Requalification en CDI : 20 juin 2023 Cour d’appel de Riom RG n° 21/00527

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Requalification en CDI : 20 juin 2023 Cour d’appel de Riom RG n° 21/00527
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20 juin 2023
Cour d’appel de Riom
RG n°
21/00527

20 JUIN 2023

Arrêt n°

SN/NB/NS

Dossier N° RG 21/00527 – N° Portalis DBVU-V-B7F-FRXS

[G] [V] épouse [N]

/

S.A.S. GSF PHEBUS

jugement au fond, origine conseil de prud’hommes – formation paritaire de clermont-ferrand, décision attaquée en date du 03 février 2021, enregistrée sous le n° f19/00120

Arrêt rendu ce VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS par la QUATRIEME CHAMBRE CIVILE (SOCIALE) de la Cour d’Appel de RIOM, composée lors des débats et du délibéré de :

M. Christophe RUIN, Conseiller Président

Mme Mme Sophie NOIR, Conseiller

Mme Karine VALLEE, Conseiller

En présence de Mme Séverine BOUDRY greffier lors des débats et de Mme Nadia BELAROUI, greffier lors du prononcé

ENTRE :

Mme [G] [V] épouse [N]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Cédric BRU, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/002589 du 09/04/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de CLERMONT-FERRAND)

APPELANT

ET :

S.A.S. GSF PHEBUS prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité en son siège social.

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Anne-Claire MALARD de la SELARL AUVERJURIS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

INTIMEE

M. RUIN, Président et Mme NOIR, Conseiller après avoir entendu, Mme NOIR, Conseiller en son rapport, à l’audience publique du 24 avril 2023, tenue par ces deux magistrats, sans qu’ils ne s’y soient opposés, les représentants des parties en leurs explications, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré après avoir informé les parties que l’arrêt serait prononcé, ce jour, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l’article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [V] a été embauchée par la Sas Gsf Phébus en qualité d’agent de service selon trois contrats de travail à durée déterminée aux mois d’octobre, de novembre et de décembre 2018.

La convention collective applicable à la relation contractuelle est la Convention Collective Nationale des Entreprises de Nettoyage.

Le 12 mars 2019, Mme [V] a saisi le conseil des prud’hommes de Clermont-Ferrand pour obtenir la requalification des CDD en un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet et le paiement d’une indemnité de requalification, d’un rappel de salaire, de dommages et intérêts, d’une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ainsi que le paiement des indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 03 février 2021, le conseil des prud’hommes de Clermont-Ferrand a :

– dit et jugé recevables et en partie fondées les demandes de Mme [V] ;

– dit et jugé que le contrat de travail est à durée indéterminée et à temps plein depuis le jour de l’embauche de Mme [V] ;

– dit et jugé que la rupture de la relation professionnelle s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence,

– condamné la société Gsf Phébus prise en la personne de son représentant légal à payer et porter à Mme [V] les sommes suivantes :

– 1.539,45 euros au titre de la requalification du contrat de travail pour une durée indéterminée ;

– 648,67 euros au titre de rappel de salaire pour la requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps plein ;

– 64,86 euros à titre de congés payés afférents ;

– 355,25 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;

– 35,52 euros au titre des congés payés sur préavis ;

– 1.539,45 euros au titre des dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ;

– 750 euros au titre de l’alinéa 2 de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– ordonné à la société Gsf Phébus la remise d’un certificat de travail, d’une attestation Pôle Emploi, d’un reçu pour solde de tout compte et d’une fiche de paie conforme à la présente décision et ce sous astreinte de 20 euros par jour de retard et par document, à compter du 15ème jour suivant le prononcé de la présente décision ; astreinte limitée à un mois, le Conseil se réservant le droit de la liquider ;

– débouté Mme [V] du surplus de ses demandes ;

– débouté la société Gsf Phébus de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– dit que les sommes porteront intérêt au taux légal avec capitalisation à compter de la demande pour les sommes à caractère de salaire, à compter de la présente décision pour les sommes à caractère indemnitaire ;

– dit qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire pour les condamnations qui ne le sont pas de droit ;

– condamné la société Gsf Phébus aux entiers dépens.

Mme [V] a interjeté appel de ce jugement le 04 mars 2021.

Vu les conclusions notifiées à la cour le 4 mars 2021 par Mme [V] ;

Vu les conclusions notifiées à la cour le 09 août 2021 par la Sas Gsf Phébus ;

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 27 mars 2023.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions, Mme [V] demande à la cour de :

– dire et juger ses demandes recevables et bien fondées ;

En conséquence,

– réformer le chef de jugement critiqué ;

– dire et juger qu’elle a fait l’objet de travail dissimulé ;

– condamner la société Gsf Phébus à lui payer et porter la somme de 9.236,70 euros (6 mois de salaire) au titre d’indemnité spécifique ;

– condamner la même à lui payer et porter la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– dire et juger que les sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil des prud’hommes.

Dans ses dernières conclusions, la Sas Gsf Phébus demande à la cour de :

– infirmer le jugement du conseil des prud’hommes de Clermont-Ferrand du 03 février 2021 en ce qu’il l’a condamné à payer et porter la somme de 648,67 euros à titre de rappel de salaire et congés payés afférents (10%) pour requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein ;

A titre subsidiaire,

– dire et juger l’absence d’élément intentionnel afin de caractériser le travail dissimulé ;

En conséquence,

– confirmer le jugement du conseil des prud’hommes en ce qu’il a débouté Mme [V] de sa demande de 9.236,70 euros au titre de l’indemnité spécifique pour travail dissimulé ;

En tout état de cause,

– condamner en tout état de cause Mme [V] à lui porter payer la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire la cour rappelle :

– qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions recevables des parties et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion contenue dans ces écritures

– les demandes de ‘constater’ ou de ‘dire et juger’ lorsqu’elles ne constituent pas des prétentions mais des rappels de moyens, ne saisissent la cour d’aucune prétention, la cour ne pouvant alors que confirmer le jugement.

Sur la demande de rappel de salaires :

Selon l’article L. 3123-14 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 et l’article L. 3123-6 du même code, dans sa rédaction issue de cette loi, le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

Il en résulte que l’absence d’écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l’emploi est à temps complet et qu’il incombe à l’employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur.

En l’espèce, les contrats de travail à durée déterminée à temps partiel du 4 octobre 2018, du 2 novembre 2018 et du 10 décembre 2018 versés aux débats ne sont pas signés par la salariée.

En l’absence de contrat de travail écrit et en application des dispositions susvisées, l’emploi de Mme [G] [V] est présumé être à temps complet.

La société GSF Phebus soutient que les contrats de travail remis à Mme [G] [V] mais que cette dernière ne lui a jamais retournés signés, mentionnent la durée du travail, la répartition de la durée mensuelle du travail entre les semaines du mois, les cas et nature des modifications de cette répartition et les modalités de communication des jours travaillés, des horaires et des durées quotidiennes de travail.

Elle ajoute que ‘les plannings de travail annexés au contrat de travail étaient remis à Mme [G] [V] qui s’y conformait au cours de la relation contractuelle’.

Elle considère que ces contrats de travail ainsi que la remise des plannings de ses interventions, permettaient à Mme [G] [V] de connaître précisément la répartition de ses horaires de travail sur les jours de la semaine de sorte qu’il ne peut être contesté que la salariée ne se tenait pas à la disposition permanente de l’employeur.

Mme [G] [V] ne développe pour sa part aucun moyen au soutien de sa demande de requalification de la durée du travail à temps partiel en temps complet.

Les premiers juges ont fait droit à cette demande au motif que la société GSF Phebus ne rapportait pas la preuve de la durée exacte de travail convenue avec la salariée, du fait que cette dernière était en capacité de prévoir son rythme de travail et qu’elle ne devait pas se tenir constamment à sa disposition et qu’il ressortait au contraire de SMS émanant de l’employeur que ce dernier lui demandait de modifier ses horaires à la dernière minute.

Les 3 contrats de travail non signés par Mme [G] [V] et les 3 plannings également non signés par cette dernière, dont il n’est en outre aucunement justifié ni de la remise effective à la salariée, ni de la date de cette remise, ne permettent pas rapporter la preuve, d’une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d’autre part, que Mme [G] [V] n’était pas placée dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et qu’elle n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de l’employeur.

En conséquence la cour, confirmant le jugement de ce chef, condamne la société GSF Phebus à payer à Mme [G] [V] la somme de 648,67 euros à titre de rappel de salaires sur requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet et 64,86 euros au titre des congés payés y afférents.

Sur le travail dissimulé :

Selon les dispositions de l’article L 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à la délivrance d’un bulletin de paie ou d’un document équivalent défini par voie réglementaire.

Aux termes de l’ article L.8223-1 du code du travail, le salarié auquel l’employeur a recours en commettant les faits prévus à l’article L.8221-5 précité a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Le caractère intentionnel du travail dissimulé ne peut ainsi se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie et il incombe au salarié de rapporter la preuve d’une omission intentionnelle de l’employeur.

Au soutien de sa demande de paiement d’une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, Mme [G] [V] fait valoir qu’elle a travaillé le 3 décembre 2018 sans aucun paiement ni bulletin de salaire.

La société GSF Phebus répond que ni l’élément matériel, ni l’élément intentionnel du travail dissimulé ne sont établis.

Pour établir l’exécution d’une prestation de travail pour le compte de la société GSF Phebus durant la journée du 3 décembre 2018, Mme [G] [V] verse aux débats la copie d’un SMS rédigé ainsi : ‘ bonjour j’aurais besoin que de toi lundi 3 décembre à 5h sur le zénith’.

Cet élément, dont l’auteur n’est en outre pas identifiable, ne suffit pas à démontrer que la salariée a travaillé pour le compte de la société GSF Phebus durant la journée du 3 décembre 2018 sans émission d’un bulletin de paie.

En conséquence la cour, confirmant le jugement de ses chefs, rejette les demandes tendant à voir juger que Mme [G] [V] a fait l’objet d’un travail dissimulé et a condamné la société GSF Phebus au paiement de la somme de 9236,70 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

Sur les demandes accessoires :

Partie perdante au principal, la société GSF Phebus supportera la charge des dépens de première instance et d’appel, lesquels seront recouvrés conformément à la Loi sur l’aide juridique.

Le jugement sera complété sur ce point dans la mesure où Mme [G] [V] était également bénéficiaire de l’aide juridictionnelle totale en première instance.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société GSF Phebus au paiement de la somme de 750 euros sur le fondement de l’article 700 2° du code de procédure civile mais sera infirmé en ce qu’il a dit que cette indemnité bénéficie à Mme [G] [V], alors qu’en application de ce texte, elle doit bénéficier à son conseil.

Ce dernier devra renoncer, dans les conditions prévues par l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à percevoir l’indemnité d’aide juridictionnelle à laquelle il pourrait sinon prétendre dans le cadre de la procédure de première instance.

Enfin, la société GSF Phebus sera condamnée sur le même fondement et dans les mêmes conditions à payer à Maître Cédric Bru, conseil de Mme [G] [V], la somme de 750 euros au titre de la procédure d’appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ses dispositions ayant :

– condamné la société GSF Phebus à payer à Mme [G] [V] la somme de 750 euros au titre de l’alinéa 2 de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamné la société GSF Phebus aux entiers dépens ;

INFIRME le jugement de ces chefs et, statuant à nouveau et y ajoutant :

CONDAMNE la société GSF Phebus à payer à Maître Cédric Bru, avocat au barreau de Clermont-Ferrand, la somme de 750 euros au titre de l’alinéa 2 de l’article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et celle de 750 euros sur le même fondement au titre de la procédure d’appel ;

DIT qu’en cas de règlement effectif de ces indemnités, Maître Cédric Bru devra renoncer, dans les conditions prévues par l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à percevoir les indemnités d’aide juridictionnelle auxquelles il pourrait sinon prétendre dans le cadre de la procédure de première instance et dans le cadre de la procédure d’appel ;

CONDAMNE la société GSF Phebus aux entiers dépens de première instance et d’appel, qui seront recouvrés conformément à la Loi sur l’Aide juridique ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ainsi fait et prononcé lesdits jour, mois et an.

Le greffier, Le Président,

N. BELAROUI C. RUIN

 


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