moteur”. Il ajoute que “les travaux (sont) inappropriés et insuffisants” rendant son véhicule inutilisable.
M. [K] souligne “l’incroyable imprudence” du gérant de la SARL SP Auto, lequel a rapatrié le véhicule litigieux par la route “sans usage d’une dépanneuse” alors qu’il soupçonnait “un problème de joint de culasse”. Le demandeur fait observer qu’il a accepté et versé le montant correspondant au devis de remise en état du véhicule, lequel mentionnait “la rectification et le surfaçage de la culasse”.
Il considère que le garage SP Auto “n’a exécuté aucune de ses obligations” en laissant le véhicule immobilisé “pendant plus de quatre mois sans la moindre réparation”.
M. [K] relève que de “nouvelles défectuosités sont apparues” et “sont directement liées aux réparations inefficaces et inutiles du garage SP Auto, rendant le véhicule encore plus dangereux qu’il ne l’était”.
Le demandeur ajoute que les “conseils du garagiste ont été inappropriés, inexacts, dangereux” et que le “plus insupportable réside dans l’aveu de M. [W], en sa qualité de gérant de SP Auto d’avoir purement et simplement tenu des propos mensongers”. M. [K] rappelle que ces désordres lui ont occasionnés un “préjudice professionnel”, étant donné sa qualité de “chauffeur-routier”, le plaçant “dans des circonstances d’insécurité pouvant nuire à son statut professionnel”.

*
La SARL SP Auto n’a pas constitué avocat. En conséquence, le jugement, susceptible d’appel, sera réputé contradictoire à l’égard de la société défenderesse par application des dispositions de l’article 473 du code de procédure civile.

Au-delà de ce qui a été repris pour les besoins de la discussion et conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est référé, pour un plus ample exposé et moyens du demandeur à ses écritures.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 12 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION
Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
I – Sur la responsabilité contractuelle de la SARL SP Auto
L’article 1103 du code civil prévoit que “Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits”.
L’article 1104 du même code dispose que “Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d’ordre public”.
Aux termes de l’article 1231-1 du code civil, “le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure”.
Selon l’article 16 du code de procédure civile, “Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction”.
Il en résulte que, hormis les cas où la loi en dispose autrement, le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l’une des parties, peu important qu’elle l’ait été en présence de celles-ci.
En l’espèce, force est de constater que M. [K] fonde exclusivement ses demandes en indemnisation sur le rapport d’expertise amiable dressé le 6 novembre 2023 par le cabinet Lang et Associés Nord-Ouest, qu’il a lui-même mandaté.
Or, le demandeur ne produit aucun autre élément technique pouvant corroborer les constatations de l’expert amiable qui ne relève “en définitive” qu’un défaut de “mise en travaux du véhicule pour le remplacement du joint de culasse et le contrôle de cette dernière”, étant observé au surplus que certains des autres documents transmis sont totalement illisibles.
En conséquence, M. [K], auquel incombe la charge de la preuve, ne pourra qu’être débouté de ses demandes.
II – Sur les autres demandes
Sur les dépens
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
M. [K], qui succombe à l’instance, sera condamné aux entiers dépens.
Sur les frais irrépétibles
Les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile permettent au juge de condamner la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.
M. [K] ne peut prétendre à l’octroi d’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant par jugement mis à disposition au greffe, réputé contradictoire et en premier ressort,
DEBOUTE M. [V] [K] de l’intégralité de ses demandes,
CONDAMNE M. [V] [K] aux entiers dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Isabelle CEBRON Géraldine BERHAULT


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x