Résiliation de bail commercial et conséquences d’une procédure collective : enjeux de recevabilité et de créances impayées

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Résiliation de bail commercial et conséquences d’une procédure collective : enjeux de recevabilité et de créances impayées
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Contexte du Bail

La SCI d’Atessa a conclu un bail dérogatoire avec la société MDRH le 11 mai 2014, portant sur des locaux à Saint-Rémy-sur-Avre, destinés à des activités de garage. Le bail était établi pour une durée de 23 mois, avec un loyer annuel total de 31.800 € HT, payable mensuellement.

Commandement de Payer

En raison de l’impayé de la société MDRH, la SCI d’Atessa a émis un commandement le 16 juin 2015, réclamant le paiement d’une somme de 7.954,40 €. Faute de régularisation dans le délai imparti, la SCI a assigné MDRH devant le tribunal de grande instance de Chartres.

Décision du Tribunal de Grande Instance

Le 18 décembre 2015, le juge des référés a constaté l’acquisition de la clause résolutoire au 17 juillet 2015, ordonné l’expulsion de MDRH et condamné cette dernière à payer 18.191,11 € pour arriérés locatifs, ainsi qu’une indemnité d’occupation mensuelle.

Appel et Incendie

MDRH a interjeté appel de la décision et a continué à occuper les lieux jusqu’au 11 avril 2016. Un incendie a été signalé dans les locaux le 18 avril 2016, et les clés ont été remises le 4 octobre 2016.

Arrêt de la Cour d’Appel

Le 27 avril 2017, la cour d’appel de Versailles a partiellement infirmé la décision du juge des référés, en considérant qu’il n’y avait pas lieu de constater la résiliation du bail ni d’ordonner l’expulsion.

Saisie Conservatoire

Le 2 octobre 2019, la SCI d’Atessa a effectué une saisie conservatoire sur le compte de MDRH, d’un montant de 12.399,28 €, qui a été dénoncée le 9 octobre.

Assignation en Résiliation

Le 31 octobre 2019, la SCI d’Atessa a assigné MDRH en résiliation de bail, expulsion et paiement des sommes dues. L’affaire a été enrôlée le 5 mars 2020.

Procédure de Redressement Judiciaire

Le 30 janvier 2020, un jugement a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de MDRH. La SCI d’Atessa a déclaré une créance de 49.445,15 € pour loyers impayés.

Conversion en Liquidation Judiciaire

Le 4 mars 2021, la procédure de redressement a été convertie en liquidation judiciaire, avec un plan de cession arrêté le 15 avril 2021 au profit d’une nouvelle société.

Radiation et Rétablissement de l’Affaire

L’affaire a été radiée le 11 octobre 2022, puis rétablie le 21 octobre 2022 pour jonction avec une autre assignation. Elle a été de nouveau radiée le 4 janvier 2023 avant d’être rétablie le 20 avril 2023.

Demandes de la SCI d’Atessa

Dans ses dernières conclusions, la SCI d’Atessa a demandé la constatation de la résiliation du bail, le paiement des créances et la mainlevée de la saisie conservatoire, tout en contestant la prescription des demandes de MDRH.

Réponses de la SAS MDRH

La SAS MDRH a contesté la validité de l’assignation, invoquant la caducité et la prescription des demandes de la SCI d’Atessa, tout en demandant des indemnités pour frais irrépétibles.

Décision du Tribunal

Le tribunal a déclaré irrecevable l’action de la SCI d’Atessa, en raison de l’ouverture de la procédure collective de MDRH, et a condamné la SCI aux dépens, sans application de l’article 700 du code de procédure civile.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Versailles
RG n°
23/02280
Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Troisième Chambre
JUGEMENT
07 NOVEMBRE 2024

N° RG 23/02280 – N° Portalis DB22-W-B7H-RIWN
Code NAC : 30B

DEMANDERESSE :

La société D’ATESSA, société civile immobilière immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés d’EVREUX sous le numéro 492 619 804 dont le siège social est situé [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,

représentée par Maître Martine DUPUIS de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES et par Maître Rebecca ROYER, avocat plaidant au barreau de PARIS.

DÉFENDERESSES :

1/ La société MDRH exerçant sous le nom commercial «1961 Classics Classic 78», société par actions simplifiée immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de VERSAILLES sous le numéro 802 529 578 dont le siège social est situé [Adresse 4], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,

2/ La SELARL JSA prise en la personne de Maître [S] [V] en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société MDRH désignée à cette fonction par le jugement du Tribunal de Commerce de Versailles en date du
04 Mars 2021, domiciliée [Adresse 2],

représentées par Maître Monique TARDY de l’ASSOCIATION AVOCALYS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES et par Maître Aurélie VERGNE, avocat plaidant au barreau d’ORLEANS.

ACTE INITIAL du 14 Avril 2023 reçu au greffe le 19 Avril 2023.

DÉBATS : A l’audience publique tenue le 17 Septembre 2024, Monsieur JOLY, Président de la Chambre et Monsieur LE FRIANT, Vice-Président, siégeant en qualité de juges rapporteurs avec l’accord des parties en application de l’article 805 du Code de procédure civile, assistés de Madame LOPES DOS SANTOS, Greffier, ont indiqué que l’affaire sera mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 07 Novembre 2024.

MAGISTRATS AYANT DÉLIBÉRÉ :
M. JOLY, Premier Vice-Président Adjoint
Monsieur LE FRIANT, Vice-Président
Madame FRANÇOIS-HARY, Première Vice-Présidente

GREFFIER : Madame LOPES DOS SANTOS

* * * * * *

EXPOSE DES FAITS

Aux termes d’un acte sous seing privé en date du 11 mai 2014, la SCI d’Atessa a donné à bail dérogatoire à la société MDRH divers locaux situés [Adresse 3] à Saint-Rémy-sur-Avre (28), à destination de garage (carrosserie, mécanique et peinture), pour une durée de 23 mois à compter de la remise des clés du local commercial, moyennant un loyer annuel de 10.200 € HT pour les équipements et 21.600 € HT pour le bâtiment, soit un loyer annuel total de 31.800 € hors taxes que le preneur s’est engagé à régler, en plus des taxes, impôts, charges et prestations afférentes aux locaux loués, le 4 de chaque mois.

Faisant grief à la société MDRH de ne pas s’acquitter du prix du bail aux termes convenus, la SCI d’Atessa lui a fait délivrer, le 16 juin 2015, un commandement visant la clause résolutoire d’avoir à payer la somme de 7.954,40 €, dont
185,29 € au titre du coût de l’acte.

Les causes du commandement n’ayant pas été apurées dans le délai d’un mois imparti, la SCI d’Atessa a fait assigner la société MDRH devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Chartres. Lors de l’audience de plaidoiries, qui s’est tenue le 4 décembre 2015, la société MDRH a procédé à un règlement de 18.550 €.

Dans une ordonnance rendue le 18 décembre 2015, le juge des référés du tribunal de grande instance de Chartres a notamment constaté l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail commercial au 17 juillet 2015, ordonné l’expulsion de la société MDRH et condamné le preneur au paiement provisionnel de la somme de 18.191,11 € à valoir sur l’arriéré locatif arrêté au 31 décembre 2015 (taxe foncière incluse) outre une indemnité mensuelle d’occupation de 2.650 € à compter du 4 janvier 2016.

La société MDRH a interjeté appel de cette décision et s’est maintenue dans les lieux au-delà du terme contractuel, fixé au 11 avril 2016. Puis, par courrier du
18 avril 2016, elle a informé la SCI d’Atessa de la survenance d’un incendie dans les locaux donnés à bail, dont les clés ont été remises le 4 octobre 2016.

Dans un arrêt rendu le 27 avril 2017, la cour d’appel de Versailles a partiellement infirmé l’ordonnance rendue par le juge des référés, considérant qu’il n’y avait pas lieu à référé du chef des demandes tendant à constater la résiliation de plein droit du bail, ordonner l’expulsion du preneur et fixer le montant de l’indemnité d’occupation.

Le 2 octobre 2019, la SCI d’Atessa a fait procéder à une saisie conservatoire fructueuse à hauteur de 12.399,28 € sur le compte bancaire de la société MDRH. Cette saisie a été dénoncée au preneur le 9 octobre suivant.

C’est dans ces conditions que, par exploit introductif d’instance signifié le
31 octobre 2019, la SCI d’Atessa a fait assigner la société MDRH en résiliation de plein droit du bail à effet du 17 juillet 2015, expulsion du preneur et paiement des sommes dues. L’affaire a été enrôlée le 5 mars 2020 sous le
RG n° 20/01588.

Par jugement rendu le 30 janvier 2020, c’est-à-dire préalablement à l’enrôlement de la présente affaire, le tribunal de commerce de Versailles a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’endroit de la société MDRH. La société AJRS a été désignée ès qualités d’administrateur judiciaire et la société JSA ès qualités de mandataire judiciaire.

La SCI d’Atessa a alors, le 16 mars 2020, procédé à sa déclaration de créance auprès des organes de procédure collective pour une somme totale de 49.445,15 €, dont 48.189,47 € pour solde de loyers impayés.

Puis, par jugement rendu le 4 mars 2021, le tribunal de commerce de Versailles a converti la procédure de redressement judiciaire en procédure de liquidation judiciaire avec maintien provisoire de l’activité jusqu’au 18 mars 2021, ultérieurement prorogé au 1er avril 2021 puis au 15 avril 2021.

Enfin, par jugement du 15 avril 2021, le tribunal de commerce de Versailles a arrêté le plan de cession de l’entreprise MDRH au profit de la société Oto Branch pour le compte de la société à constituer ADM Moteurs avec une date d’entrée en jouissance fixée au 15 avril 2021.

En l’absence de toutes diligences des parties pour mettre en cause les organes de la procédure collective, l’affaire a été radiée par décision du 11 octobre 2022.

Elle a ensuite été rétablie à l’initiative de la SCI d’Atessa le 21 octobre 2022 sous le RG n° 22/05530 pour jonction avec l’assignation en intervention forcée des organes de la procédure collective enrôlée sous le RG n° 22/05443, jonction prononcée le 25 octobre 2022.

En l’absence de conclusions des parties après jonction, l’affaire a été une nouvelle fois radiée le 4 janvier 2023 avant d’être rétablie le 20 avril 2023, à l’initiative de la SCI d’Atessa, sous le RG n° 23/02280.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées au greffe par voie électronique le 9 octobre 2023, la SCI d’Atessa demande au tribunal de :

Vu les articles 1103, 1104 et 1231-1 du code civil (anciens articles 1134 et 1147 du code civil), 2040 et suivants du code civil,
Vu l’article 700 du code de procédure civile,
Vu le bail commercial en date du 11 mai 2014,
Vu la jurisprudence,
Vu les différentes pièces produites aux débats,

– Déclarer la SCI D’Atessa recevable et bien fondée en ses écritures,
– Constater la validité de l’assignation signifiée à la SAS MDRH le 31 octobre 2019 et placée au fond par RPVA le 27 février 2020 par la SCI D’Atessa,
– Rejeter la demande de prescription formulée par la SAS MDRH,

En conséquence,

– Constater que le bail commercial a été résilié de plein droit par l’acquisition de la clause résolutoire le 17 juillet 2015,
– Constater que depuis le 17 juillet 2015 et jusqu’à son départ des lieux, le
4 octobre 2016, la société MDRH s’est maintenue sans droit ni titre au sein du local commercial,
– Fixer la créance de la somme de 44.520 euros en principal, assortie des intérêts au taux légal à compter du jour de la résiliation du bail commercial, au passif de la liquidation judiciaire de la société MDRH au titre des loyers impayés et de l’indemnité d’occupation due,
– Fixer la créance de la somme de 4.452 euros au passif de la société MDRH par application de la clause pénale du bail commercial,
– Fixer la créance de la somme de 11.341, 59 euros au passif de la liquidation judiciaire de la société MDRH au titre de la taxe foncière 2016 non payée et des pénalités engendrées en 2014, 2015 et 2016 au titre de la taxe foncière due par la société MDRH,

En tout état de cause,

– Fixer la créance de la somme de 22.500 euros au passif de la liquidation judiciaire de la société MDRH en remboursement des frais engagés par la SCI D’ATESSA pour faire évacuer les éléments abandonnés au sein du local commercial par la locataire,
– Fixer la créance de la somme de 21.531,98 euros au passif de la société MDRH en remboursement des pénalités de retard et indemnité de déchéance du terme payés par la SCI D’Atessa à la banque Caisse d’épargne, en raison des impayés de la société MDRH,
– Fixer la créance de la somme de 27.254,07 euros au passif de la société MDRH à titre de dommages et intérêts, en réparation de son préjudice matériel,

– Fixer la créance de la somme de 20.000 euros au passif de la liquidation judiciaire de la société MDRH à titre de dommages et intérêts, en réparation de son préjudice moral,
– Ordonner la mainlevée de la saisie conservatoire effectuée le 2/10/2019 à l’encontre de la société MDRH auprès du Crédit Agricole et relative à la somme de 12.399,28 euros à ce jour détenue par le Crédit Agricole,
– Ordonner le versement de la somme de 12.399,28 euros détenue par le Crédit Agricole entre les mains de la SCI d’Atessa, en réduction des sommes dues par la SAS MDRH,
– Fixer la créance de la somme de 6.000 €et les dépens au passif de la liquidation de la société MDRH en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La SCI d’Atessa conteste la caducité de l’assignation délivrée dans la mesure où elle a procédé aux formalités d’enrôlement le 27 février 2020, dans le délai de 4 mois imparti. Elle réfute, également, toute prescription de ses demandes. Elle explique que l’action en paiement des loyers arriérés ne résulte pas du statut des baux commerciaux mais des règles de prescription de droit commun. Elle souligne, en l’occurrence, que le délai de prescription quinquennal a été interrompu du 13 octobre 2015 (assignation devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Chartres) au 27 avril 2017 (date de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles) puis de nouveau le 31 octobre 2019 (assignation au fond). Elle conclut ainsi à la recevabilité des demandes présentées.

Elle soutient, sur le fondement des articles 1103 et 1104 du code civil, que les stipulations claires et précises du contrat de bail doivent être exécutées. Elle rappelle que les locaux ont été donnés à bail moyennant un loyer annuel de 38.160 € TTC et que la société MDRH demeure redevable, à ce jour :
– des loyers des mois d’avril à décembre 2015 : 28.620 €,
– des loyers des mois d’avril à décembre 2016 : 15.900 €,
pour un total de 44.520 €.

Elle ajoute, au visa de l’article 7 du contrat de bail, que l’intérêt de retard de
10 % sur les sommes dues doit être appliqué, pour une créance supplémentaire de 4.452 €.

Elle évalue sa créance au titre des pénalités de taxes foncières 2014 et 2015 et de la taxe foncière 2016 à la somme de 11.341,59 €. Elle réplique que la saisie conservatoire diligentée n’a pas permis, en l’absence de titre exécutoire, la libération des fonds et qu’elle n’a pas pu, jusqu’à présent, être désintéressée des montants sollicités.

Elle prétend que les impayés de la société MDRH ont entraîné des pénalités ainsi que la déchéance du prêt qu’elle avait souscrit auprès de la Caisse d’Epargne. Après déduction de la somme de 12.379,99 €, elle considère que son préjudice s’élève à la somme de 21.531,98 €.

Elle relève encore qu’aux termes du bail, le preneur s’est engagé à procéder, à la demande du bailleur, à la remise en état des locaux. Elle indique qu’à son départ, la société MDRH a laissé à l’abandon une cuve de gaz et divers autres éléments. Elle demande, par conséquent, l’indemnisation des frais exposés pour les faire évacuer à sa place, à hauteur de 22.500 €.

Elle souligne, au visa de l’article 1231-1 du code civil, que le comportement adopté par la société MDRH est à l’origine de ses difficultés financières (prêt bancaire, engagement de frais de procédure, prêt personnel de la gérante, mise à contribution personnelle des associés) mais aussi de l’incendie des locaux donnés à bail. C’est la raison pour laquelle elle demande une indemnisation supplémentaire de 27.254,07 € pour préjudice matériel, outre un préjudice moral de 20.000 €.

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 27 septembre 2021, la SAS MDRH, la SELARL AJRS et la SELARL JSA demandent au tribunal de :

Vu les articles L145-60, L110-4-4 du Code de Commerce,
Vu les articles 1722 et 2224 du Code Civil,
Vu l’article 757 du Code de Procédure Civile, dans sa version en vigueur au
15 mars 2015 et jusqu’au 16’janvier 2020,

Vu les pièces jointes,

– dire et juger la SAS MDRH recevable et bien fondée en ses demandes et en conséquence,

in limine litis,

constater la caducité de l’assignation signifiée à la société MDRH le
31 octobre 2019,

– constater la prescription des demandes formulées parla SCI D’ATESSA
au titre :
– des reliquats de loyers impayés des mois de juin et septembre 2014, pour la somme totale de 1.195€.
– de la taxe foncière 2014, outre des pénalités à hauteur de 10 % (6.618,36 € +661 ,83 €) représentantla somme totale de 7.280,19 €.
– des sommes dues s’agissant des réparations et de l’entretien du compresseur, représentant la somme de 141,47 €,

au fond,
à titre principal,
– débouter la SCI D’ATESSA de toutes ses demandes plus amples ou contraires,

à titre subsidiaire, si par extraordinaire le Tribunal venait à accueillir les demandes formulées par laSCI D’ATESSA, totalement ou partiellement,

– dire et juger que toute condamnation prononcée à l’encontre de la société MDRH, à quelque titre que ce soit, sera inscrite au passif de la procédure de redressement judiciaire dont celle-ci faitl’objet,

en tout état de cause,
– condamner la SCI D4ATESSA à payer à la SAS MDRH la somme de 5.000 € à titre d’indemnité pour frais irrépétibles sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

– condamner la SCI D’ATESSA aux entiers dépens.

Elles font valoir que l’assignation est caduque en l’absence d’enrôlement dans le délai de quatre mois. Elles affirment que les demandes au titre des reliquats de loyers, de la taxe foncière de 2014 et des sommes dues pour les réparations et l’entretien du compresseur sont prescrites en application des dispositions de l’article 2224 du Code civil et L. 110-4 du Code de Commerce. Au fond, elle conclut que les demandes de la SCI D’ATESSA sont mal-fondées et non justifiées.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 14 novembre 2023.

A l’issue de l’audience qui s’est tenue le 5 mars 2024, le tribunal a demandé la production d’une note en délibérée, notifiée par voie RPVA sous 15 jours, sur sa compétence pour statuer sur la demande de mainlevée de la saisie conservatoire diligentée.

Dans sa note notifiée par voie de RPVA le 20 mars 2024, la SCI d’Atessa rappelle, au visa des articles L. 523-2 et R. 523-7 du code des procédures civiles d’exécution, que la conversion d’une saisie conservatoire en saisie attribution nécessite qu’un jugement revêtu de la formule exécutoire constate la créance et ordonne son versement au créancier. Elle précise aussi, sur le fondement de l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire, que l’intervention du juge de l’exécution n’est prévue qu’en cas de contestation de la saisie conservatoire ou de sa mise en oeuvre.

Les autres développements et pièces communiqués, qui n’ont pas été autorisés, ont été écartés comme étant hors débat.

Par jugement du 30 mai 2024, le tribunal a :

– prononcé la révocation de l’ordonnance de clôture rendue le
14 novembre 2023,

– ordonné la réouverture des débats,

– renvoyé la cause et les parties à l’audience de mise en état du 11 juin 2024 à 09h30 pour signification des dernières conclusions de la SCI d’Atessa à la SELARL JSA, prise en la personne de Maître [S] [V], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MDRH, et avis sur clôture en juge unique ou audience collégiale.

Le 24 mai 2024, la S.C.I. D’ATESSA a fait signifier ses dernières conclusions à la société JSA.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 juin 2024.

L’affaire a été plaidée à l’audience du 17 septembre 2024. Le tribunal a soulevé d’office une fin de non-recevoir de l’action de la S.C.I. D’ATESSA au regard de la prohibition de toute nouvelle action en justice d’un créancier en application des dispositions de l’article L. 622-21 du code de commerce et a autorisé la demanderesse à y répondre par note en délibéré dans un délai d’un mois.

Par note en délibéré reçue le 16 octobre 2024, la S.C.I. D’ATESSA soutient la validité de son assignation au motif que la signification de son assignation avant l’ouverture de la procédure collective rend la procédure valable et que la date de signification prime sur le placement de l’assignation.

L’affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe le
7 novembre 2024.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l’action de la S.C.I. D’ATESSA

Aux termes des dispositions de l’article L. 622-21 du code de commerce, le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n’est pas mentionnée au I de l’article
L. 622-17 et tendant :
1° A la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent ;
2° A la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.
L’article L. 622-22 du même code ajoute que sous réserve des dispositions de l’article L. 625-3, les instances en cours sont interrompues jusqu’à ce que le créancier poursuivant ait procédé à la déclaration de sa créance. Elles sont alors reprises de plein droit, le mandataire judiciaire et, le cas échéant, l’administrateur ou le commissaire à l’exécution du plan nommé en application de l’article L.625-25 dûment appelés, mais tendent uniquement à la constatation des créances et à la fixation de leur montant.

L’article L. 631-14 du même code prévoit que les articles L. 622-3 à L. 622-9, à l’exception de l’article L. 622-6-1 , et L. 622-13 à L. 622-33 sont applicables à la procédure de redressement judiciaire.

Aux termes des dispositions de l’article 757 du code de procédure civile dans sa rédaction applicable entre le 31 octobre 2019 et le 1er janvier 2020, le tribunal est saisi, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation.

Aux termes des dispositions de l’article 754 du code de procédure civile applicable à compter du 1er janvier 2020, la juridiction est saisie, à la diligence de l’une ou l’autre partie, par la remise au greffe d’une copie de l’assignation.

Il en résulte que pour apprécier si le tribunal était saisi d’une instance avant le jugement d’ouverture de la procédure permettant, après interruption, une reprise d’instance ou s’il n’était pas saisi ce qui prohibait toute action en paiement ou en résolution du contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent, il y a lieu de de se référer à la date de remise au greffe de l’assignation. (C. cass., Com., 12 janvier 2010, pourvoi n° 08-19.645)

En outre, la règle de l’arrêt des poursuites individuelles, consécutive à l’ouverture d’une procédure collective, constitue une fin de non-recevoir pouvant être proposée en tout état de cause dont le caractère d’ordre public impose au juge de la relever d’office (arrêt précité).

En l’espèce, il est constant que la S.A.S. MDRH a été placée en redressement judiciaire le 30 janvier 2020.

Or, si la S.C.I. D’ATESSA lui avait délivrer une assignation devant la présente juridiction le 31 octobre 2019, cette assignation n’a été remise au greffe de la juridiction que le 05 mars 2020.

Il en résulte que la présente juridiction a été saisie postérieurement à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire.

En outre, cette assignation a trait à la condamnation de la débitrice au paiement d’une somme d’argent et à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent au sens de l’article L. 622-21 précité.

En conséquence, au regard de la règle de l’arrêt des poursuites individuelles précédemment rappelée, l’action intentée par la S.C.I. D’ATESSA par remise de son assignation le 05 mars 2020 est irrecevable et par voie de conséquence, l’ensemble des prétentions soulevées par la partie demanderesse.
Sur les demandes accessoires

La S.C.I. D’ATESSA succombant, elle sera condamnée à supporter la charge des dépens.

En revanche, les défenderesses n’étant plus intervenues à l’instance depuis le 27 septembre 2021, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile à leur profit.

Il convient de rappeler qu’en application de l’article 514 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal judiciaire statuant publiquement par décision contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe après débats en audience publique,

DECLARE irrecevables l’action et l’ensemble des demandes subséquentes de la S.C.I. D’ATESSA ;

CONDAMNE la S.C.I. D’ATESSA aux dépens ;

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de droit à titre provisoire.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 NOVEMBRE 2024 par M. JOLY, Premier Vice-Président Adjoint, assisté de Madame LOPES DOS SANTOS, Greffier, lesquels ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Carla LOPES DOS SANTOS Eric JOLY


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