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15 juin 2023
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
21/00302
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
CHAMBRE SOCIALE – SECTION B
————————–
ARRÊT DU : 15 JUIN 2023
PRUD’HOMMES
N° RG 21/00302 – N° Portalis DBVJ-V-B7F-L4PB
Madame [I] [C]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 33063/02/21/2489 du 04/03/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BORDEAUX)
c/
S.E.L.A.R.L. EKIP’
C.G.E.A. DE [Localité 3]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée aux avocats le :
à :
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 décembre 2020 (R.G. n°F18/01750) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BORDEAUX, Section Commerce, suivant déclaration d’appel du 18 janvier 2021,
APPELANTE :
[I] [C]
née le 21 Juin 1986 à [Localité 5] (17)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]
Représentée par Me Pierre CASTERA substituant Me Camille LENOBLE, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉES :
S.E.L.A.R.L. EKIP’ Es qualité de « Mandataire liquidateur » de la « SAS METROPOLYS », prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 1]
C.G.E.A. DE [Localité 3] prise en la personne de son directeur domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 6]
Représentée par Me Philippe DUPRAT de la SCP DAGG, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 907 et 805 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 30 mars 2023 en audience publique, devant Monsieur Eric VEYSSIERE, Président chargé d’instruire l’affaire, qui a retenu l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Eric Veyssière, président,
Madame Cybèle Ordoqui, conseillère,
Madame Sophie Lésineau, conseillère
greffière lors des débats : Evelyne Gombaud
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.
Le délibéré a été prorogé en raison de la charge de travail de la Cour.
Exposé du litige
Selon un contrat de travail à durée déterminée du 1er juillet 2016 au 31 août 2016, la société Metropolys, ayant pour activité l’exploitation d’une discothèque à [Localité 4] (33), a engagé Mme [C] en qualité de serveuse.
Par jugement du tribunal de commerce du 18 janvier 2019, la société a été placée en liquidation judiciaire.
Le 3 mars 2017, Mme [C] a saisi le conseil de prud’hommes de Bordeaux en sa formation de référé aux fins de rappel de salaires, indemnités de congés payés, indemnités de fin de contrat et remise des documents de fin de contrat.
Par ordonnance de référé du 12 octobre 2016, le conseil de prud’hommes de Bordeaux a condamné l’employeur à verser 1 280 euros bruts au titre de la rémunération due du mois d’août 2016, 228, 63 euros au titre d’indemnité compensatrice de congés payés, 228,63 euros au titre d’indemnité de fin de contrat et la remise des documents de fin de contrat sous astreinte de 20 euros à compter du 15e jour suivant la notification et limité à 30 jours.
L’employeur n’a pas fait appel de la décision mais ne l’a pas exécutée.
Le 15 novembre 2018, Mme [C] a saisi le conseil de prud’hommes de Bordeaux afin de :
– voir fixer ses créances à la liquidation judiciaire de la société comme suit :
Pour le contrat à durée déterminée :
– rappel de salaire du 1er juillet 2016 au 31 août 2016 : 1 910,96 euros,
– heures supplémentaires : 7 206,98 euros,
– repos non pris : 1 515,50 euros,
– congés payés non pris : 215,67 euros,
– dommages et intérêts pour travail dissimulé : 11 372,28 euros,
– préavis : 710,88 euros,
– congés payés sur préavis : 33 euros,
– dommages et intérêts pour non respect de la procédure : 1 666,75 euros,
– indemnité de requalification : 1 895,38 euros,
Pour le contrat à durée indéterminée :
– rappel de salaire : 960 euros,
– préavis : 240,04 euros,
– congés payés sur préavis : 33 euros,
– dommages et intérêts pour licenciement abusif : 640 euros,
– dommages et intérêts pour travail dissimulé : 3 840 euros,
– ordonner le remise de documents de rupture sous astreinte journalière de 10 euros,
– ordonner l’exécution provisoire.
Par jugement du 14 décembre 2020, le conseil de prud’hommes de Bordeaux a :
– fixé les créances de Mme [C] au passif de la liquidation judiciaire de la société Métropolys comme suit :
– 511 euros au titre du rappel de salaire des mois de juillet et août 2016,
– 215,67 euros au titre du rappel de congés payés des mois de juillet et août 2016,
– débouté Mme [C] de sa demande de paiement d’heures supplémentaires et d’indemnité pour jours de repos non pris,
– dit prescrit la demande de requalification de contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et a débouté Mme [C] de l’ensemble de ses demandes indemnitaires,
– dit prescrit la demande au titre du travail dissimulé sur le contrat de travail à durée déterminée et déboute Mme [C] de sa demande indemnitaire,
– qualifié la relation des parties en contrat de travail du 2 au 30 septembre 2016,
– fixé la créance au passif de la liquidation judiciaire de l’employeur les sommes de :
– salaire septembre 2016 : 640 euros,
– salaire octobre 2016 : 320 euros,
– congés payés sur salaire de septembre : 96 euros,
– préavis : 240,04 euros,
– congés payés sur préavis : 24 euros,
– dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 640 euros,
– dit prescrit la demande au titre du travail dissimulé au titre du contrat à durée indéterminée et déboute Mme [C] de sa demande indemnitaire,
– fixé la créance au passif de la liquidation judiciaire de l’employeur au paiement de la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– ordonné la production des documents de fin de contrat : certificat de travail, attestation pôle emploi, bulletins de paie et solde de tout compte,
– fixé les dépens au passif de la liquidation judiciaire de l’employeur,
– rendu le jugement opposable à l’AGS-CGEA dans la limite légale de sa garantie, laquelle exclut l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté les autres demandes, plus amples ou contraires.
Par déclaration du 18 janvier 2021, Mme [C] a relevé appel du jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions du 29 septembre 2021, Mme [C] sollicite de la cour qu’elle :
Sur le contrat à durée déterminée du 1er juillet au 31 août 2016 :
– infirme le jugement en ce qu’il a limité la somme à fixer au passif de la liquidation judiciaire de l’employeur au titre du rappel de salaire pour les mois de juillet et août 2016 à 511 euros et en ce qu’il a débouté Mme [C] de ses demandes de rappel d’heures supplémentaires, d’indemnisation des jours de repos non pris, de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée avec toutes conséquences de droit et d’indemnisation pour le travail dissimulé,
Et statuant à nouveau :
– inscrive au passif de la liquidation de la société les sommes suivantes :
– 1 802,75 euros bruts à titre de rappel de salaire pour les mois de juillet et août 2016,
– 222,77 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de congés payés,
– 7 740,94 euros bruts à titre de rappel d’heures supplémentaires outre 774,09 euros bruts de congés payés afférents,
– 2 000 euros de dommages et intérêts au titre de la violation des règles relative au temps de travail et de l’atteinte manifeste aux règles visant à préserver la santé et la vie privée et familiale,
– 1 895,88 euros à titre d’indemnité de requalification du contrat à durée déterminée,
– 3 000 euros pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 710,88 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis sur le licenciement, outre 71,08 euros bruts au titre des congés payés afférent,
– 11 366 euros à titre de dommages intérêts pour travail dissimulé,
Sur le contrat à durée indéterminée à compter du 2 septembre 2016 :
– confirme le jugement déféré en ce qu’il a constaté l’existence d’une relation de travail entre le 2 septembre 2016 et le 16 octobre 2016,
– réévalue les créances à inscrire au passif de la liquidation de l’employeur à :
– 1 039,20 euros bruts au titre de rappel de salaires pour la période du 2 septembre au 16 octobre 2016 outre 103,92 euros bruts de congés payés afférents,
– 5 000 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 259,84 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés sur préavis de 25,98 euros bruts.
– ordonne la remise des documents de fin de contrat,
– ordonne la remise du bulletin de paie de juillet 2016 rectifié outre la remise des bulletin paie d’août à octobre 2016,
– infirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté Mme [C] de sa demande d’indemnisation pour travail dissimulé,
Et statuant à nouveau :
– inscrive au passif de la liquidation de la société la somme de 4 156,80 euros à titre de dommages intérêts pour travail dissimulé,
En tout état de cause :
– inscrive au passif de la liquidation de la société la somme de 2 000 euros au titre de l’article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991,
– fixe au passif de la liquidation les dépens,
– rende l’arrêt opposable à l’AGS CGEA.
Par ses dernières conclusions du 30 juin 2021, l’AGS CGEA demande à la cour de :
Concernant le contrat à durée déterminée du 1er juillet au 31 août 2016 :
– déclarer mal fondé l’appel de Mme [C],
– réformer le jugement en ce qu’il a fixé le rappel de salaire à la somme de 511 euros et l’indemnité de congés payés à la somme de 215,67 euros,
Statuant à nouveau,
– fixer la créance de Mme [C] au passif de la société à :
– 455,96 euros à titre de rappel brut de salaires du 1er juillet au 31 août 2016,
– 27,37 euros à titre de reliquat d’indemnité compensatrice de congés payés,
ou, subsidiairement en cas de temps plein,
– 829,24 euros, à titre de rappel brut de salaires du 1er juillet au 31 août 2016,
– 64,39 euros à titre de reliquat d’indemnité compensatrice de congés payés,
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [C] de sa demande de rappel d’heures supplémentaires et pour jours de repos non pris et en ce qu’il a dit prescrit ses autres demandes au titre de la rupture du 31 août 2016,
Subsidiairement,
– cn cas d’heures supplémentaires admises, fixer la créance de Mme [C] au passif de la société sur la base majorée à 25 % de 12, 087 euros et sur la base majorée à 50% de 14, 505 euros, soit au plus, la somme de 5 988,10 euros, outre les congés payés y afférents,
– déclarer prescrite sa demande de dommages et intérêts pour violation des règles relatives au temps de travail et atteinte à la préservation de la santé « des salariés » et la vie privée et familiale,
– déclarer prescrite sa demande indemnitaire pour travail dissimulé au titre du contrat à durée déterminée,
– déclarer prescrite sa demande de requalification du contrat en contrat à durée indéterminée,
– en toute hypothèse débouter Mme [C] de requalification du contrat en contrat à durée indéterminée à raison du motif légal de recours,
– en conséquence débouter Mme [C] de l’indemnité de requalification et des demandes au titre de la rupture,
Encore plus subsidiairement,
Vu le taux horaire,
– fixer la créance de Mme [C] au passif à :
– 1 466,64 euros à titre d’indemnité de requalification,
– 391,10 euros, à titre de préavis, (1 466,64 x 8/30) sauf reconnaissance du nouvel emploi,
– 39,11 euros à titre de congés payés sur préavis,
– en cas de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, réduire les dommages et intérêts à la somme maximale de 750 euros et sauf reconnaissance du nouvel emploi anéantissant le préjudice de perte d’emploi,
Concernant le contrat à durée indéterminée du 1er septembre au 16 octobre 2016 :
– débouter Mme [C] de sa demande de reconnaissance d’une relation contractuelle après le 31 août 2016,
– réformer en conséquence le jugement dont appel en ce qu’il a reconnu une relation contractuelle de travail du 2 au 30 septembre 2016 et en ce qu’il a alloué à Mme [C] un rappel de salaire sur cette période et des indemnités de rupture et des dommages et intérêts,
– débouter Mme [C] de sa demande de salaire faute de preuve d’une relation contractuelle que le contrat non signé par les parties ne peut établir ni présumé,
– débouter en toute hypothèse Mme [C] de ses demandes indemnitaires au titre de la rupture, à raison de la prescription,
– confirmer le jugement en ce qu’il a jugé prescrite sa demande pour travail dissimulé,
– en cas de confirmation de la relation contractuelle, réduire les dommages et intérêts à la somme maximale de 300 euros faute de préjudice établi supérieur,
– débouter en toute hypothèse Mme [C] de sa demande pour travail dissimulé,
Sur la garantie de l’AGS,
Vu les articles L.3253-6 et suivants du code du travail
– en toute hypothèse, déclarer opposable l’arrêt à intervenir à l’AGS – CGEA de [Localité 3] dans la limite légale de sa garantie, laquelle exclut l’astreinte et l’indemnité allouée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 février 2023
Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.
Motifs de la décision
Sur la demande de rappel de salaires au titre du contrat à durée déterminée
Le contrat de travail de Mme [C] prévoit une rémunération mensuelle de 1280 euros bruts.
A défaut de prévoir une durée du travail, ce contrat est présumé avoir été souscrit à temps complet, soit 35 heures par semaine ou 151,67 heures par mois.
L’unique bulletin de paie établi pour le mois de juillet 2016 mentionne un salaire d’un montant de 1006,25 euros pour 80,50 heures travaillées.
La salariée en déduit que sa rémunération mensuelle était basée sur un taux horaire de 12,50 euros et qu’elle aurait dû s’élever pour un temps complet à 1895,38 euros. Or, soutient-elle, elle n’a perçu, que la somme de 600 euros en espèces.
Elle sollicite, en conséquence, un rappel de salaires de 3791,75 euros pour les mois de juillet et août 2016.
Mais, il convient de relever que :
– le bulletin de paie fait état d’un taux horaire de 9,67 euros,
– ce taux est conforme au smic horaire de la convention collective,
– sur la base de ce taux, le salaire mensuel s’élève pour un temps complet à 1466,64 euros (151,67h x 9,67 euros).
Il en résulte que le bulletin paie du mois de juillet 2016 mentionnant une durée du travail de 100,50 heures travaillées, alors que la salariée revendique un temps complet et que le contrat de travail prévoit une rémunération mensuelle de 1280 euros, est erroné. Or cette erreur manifeste n’est pas créatrice de droits.
Le salaire mensuel dû à la salariée doit, en conséquence, être fixé à 1466,64 euros.
Mme [C] aurait dû percevoir 2933,28 euros bruts en paiement des salaires des mois de juillet et août 2016.
Il y a lieu de déduire de cette somme :
– 824,04 euros (600 euros nets) versée par l’employeur
– 1280 euros bruts versés par le liquidateur.
Il reste donc dû à la salariée la somme de 829,24 euros (2933,28 – 824,04 + 1280).
Le jugement sera réformé en ce sens.
Sur la demande d’indemnité compensatrice de congés payés au titre du contrat à durée déterminée
Le liquidateur a versé à Mme [C] la somme de 228,63 euros à titre d’indemnité de congés payés, que le CGEA a avancée, calculé sur la base non discutée de 5 jours de congés.
Mme [C] réclame un rappel d’indemnité de congés payés de 451,40 euros.
Compte tenu du montant total des salaires (2933,28 euros) retenu par la cour ci-dessus, la salariée pouvait prétendre à une indemnité de congés payés de 293,32 euros.
Il reste donc dû à la salariée un solde de 64,69 euros.
Le jugement sera réformé en ce sens.
Sur la demande au titre des heures supplémentaires
Il résulte des articles L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.
Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Au soutien de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires d’un montant de 7740,94 euros pour les mois de juillet et août 2016, Mme [C] produit les éléments suivants :
– un décompte hebdomadaire des heures supplémentaires effectuées,
– des attestations sur sa présence dans la discothèque et ses différentes attributions (serveuse, femme de ménage, animation…)
Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre.
Le CGEA qui conteste la valeur probante des éléments fournis par la salariée ne justifie pas des horaires de travail de la salariée (hormis les jours d’ouverture de la discothèque) ni des dispositifs mis en place pour contrôler le temps de travail de l’intéressée. Il est donc défaillant dans la partie de l’administration de la preuve qui lui incombe.
Au regard des pièces du dossier, la cour évalue le volume des heures supplémentaires impayées comme suit :
– 64 heures majorées à 25% soit la somme de 773,56 euros (12,087 euros x 64)
– 150 heures majorée à 50% soit la somme de 2107,50 euros(14,05 euros x 150)
Soit un total de 2881,06 euros auquel il convient d’ajouter les congés payés afférents.
Le jugement sera réformé en ce sens.
Sur la demande indemnitaire au titre des jours de repos non pris
Contrairement à ce que soutient le CGEA, cette demande n’est pas nouvelle en cause d’appel. Elle n’est pas non plus prescrite par application de l’article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 relatif à l’aide juridique compte tenu du dépôt d’une demande d’aide juridictionnelle en date du 27 avril 2018 qui a interrompu le délai de prescription, de la décision du bureau de l’aide juridictionnelle intervenue le 24 mai 2018 et de la saisine du conseil de prud’hommes le 15 novembre 2018.
En vertu des dispositions de la convention collective HCR, Mme [C] avait droit à deux jours de repos par semaine. Elle soutient qu’elle n’a pu en bénéficier.
L’employeur sur qui repose la charge de la preuve ne justifie pas les avoir accordés.
Ce manquement de l’employeur a causé un préjudice au salarié dont la protection de la santé et de la sécurité n’a pas été assurée. Ce préjudice sera réparé par l’allocation d’une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts.
Le jugement sera réformé en ce sens.
Sur la demande de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et les demandes subséquentes relatives à la rupture du contrat de travail
Pour les motifs évoqués ci-dessus relatifs à l’effet interruptif du délai de prescription en cas de dépôt d’une demande d’aide juridictionnelle, cette demande n’est pas prescrite.
Mme [C] soutient que le contrat à durée déterminée doit être requalifié en contrat à durée indéterminée car le contrat n’est signé que de l’employeur.
Aux termes de l’article L 1242-12 du code du travail, le contrat à durée déterminée est établi par écrit et comporte la définition précise de son motif. A défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée.
Faute de comporter la signature du salarié, le contrat à durée déterminée ne peut-être considéré comme ayant été établi par écrit.
Selon l’article L 1245-1 du code du travail est réputé à durée indéterminée tout contrat de travail conclu en méconnaissance des dispositions de l’article L 1242-12.
En l’espèce, le contrat de travail est revêtu de la seule signature de l’employeur.
Il encourt, en conséquence, la requalification en contrat à durée indéterminée.
En application de l’article L 1245-2 du code du travail, il sera alloué à Mme [C] la somme de 1466,64 euros à titre d’indemnité de requalification.
Par ailleurs, l’employeur ne justifiant la rupture que par l’échéance du terme du contrat à durée déterminée, c’est à juste titre que la salariée soutient que la rupture est abusive compte tenu de la requalification intervenue.
Mme [C] peut ainsi prétendre au versement :
– d’une indemnité compensatrice de préavis de 8 jours en vertu de la convention HCR, soit la somme de 391,10 euros et les congés payés afférents,
– d’une indemnité pour perte injustifiée de son emploi sur le fondement de l’article L 1235-3 du code du travail que la cour fixera à 750 euros.
Sur la demande d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé
Pour les motifs évoqués ci-dessus relatifs à l’effet interruptif du délai de prescription en cas de dépôt d’une demande d’aide juridictionnelle, cette demande n’est pas prescrite.
Aux termes de l’article L8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :
1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;
2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d’un bulletin de paie ou d’un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;
3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales.
En l’espèce, il ressort d’un courrier de l’Urssaf Aquitaine du 21 avril 2021 adressé à Mme [C] que la société Metropolys n’a pas déclaré ses rémunérations à l’organisme de sécurité sociale. En tout état de cause, aucun bulletin de paie n’a été établi au mois d’août 2016 et la salariée n’a reçu qu’une faible partie de sa rémunération payée en espèces.
En application des dispositions légales sus-visées, l’infraction de travail dissimulé est donc caractérisée.
En application de l’article L 8223-1 du code du travail, Mme [C] peut prétendre à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaires, soit la somme de 8799,84 euros.
Le jugement sera réformé en ce sens.
Sur les autres demandes
Le présent arrêt sera déclaré opposable au CGEA dans la limite légale de sa garantie.
Le liquidateur remettra à Mme [C] un bulletin de paie, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi rectifiés conformément aux dispositions de la présente décision.
Les dépens seront supportés par la liquidation judiciaire.
L’équité ne commande pas de faire droit aux demandes d’indemnités sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles,
statuant à nouveau sur les points infirmés
Fixe les créances de Mme [C] à inscrire au passif de la société Metropolys aux sommes suivantes :
– 829,24 euros à titre de rappel de salaires pour les mois de juillet et août 2016,
– 64,69 euros à titre de solde d’indemnité de congés payés,
– 2881,06 euros au titre des heures supplémentaires sur la période du 1er juillet au 31 août 2016 et les congés payés afférents,
– 500 euros à titre de dommages et intérêts pour jour de repos non pris,
– 8799,84 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,
– 1466,64 euros à titre d’indemnité de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,
– 391,10 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents,
– 750 euros à titre d’indemnité pour perte injustifiée de son emploi
Ordonne à la société Ekip’ de remettre à Mme [C] un bulletin de paie, un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi rectifiés conformément aux dispositions de la présente décision,
Rejette les demandes d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Déclare la présente décision opposable au CGEA de [Localité 3] dans la limite légale de sa garantie,
Dit que les dépens seront supportés par la liquidation judiciaire.
Signé par Eric Veyssière, président et par Evelyne Gombaud, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
E. Gombaud E. Veyssière