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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-5
ARRÊT AU FOND
DU 08 DECEMBRE 2022
N° 2022/
GM
Rôle N° RG 20/01396 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BFQRO
[P] [W]
C/
SAS PERRENOT GRASSE
Copie exécutoire délivrée
le : 08/12/22
à :
– Me Sébastien ZARAGOCI, avocat au barreau de NICE
– Me Audrey JURIENS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRASSE en date du 13 Janvier 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F18/00006.
APPELANT
Monsieur [P] [W], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Sébastien ZARAGOCI, avocat au barreau de NICE
INTIMEE
SAS PERRENOT GRASSE, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Audrey JURIENS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre
Monsieur Antoine LEPERCHEY, Conseiller
Madame Gaëlle MARTIN, Conseiller
Greffier lors des débats : Mme Karen VANNUCCI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.
Signé par Madame Michelle SALVAN, Président de Chambre et Mme Karen VANNUCCI, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS ET PROCEDURE
La société Perrenot Grasse est une société spécialisée dans le transport routier de marchandises.
M.[P] [W] a été embauché par la société Perrenot Grasse le 9 mai 2011 en qualité de conducteur routier polyvalent sous contrat de travail à durée déterminée jusqu’au 31 août 2022.
Le contrat de travail stipule que son emploi relève du groupe 6,, coefficient 138 M, de la convention collective nationale des transports.
Par avenant du 31 août 2011 au contrat de travail, les parties ont conclu un contrat de travail à durée indéterminée.
La convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport n° 3085 s’applique.
Le salarié a été victime d’un accident de la route le 8 janvier 2016.
Le 4 juillet 2017, une étude de poste était réalisée par le médecin du travail avec un entretien avec l’employeur.
Le 11 juillet 2017, M.[P] [W] a effectué une visite de reprise à l’issue de laquelle le médecin du travail a rempli une fiche d’aptitude médicale et a conclu de la façon suivante : « Inapte au poste de chauffeur PL livreur, (‘) Reste apte à un poste de chauffeur PL. »
Sur cette fiche, le médecin du travail cochait également la case intitulée’,’«’inapte’».
Par courrier du 1er août 2017, La société Perrenot Grasse a proposé deux postes de travail au salarié’:
– employé administratif à [Localité 4]
– Aide exploitant à [Localité 1].
Le 3 août 2017, M. [P] [W] a refusé ces postes.
Par courrier daté du 8 août 2017, la société Perrenot Grasse a convoqué M. [P] [W] à un entretien préalable fixé au 18 août 2017 en vue d’un éventuel licenciement.
Par courrier recommandé daté du 22 août 2017, la société Perrenot Grasse a notifié à M.[P] [W] son licenciement pour inaptitude physique à son poste de travail sans reclassement possible.
Par jugement du 13 janvier 2020, le Conseil de prud’hommes de Grasse , saisi par M.[P] [W], a’:
-dit que le licenciement de M. [P] [W] pour inaptitude avec impossibilité de reclassement est fondé ,
-dit que la qualification de M. [P] [W] ne correspond pas au coefficient 150 Groupe 7 ,
-débouté M. [P] [W] de l’ensemble de ses demandes,
-débouté les parties de toutes leurs autres demandes ,
-condamné M. [P] [W], succombant de l’instance, aux entiers dépens.
Le 28 janvier 2020, M. [W] a interjeté appel dans des formes et délais qui ne sont pas critiqués.
L’ordonnance de clôture est rendue le’ 29 septembre 2022.
PRETENTIONS ET MOYENS
Par conclusions notifiées par voie électronique le’ 10 septembre 2020 , M. [P] [W] demande à la cour d’appel de’:
– le déclarer recevable en son appel et l’en dire bien fondé ,
– réformer le Jugement entrepris et statuer de nouveau :
– dire que le licenciement intervenu est dénué de cause réelle et sérieuse ,
– condamner la société Perrenot Grasse au paiement des sommes suivantes :
indemnité compensatrice de préavis ………………………………………………. 4.744,74 euros
congés payés sur préavis ……………………………………………………………… 474,47 euros
dommages et intérêts licenciement abusif ………………………………………. 28.468,44 euros
dommages et intérêts exécution déloyale ……………………………………….. 7.117,11 euros
-ordonner à l’intimée de remettre à l’appelant ses bulletins de salaire et documents sociaux, rectifiés, sous astreinte de 150 € par jour de retard ,
-condamner la société Perrenot Grasse au paiement de la somme de 2.625,12 euros TTC sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de la présente instance.
Sur les manquements de l’employeur à son obligation de reclassement, M [P] [W] fait valoir, en droit que conformément aux dispositions de l’article L4624-6 du Code du travail ‘ en vigueur au moment des faits ”: « l’employeur est tenu de prendre en considération l’avis et les indications ou les propositions émis par le médecin du travail en application des articles L 4624-2 à L4624-4. En cas de refus, l’employeur fait connaître par écrit au travailleur et au médecin du travail les motifs qui s’opposent à ce qu’il y soit donné suite ». Il ajoute que l’employeur qui prétend ne pas pouvoir donner suite aux préconisations médicales doit être de bonne foi, faute de quoi le licenciement sera dénué de cause réelle et sérieuse.
Dans les faits, il a été déclaré apte à la conduite d’un véhicule poids lourd, sous réserve de ne pas porter de charges,. Or, l’employeur a seulement formulé deux propositions de poste administratifs, au lieu de tenter d’adapter le poste de M. [P] [W] conformément aux préconisations du médecin du travail. L’employeur croit bon de se défendre sur une obligation de reclassement qui n’est pas l’objet des débats, puisqu’il lui est reproché de ne pas respecter son obligation d’adaptation en raison de l’aptitude avec réserves arrêtée par le médecin du travail.
Sur sa demande d’application d’un coefficient 150 au lieu du coefficient 138′, M. [P] [W] indique que l’affection au groupe 7 et ainsi au coefficient 150 n’est pas fonction d’une prime qualité mais d’un nombre de points acquis conventionnellement. S’il justifie de 55 points au moins, il doit bénéficier des avantages liés au groupe 7 et au coefficient 150M, en ce compris le minima conventionnel.
Sur sa demande de dommages intérêts au titre de l’exécution déloyale et de la résistance abusive de l’employeur, M. [P] [W], soutient que l’employeur a exécuté de manière déloyale le contrat de travail, en refusant notamment de modifier volontairement le coefficient de son salarié. Par ailleurs, en raison de l’évidence des demandes du salarié, la défense de l’employeur s’analysera en un abus de droit.
Par conclusions notifiées par voie électronique le’ 27 juillet 2020 , la société Perrenot Grasse demande à la cour d’appel de’:
-confirmer le jugement rendu en ce qu’il a :
– dit que la société Perrenot Grasse a rempli ses obligations de reclassement l’égard de M. [P] [W],
– dit que le licenciement de M. [P] [W] pour inaptitude avec impossibilité de reclassement est fondé ,
– dit que le coefficient de M. [P] [W] ne correspond pas au coefficient 150 groupe 7 ,
– débouté M. [P] [W] de l’ensemble de ses demandes,
-infirmer le jugement rendu le 13 janvier 2020 par le Conseil de Prud’hommes de Grasse en ce qu’il l’a débouté de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
En conséquence,
-débouter M. [P] [W] de l’ensemble de ses demandes,
-condamner M. [P] [W] à lui régler 2.000,00 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
-condamner M. [P] [W] aux entiers dépens.
Sur le caractère justifié du licenciement, l’employeur rappelle, en droit l’article L1226-10 du Code du travail , dont le premier alinéa prévoit que’: “Lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.
La société Perrenot Grasse ajoute avoir usé de tous les moyens pour tenter de reclasser son salarié.Elle a également fait deux propositions correspondant aux préconisations du médecin que le salarié a préféré refuser.
Sur la lettre de licenciement, l’employeur soutient encore que M.[P] [W] fait une mauvaise application de la règle de droit sur l’inaptitude et une mauvaise appréciation des faits en ce qu’il indique qu’on serait en présence d’une inaptitude partielle. tel n’est pas le cas.La jurisprudence citée par le salarié concerne le cas de l’aptitude avec réserves.En l’espèce, le médecin du travail a coché l’avis en précisant qu’il s’agissait d’un avis d’inaptitude .
Sur la demande du salarié au titre du coefficient 150 groupe 7 au lieu du coefficient 138 M du groupe 6, , l’employeur répond que M. .[P] [W] fait une mauvaise lecture de la convention collective. Il ne cumule pas assez de points pour obtenir le coefficient 150M.
La convention collective précise que le chauffeur doit être hautement qualifi é et doit en outre bénéficier d’un nombre de points égal au moins à 55.Il s’agit d’un critère cumulatif .La jurisprudence est venue régulièrement rappeler que pour prétendre au bénéfice d’une classification de niveau supérieur, encore faut-il satisfaire à l’ensemble des conditions requises par le coefficient demandé.
En l’espèce, M.[P] [W] ne démontre pas qu’il peut bénéficier du statut de chauffeur« hautement » qualifié.
Sur la demande en indemnisation pour prétendue exécution déloyale du contrat de travail, la société Perrenot Grasse fait d’abord valoir qu’aucun grief ne peut lui être reproché. Le salarié n’ a pas en effet été privé d’un élément de rémunération. De plus, si la juridiction on venait à considérer que le salarié aurait dû bénéficier du coefficient 150, elle condamnerait alors la société à régler un rappel de salaire.
MOTIFS
Sur les demandes relatives à l’exécution du contrat de travail’
1.sur la demande de reclassification
Il incombe au salarié qui se prévaut d’une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail de démontrer qu’il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu’il revendique.
M [P] [W] estime qu’il relevait de la catégorie professionnelle du conducteur routier du groupe 7 coefficient 150 m et non de celle inférieure du groupe 6 coefficient 138 m qui lui était attribuée par son employeur.
Il appartient au’salarié’qui se prévaut d’une’classification’professionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail de démontrer qu’il assure de façon permanente dans le cadre de ses fonctions des tâches et responsabilités relevant de la’classification’qu’il revendique , La charge de la preuve repose sur le salarié qui se prévaut d’un niveau de qualification supérieur, conformément aux règles de droit commun et ce en application de l’article 1315 du code civil, devenu 1353.
L’annexe I ouvriers, nomenclature et définition des emplois résultant de l’accord du 16 juin 1961 à la convention collective nationale des transports routiers du 21 décembre 1950 stipule, s’agissant du groupe 7 que le salarié doit être un’:
‘7. Conducteur hautement qualifié de véhicule poids lourd. – Ouvrier chargé de la conduite d’un véhicule automobile, porteur ou tracteur, et ayant la qualification professionnelle nécessaire à l’exécution correcte (c’est-à-dire avec le triple souci de la sécurité des personnes et des biens, de l’efficacité des gestes ou des méthodes et de la satisfaction de la clientèle) de l’ensemble des tâches qui lui incombent normalement (c’est-à-dire conformément à l’usage et dans le cadre des réglementations existantes) dans l’exécution des diverses phases d’un quelconque transport de marchandises. En particulier : utilise rationnellement (c’est-à-dire conformément aux exigences techniques du matériel et de la sécurité) et conserve en toutes circonstances la maîtrise de son véhicule , en assure le maintien en ordre de marche , a les connaissances mécaniques suffisantes pour lui permettre soit de dépanner son véhicule, s’il en a les moyens, soit en cas de rupture de pièces ou d’organes de signaler à l’entreprise la cause de la panne , peut prendre des initiatives notamment s’il est en contact avec le client , est capable de rédiger un rapport succinct et suffisant en cas d’accident, de rendre compte des incidents de route et des réparations à effectuer à son véhicule , assure l’arrimage et la préservation des marchandises transportées , est responsable de la garde de son véhicule, de ses agrès, de sa cargaison et, lorsque le véhicule est muni d’un coffre fermant à clé, de son outillage , peut être amené en cas de nécessité à charger ou à décharger son véhicule.
Doit en outre justifier habituellement d’un nombre de points égal au moins à 55 en application du barème ci-après : conduite d’un véhicule de plus de 19 tonnes de poids total en charge : 30 points , services d’au moins 250 kilomètres dans un sens : 20 points , repos quotidien hors du domicile (au moins trente fois par période de douze semaines consécutives) : 15 points , services internationaux à l’exclusion des services frontaliers (c’est-à-dire ceux effectués dans une zone s’étendant jusqu’à 50 kilomètres à vol d’oiseau des frontières du pays d’immatriculation du véhicule) : 15 points , conduite d’un ensemble articulé ou d’un train routier : 10 points , possession du CAP ou d’un diplôme de FPA de conducteur routier : 10 points. L’attribution de points pour la conduite de véhicule assurant des transports spéciaux sera de droit pour les titulaires de tout titre de qualification professionnelle reconnu par les parties signataires.’
Il résulte de la convention collective que, pour pouvoir prétendre à l’application du coefficient 150 m du groupe 7, l’appelant doit à la fois démontrer qu’il est un’:«’conducteur hautement qualifié de véhicule poids lourd.’» et qu’il justifie habituellement d’un nombre de points égal au moins à 55 en application du barème de la convention collective.
S’agissant de la première condition, la convention collective prévoit que pour répondre à la définition d’un’:«’conducteur hautement qualifié de véhicule de poids lourd’», le salarié doit démontrer qu’il assure les tâches suivantes’:
-‘ouvrier chargé de la conduite d’un véhicule automobile, porteur ou tracteur, et ayant la qualification professionnelle nécessaire à l’exécution correcte (c’est-à-dire avec le triple souci de la sécurité des personnes et des biens, de l’efficacité des gestes ou des méthodes et de la satisfaction de la clientèle) de l’ensemble des tâches qui lui incombent normalement (c’est-à-dire conformément à l’usage et dans le cadre des réglementations existantes) dans l’exécution des diverses phases d’un quelconque transport de marchandises.
-en particulier : utilise rationnellement (c’est-à-dire conformément aux exigences techniques du matériel et de la sécurité) et conserve en toutes circonstances la maîtrise de son véhicule , en assure le maintien en ordre de marche , a les connaissances mécaniques suffisantes pour lui permettre soit de dépanner son véhicule, s’il en a les moyens, soit en cas de rupture de pièces ou d’organes de signaler à l’entreprise la cause de la panne , peut prendre des initiatives notamment s’il est en contact avec le client , est capable de rédiger un rapport succinct et suffisant en cas d’accident, de rendre compte des incidents de route et des réparations à effectuer à son véhicule , assure l’arrimage et la préservation des marchandises transportées , est responsable de la garde de son véhicule, de ses agrès, de sa cargaison et, lorsque le véhicule est muni d’un coffre fermant à clé, de son outillage , peut être amené en cas de nécessité à charger ou à décharger son véhicule.
Or, M. [P] [W] se contente de dire qu’il dispose des diplômes nécessaires (cap et Bep) pour tenter de démontrer qu’il accomplit toutes les tâches citées en amont, ce qui n’est pas suffisant. Le salarié aurait dû produire des pièces justifiant concrètement de l’exécution desdites tâches requises. Par ailleurs, quand bien même l’employeur n’aurait pas formulé de reproches à l’encontre du salarié concernant certaines des compétences professionnelles listées par la convention collective pour l’attribution du coefficient 150 m, ce la ne signifie pas pour autant que ce dernier réunissait le savoir faire et les connaissances exigées.
Enfin, l’attestation du 15 juin 2017 est bien un indice d’attribution de la meilleure classification professionnelle revendiquée par le salariée, mais elle ne saurait démontrer à elle-seule que le salarié remplissait toutes les conditions posées par la convention collective.
Le jugement est confirmé en ce qu’il déboute le salarié de sa demande.
2-Sur la demande indemnitaire au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail’
M.[P] [W] ne démontre pas la faute de la société Perrenot Grasse, laquelle lui a appliqué la bonne classification professionnelle. M.[P] [W] est débouté de sa demande de dommages intérêts d’un montant de 7.117,11 euros. Le jugement est confirmé de ce chef.
Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail’
1-Sur la demande tendant à voir dire que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse
-Sur la qualification de l’avis d’aptitude du 11 juillet 2017 du médecin du travail’
L’article L 4624-4 du code du travail dans sa version applicable en vigueur depuis le 1er janvier 2017 dispose’:Après avoir procédé ou fait procéder par un membre de l’équipe pluridisciplinaire à une étude de poste et après avoir échangé avec le salarié et l’employeur, le médecin du travail qui constate qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible et que l’état de santé du travailleur justifie un changement de poste déclare le travailleur inapte à son poste de travail. L’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail est éclairé par des conclusions écrites, assorties d’indications relatives au reclassement du travailleur.
Il résulte de cet article de loi que l’inaptitude doit être déclarée par le médecin du travail quand’:«”aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible et que l’état de santé du travailleur justifie un changement de poste ».
En l’espèce, dans sa fiche d’aptitude médicale du 11 juillet 2017, le médecin du travail conclut à l’inaptitude du salarié en mentionnant toutefois également avec ambiguité que ce dernier est’:«’inapte au poste de chauffeur poids lourd livreur’» mais’:«’reste apte au poste de chauffeur poids lourd’».
M.[P] [W] avait été embauché par la société Perrenot Grasse le 9 mai 2011 en qualité de conducteur routier polyvalent, de sorte qu’on peut dire que le poste de travail principal de ce dernier était celui de chauffeur routier. Le médecin du travail a rendu un avis d’aptitude avec réserves et non pas un avis d’inaptitude.
-Sur la prise en considération par l’employeur de l’avis des indications et des propositions émis par le médecin du travail’
Or, l’avis’d’aptitude avec’réserves’ne produit pas les mêmes effets pour l’employeur’qu’un avis d’inaptitude. L’avis d’inaptitude oblige l’employeur’à effectuer des recherches de reclassement, ce qui n’est pas le cas de l’ avis d’aptitude’avec’réserves.
C’est donc à tort, en l’espèce, que l’employeur invoque le fait qu’il serait soumis à une obligation de reclassement en application de l’article L 1226-10 du code du travail.
S’agissant d’un avis d’inaptitude avec réserves, l’employeur était tenu de proposer au salarié son poste, si nécessaire aménagé, ou un emploi similaire, en tenant compte des préconisations du médecin du travail, par application de l’article L 4624-1 du code du travail.
En l’espèce, la société Perrenot Grasse ne démontre pas ni même n’allègue qu’elle ne pouvait pas tenir des comptes des préconisations du médecin du travail, en proposant au salarié un poste de chauffeur poids lourds sans livraisons.
Ainsi, les pièces produites aux débats ne caractérisent pas l’impossibilité pour la société Perrenot Grasse de proposer au salarié son poste si nécessaire aménagé, ou un emploi similaire, en tenant compte des préconisations du médecin du travail.
En conséquence, les deux propositions de reclassement émises par l’employeur le 1er août 2017 et refusées par l’appelant ne pouvaient constituer un motif valable de licenciement.
Conformément à la demande de M. [P] [W], il convient de dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse. Le jugement est infirmé sur ce point.
2-Sur l’indemnité compensatrice de préavis’
Selon l’article L 1234-1 du code du travail’: Lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit :
1° S’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus inférieure à six mois, à un préavis dont la durée est déterminée par la loi, la convention ou l’accord collectif de travail ou, à défaut, par les usages pratiqués dans la localité et la profession ,
2° S’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus comprise entre six mois et moins de deux ans, à un préavis d’un mois ,
3° S’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus d’au moins deux ans, à un préavis de deux mois.
Toutefois, les dispositions des 2° et 3° ne sont applicables que si la loi, la convention ou l’accord collectif de travail, le contrat de travail ou les usages ne prévoient pas un préavis ou une condition d’ancienneté de services plus favorable pour le salarié.
L’article L 1234-5 ajoute’:Lorsque le salarié n’exécute pas le préavis, il a droit, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.
L’inexécution du préavis, notamment en cas de dispense par l’employeur, n’entraîne aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail jusqu’à l’expiration du préavis, indemnité de congés payés comprise.
L’indemnité compensatrice de préavis se cumule avec l’indemnité de licenciement et avec l’indemnité prévue à l’article L. 1235-2.
Si le salarié ne peut en principe prétendre au paiement d’une indemnité pour un préavis qu’il est dans l’impossibilité physique d’exécuter en raison d’une aptitude avec réserves à son emploi, cette indemnité est due au salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l’employeur à son obligation de tenir compte des préconisations du médecin du travail.
M.[P] [W] a donc droit l’indemnité compensatrice de préavis prévue à l’article L. 1234-5 et ce d’une durée de deux mois. En l’absence de contestation subsidiaire de l’employeur sur le mode de calcul de cette indemnité, le montant de celle-ci peut se calculer ainsi’:
Salaire mensuel moyen brut (soit le montant du salaire mensuel moyen indiqué par le salarié résultant de ses bulletins de paie ) ………………………………………………………….2372, 37 euros bruts
Indemnité compensatrice de préavis ……………………………………………….4.744,74 euros (2.372,37 euros X 2 mois) .
Dès lors, il y a lieu de condamner la société Perrenot Grasse à régler à M. [P] [W] une indemnité compensatrice de préavis de 4.744,74 euros ainsi que des congés payés sur préavis équivalent à 10% de la somme susvisée, soit 474,47 euros.
Le jugement est infirmé sur ce point.
3-Sur les dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’:
Selon l’article L 1235-3 du code du travail, dans sa version en vigueur du 1er mai 2008 au 24 septembre 2017, applicable à ce licenciement notifié le 222 août 2017′:Si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement prévue à l’article’L. 1234-9.
Conformément aux dispositions de l’article L1235-3 du Code du travail, les salariés ayant au moins deux années d’ancienneté dans une entreprise de plus de 11 salariés, peuvent prétendre, en cas de licenciement abusif, à une indemnité égale au mois à 6 mois de salaire.
L’appelant ne produit aucune pièce concernant ses situations financières et personnelles depuis le 22 août 2017, date de notification de son licenciement. En conséquence, une indemnité égale à 6 mois de salaires réparera suffisamment son préjudice.
Les dommages intérêts alloués sont de 2372, 37 euros x 6 soit la somme de 14 234, 22 euros. Dès lors, il y a lieu de condamner la société Perrenot Grasse à régler à M. [P] [W] des dommages intérêts à hauteur de 14 234, 22 euros. Le jugement est infirmé sur ce point.
Sur la remise de documents’:
La cour ordonne à l’intimée de remettre à l’appelant les documents de fin de contrat rectifiés.
Il n’est pas nécessaire d’assortir cette obligation d’une astreinte. La demande de l’appelant en ce sens est rejetée.
Sur les frais du procès’:
Le jugement est infirmé en ce qu’il condamne M. [P] [W] aux dépens de première instance.
En application des dispositions des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la société Perrenot Grasse sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel ainsi qu’au paiement d’une indemnité de 2.625, 12 euros au bénéfice de l’appelant.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe, en matière prud’homale,
-confirme le jugement en ce qu’il’a’:
-débouté M. [P] [W] de sa demande de dommages intérêts pour exécution déloyale et résistance abusive,
-dit que la qualification de M. [P] [W] ne correspondait pas au coefficient 150 groupe 7,
-infirme le jugement en ce qu’il a’:
-dit que le licenciement de M. [P] [W] était fondé,
-rejeté les demandes financières de M. [P] [W] en lien avec un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-condamné M. [P] [W] aux dépens de première instance,
statuant à nouveau’:
-dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse,
-condamne la société Perrenot Grasse à régler à M. [P] [W]’:
4774, 74 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis
474, 47 euros au titre des congés payés afférents
14 234, 22 euros bruts au titre des dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
y ajoutant,
-ordonne à la société Perrenot Grasse de remettre à M. [P] [W] les documents de fin de contrat rectifiés’,
-rejette la demande d’astreinte,
-ordonne le remboursement par la société Perrenot Grasse aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage versées à M. [P] [W], du jour de son licenciement au jour du jugement, dans la limité de 3 mois d’indemnité de chômage,
-condamne la société Perrenot Grasse aux dépens de première instance et d’appel,
-condamne la société Perrenot Grasse à payer à M. [P] [W] une somme de 2 625, 12 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-déboute la société Perrenot Grasse de sa demande d’indemnité de procédure en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-Rejette toute autre demande.
LE GREFFIER LE PRESIDENT