Réparation des désordres causés sur une toiture

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Réparation des désordres causés sur une toiture

Résumé de l’affaire

Monsieur [N] [Y] et Madame [O] [Y] ont confié à la société [U] la réalisation d’un traitement hydrofuge de leur toiture pour 7 000 euros. Après des travaux réalisés en juillet 2019, ils ont constaté l’apparition de mousse sur leur toiture et ont assigné la société en justice pour obtenir des dommages et intérêts. La société [U] a demandé une expertise judiciaire pour examiner les désordres allégués et a contesté sa responsabilité, arguant que la réapparition de mousse était due à des facteurs naturels et non à un défaut de ses travaux. La décision du tribunal était en attente pour le 7 août 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 août 2024
Tribunal judiciaire de Meaux
RG
23/02785
Min N° 24/00626
N° RG 23/02785 – N° Portalis DB2Y-W-B7H-CDEZF

M. [N] [Y]
Mme [O] [Y]
C/
Société [U] SA

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION

JUGEMENT DU 07 août 2024

DEMANDEURS :

Monsieur [N] [Y]
[Adresse 7]
[Localité 8]

Madame [O] [Y]
[Adresse 7]
[Localité 8]

représentés par Maître François MEURIN de la SELARL TOURAUT AVOCATS (avocats au barreau de MEAUX)

DÉFENDERESSE :

Société [U] SA
[Adresse 10]
[Adresse 10]
[Localité 4]

représentée par Me Catherine SCHMITT de la SELARL LE CERCLE AVOCATS (avocat au barreau de TOURS)

PARTIES INTERVENANTES VOLONTAIRES :

Maître [S] [C] – Administrateur judiciaire de la Société [U] SA
SELARL AJAssociés
[Adresse 2]
[Localité 3]

Maître [E] [T] – Administrateur judiciaire de la Société [U] SA
SELARL FHB
[Adresse 11]
[Adresse 1]
[Localité 9]

Maître [G] [K] – Mandataire judiciaire de la Société [U] SA
SAS [X] [K] ET ASSOCIES
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 3]

Maître [J] [M] – Mandataire judiciaire de la Société [U] SA
SELARL [M] [I]
[Adresse 5]
[Localité 3]

représentées par Me Catherine SCHMITT de la SELARL LE CERCLE AVOCATS (avocat au barreau de TOURS)

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Madame COLLANGE Elisabeth, Juge
Greffier : Madame DE PINHO Maria, Greffière

DÉBATS :

Audience publique du : 07 août 2024

Copie exécutoire délivrée
le :
à : Maître François MEURIN

Copie délivrée
le :
à : Maître Catherine SCHMITT

EXPOSE DU LITIGE

Suivant bon de commande du 4 juin 2019, Monsieur [N] [Y] et Madame [O] [Y] ont confié à la société [U] la réalisation du traitement hydrofuge de leur toiture, pour un coût TTC de 7.000 euros. Les travaux ont été réalisés courant juillet 2019 et la facture a été réglée par les clients.

Se plaignant de l’apparition de mousse sur leur toiture postérieurement à ces travaux, Monsieur [N] [Y] et Madame [O] [Y] ont, par acte de commissaire de justice du 15 juin 2023, fait assigner la société [U] devant le Tribunal judiciaire de Meaux aux fins de la voir condamner au paiement de la somme de 6.963,95 euros au titre de la reprise des désordres, de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral et esthétique subi, outre une somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 26 juillet 2023, le tribunal de commerce d’Orléans a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société [U] immatriculée au RCS d’Orléans sous le n° B 788 139 285 (1974B00010).

Au terme de plusieurs renvois, l’affaire a été appelée et débattue à l’audience du 12 juin 2024.

A cette audience, Monsieur [N] [Y] et Madame [O] [Y], représentés par leur conseil, se réfèrent oralement à leurs conclusions par lesquelles ils réitèrent les termes de leur acte introductif d’instance.

A l’appui de leurs demandes, ils soutiennent que la société [U] engage sa responsabilité contractuelle sur le fondement de l’article 1231-1 du code civil en ce que le traitement hydrofuge effectué par la société [U] sur leur toiture n’a pas été réalisé conformément au devis et aux règles de l’art, ce qui a engendré la réapparition rapide et importante de mousse sur les tuiles du toit.

La S.A [U], représentée par son conseil, se réfère oralement à ses conclusions par lesquelles elle demande au juge de :
– prendre acte de l’intervention volontaire de :
o la SELARL AJAssociés, en la personne de Maître [S] [C],
o la SELARL FHB, en la personne de Maître [T] [E],
o la SAS [X] [K] ET ASSOCIES, en la personne de Maître [G] [K],
o la SELARL [M] [I], en la personne de Maître [J] [M],
– ordonner avant dire droit, une mesure d’expertise judiciaire aux fins d’examiner les désordres allégués par les époux [Y], et réserver les frais et dépens ;
– sur le fond et subsidiairement, débouter les époux [Y] de leurs demandes, condamner solidairement ces derniers au paiement d’une somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens, et écarter l’exécution provisoire.

Sur sa demande principale, elle souligne que le rapport d’expertise amiable est techniquement contestable et en tout état de cause insuffisant pour déterminer la cause des désordres invoqués par les époux [Y] ; par ailleurs, l’expert n’évoque pas les travaux de reprise nécessaires pour y remédier, et n’a notamment pas validé le devis des demandeurs pour une reprise de toute la toiture, ce qui parait disproportionné. Partant, le tribunal n’est pas suffisamment éclairé sur la cause des désordres et leur imputabilité à la société [U].

En réplique aux prétentions adverses, elle affirme que la réapparition de mousse sur la toiture des demandeurs n’est pas liée à une faute de sa part mais n’est que la conséquence naturelle des variations climatiques et d’une exposition spécifique d’une partie de la toiture ; que le traitement hydrofuge effectué sur la toiture des époux [Y] n’avait pas vocation à empêcher la réapparition de mousse, phénomène naturel et inévitable compte tenu de l’exposition Nord-Est de la toiture, précisant qu’aucun produit offrant une telle garantie n’existe sur le marché. Elle ajoute que les préjudices allégués par les demandeurs ne sont pas démontrés.

La décision était mise en délibéré à la date du 7 août 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les interventions volontaires :

Selon l’article 325 du code de procédure civile, l’intervention n’est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.

Aux termes de l’article 330 du même code, l’intervention est accessoire lorsqu’elle appuie les prétentions d’une partie. Elle est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie. L’intervenant à titre accessoire peut se désister unilatéralement de son intervention.

En l’espèce, une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société [U] immatriculée au RCS d’Orléans sous le n°B 788 139 285 (1974B00010) a été ouverte par jugement du 26 juillet 2023 du tribunal de commerce d’Orléans, lequel a désigné :
– la SELARL AJAssociés, en la personne de Maître [S] [C] et la SELARL FHB, en la personne de Maître [T] [E], en qualité d’administrateurs judiciaires ;
– la SAS [X] [K] ET ASSOCIES, en la personne de Maître [G] [K], et la SELARL [M] [I], en la personne de Maître [J] [M], en qualité de mandataires judiciaires.

Le conseil des époux [Y] a, par courrier du 27 mars 2024, déclaré la créance de ses clients à la procédure.

Les organes de la procédure collective ouverte à l’égard de la société défenderesse ont un intérêt manifeste à intervenir à la procédure initiée par les époux [Y] à son encontre.

En conséquence, il sera pris acte de l’intervention volontaire de la SELARL AJAssociés, en la personne de Maître [S] [C], de la SELARL FHB, en la personne de Maître [T] [E], de la SAS [X] [K] ET ASSOCIES, en la personne de Maître [G] [K], et de la SELARL [M] [I], en la personne de Maître [J] [M].

Sur les demandes financières à l’encontre de la société [U] :

Aux termes de l’article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.

En l’espèce, les époux [Y] se plaignent d’une mauvaise exécution des travaux réalisés à leur domicile par la société [U] en juillet 2019.

Ils produisent à l’appui de leurs prétentions :
– Le document d’information précontractuelle communiqué par la société [U] aux époux [Y] lors de la signature du contrat ;
– Un courrier de la société [U] du 12 juin 2019 confirmant la commande pour un traitement de toiture hydrofuge 127m² au prix de 7.000 euros ;
– Un courrier de la société [U] du 30 juillet 2021 indiquant qu’une reprise a été effectuée par leur société dans le cadre de leur service après-vente, constatant que cette reprise ne leur a pas donné satisfaction et proposant de leur accorder une remise de 300 euros et l’envoie d’un bidon anti-mousse ;
– Des photographies de la toiture des demandeurs après l’intervention du prestataire ;
– Des courriers adressés par l’assureur protection juridique des époux [Y] à la société [U] ;

– Les réponses adressées à ces courriers par la société THEVEVIN indiquant que le phénomène de réapparition de mousse est lié à l’environnement, n’est pas couvert par la garantie décennale qui ne concerne que la bonne tenue du produit sur le support et non la dépigmentation de la couleur.
– Un rapport d’expertise contradictoire du 27 mars 2022 ;
– Un procès-verbal de constat du 28 mars 2023 avec photographies ;
– Un devis de la SAS HABITAT ECO MACONNERIE pour le démoussage toiture par grattage des plus grosses mousses, mise en œuvre de peinture sur tuiles en place et traitement par produit professionnel au prix TTC de 6.963,95 euros.

Il n’est pas contesté que, suite à l’intervention de la société [U], de la mousse est réapparue sur les tuiles de la toiture des époux [Y].

La société [U] fait valoir qu’il s’agit d’un phénomène naturel compte tenu de l’exposition Nord-Est du pan de la toiture, exposition qui implique une absence d’ensoleillement et la formation de gouttes d’eau sur le nez de la tuile favorisant ainsi le dépôt de mousse sur la peinture et non sur la tuile qui reste protégée.

Or, l’expertise amiable et le constat d’huissier relèvent tous deux la présence, non seulement de mousse de lichens sur les rives des tuiles, mais également de moisissures type champignons sur les ondes de tuiles, qui sont visibles sur les photographies annexées à l’expertise et au constat et ce, sur les deux pans du toit.

La société [U] indique que son intervention ne visait qu’à répondre au phénomène d’encrassement naturel et d’embellissement, précisant qu’aucun autre produit sur le marché ne permet de garantir l’absence de réapparition de mousse après un traitement hydrofuge.

Or, il ressort du document d’information précontractuelle communiqué par la société [U] aux époux [Y] que les travaux devaient se dérouler en plusieurs étapes, à savoir un décapage, un nettoyage haute pression, l’application d’un anti-mousse, l’application d’un traitement hydrofuge, et l’application d’un vernis. Il ne saurait ainsi être valablement prétendu par le prestataire que son intervention ne visait pas à prévenir l’apparition de mousse sur le toit traité, du moins à court terme. Or, il ressort des éléments non contestés du dossier que la société [U] a dû effectuer dès le mois de septembre 2019 une reprise des travaux au regard de l’apparition rapide de mousse sur la toiture. Par ailleurs, les époux [Y] versent aux débats un document commercial de la société SOVEDI, citée par la défenderesse, qui mentionne que le traitement  » agit en profondeur contre l’encrassement et la recolonisation du support par les algues et lichens « , ce qui relativise l’assertion de la société [U] selon laquelle aucun produit ne garantit la prolifération de mousse, au moins à court terme.

En outre, l’expert impute ces désordres, non pas à un phénomène naturel inévitable, mais à l’application du produit hydrofuge sur un support insuffisamment propre et sain, à l’insuffisance de brossage et préparation avant l’application du produit.

Le devis prévoit un nettoyage haute pression avant l’application du produit anti-mousse et l’expert souligne que ce nettoyage n’a pas dû être correctement réalisé, ce qui a favorisé l’apparition de mousse et champignons.

La mauvaise exécution du contrat par la société [U] est donc suffisamment caractérisée par les éléments versés aux débats, sans qu’il soit nécessaire de diligenter une expertise judiciaire.

L’expert préconise à titre de remède la réfection du traitement hydrofuge.

Les époux [Y] produisent un devis pour le démoussage de la toiture par grattage des plus grosses mousses, mise en œuvre de peinture sur tuiles en place et traitement par produit professionnel au prix TTC de 6.963,95 euros.

Il y a donc lieu d’indemniser les époux [Y] à hauteur de cette somme.

Ceux-ci seront en revanche déboutés de leur demande d’indemnisation au titre des préjudices moral et esthétique allégués, lesquels ne sont pas suffisamment établis.

Sur les demandes accessoires :

Conformément aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, il y a lieu de condamner la société [U], qui succombe à l’instance, aux entiers dépens.

La société [U] sera condamnée à verser aux époux [Y] la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le Tribunal rappellera que la présente décision est assortie, de droit, de l’exécution provisoire. Il n’y a pas lieu de l’écarter compte tenu de l’ancienneté des désordres.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort,

PREND ACTE de l’intervention volontaire de :

o La SELARL AJAssociés, en la personne de Maître [S] [C],
o La SELARL FHB, en la personne de Maître [E] [T],
o La SAS [X] [K] ET ASSOCIES, en la personne de Maître [G] [K],
o La SELARL [M] [I], en la personne de Maître [J] [M],

DEBOUTE les défendeurs de leur demande d’expertise judiciaire ;

CONDAMNE la S.A [U] à payer à Monsieur [N] [Y] et Madame [O] [Y] la somme de 6.963,95 euros ;

CONDAMNE la S.A [U] à payer à Monsieur [N] [Y] et Madame [O] [Y] la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE Monsieur [N] [Y] et Madame [O] [Y] de leurs demandes pour le surplus ;

CONDAMNE la S.A [U] aux dépens ;

REJETTE les parties de toute demande plus ample ou contraire ;

DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la présente décision.

LE GREFFIER LE JUGE


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