Résiliation de bail commercial : obligations de paiement et d’assurance en question

·

·

Résiliation de bail commercial : obligations de paiement et d’assurance en question
Ce point juridique est utile ?

Contexte de l’affaire

Le litige oppose plusieurs demandeurs, dont Monsieur [T] [H] et Madame [J] [Z], à la S.A.R.L. SCMI concernant un bail commercial signé le 7 mai 2021. Ce bail portait sur des locaux d’une superficie d’environ 500 m², destinés à une activité de fabrication de structures métalliques, pour un loyer annuel de 18 000 €.

Motifs de la demande

Les demandeurs ont assigné la S.A.R.L. SCMI en référé en raison d’un défaut de paiement du loyer et d’une absence de justification d’assurance. Malgré des commandements de payer, la S.A.R.L. SCMI n’a pas régularisé sa situation, ce qui a conduit les bailleurs à demander la résiliation du bail et l’expulsion de la locataire.

Arguments des demandeurs

Les demandeurs soutiennent que la locataire n’a pas pris les mesures nécessaires pour assurer les locaux, ce qui constitue une violation grave des obligations contractuelles. Ils affirment également que la locataire ne peut pas refuser de payer le loyer en raison de prétendus manquements des bailleurs, tout en demandant des indemnités pour occupation et loyers impayés.

Réponse de la S.A.R.L. SCMI

La S.A.R.L. SCMI conteste les accusations, affirmant avoir signalé des infiltrations d’eau et que les bailleurs n’ont pas effectué les réparations nécessaires. Elle demande également un délai pour régler d’éventuelles dettes locatives et conteste le montant des arriérés de loyer.

Décision du juge

Le juge a constaté la résiliation du bail et ordonné l’expulsion de la S.A.R.L. SCMI, tout en condamnant cette dernière à verser une indemnité provisionnelle d’occupation et une somme pour les loyers impayés. La demande de suspension des effets de la clause résolutoire et d’expertise a été rejetée, considérant que la locataire n’avait pas justifié de démarches sérieuses pour s’assurer.

Conclusion

La décision a été rendue en faveur des demandeurs, avec des condamnations financières à l’encontre de la S.A.R.L. SCMI, tout en rejetant les autres prétentions de cette dernière.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Nantes
RG n°
24/00781
N° RG 24/00781 – N° Portalis DBYS-W-B7I-NCOZ

Minute N° 2024/977

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

du 07 Novembre 2024

—————————————–

[T], [W], [A] [H]
[J], [S], [U] [Z]
[G], [B], [T] [H]
[R], [Y], [T] [H]
[M], [F], [T] [H]

C/

S.A.R.L. SCMI

—————————————

copie exécutoire délivrée le 07/11/2024 à :

la SELARL EC JURIS – 148
copie certifiée conforme délivrée le 07/11/2024 à :

la SARL CHROME AVOCATS – 322
la SELARL EC JURIS – 148
dossier

MINUTES DU GREFFE

DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES

(Loire-Atlantique)

_________________________________________

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
_________________________________________

Président : Pierre GRAMAIZE

Greffier : Eléonore GUYON

DÉBATS à l’audience publique du 17 Octobre 2024

PRONONCÉ fixé au 07 Novembre 2024

Ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe

ENTRE :

Monsieur [T], [W], [O] [H],
demeurant [Adresse 1]
[Localité 5]

Madame [J], [S], [U] [Z],
demeurant [Adresse 1]
[Localité 5]

Monsieur [G], [B], [T] [H],
demeurant [Adresse 6]
[Localité 5]

Monsieur [R], [Y], [T] [H],
demeurant [Adresse 8]
[Localité 4]

Monsieur [M], [F], [T] [H],
demeurant [Adresse 3]
[Localité 5]

Représentés par Maître Eric CHEDOTAL de la SELARL EC JURIS, avocats au barreau de NANTES

DEMANDEURS

D’UNE PART

ET :

S.A.R.L. SCMI
(RCS SARREGUEMINES 881 662 571),
dont le siège social est sis [Adresse 9]
[Localité 7]
Rep/assistant : Maître Pierrick HAUDEBERT de la SARL CHROME AVOCATS, avocats au barreau de NANTES

DÉFENDERESSE

D’AUTRE PART

PRESENTATION DU LITIGE

Selon acte dressé le 7 mai 2021 par Maître [C] [L], notaire associée à [Localité 5], Monsieur [T] [H], Madame [J] [Z] épouse [H], Monsieur [G] [H], Monsieur [R] [H] et Monsieur [M] [H] ont donné à bail commercial à la S.A.R.L. SCMI des locaux d’une surface de 500 m² environ comprenant des sanitaires et vestiaires, un local de production et un local de stockage isolé dans un bâtiment situé [Adresse 2] à [Localité 5] pour une durée de 9 ans à compter du 15 mai 2021, à destination de l’activité de fabrication de structure métallique et ingénierie, moyennant un loyer annuel de 18 000,00 € hors taxes hors charges, payable mensuellement d’avance.

Se plaignant d’un défaut de paiement du loyer et du défaut de justification d’une assurance malgré des commandements visant la clause résolutoire du 14 mars 2024 et du 18 mars 2024, et ce, en dépit d’un litige injustifié sur des infiltrations dans les locaux, Monsieur [T] [H], Madame [J] [Z] épouse [H], Monsieur [G] [H], Monsieur [R] [H] et Monsieur [M] [H] ont fait assigner en référé la S.A.R.L. SCMI suivant acte de commissaire de justice du 8 juillet 2024 pour solliciter :

– le constat de la résiliation du bail,
– l’expulsion de la S.A.R.L. SCMI et de tous occupants de son chef et ce, au besoin avec l’aide de la force publique,
– l’autorisation de faire transporter les meubles en garde-meubles ou de les séquestrer aux frais et périls de la défenderesse avec sommation de les retirer dans les quatre semaines avant leur mise aux enchères sur autorisation du juge de l’exécution conformément aux articles L 433-1 et suivants, R 433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,
– le paiement d’une indemnité provisionnelle d’occupation de 1 930 € par mois à compter du 14 avril 2024 jusqu’à libération effective des lieux par la remise des clés et son indexation en cas de prolongation au-delà d’un an,
– le paiement provisionnel de la somme de 5 790,00 € au titre des loyers et charges impayés avec intérêts au taux légal à compter du 14 mars 2024,
– le paiement de la somme de 2 000,00 € en application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens, y compris le coût du commandement du 14 mars 2024 et de l’état des créanciers inscrits.

Aux termes de leurs dernières conclusions, Monsieur [T] [H], Madame [J] [Z] épouse [H], Monsieur [G] [H], Monsieur [R] [H] et Monsieur [M] [H] maintiennent leurs prétentions initiales, sauf à réduire la demande de provision sur les loyers et charges impayés à 3 860,00 € et à porter celle en application de l’article 700 du code de procédure civile à 3 000,00 €, en faisant notamment valoir que :

– la locataire n’a pas fait diligence auprès de son assureur pour qu’une expertise puisse avoir lieu et pour lui communiquer des justificatifs, si bien que celui-ci a classé le dossier de dégât des eaux,
– les locaux ne sont plus assurés depuis le 31 décembre 2023 et il n’y a pas de document suffisant pour établir une impossibilité de les assurer, ce qui constitue une infraction grave de nature à justifier l’application de la clause résolutoire,
– alors que la locataire ne conteste pas devoir les sommes réclamées, elle ne peut pas refuser de payer le loyer au motif d’un prétendu manquement à l’obligation de délivrance du bailleur,
– des règlements ont été opérés sur l’un des comptes de l’indivision en dépit des demandes expresses et réitérées de les faire auprès du gestionnaire de l’immeuble, et compte tenu de l’imputation de l’un de ces versements, il n’est plus dû que 3 860,00 € au titre de l’arriéré,
– la demande de provision sur un prétendu préjudice de jouissance se heurte à des contestations sérieuses,
– la cause des infiltrations n’est pas déterminée et il est probable qu’elles résultent du manque d’entretien des gouttières et systèmes d’évacuation des eaux pluviales par le preneur,
– la prise en charge partielle de frais de nettoyage a été acceptée pour mettre fin au litige naissant, sans reconnaissance de responsabilité,
– l’avis de la société COUVERTURE CHARPENTE VIDEMENT est un refus d’intervention qui n’est pas étayé, et ce n’est que deux mois et demi après l’assignation qu’un commissaire de justice a été appelé à faire des constatations et à reprendre les déclarations de la locataire,
– il n’est pas démontré que des grosses réparations seraient à exécuter,
– la demande d’expertise devient sans objet du fait de la résiliation du bail et n’a qu’un but dilatoire,
– la demande de séquestre présentée après s’être fait justice est tardive.

La S.A.R.L. SCMI conclut au renvoi des demandeurs à mieux se pourvoir au fond, à titre subsidiaire à la suspension des effets de la clause résolutoire et à l’octroi d’un délai de 24 mois pour s’acquitter de l’éventuel solde de dette locative qui ne saurait excéder 1 596,00 € en opérant une compensation légale avec sa créance de dommages et intérêts, à titre reconventionnel à l’organisation d’une expertise aux frais avancés des bailleurs, à l’autorisation de séquestrer les loyers et charges jusqu’à la réalisation des travaux incombant aux bailleurs, au rejet du surplus, à la suppression de l’exécution provisoire et à la condamnation de ses adversaires au paiement d’une somme de 2 000,00 € en application de l’article 700 du code de procédure civile outre le dépens, y compris des frais de constats du 26 septembre 2024, en objectant que :

– elle subit d’importantes infiltrations qui l’empêchent de jouir des lieux et qu’elle a signalées dès octobre 2021,
– contrairement à ce qui est allégué, elle a fait diligence pour déclarer le sinistre de dégât des eaux auprès de la MAAF, son assureur, le 4 juillet 2022, mais le sinistre n’a été indemnisé par aucun assureur,
– les bailleurs ayant reconnu devoir prendre en charge les factures de nettoyage après sinistre, ils admettent que le sinistre leur est imputable,
– en dépit de leur engagement, les bailleurs n’ont pas encore fait exécuter les travaux nécessaires,
– de multiples courriers ont été vains,
– comme en justifie l’avis de la société COUVERTURE CHARPENTE VIDEMENT, les infiltrations proviennent non pas seulement de quelques fuites du chéneau et des gouttières mais de grosses réparations incombant aux bailleurs,
– en l’absence de réparations, aucun assureur n’accepte d’assurer les locaux,
– elle est en droit d’opposer l’exception de non-exécution en raison du défaut de respect de l’obligation de délivrance définie par les articles 1719, 1720, 1721 du code civil,
– elle revendique l’indemnisation d’un préjudice de jouissance de 3 000,00 € venant en compensation partielle de la somme restant due de 9 650,00 €, ce qui rend le décompte du commandement sérieusement contestable,
– des délais peuvent lui être accordés à raison de sa bonne foi,
– de l’aveu même des bailleurs, les sommes réclamées sont erronées, dès lors qu’ils ont réduit leur demande de 5 790 à 3 860 €, et il subsiste un doute sur les arriérés allégués de la période du 07/05/21 au 30/11/23 alors qu’il n’y avait pas de réclamations antérieures,
– elle justifie d’un motif légitime de réclamer une expertise sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

L’acte de bail du 7 mai 2021 prévoyait le versement d’un loyer annuel de 18 000,00 € hors taxes hors charges, payable mensuellement d’avance, indexé, ainsi que la souscription d’une assurance par le preneur pour les locaux sous peine de résiliation du bail en cas de non-paiement d’une seule échéance et du non respect de l’obligation d’assurance.

Monsieur [T] [H], Madame [J] [Z] épouse [H], Monsieur [G] [H], Monsieur [R] [H] et Monsieur [M] [H] ont fait délivrer un commandement de payer le 14 mars 2024 et le 18 mars 2024 portant sur un arriéré de loyer et charges de 5 790 € TTC avec commandement d’avoir à justifier d’une assurance, qui rappelait la clause résolutoire insérée au bail et les dispositions de l’article L 145-41 du code de commerce.

Les sommes dues n’ont pas été réglées dans le délai d’un mois imparti par le commandement et il n’a pas été justifié d’une assurance pour les locaux.

Il résulte d’un état récapitulatif des inscriptions délivré par le greffe du tribunal de commerce qu’il n’y a pas de créanciers inscrits au 15 juillet 2024.

La locataire ne saurait se prétendre de bonne foi dans la vaine recherche d’un assureur, alors qu’elle ne rapporte pas la preuve du motif de la résiliation du contrat d’assurance qu’elle avait souscrite auprès de la MAAF jusqu’au 31 décembre 2023 et qu’elle se contente de justifier de démarches auprès d’un courtier par un courriel du 26 septembre 2024 faisant état d’une visite des locaux le lundi précédent, ce qui démontre au contraire l’absence de toute démarche de tentative de poursuivre l’assurance auprès de la MAAF ou de rechercher un autre assureur avant le mois de septembre 2024, en dépit du commandement du 14 mars 2024.

De même, la locataire ne peut se prévaloir d’un manquement des bailleurs à leurs obligations au titre d’un sinistre de dégât des eaux du 21 juin 2022, dont il est justifié par des courriels des assureurs, des bailleurs et de la locataire que le dossier a été classé et pour laquelle elle n’a formé aucune réclamation avant la présente procédure.

S’agissant des dégâts des eaux allégués à compter de juin 2023, la locataire ne rapporte pas la preuve qu’elle a fait une déclaration de sinistre auprès de son assureur et ne produit que ses propres courriers pour justifier de ces événements.

Le manquement allégué à l’obligation de délivrance des locaux ne saurait résulter d’un courriel de la gérante d’une entreprise de couverture du 17 septembre 2024, qui refuse d’intervenir pour des réparations en faisant état de défauts de constitution de la structure non précisés, ni de photographies d’eau sur le sol du local, dont l’impression est datée du 4 octobre 2024, ni d’un constat de commissaire de justice du 26 septembre 2024 accompagné de photographies de flaques d’eau au sol, ces éléments de preuve étant impropres à démontrer un manquement des bailleurs à leurs obligations antérieur à la délivrance du commandement.

Dès lors, il n’y a pas de contestation sérieuse sur le principe de l’acquisition de la clause résolutoire qu’il conviendra de constater, ce qui justifie l’expulsion du preneur et de tous occupants de son chef au besoin avec l’aide de la force publique.

Il n’est pas nécessaire de prendre des dispositions particulières concernant les meubles dont le sort est réglé de plein droit par celles du code des procédures civiles d’exécution.

L’indemnité provisionnelle d’occupation sera fixée au montant du dernier loyer avec charges, c’est à dire la somme de 1 930 € TTC par mois, révisable le cas échant selon les mêmes modalités que celles concernant le loyer.

Le décompte des loyers et accessoires permet de constater qu’il est dû 3 860,00 € jusqu’au 31 mars 2024, de sorte que cette somme n’est pas sérieusement contestable et sera accordée à titre de provision avec intérêts au taux légal à compter du commandement de payer, étant souligné que la réduction du montant finalement réclamé due à la prise en compte d’un versement opéré par la locataire sur un autre compte que celui désigné par les bailleurs, n’est pas de nature à créer un doute sur la créance ni à constituer une contestation sérieuse, et étant observé que la contestation pour la première fois dans les dernières conclusions d’un impayé antérieur au 30/11/23 est inopérante, alors que c’est à celui qui se prétend libéré d’une dette d’en rapporter la preuve.

La demande de compensation avec une réclamation de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance, qui n’est calculée sur aucun élément objectif et qui ne repose sur aucun élément de preuve de nature à démontrer sérieusement un préjudice résultant d’un supposé manquement des bailleurs, ne peut qu’être rejetée en l’état.

Il ne saurait être fait droit à une demande de suspension des effets de la clause résolutoire, alors que la débitrice ne justifie pas de démarches sérieuses pour s’assurer depuis janvier 2024 ni de difficultés financières, et que l’exception de non-exécution dont elle s’est prévalue n’aurait pu jouer que si les locaux avaient été entièrement et durablement inexploitables.

De même, le bail étant résilié, la demande d’expertise ne repose sur aucun motif légitime et la demande de séquestre des loyers devient sans objet.

Il est équitable de fixer à 1 500 € l’indemnité pour frais d’instance non compris dans les dépens que la S.A.R.L. SCMI devra verser à la demanderesse en application de l’article 700 du code de procédure civile.

DECISION

Par ces motifs, Nous, juge des référés, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

Constatons la résiliation du bail,

Ordonnons l’expulsion de la S.A.R.L. SCMI et celle de tous occupants de son chef au besoin avec l’aide de la force publique à compter de la signification de l’ordonnance,

Condamnons la S.A.R.L. SCMI à payer à Monsieur [T] [H], Madame [J] [Z] épouse [H], Monsieur [G] [H], Monsieur [R] [H] et Monsieur [M] [H] :
– une indemnité provisionnelle d’occupation de 1 930 € par mois à compter du 14 avril 2024 et jusqu’à libération complète des lieux, ladite indemnité étant indexée selon les mêmes modalités que celles prévues au bail pour le loyer,
– une provision de 3 860,00 € au titre des loyers et charges dus au 31/03/24 avec intérêts au taux légal à compter du 14 mars 2024,
– une somme de 1 500,00 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejetons toutes autres prétentions plus amples ou contraires,

Condamnons la S.A.R.L. SCMI aux dépens, y compris le coût du commandement du 14 mars 2024 et des frais de levée de l’état des créanciers inscrits.

Le Greffier, Le Président,

Eléonore GUYON Pierre GRAMAIZE


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x