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Le 4 février 2022, Mme [L] [E] et M. [V] [C] achètent un véhicule d’occasion, une Citroën Nemo, à la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS pour 5 990 euros. Après avoir constaté des dysfonctionnements, ils confient le véhicule au garage Dubois, qui évalue les réparations à 6 993,57 euros. Un expert automobile, mandaté par leur assureur, rédige un rapport le 3 octobre 2023. Le 25 mai 2023, les acheteurs mettent en demeure la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS de répondre à l’expertise. Le 30 novembre 2023 et le 5 février 2024, ils assignent la société devant le tribunal judiciaire de Lille, demandant la résolution de la vente, le remboursement du prix d’achat avec intérêts, des dommages et intérêts pour divers préjudices, ainsi que la restitution du véhicule. La SARL LEDUC NEGOCE AUTOS ne se présente pas à l’audience du 1er juillet 2024, où les acheteurs soutiennent que les vices étaient antérieurs à la vente et qu’ils n’auraient pas acheté le véhicule s’ils en avaient eu connaissance. La décision est mise en délibéré au 7 octobre 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
☎ :[XXXXXXXX01]
N° RG 24/00875 et 24/2596
N° Portalis DBZS-W-B7I-X622
N° de Minute : L 24/00528
JUGEMENT
DU : 07 Octobre 2024
[L] [E]
[V] [C]
C/
S.A.R.L. LEDUC NEGOCE AUTOS
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUGEMENT DU 07 Octobre 2024
DANS LE LITIGE ENTRE :
DEMANDEUR(S)
Mme [L] [E], demeurant [Adresse 4]
M. [V] [C], demeurant [Adresse 4]
représentés par Me Valérie ZIMMERMANN, avocat au barreau de LILLE
ET :
DÉFENDEUR(S)
S.A.R.L. LEDUC NEGOCE AUTOS, dont le siège social est sis [Adresse 3]
non comparant
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L’AUDIENCE PUBLIQUE DU 01 Juillet 2024
Mélanie COCQUEREL, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier
COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DU DÉLIBÉRÉ
Par mise à disposition au Greffe le 07 Octobre 2024, date indiquée à l’issue des débats par Mélanie COCQUEREL, Juge, assistée de Sylvie DEHAUDT, Greffier
RG 875/24 – page – MA
Le 4 février 2022, Mme [L] [E] et M. [V] [C] ont acquis auprès de la société à responsabilité limitée (SARL) LEDUC NEGOCE AUTOS un véhicule d’occasion de marque Citroën, modèle Nemo, n°VF7AAFHZ0D8414286, immatriculé [Immatriculation 5], moyennant le prix de 5 990 euros.
Se prévalant de divers dysfonctionnements, Mme [E] et M. [C] ont confié le véhicule au garage Dubois qui a émis le 22 novembre 2022 un devis de réparation d’un montant de 6 993,57 euros.
Le 3 octobre 2023, M. [T] [N], expert automobile du cabinet IDEA NORD DE FRANCE EXPERTISE, mandaté par l’assureur protection juridique de Mme [E] et M. [C], a déposé un rapport d’expertise amiable contradictoire.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 25 mai 2023, les acheteurs ont mis en demeure la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS de se positionner vis à vis à de ladite expertise dans un délai de deux semaines.
Par actes d’huissier des 30 novembre 2023 et 5 février 2024, Mme [E] et M. [C] ont fait assigner la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS devant le tribunal judiciaire de Lille à l’audience du 1er juillet 2024, sur le fondement des articles 1641 et suivants du code civil, afin de voir :
prononcer la résolution de la vente ;condamner la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS à leur restituer la somme 5 990 euros au titre du prix de vente augmentée des intérêts aux taux légal à compter de la date du paiement ;condamner la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS à leur payer, à titre de dommages et intérêts les sommes de : ◦
533,94 euros au titre des frais de la vente et accessoires ;◦1657,37 euros au titre du préjudice de privation de jouissance et de trouble dans les conditions d’existence ;ordonner la restitution du véhicule aux frais de la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS dans un délai de trois mois suivant la signification du jugement ;condamner la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS à leur payer la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;condamner la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS aux dépens ;ordonner l’exécution provisoire de la décision.
Ces deux assignations, rédigées dans les mêmes termes ont été enregistrées sous des numéros de RG distincts, à savoir 24/00875 et 24/02596.
A l’audience du 1er juillet 2024, Mme [E] et M. [C], représentés par leur conseil, s’en sont rapportés aux demandes contenues dans l’acte introductif d’instance.
Au soutien de celles-ci, ils font valoir que le rapport d’expertise amiable contradictoire permet d’établir que les vices sont majeurs, étaient antérieurs à la vente et nécessitent un remplacement du moteur, ce qui n’est pas économiquement envisageable.
Ils soutiennent qu’ils n’auraient pas acquis le véhicule s’ils en avaient eu connaissance.
Ils précisent que les frais accessoires comprennent le coût de l’assurance, les deux factures du garage Dubois.
Ils sollicitent également le remboursement des frais de location d’un autre véhicule et considèrent qu’ils ont subi un préjudice de jouissance.
La SARL LEDUC NEGOCE AUTOS, bien que régulièrement assignée par remise de l’acte à l’étude d’huissier, n’a pas comparu et ne s’est pas faite représenter.
A l’issue de l’audience, la décision a été mise en délibéré au 7 octobre 2024.
En application de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la jonction des procédures
Aux termes de l’article 367 du code de procédure civile, le juge peut, à la demande des parties ou d’office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s’il existe entre les litiges un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble.
En l’espèce, les demandeurs ont fait assigner la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS les 30 novembre 2023 et 5 février 2024.
Bien qu’enregistrées sous des n° RG distincts, ces deux assignations sont rédigées dans les même termes.
Il convient donc d’ordonner la jonction de ces procédures.
L’affaire sera désormais évoquée sous le n° RG unique 24-00875.
Sur la demande de résolution judiciaire du contrat de vente
En application de l’article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.
En application de l’article 1642 du code civil, le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même.
L’article 1643 du code civil précise que le vendeur est tenu des vices cachés, quand bien même il ne les aurait pas connus.
La charge de la preuve pèse sur l’acquéreur.
Cette preuve peut être rapportée par tous moyens, y compris une expertise non judiciaire, qu’elle soit contradictoire ou non, pourvu que cette expertise soit soumise à la libre discussion des parties et qu’elle soit corroborée par d’autres éléments.
M. [T] [N] du cabinet IDEA NORD DE FRANCE EXPERTISES, mandaté par l’assurance protection juridique des demandeurs, a réalisé une expertise amiable contradictoire qui s’est tenue le 2 mars 2023 et qui a donné lieu à un rapport établi le 3 octobre 2023.
Aux termes de son rapport, M. [N] constate que le moteur présente « une consommation anormale et excessive d’huile moteur » ainsi qu’une « usure prononcée et anormale de la segmentation compte tenu de son faible kilométrage ». Il précise que le bref délai tant kilométrique que temporel entre l’achat du véhicule et l’apparition du désordre montre que ce dernier ne peut s’expliquer par l’usage du véhicule par les acquéreurs.
Il considère que le désordre observé sur le véhicule était latent et en germe avant l’acquisition du véhicule.
Il estime que la remise en état suppose un remplacement du moteur dont le coût peut être estimé à la somme de 6 993,57 euros.
Cette somme correspond au montant du devis de réparation que les demandeurs ont fait établir par le garage Dubois le 22 novembre 2022.
Il inclut notamment le remplacement du moteur, de divers joints, de l’huile moteur ou encore du turbo compresseur ESD.
Ainsi, il résulte de l’expertise amiable contradictoire que les vices affectant le véhicule n’étaient pas décelables pour des acheteurs profanes et qu’ils préexistaient à la vente du véhicule.
Si le kilométrage du véhicule était de 102 947 lorsqu’il a été acquis d’après les informations qui figurent sur le bon de commande et de 112 401 kms lorsque l’expertise amiable contradictoire a été réalisée, ce qui signifie qu’il a parcouru environ 10 000 kms, il ressort de l’historique repris par l’expert automobile qu’il a nécessité des interventions récurrentes de professionnels jusqu’à ce que ceux-ci préconisent le remplacement du moteur.
Par ailleurs, le coût des réparations nécessaires pour remédier au vice excède celui du prix d’achat du véhicule, ce qui permet de considérer que les acheteurs ne l’auraient pas acquis s’ils en avaient eu connaissance.
L’expertise amiable contradictoire ainsi diligentée, corroborée par le devis de réparation que les demandeurs ont fait établir par le garage Dubois, permettent de considérer que le véhicule acquis est affecté d’un vice caché au sens de l’article 1641 du code civil précité.
Aux termes de l’article 1644 du code civil, dans le cas des articles 1641 et 1643, l’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.
En l’espèce, les acheteurs sollicitent la résolution du contrat de vente du véhicule et la restitution du prix.
En conséquence, il y a lieu de prononcer la résolution de la vente conclue le 4 février 2022 entre Mme [E] et M. [C], d’une part et la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS, d’autre part.
La SARL LEDUC NEGOCE AUTOS sera donc condamnée à restituer le prix de vente du véhicule à Mme [E] et M. [C], soit la somme de 5 990 euros.
Mme [E] et M. [C] seront condamnés à restituer le véhicule à la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS après réception du paiement du prix de vente.
La SARL LEDUC NEGOCE AUTOS sera condamnée à procéder à l’enlèvement du véhicule à ses frais au lieu où il se trouve dans un délai de trois mois à compter de la signification du présent jugement.
Sur les demandes de dommages et intérêts
En application de l’article 1645 du code civil, si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.
Aux termes de l’article 1646 du même code, si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne sera tenu qu’à la restitution du prix, et à rembourser à l’acquéreur les frais occasionnés par la vente.
En l’espèce la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS est un vendeur professionnel de véhicule, sa connaissance des vices est donc présumée.
Aucun élément ne permet de considérer qu’il y aurait lieu d’écarter cette présomption en ce qui concerne la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS.
Elle sera donc tenue de réparer les préjudices causés par ce vice caché.
Sur les frais de la vente et accessoire :
Mme [E] et M. [C] produisent un échéancier de règlement d’une assurance automobile souscrite auprès de l’Olivier Assurance qui mentionne le n° d’immatriculation du véhicule.
Il convient toutefois d’observer que d’après les relevés kilométriques rappelés par l’expert amiable, le véhicule a continué à circuler jusqu’à la date de réalisation de l’expertise le 2 mars 2023.
Les échéances de mars à août 2023 représentent une somme de et 209,88 euros.
Par ailleurs, il convient de faire droit à la demande de 101 euros pour la période de septembre à novembre 2023, soit 3 mois.
La SARL LEDUC NEGOCE AUTOS sera donc condamnée à payer aux demandeurs la somme de 310,88 au titre des frais d’assurance.
Par ailleurs, Mme [E] et M. [C] produisent deux factures du garage Dubois : l’une datée du 1er septembre 2022 et d’un montant de 29,80 euros et l’autre datée du 9 novembre 2022 d’un montant de 25,82 euros au titre de l’achat de litres d’huile Yacco.
Comme précédemment indiqué, l’expert amiable a constaté que le moteur présentait une consommation anormale et excessive d’huile moteur. Les dépenses exposées ont donc un lien direct avec le vice caché du véhicule.
La SARL LEDUC NEGOCE AUTOS sera donc condamnée à payer à ce titre à Mme [E] et M. [C] la somme de 55,62 euros.
Sur le préjudice de jouissance:
Mme [E] et M. [C] produisent trois factures concernant des locations de véhicules :
– Une facture Mobilize en date du 6 mai 2023 pour un montant de 63,77 euros,
– Une facture Ouicar en date du 3 février 2023 pour un montant de 42,59 euros,
– Une facture Mobilize en date du 19 avril 2023 pour un montant de 51,01 euros.
Dans la mesure où l’expert amiable a précisé que le véhicule était immobilisé, il convient de faire droit à ces demandes.
La SARL LEDUC NEGOCE AUTOS sera condamnée à payer aux acquéreurs la somme de 157,37 euros au titre des frais de location de véhicule.
Les acquéreurs ont circulé avec le véhicule jusqu’ à la date de réalisation de l’expertise amiable contradictoire alors que le prix intégral de vente est restitué et qu’ils sont remboursés des frais de location exposés.
Ils ne démontrent donc pas de préjudice de jouissance distinct.
La demande présentée à ce titre sera donc rejetée.
Sur les demandes accessoires
En application de l’article 696 du code de procédure civile, la SARL LEDUC NEGOCE AUTOS sera condamnée aux dépens.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, elle sera condamnée à payer à Mme [E] et M. [C] la somme de 1 200 euros.
Enfin, en application de l’article 514 du code de procédure civile, le présent jugement est assorti de l’exécution provisoire de droit.