Your cart is currently empty!
27 juin 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
22/05873
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 51A
1re chambre 2e section
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 27 JUIN 2023
N° RG 22/05873 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VNTT
AFFAIRE :
M. [F] [Y]
…
C/
Mme [P] [N]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Juin 2021 par le Tribunal de proximité de COURBEVOIE
N° RG : 11-19-1139
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 27/06/23
à :
Me Oriane DONTOT
Me Ophélia FONTAINE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [F] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentant : Maître Oriane DONTOT de l’AARPI JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – N° du dossier 20210684 –
Représentant : Maître Thierry ZANG, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0894
Madame [M] [S]
[Adresse 1]
[Localité 7]
Représentant : Maître Oriane DONTOT de l’AARPI JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – N° du dossier 20210684 –
Représentant : Maître Thierry ZANG, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0894
S.C.I. DE FAMILLE MONTE MONREALE ET BELLO
N° SIRET : 814 956 272 RCS Paris
Ayant son siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentant : Maître Oriane DONTOT de l’AARPI JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – Représentant : Maître Thierry ZANG, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0894
APPELANTS
****************
Madame [P] [N] agissant à titre personnel et Ès qualités d’ayant droit de Monsieur [Z] [U]
[Adresse 6]
[Localité 7]
Représentant : Maître Ophélia FONTAINE, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 672 – N° du dossier 2021.435
Représentant : Maître Marc GANILSY, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1594 –
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 14 Février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Jean-Yves PINOY, conseiller et Monsieur Philippe JAVELAS, Président, chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,
Madame Isabelle BROGLY, Magistrat honoraire,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,
EXPOSE DU LITIGE
Par acte sous seing privé du 28 avril 2017, à effet du 1er mai 2017, M. [Z] [U] et Mme [P] [N], épouse [U], ont donné en location à la société Monte Monreale et Bello un logement à usage d’habitation de ses gérants, M. [F] [Y] et Mme [M] [S] situé [Adresse 6] à [Localité 7], moyennant un loyer mensuel hors charges indexé de 3 400 euros.
Un avenant à ce bail a été signé entre les parties le 23 mars 2018 portant sur la reconduction du bail pour une année à compter du 1er mai 2018 et prévoyant la tacite reconduction annuelle à compter de cette date.
Se prévalant d’échéances impayées, les époux [U] ont fait délivrer le 17 septembre 2019 à la société Monte Monreale et Bello un commandement de payer visant la clause résolutoire pour la somme de 7 150 euros au titre des loyers et charges impayés arrêtés au mois de septembre 2019 inclus.
Par actes de commissaire de justice délivrés les 29 et 30 octobre 2019, la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] ont assigné M. et Mme [U] ainsi que le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 6] devant le tribunal d’instance de Courbevoie aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– la communication, sous astreinte de 50 euros par jour de retard des titres de propriétés relatifs à l’immeuble, des états de lieux et des diagnostics techniques,
– l’annulation du commandement de payer du 17 septembre 2019,
– la requalification du bail en question en bail d’habitation portant sur un logement vide pour une durée de 6 ans,
– la condamnation des époux [U], sous astreinte de 50 euros par jour de retard, à effectuer les travaux de remise en état du logement et sa mise en conformité aux normes techniques,
– subsidiairement, la mise en place d’une expertise judiciaire aux fins de constater les désordres affectant le logement et sa jouissance,
– en tout état de cause, et à titre provisionnel, la condamnation des époux [U] à leur verser la somme de 50 000 euros au titre du préjudice de jouissance,
– la condamnation des époux [U] aux dépens.
Par jugement mixte contradictoire du 18 juin 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Courbevoie a :
Au fond,
– débouté la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] de leur demande en requalification du contrat de bail du 28 avril 2017 portant sur un logement sis [Adresse 6] à [Localité 7], ledit bail devant être qualifié de bail meublé ressortant du titre 1er bis de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989,
– rejeté la demande de la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] visant au prononcé de la nullité du commandement de payer délivré par les époux [U] le 17 septembre 2019,
– rejeté la demande de la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] visant à faire valider judiciairement l’exception d’inexécution invoquée pour refuser de payer le montant des loyers prévus au bail du 28 avril 2017,
– débouté la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] de leur demande en suspension des loyers pendant le temps de la procédure,
– constaté, à compter du 18 novembre 2019, l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée au bail du 28 avril 2017 liant les parties et dit que la société Monte Monreale et Bello devrait quitter les lieux loués sis [Adresse 6] à [Localité 7] et les rendre libres de toute occupation en satisfaisant aux obligations des locataires sortants, notamment par la remise des clefs,
– ordonné l’expulsion, à défaut de départ volontaire, de la société Monte Monreale et Bello ainsi que celle de tous occupants de son chef et ce, au besoin, avec le concours de la force publique et d’un serrurier à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la signification d’un commandement de libérer les lieux,
– condamné la société Monte Monreale et Bello à payer à M. et Mme [U] la somme de 13 651,67 euros correspondant à la dette locative, jusqu’au 17 novembre 2019 inclus et ce avec intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2019, date du commandement de payer sur la somme de 7 150 euros et à compter de la décision pour le surplus,
– fixé le montant de l’indemnité d’occupation au montant du loyer et des charges qui auraient été dues en cas de non-résiliation du bail,
– condamné in solidum, la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] à payer la somme de 45 096,67 euros à M. et Mme [U] au titre de l’indemnité d’occupation couvrant la période allant du 18 novembre 2019 au 30 septembre 2020,
– condamné in solidum, la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] à payer à M. et Mme [U] à compter du 1er octobre 2020, l’indemnité mensuelle d’occupation, jusqu’à la date de libération effective des lieux,
– dit que le sort des meubles serait réglé conformément aux articles L433-1 a L433-3 du code des procédures civiles d’exécution,
Avant dire-droit sur le surplus des demandes :
– ordonné une mission d’expertise,
– commis pour y procéder M. [C] [G], expert inscrit sur la liste de la cour d’appel de Versailles, [Adresse 5], à [Localité 9] (92), avec pour mission, les parties régulièrement convoquées, après avoir pris connaissance du dossier, s’être fait remettre tous documents utiles et avoir entendu les parties ainsi que tout sachant, de :
– se rendre sur les lieux sis [Adresse 6], à [Localité 7], après y avoir convoqué les parties,
– examiner les désordres, malfaçons, non façons, non-conformités contractuelles allégués dans l’assignation et les conclusions de la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S],
– les décrire, en indiquer la nature, l’importance, la date d’apparition, en rechercher la ou les causes,
– dire si l’ouvrage a fait l’objet d’une réception expresse, le cas échéant, en préciser la date, indiquer les réserves y figurant en relation avec les désordres allégués, préciser, parmi les désordres malfaçons, non-façons, non-conformités contractuelles allégués, lesquels étaient apparents à cette date,
– fournir tout renseignement de fait permettant au tribunal de statuer sur les éventuelles responsabilités encourues,
– dans le cas où ces désordres, malfaçons, non-façons, non-conformités contractuelles constitueraient des dommages affectant l’ouvrage dans un de ses éléments d’équipement sans rendre l’immeuble impropre à sa destination, de dire si cet élément fait ou non indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, fondation, ossature, clos ou couvert,
– dans l’affirmative, préciser si ces désordres affectent la solidité du bien ou son bon fonctionnement,
– donner tous éléments motivés sur les causes et origines des désordres et malfaçons dont s’agit en précisant s’ils sont imputables :
* à la conception,
* à un défaut de direction ou de surveillance,
* à l’exécution,
* aux conditions d’utilisation ou d’entretien,
* à une cause extérieure
* dans le cas de causes multiples, évaluer les proportions relevant de chacune d’elles, en précisant les intervenants concernés,
– après avoir exposé ses observations sur la nature des travaux propres à remédier aux désordres, et leurs délais d’exécution, chiffrer, à partir des devis fournis par les parties, éventuellement assistées d’un maître d’oeuvre, le coût de ces travaux,
– fournir tous éléments de nature à permettre ultérieurement à la juridiction saisie d’évaluer les préjudices de toute nature, directs ou indirects, matériels ou immatériels résultant des désordres, notamment le préjudice de jouissance subi ou pouvant résulter des travaux de remise en état,
– dire si des travaux urgents sont nécessaires soit pour empêcher l’aggravation des désordres et du préjudice qui en résulte, soit pour prévenir les dommages aux personnes ou aux biens, dans l’affirmative, à la demande d’une partie ou en cas de litige sur les travaux de sauvegarde nécessaires, décrire ces travaux et en faire une estimation sommaire dans un rapport intermédiaire qui devra être déposé aussitôt que possible,
– faire toutes observations utiles au règlement du litige,
– mettre, en temps utile, au terme des opérations d’expertise, les parties en mesure de faire valoir leurs observations, qui seront annexées au rapport,
– désigné le juge des contentieux de la protection au tribunal de proximité de Courbevoie comme juge chargé du contrôle de l’expertise pour suivre la mesure d’instruction et statuer sur tous incidents,
– dit que l’expert serait saisi et effectuerait sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu’il déposerait son rapport en un exemplaire original au greffe du tribunal de proximité de Courbevoie, dans le délai de 6 mois à compter du jugement, sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile au juge chargé du contrôle de l’expertise (en fonction d’un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties),
– dit que l’expert devrait fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l’article 276 du code de procédure civile et rappelé qu’il ne serait pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives,
– dit que l’expert devrait rendre compte au juge charge du contrôle de l’expertise de l’avancement de ses travaux d’expertise et des diligences accomplies et qu’il devrait l’informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l’exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile,
– fixé à la somme de 3 000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, qui devra être consignée par les parties demanderesses, soit la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S], entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de ce tribunal, dans le délai maximum de six semaines à compter de l’ordonnance, sans autre avis,
– dit que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l’expert serait caduque et privée de tout effet,
– sursis à statuer sur les demandes indemnitaires des parties, sur les demandes des sociétés Rénovation concept et AXA IARD, sur les appels en garantie et sur les demandes portant sur les éventuels travaux de remise en état du logement, dans l’attente du dépôt du rapport d’expertise,
– dit que l’affaire serait rappelée à l’audience du 2 décembre 2021, quand bien même le rapport d’expertise ne serait toujours pas rendu, le jugement valant convocation,
– réservé les dépens, qui seraient mis à la charge de la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] si la désignation de l’expert devenait caduque,
– ordonné l’exécution provisoire de la décision.
L’expert désigné ayant refusé sa mission, un nouvel expert – M. [E] [L] – a été désigné.
L’expert a remis son rapport définitif le 6 juillet 2022.
Par déclaration reçue au greffe le 20 juillet 2021, M. [Y], Mme [S] et la société de famille Monte Monreale et Bello ont relevé appel de ce jugement.
M. [Y], Mme [S] et la société de famille Monte Monreale et Bello ont été expulsé le 30 juillet 2021.
M. [Z] [U] est décédé le [Date décès 2] 2022. Compte tenu de la renonciation des enfants des époux [U] à la succession de leur père, Mme [P] [U] est devenu le seul ayant droit de feu son époux.
Par ordonnance rendue le 23 juin 2022, le conseiller de la mise en état a :
– constaté l’interruption de l’instance,
– dit qu’à défaut de régularisation avant le 23 septembre 2022 pour assigner les héritiers de M. [Z] [U], l’affaire serait radiée.
Aux termes de leurs conclusions signifiées le 10 janvier 2023, M. [Y], Mme [S] et la société de famille Monte Monreale et Bello, appelants, demandent à la cour de :
– infirmer le jugement rendu par le tribunal de proximité de Courbevoie le 18 juin 2021 en ce qu’il :
* les a déboutés de leur demande en requalification du contrat de bail du 28 avril 2017 portant sur un logement sis [Adresse 6] à [Localité 7], ledit bail devant être qualifié de bail meublé ressortant du titre 1er bis de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989,
* a rejeté leur demande visant au prononcé de la nullité du commandement de payer délivré par les époux [U] le 17 septembre 2019,
* a rejeté leur demande visant à faire valider judiciairement l’exception d’inexécution invoquée pour refuser de payer le montant des loyers prévus au bail du 28 avril 2017,
* les a déboutés de leur demande en suspension des loyers pendant le temps de la procédure,
* a constaté, à compter du 18 novembre 2019, l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée au bail du 28 avril 2017 liant les parties et dit que la société Monte Monreale et Bello devrait quitter les lieux loués sis [Adresse 6] à [Localité 7] et les rendre libres de toute occupation en satisfaisant aux obligations des locataires sortants, notamment par la remise des clefs,
* a ordonné l’expulsion, à défaut de départ volontaire, de la société Monte Monreale et Bello ainsi que celle de tous occupants de son chef et ce, au besoin, avec le concours de la force publique et d’un serrurier à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la signification d’un commandement de libérer les lieux,
*a condamné la société Monte Monreale et Bello à payer à M. et Mme [U] la somme de 13 651,67 euros correspondant à la dette locative, jusqu’au 17 novembre 2019 inclus et ce, avec intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2019, date du commandement de payer sur la somme de 7 150 euros et à compter de la décision pour le surplus,
* a fixé le montant de l’indemnité d’occupation au montant du loyer et des charges qui auraient été dues en cas de non-résiliation du bail,
* les a condamnés in solidum à payer la somme de 45 069,67 euros à M. et Mme [U] au titre de l’indemnité d’occupation couvrant la période allant du 18 novembre 2019 au 30 septembre 2020,
* les a condamnés in solidum à payer à M. et Mme [U] à compter du 1er octobre 2020, l’indemnité mensuelle d’occupation, jusqu’à la date de libération effective des lieux,
* a dit que le sort des meubles serait réglé conformément aux articles L.433-1 à L.433-3 du code des procédures civiles d’exécution,
Statuant à nouveau,
– condamner Mme [U] à rembourser le dépôt de garantie de 6 800 euros,
Pour une bonne administration de la justice,
– à titre principal, au visa des articles 528 et suivants du code de procédure civile, user de la faculté d’évocation offerte à la cour pour trancher (après expertise), les points du litige qui n’ont pas été tranchés en première instance notamment les demandes indemnitaires croisées des parties, laquelle faculté d’évocation n’interdira pas à l’intimée de se tourner ultérieurement si elle le souhaite contre les parties contradictoirement présentes à l’expertise de M. [L],
– ou à titre subsidiaire, au visa des articles 378 et suivants du code de procédure civile, surseoir à statuer sur l’ensemble du litige, des demandes des appelants et de l’intimée, en l’attente du jugement en ouverture du rapport d’expertise du tribunal de proximité de Courbevoie (RG 11-19-001139) en suite de l’audience de plaidoiries, fixée contradictoirement, parties représentées à l’audience du 8 décembre 2022 par le dit tribunal au jeudi 11 mai 2023 à 11 heures au dit tribunal et de l’acquiescement ou de l’appel alors à joindre à celui dont la cour est déjà saisie, des parties ou permettre l’assignation en intervention forcée par l’intimée, de celles des parties à la première instance qu’elle souhaiterait, le cas échéant, appeler en garantie,
– rejeter toute autre demande d’irrecevabilité ou de débouté par l’intimée des demandes d’évocation ou de sursis à statuer formées dans l’intérêt du traitement dans leur ensemble des différents points indissociables du litige s’agissant, pour une bonne administration de la justice, non pas de demandes au sens strict mais de mesures à la discrétions des juges,
– rejeter les demandes tardives d’annulation d’assignations introductives d’instance et de validité du congé pour reprise (faute de justification réelle et sérieuse de la décision de reprise loi du 6 juillet 1989, art.15) de l’intimée ayant fait l’objet de longs débats oraux et conclusions écrites contradictoires en première instance,
– requalifier le bail consenti en bail d’habitation nu à usage d’habitation principale pour une durée de 6 ans pour la période du 1er mai 2017 au 30 avril 2023,
– prononcer la nullité du commandement de payer délivré le 17 septembre 2019 par la SCP Cheene et associés, huissiers de justice, délivré à une autre adresse que celle de la société Monte Monreale et Bello et qui ne comprend ni l’état civil complet l’adresse exacte des requérants, ni l’ensemble des mentions obligatoires au visa de l’article 24 d’ordre public de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 actualisée et injustifié compte tenu de l’exception d’inexécution soulevée par les appelants,
– rejeter toute constatation d’acquisition de clause résolutoire et/ou résiliation judiciaire de bail,
– condamner, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la mise en demeure du 5 septembre 2019 (arrêt contradictoire du 21 janvier 2021) Mme [U] à faire effectuer tous les travaux nécessaires à la décence du logement et sa mise en conformité avec les normes techniques,
– condamner Mme [U] à les reloger pendant la durée des travaux,
– ordonner, après travaux à charge de l’intimée, leur réintégration dans l’appartement pris à bail,
– condamner Mme [U] à leur payer la somme de 72 625 euros au titre du préjudice de jouissance évalué à la moitié du loyer contractuel intégralement payé ainsi calculé :
– période du 1er septembre 2018 (désordres) au 30 juillet 2021 (départ des lieux) 35 mois X 4 150 euros loyer mensuel X 50 % = 72 625 euros,
– débouter Mme [U] de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles ou incidentes, fins et conclusions notamment faute pour elle de production de diagnostics préalables à toute location, appels de fonds mensuels distinguant loyer et charges locatives récupérables, régularisation annuelle des charges locatives récupérables et justification, via décompte chronologique, d’une créance détaillée et précise, certaine ( non contestée par trouble de jouissance ) liquide et exigible tant pour la période antérieure au 30 juillet 2021 ( toutes les sommes prétendument dues ayant été payées sous la contrainte d’huissier ) que pour la période postérieure au 30 juillet 2021 (les locaux ayant été laissés entièrement libre, à cette date, de toute occupation par les appelants),
– rejeter toute demande de condamnation in solidum à leur encontre,
En tout cas,
– condamner Mme [U] au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, dont distraction pour ceux la concernant au profit de Maître Oriane Dontot, JRF & Associés, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Aux termes de ses conclusions signifiées le 13 décembre 2022, Mme [U], intimée et appelante à titre incident, demande à la cour de :
– la recevoir à titre personnel et ès qualités d’héritière de M. [Z] [U] en ses écritures et les dire bien fondées,
– débouter la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] de leurs demandes, fins et conclusions,
– déclarer irrecevable la demande de la société Monte Monreale et Bello de ramener les sommes dues par les appelants au titre des loyers et/ou indemnités d’occupation à la somme de 1 500 euros par mois depuis l’entrée dans les lieux, jusqu’au départ effectif des lieux,
– déclarer irrecevable la demande des appelants de réintégration dans l’appartement et de relogement pendant la durée des travaux,
– déclarer irrecevable la demande des appelants de réparation de leur trouble de jouissance à hauteur de 72 625 euros, la cour n’étant pas saisie du rapport d’expertise judiciaire [L] du 6 juillet 2022,
– déclarer irrecevable la demande des appelants tendant à ce que la cour use de sa faculté d’évocation et subsidiairement les débouter de cette demande,
– confirmer le jugement du 18 juin 2021 en ce qu’il :
* a débouté la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] de leur demande en requalification du contrat de bail du 28 avril 2017 portant sur un logement sis [Adresse 6] à [Localité 7], ledit bail devant être qualifié de bail meublé ressortant du titre 1er bis de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989,
* a rejeté la demande de la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] visant au prononcé de la nullité du commandement de payer délivré par les époux [U] le 17 septembre 2019,
* a rejeté la demande de la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] visant à faire valider judiciairement l’exception d’inexécution invoquée pour refuser de payer le montant des loyers prévus au bail du 28 avril 2017,
* a débouté la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] de leur demande en suspension des loyers pendant le temps de la procédure,
* a constaté, à compter du 18 novembre 2019, l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée au bail du 28 avril 2017 liant les parties et dit que la société Monte Monreale et Bello devrait quitter les lieux loués sis [Adresse 6] à [Localité 7] et les rendre libres de toute occupation en satisfaisant aux obligations des locataires sortants, notamment par la remise des clefs,
* a ordonné l’expulsion, à défaut de départ volontaire, de la société Monte Monreale et Bello ainsi que celle de tous occupants de son chef et ce, au besoin, avec le concours de la force publique et d’un serrurier à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la signification d’un commandement de libérer les lieux,
* a condamné la société Monte Monreale et Bello à leur payer la somme de 13 651,67 euros correspondant à la dette locative, jusqu’au 17 novembre 2019 inclus et ce avec intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2019, date du commandement de payer sur la somme de 7 150 euros et à compter de la décision pour le surplus,
– infirmer le jugement du 18 juin 2021 en ce qu’il :
* a fixé le montant de l’indemnité d’occupation au montant du loyer et des charges qui auraient été dues en cas de non-résiliation du bail,
* a condamné in solidum, la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] à payer la somme de 45 096,67 euros à M. et Mme [U] au titre de l’indemnité d’occupation couvrant la période allant du 18 novembre 2019 au 30 septembre 2020,
Statuant à nouveau,
– condamner in solidum la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] à lui payer la somme mensuelle de 8 300 euros, correspondant au double du dernier montant de loyer conformément au bail, à titre d’indemnité d’occupation avec intérêts au taux légal, et ce à compter du 18 novembre 2019 jusqu’au 30 juillet 2021, date d’expulsion,
A titre subsidiaire,
– valider le congé délivré le 30 janvier 2020,
– condamner la société Monte Monreale à lui verser, à titre personnel et ès qualités d’héritière de M. [U], la somme de 36 200 euros, correspondant au montant des loyers et des charges impayés au 30 avril 2020, date de terme du bail meublé et ce, avec intérêts au taux légal,
– condamner in solidum la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] à lui payer, à titre personnel et ès qualités d’héritière de M. [U], la somme mensuelle de 8 300euros, correspondant au double du dernier montant de loyer conformément au bail, à titre d’indemnité d’occupation avec intérêts au taux légal et ce, à compter du 1er mai 2020 jusqu’au 30 juillet 2021, date d’expulsion,
A titre infiniment subsidiaire :
– prononcer la résiliation judiciaire pure et simple, aux torts de la société Monte Monreale et Bello du bail meublé qui lui a été consenti le 28 avril 2017 et renouvelé le 23 mars 2018 et successivement, sur le fondement de l’article 1224 du code civil,
– condamner la société Monte Monreale et Bello à lui verser la somme de 100 248,34 euros correspondant au montant des loyers et des charges impayés d’août 2019 jusqu’au 30 juillet 2021, date d’expulsion et ce, avec intérêts au taux légal,
En tout état de cause :
– condamner in solidum la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] à lui verser la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel dilatoire,
– condamner in solidum la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner in solidum la société Monte Monreale et Bello, M. [Y] et Mme [S] aux entiers dépens.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 26 janvier 2023.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
MOTIFS DE LA DÉCISION
I) Sur la qualification de la relation juridique entre bailleurs et preneurs
Les appelants font grief au premier juge d’avoir rejeté leur demande de requalification du bail litigieux en bail nu, alors qu’aucun état des lieux, ni diagnostic technique ni liste détaillée et précise des meubles meublants n’ont été produits en temps et en heure.
Mme [U] conclut à la confirmation du jugement déféré de ce chef et réplique que :
– M. [Y] a adressé à l’agence immobilière en charge de la location confirmant son intérêt pour la location de ‘l’appartement meublé’,
– le dossier locataire fait référence à un ‘ bail un an meublé tacitement reconductible’,
– l’état des lieux et l’inventaire précis et détaillé des meubles, équipements et accessoires a été établi contradictoirement à l’entrée dans les lieux, signé par M. [Y] le 1er mai 2017, et annexé au contrat de bail,
– la contestation du caractère meublé de l’appartement litigieux par les anciens locataires est ‘ un écran de fumée ayant pour seule vocation de masquer la volonté des anciens locataires de ne pas payer les loyers’.
Réponse de la cour
En application de l’article 12 du code de procédure civile, il incombe au juge de donner ou de restituer aux faits et actes litigieux leur exacte qualification juridique sans s’arrêter à la dénomination que les parties en ont proposée
Il ressort des pièces versées aux débats par l’intimée que :
– l’état des lieux d’entrée contradictoire décrit le bien litigieux comme ‘ un appartement traversant entièrement rénové meublé’,
– est annexé au bail une liste complète des meubles et accessoires figurant dans le logement,
– la liste des meubles proposés correspond à l’inventaire de l’équipement minimal fixé par le décret du 31 juillet 2015 à savoir :
1° Literie comprenant couette ou couverture ;
2° Dispositif d’occultation des fenêtres dans les pièces destinées à être utilisées comme chambre à coucher ;
3° Plaques de cuisson ;
4° Four ou four à micro-ondes ;
5° Réfrigérateur et congélateur ou, au minimum, un réfrigérateur doté d’un compartiment permettant de disposer d’une température inférieure ou égale à – 6 °C;
6° Vaisselle nécessaire à la prise des repas ;
7° Ustensiles de cuisine ;
8° Table et sièges ;
9° Etagères de rangement ;
10° Luminaires ;
11° Matériel d’entretien ménager adapté aux caractéristiques du logement.»
La liste des meubles proposés permet à la cour de constater que, conformément aux dispositions de l’article 25-4 de la loi du 6 juillet 1989, le mobilier décrit était suffisant pour permettre aux locataires d’y dormir, manger et vivre convenablement au regard des exigences de la vie courante.
– le dépôt de garantie – deux mois de loyers – et la durée du bail correspondent à ceux d’un logement meublé.
C’est donc à bon droit que le premier juge considéré, au vu de ces éléments, que l’intitulé du contrat de bail qui mentionne un logement nu constituait une erreur matérielle et qu’il convenait, en conséquence, de qualifier le contrat de bail portant sur un logement meublé.
Le jugement déféré sera confirmé de ce chef.
II) Sur la validité du commandement de payer délivré aux locataires le 17 septembre 2019
Les appelants font grief à la décision querellée d’avoir jugé régulier le commandement de payer qui leur a été délivré le 17 septembre 2019, alors que le commandement litigieux ne comprenait pas :
– l’état civil complet et l’adresse exacte des requérants qui demeuraient en Espagne,
– de décompte historique, clair et précis et actualisé de la dette locative et ne faisait pas mention du virement initial de 44 150 euros exigé par les époux [U].
Mme [U] de répliquer que :
– les mentions faisant défaut ne sont point prescrites à peine de nullité,
– leur absence n’a causé aucun grief aux appelants,
– le commandement a été délivré à l’adresse du bien loué et signifié à M. [Y], occupant, associé et gérant de la SCI.
Réponse de la cour
L’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 relative aux baux d’habitation prescrit que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux.
Le commandement de payer contient, à peine de nullité :
1° La mention que le locataire dispose d’un délai de deux mois pour payer sa dette ;
2° Le montant mensuel du loyer et des charges ;
3° Le décompte de la dette ;
4° L’avertissement qu’à défaut de paiement ou d’avoir sollicité des délais de paiement, le locataire s’expose à une procédure judiciaire de résiliation de son bail et d’expulsion ;
5° La mention de la possibilité pour le locataire de saisir le fonds de solidarité pour le logement de son département, dont l’adresse est précisée, aux fins de solliciter une aide financière ;
6° La mention de la possibilité pour le locataire de saisir, à tout moment, la juridiction compétente aux fins de demander un délai de grâce sur le fondement de l’article 1343-5 du code civil.
Au cas d’espèce, le commandement litigieux comporte l’ensemble des mentions requises par l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989, ainsi qu’un décompte précis de la dette, avec une ventilation entre les loyers et les charges.
Le commandement litigieux n’avait pas à reproduire l’ensemble des versements effectués depuis leur entrée dans les lieux par les locataires, dès lors que la dette locative portait uniquement sur les loyers des mois d’août et septembre 2019.
Le fait que le commandement litigieux, qui est un acte de procédure, ne comporte pas l’adresse exacte des époux [U] et leur état civil complet n’est pas, en l’espèce, un motif de nullité de l’acte litigieux en l’absence de grief démontré et même allégué causé aux preneurs, qui n’ont pu se méprendre sur l’identité des requérants.
Enfin, le commandement litigieux a été délivré à la personne même du gérant et représentant légal de la SCI, peu important, dès lors, que l’adresse de signification soit celle des lieux loués et non celle du siège de la SCI locataire.
Il résulte de ce qui précède que la décision entreprise doit être confirmée en ce qu’elle a jugé régulier le commandement de payer litigieux.
III) Sur l’acquisition de la clause résolutoire et les conséquence qu’elle emporte
Les appelants contestent la décision déférée en ce qu’elle a constaté l’acquisition de la clause résolutoire, et ordonné leur expulsion, les condamnant, au surplus, au paiement d’une indemnité d’occupation égale au montant du loyer, augmenté des charges.
Reprenant l’argumentation développée devant le premier juge, les anciens locataires font valoir qu’ils sont bien fondés à se prévaloir de l’exception d’inexécution, en raison des graves désordres affectant le logement qu’ils occupaient et que les désordres affectant le logement font obstacle au jeu de la clause résolutoire.
La bailleresse intimée conclut à la confirmation que jugement querellé en ce qu’il a constaté l’acquisition de la clause résolutoire, ordonné l’expulsion des occupants et condamné ces derniers au paiement d’une indemnité d’occupation.
Elle forme, toutefois, appel incident sur la disposition du jugement ayant fixé le montant mensuel de l’indemnité d’occupation à celui du loyer de base augmenté des charges, en demandant à la cour de fixer le montant de l’indemnité d’occupation à une somme mensuelle de 8 300 euros correspondant au double du montant du loyer conformément au bail.
Réponse de la cour
Dans l’hypothèse où le bail contient une clause résolutoire, le bailleur est autorisé, en cas de défaut de paiement d’un seul loyer, à faire délivrer au locataire un commandement de payer. Si, à l’issue du délai de deux mois qui suit la délivrance de cet acte, le locataire ne s’est pas acquitté de sa dette, le bail est de plein droit résolu et le bailleur peut saisir le juge d’instance en vue de faire constater cette résolution et ordonner l’expulsion du locataire.
Faute d’avoir payé ou contesté les causes du commandement de payer dans le délai imparti, prévu au contrat de bail, le preneur ne peut contester l’acquisition de la clause résolutoire, sauf à démontrer la mauvaise foi du bailleur lors de la délivrance du commandement de payer ou à invoquer l’exception d’inexécution.
Le locataire peut, en effet, se prévaloir de l’exception d’inexécution pour s’exonérer du paiement du loyer ou s’opposer au jeu de la clause résolutoire, lorsque le bailleur manque à son obligation de délivrance, en mettant à sa disposition un logement qui ne répond pas aux normes de décences prévues par la loi.
Mais il lui faut alors démontrer que l’inexécution par le bailleur de son obligation est de nature, par la gravité de ses manquements, à affranchir le locataire de son obligation corrélative de payer le loyer ou à faire obstacle à la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire. Les manquements dénoncés supposent que le locataire se soit trouvé dans l’impossibilité absolue d’utiliser les lieux loués conformément à la destination du bail.
Au terme d’une analyse exhaustive des faits et documents de la cause et notamment du contrat de location, et par des motifs pertinents à l’encontre desquels les appelants n’ont formulé aucune critique sérieuse, le premier juge a exactement relevé en substance que :
– les locataires étaient mal fondés à se prévaloir de l’exception d’inexécution, au visa d’une absence de décompte précis des loyers, de régularisation de charges, de l’absence de diagnostic technique préalable à la location, et au visa des désordres affectant le logement, dès lors que les locaux n’étaient point inhabitables laissant aux locataires une jouissance potentiellement dégradée mais nullement impossible des lieux,
– le commandement de payer délivré le 17 septembre 2019, régulier en la forme, était demeuré infructueux en ce que ses causes n’avaient pas été réglées dans les deux mois de sa délivrance, et que, par suite, il convenait de constater que la résiliation du bail avait été acquise de plein droit à compter du 18 novembre 2019.
En l’absence d’ éléments nouveaux soumis à son appréciation, la Cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu’elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties.
Partant le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il constaté l’acquisition de la clause résolutoire à compter du 18 novembre 2019, et subséquemment ordonné l’expulsion des occupants sans droit ni titre, et condamné ces derniers au paiement d’une indemnité d’occupation.
S’agissant du montant de l’indemnité mensuelle d’occupation, c’est également à bon droit que le premier juge après avoir relevé, que cette indemnité a un caractère mixte indemnitaire et compensatoire du préjudice subi par le bailleur du fait de l’occupation illicite de son bien, et que la stipulation contractuelle ayant le caractère d’une clause pénale et fixant l’indemnité contractuelle à un montant au moins égal au double de celui du dernier loyer, avait un caractère manifestement excessif, a fixé, en considération du préjudice subi par la bailleresse du fait de l’occupation illégale de son bien, l’indemnité mensuelle d’occupation à un montant correspondant à celui du loyer augmenté des charges accessoires.
Le jugement déféré sera également confirmé de ce chefs et, partant, la bailleresse intimée, déboutée de son appel incident.
Subséquemment, le jugement déféré sera confirmé, en ce qu’il a condamné in solidum M. [Y], Mme [S] et la SCI à payer aux bailleurs la somme de 45 069,67 euros au titre des indemnités d’occupation couvrant la période allant du 18 novembre 2019, date de la résilation du bail, jusqu’au 30 septembre 2020, et ayant condamné les mêmes sous la même solidarité au paiement de l’indemnité mensuelle d’occupation jusqu’à la libération effective des lieux.
À hauteur de cour, les appelants contestent le fait que la condamnation ait été prononcé in solidum entre eux, invitant la cour, dans le dispositif de leurs dernières conclusions, à rejeter toute demande de condamnation in solidum.
Cependant, cette prétention n’est pas motivée ni assortie d’aucun exposé des moyens sur lesquels elle se fonde, en violation des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, si bien qu’elle sera rejetée.
V) Sur les demandes des appelants visant à obtenir la condamnation de la bailleresse à effectuer des travaux dans le logement, à les reloger pendant la durée des travaux, et à ordonner leur réintégration dans les lieux, une fois les travaux effectués
La confirmation de la résiliation du bail par acquisition de la clause résolutoire et l’expulsion des occupants emportent rejet de ces demandes, devenues sans objet.
VI) Sur la demande en suspension des loyers pendant le cours de la procédure
Les appelants se bornent, dans le dispositif de leurs conclusions d’appel, à solliciter l’infirmation du jugement frappé d’appel, en ce qu’il les a déboutés de leur demande en suspension des loyers pendant le temps de la procédure, sans réitérer leur contestation rejetée par le premier juge et sans formuler de prétention sur la demande tranchée dans ce jugement, de sorte que la cour ne se trouve saisie d’aucune prétention relative à ces demandes.
Il en résulte que la cour ne peut que confirmer, sur ce chef, le jugement frappé d’appel.
VII) Sur la demande en restitution du dépôt de garantie (6 800 euros)
Selon les dispositions de l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989, lorsqu’un dépôt de garantie est réglé par le locataire lors de son entrée dans les lieux, ce dépôt doit être restitué dans un délai maximal de deux mois à compter de la remise en main propre, ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, des clés au bailleur ou à son mandataire, déduction faite, le cas échéant, des sommes restant dues au bailleur et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu, aux lieu et place du locataire, sous réserve qu’elles soient dûment justifiées.
Au cas d’espèce, le premier juge reste saisi des demandes indemnitaires de la bailleresse en réparation des dégradations locatives, et réparation du préjudice consécutif à la disparition, constatée par procès-verbal de commissaire de justice, de certains éléments dans l’appartement, si bien que la cour n’est pas en mesure, du fait du périmètre de sa saisine, d’apprécier si des sommes restent dues à la bailleresse.
Par suite, il est opportun, s’agissant de cette demande, non pas de débouter les appelants de leur demande de restitution, mais de renvoyer, la cause et les parties devant le tribunal de proximité de Courbevoie, appelé à trancher les demandes indemnitaires des anciens locataires et à faire les comptes entre les parties.
VIII) Sur la réparation du préjudice de jouissance des locataires
Le premier juge a sursis à statuer sur cette demande.
Les appelants demandent à la cour d’user de son pouvoir d’évocation pour trancher la question et donner une solution définitive au litige.
Mme [U] est mal fondée soutenir que cette demande serait irrecevable, motif pris de sa tardiveté et au visa de l’article 910-4 du code de procédure civile.
En effet, il ne peut être fait grief aux appelants de ne pas avoir fait figurer cette demande dans leurs premières conclusions d’appelants, dès lors que ces premières écritures ont été prises avant que le rapport définitif de l’expert judiciaire ne soit déposé.
Pour autant, la cour n’entend pas faire usage de son pouvoir discrétionnaire d’évocation, d’une part, pour ne pas priver les parties du double degré de juridiction qui est une garantie fondamentale reconnue à tout justiciable, d’autre part, parce qu’il paraît opportun que les demandes indemnitaires des locataires en réparation de leur préjudice de jouissance et l’appel en garantie formé par la bailleresse à l’encontre de son architecte d’intérieur, puissent être traités concomitamment, et que la cour ne statuer sur cet appel en garantie, du fait que la société Rénovation Concept Gil Mann, n’est pas partie à la présente instance d’appel.
En conséquence, la cour renverra, s’agissant de cette question, la cause et les parties devant le tribunal de proximité de Courbevoie.
IX) Sur la demande de dommages et intérêts formée par les locataires pour appel abusif (10000 euros)
Mme [U] sollicite la condamnation des appelants à lui payer une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts au visa de l’article 559 du code de procédure civile.
Elle fait valoir, au soutien de cette prétention, que l’appel a été interjeté avec l’intention malicieuse de lui nuire, et que son époux est décédé, trois jours après la première réunion d’expertise, victime des manoeuvres toxiques et des pressions psychologiques de ses anciens locataires.
Elle souligne que ses anciens locataires, qui disposent d’un patrimoine immobilier important et de moyens financiers considérables et vivent dans un luxueux appartement à [Localité 8], ont mis en oeuvre une stratégie procédurale visant à prolonger artificiellement la procédure très éprouvante pour elle, pour la contraindre, alors qu’elle se trouve dans une situation financière dramatique, à accepter leurs conditions : le non-paiement des loyers pendant toute la durée du bail en guise de compensation d’un préjudice de jouissance imaginaire, l’acquisition de son appartement à des conditions abusives imposées.
Réponse de la cour
L’article 559 du code de procédure civile ne permet de condamner l’appelant à des dommages-intérêts que s’il est établi qu’il a agi dans un but dilatoire ou abusif.
En l’espèce, le caractère abusif, dilatoire ou malveillant de l’appel interjeté par les locataires, qui ont pu se méprendre sur leurs droits, n’est pas établi, non plus que le lien entre cet appel et le décès de M. [U].
C’est pourquoi l’intimée sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts.
X) Sur les demandes accessoires
Les appelants, qui succombent, seront condamnés aux dépens de la procédure d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Déboute Mme [M] [S], M. [F] [Y] et SCI Monte Monreale et Bello de leurs demandes ;
Déboute Mme [P] [N], veuve [U], de ses demandes incidentes concernant le montant de l’indemnité mensuelle d’occupation, ainsi que de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour appel abusif ;
Dit n’y avoir lieu à évocation ;
Renvoie la cause et les parties devant le tribunal de proximité de Courbevoie pour la poursuite de l’instance ;
Condamne in solidum Mme [M] [S], M. [F] [Y] et SCI Monte Monreale et Bello à payer à Mme [P] [N], veuve [U], une indemnité de 10 000 euros, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum Mme [M] [S], M. [F] [Y] et SCI Monte Monreale et Bello aux dépens d’appel.
– prononcé hors la présence du public par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,