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Un établissement peut parfaitement être redevable d’un barème de rémunération équitable mixte, à savoir un barème applicable aux ‘discothèques et établissements similaires’ concernant son activité exercée de 22 heures jusqu’à la fermeture et un barème de restaurant entre 19 heures et 22 heures.
À la différence des discothèques ou établissements similaires, les bars et/ou restaurants à ambiance musicale peuvent cependant bénéficier de l’application des normes de réduction prévues à l’annexe 2 du protocole d’accord conclu le 10 novembre 2011 entre la SPRE et les syndicats professionnels.
L’article 2 de la décision réglementaire du 5 janvier 2010 dispose : ‘La rémunération due par les établissements exerçant une activité de bars et/ou de restaurants à ambiance musicale, ci-après dénommés respectivement BAM et RAM est déterminée comme suit.
Sont considérés comme BAM et/ou RAM tous établissements recevant du public diffusant de la musique amplifiée attractive constituant une composante essentielle de l’activité commerciale’.
Il est par ailleurs constant que le critère essentiel emportant la qualification de discothèque et l’application du barème ‘discothèques et établissements similaires’ résultant de la décision réglementaire du 30 novembre 2001, réside dans la possibilité pour la clientèle de danser sur de la musique constituée de phonogrammes et diffusée à un niveau d’amplification important.
Une société qui diffuse au sein de son établissement des phonogrammes à une forte intensité sonore qui incitent les clients à danser, avec des jeux de lumière, ainsi qu’une animation par un disc-jockey, est redevable du barème discothèques.
Tout établissement diffusant de la musique de sonorisation ou de la musique attractive a l’obligation d’une part, de communiquer spontanément tout justificatif comptable et fiscal des éléments nécessaires au calcul de cette rémunération, et d’autre part, de régler la rémunération due. En outre, une facturation d’office est adressée au redevable qui ne justifie pas de ses recettes.
Pour rappel, la Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (ci-après la SPRE) est une société civile de gestion collective des droits voisins du droit d’auteur des artistes-interprètes et des producteurs de phonogrammes.
La SPRE a pour mission légale de percevoir, sous le contrôle du ministère de la Culture, la rémunération dite équitable, prévue à l’article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle, due aux artistes-interprètes par les établissements qui diffusent publiquement à des fins commerciales des phonogrammes, qu’il s’agisse de musique attractive ou de sonorisation, dès lors que lesdits phonogrammes font l’objet d’une communication directe dans un lieu public ou d’une radiodiffusion.
Cette rémunération perçue par la société SPRE est ensuite répartie par moitié entre les artistes-interprètes et les producteurs.
Son barème et ses modalités de versement sont déterminés par une commission créée par l’article L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle.
En application de l’article L. 214-1 du même code, plusieurs catégories de barèmes de la rémunération équitable ont été arrêtées par ladite commission, en fonction de l’importance donnée à la musique diffusée, à savoir :
— un barème concernant les ‘lieux sonorisés’, soit les établissements qui diffusent un fond sonore, cette musique étant ‘une composante accessoire à l’activité commerciale’ (décision réglementaire de la commission du 9 septembre 1987, titre III – à partir du 1er février 2010, décision réglementaire de la commission du 5 janvier 2010, article 1),
— un barème concernant les ‘discothèques et établissements similaires’ (décision réglementaire du 30 novembre 2001, articles 1 et 2),
— un barème applicable aux ‘bars et/ou restaurants à ambiance musicale’ (BAM-RAM), soit les établissements ‘diffusant de la musique amplifiée attractive constituant une composante essentielle de l’activité commerciale’ institué par décision réglementaire de la commission du 5 janvier 2010 (article 2), avec effet au 1er février 2010.
Pour les discothèques et établissements similaires, comme pour les bars et/ou restaurants à ambiance musicale, la rémunération équitable est égale à 1,65 % de ‘l’ensemble des recettes brutes hors taxes’ de l’établissement, ‘confirmées par la production des éléments comptables et fiscaux permettant à la fois la vérification par la société de perception et de répartition et, le cas échéant, la prise en compte des particularités d’un établissement’ (décision réglementaire du 30 novembre 2001, articles 1 et 2 ; décision réglementaire du 5 janvier 2010, article 2).
À la différence des discothèques ou établissements similaires, les bars et/ou restaurants à ambiance musicale peuvent cependant bénéficier de l’application des normes de réduction prévues à l’annexe 2 du protocole d’accord conclu le 10 novembre 2011 entre la SPRE et les syndicats professionnels.
L’article 1er de la décision réglementaire du 30 novembre 2001 prévoit : ‘La rémunération due par les discothèques et établissements similaires est déterminée sur la base d’une assiette qui comprend l’ensemble des recettes brutes produites par les entrées ainsi que par la vente des consommations ou la restauration, services inclus, hors taxes, confirmées par la production des éléments comptables et fiscaux permettant à la fois la vérification par la société de perception et de répartition et, le cas échéant, la prise en compte des particularités d’un établissement’.
Au termes de l’article 2 de la même décision : ‘Le taux applicable à cette assiette est de 1,65 %. Sont déduits de cette assiette :
1- Un abattement de 12 % pour les établissements qui communiquent dans les quatre mois suivant la clôture de leur exercice social une déclaration certifiée de l’ensemble des recettes brutes détaillées réalisées au titre de cet exercice et une copie certifiée conforme par un expert-comptable ou un comptable agréé de la déclaration effectuée auprès de l’administration fiscale au titre de cet exercice ; cet abattement est pris en compte pour le calcul des paiements mensuels ;
2- Un abattement supplémentaire de 15 % pour les établissements qui s’acquittent, avant le 25 du mois d’émission de la facture, du montant facturé mensuellement ; cet abattement est porté à 17 % en cas de paiement par prélèvement automatique’.
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 03 MAI 2022
RP
N° RG 19/02215 – N° Portalis DBVJ-V-B7D-K7MZ
[O] [S]
SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE
c/
SOCIÉTÉ POUR LA PERCEPTION DE LA RÉMUNÉRATION EQUITABLE DE LA COMMUNICATION AU PUBLIC DES PHONOGRAMMES DU COMMERCE (SPRE)
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 05 février 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (chambre : 1, RG : 13/09985) suivant déclaration d’appel du 18 avril 2019
APPELANTES :
[O] [S]
née le 20 Novembre 1953 à [Localité 4]
de nationalité française
demeurant [Adresse 2]
SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège sis [Adresse 1]
représentées par Maître Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistées de Maître COUDRIER substituant Maître Sébastien BRUNET de la SCP CAMILLE et Associés, avocats plaidants au barreau de TOULOUSE
INTIMÉE :
SOCIETE POUR LA PERCEPTION DE LA REMUNERATION EQUITABLE DE LA COMMUNICATION AU PUBLIC DES PHONOGRAMMES DU COMMERCE (SPRE), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siége sis [Adresse 3]
représentée par Maître Annie TAILLARD de la SCP ANNIE TAILLARD AVOCAT, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Sophie BARA de la SELARL OX, avocat plaidant au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 15 mars 2022 en audience publique, devant la cour composée de :
Roland POTEE, président,
Vincent BRAUD, conseiller,
Bérengère VALLEE, conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Véronique SAIGE
ARRÊT :
— contradictoire
— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
La Société pour la Perception de la Rémunération Equitable de la communication au public des phonogrammes du commerce (ci-après la SPRE) est une société civile de gestion collective des droits voisins du droit d’auteur des artistes-interprètes et des producteurs de phonogrammes.
La SPRE a pour mission légale de percevoir, sous le contrôle du ministère de la Culture, la rémunération dite équitable, prévue à l’article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle, due aux artistes-interprètes par les établissements qui diffusent publiquement à des fins commerciales des phonogrammes, qu’il s’agisse de musique attractive ou de sonorisation, dès lors que lesdits phonogrammes font l’objet d’une communication directe dans un lieu public ou d’une radiodiffusion. Cette rémunération perçue par la société SPRE est ensuite répartie par moitié entre les artistes-interprètes et les producteurs.
Son barème et ses modalités de versement sont déterminés par une commission créée parl’article L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle. En application de l’article L. 214-1 du même code, plusieurs catégories de barèmes de la rémunération équitable ont été arrêtées par ladite commission, en fonction de l’importance donnée à la musique diffusée, à savoir :
— un barème concernant les ‘lieux sonorisés’, soit les établissements qui diffusent un fond sonore, cette musique étant ‘une composante accessoire à l’activité commerciale’ (décision réglementaire de la commission du 9 septembre 1987, titre III – à partir du 1er février 2010, décision réglementaire de la commission du 5 janvier 2010, article 1),
— un barème concernant les ‘discothèques et établissements similaires’ (décision réglementaire du 30 novembre 2001, articles 1 et 2),
— un barème applicable aux ‘bars et/ou restaurants à ambiance musicale’ (BAM-RAM), soit les établissements ‘diffusant de la musique amplifiée attractive constituant une composante essentielle de l’activité commerciale’ institué par décision réglementaire de la commission du 5 janvier 2010 (article 2), avec effet au 1er février 2010.
Pour les discothèques et établissements similaires, comme pour les bars et/ou restaurants à ambiance musicale, la rémunération équitable est égale à 1,65 % de ‘l’ensemble des recettes brutes (‘) hors taxes’ de l’établissement, ‘confirmées par la production des éléments comptables et fiscaux permettant à la fois la vérification par la société de perception et de répartition et, le cas échéant, la prise en compte des particularités d’un établissement’ (décision réglementaire du 30 novembre 2001, articles 1 et 2 ; décision réglementaire du 5 janvier 2010, article 2).
À la différence des discothèques ou établissements similaires, les bars et/ou restaurants à ambiance musicale peuvent cependant bénéficier de l’application des normes de réduction prévues à l’annexe 2 du protocole d’accord conclu le 10 novembre 2011 entre la SPRE et les syndicats professionnels.
En vertu des dispositions légales et réglementaires, tout établissement diffusant de la musique de sonorisation ou de la musique attractive a l’obligation d’une part, de communiquer spontanément tout justificatif comptable et fiscal des éléments nécessaires au calcul de cette rémunération, et d’autre part, de régler la rémunération due. En outre, une facturation d’office est adressée au redevable qui ne justifie pas de ses recettes.
La SAS La Couleur de la Culotte dont Mme [O] [S] est la dirigeante, exploite depuis le 10 décembre 2001, [Adresse 1], un établissement de bar-discothèque dénommé ‘LA COULEUR DE LA CULOTTE’, ouvert de 10 heures à 2 heures en semaine et jusqu’à 4 heures du matin le week-end.
Au terme d’une première procédure judiciaire engagée à l’encontre de cette société par la SPRE, la cour d’appel de Toulouse a, par arrêt du 22 septembre 2010 :
— condamné in solidum la société LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [S] à payer à la SPRE la somme de 781,76 € au titre de la rémunération équitable impayée en vertu du barème ‘lieux sonorisés’,
— reconnu l’assujettissement de la société LA COULEUR DE LA CULOTTE au barème ‘discothèques et établissements similaires’,
— condamné in solidum la société LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [S] à payer à la SPRE la somme de 88.787,81 € :
* la première au titre de la rémunération équitable impayée en vertu du barème ‘discothèques et établissements similaires’ pour les années 2002 à 2006,
* la seconde à titre de dommages-intérêts pour avoir commis une faute délictuelle détachable de son mandat social en manquant à son obligation de paiement de la rémunération équitable,
— condamné la société LA COULEUR DE LA CULOTTE à communiquer les justificatifs ventilés de ses recettes pour les années 2002 à 2006,
— condamné in solidum la société LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [S] au paiement de la somme de 1.000 € à titre de dommages-intérêts, outre la somme de 1.000 € déjà allouée en première instance,
— ordonné la publication de l’arrêt dans trois journaux aux frais de la société LA COULEUR DE LA CULOTTE à concurrence de 5.000 €,
— condamné in solidum la société LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [S] au paiement de la somme de 1.500 € au titre des frais irrépétibles d’appel, outre la somme de 1.500 € déjà allouée au titre des frais irrépétibles de première instance.
Invoquant la poursuite de la violation par la société La Couleur de la Culotte de ses obligations au titre de la rémunération équitable postérieurement à cette décision et faute de parvenir à un règlement amiable du litige, la SPRE a, par acte d’huissier du 2 octobre 2013, assigné la société La Couleur de la Culotte et Mme [S] devant le tribunal de grande instance de Bordeaux, aux fins notamment de les voir condamner in solidum au règlement de la rémunération équitable impayée entre le 1er janvier 2007 et le 30 novembre 2018.
Par jugement du 5 février 2019, le tribunal a :
— ordonné la révocation de l’ordonnance de clôture qui sera fixée au jour des plaidoiries et dit que sont recevables les conclusions et pièces n° 59 à 65 signifiées par la société LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [S] le 2 novembre 2018, ainsi que les conclusions et pièces n° 1.25, 1.26, 1.27, 2.14, 2.15, 2.16, 2.17, 2.18 et 4.5 signifiées le 4 décembre 2018 par la SPRE,
— dit que l’établissement exploité par la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE, sis [Adresse 1], relève du barème applicable aux ‘discothèques et établissements similaires’ tel que fixé par les articles 1 et 2 de la décision réglementaire du 30 novembre 2001 au titre de son activité exercée à compter de 22 heures et jusqu’à la fermeture,
— rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l’action en paiement engagée par la SPRE à l’encontre de la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE,
— condamné la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE à payer à la SPRE, au titre de la rémunération équitable due pour la période du 1er janvier 2007 au 30 novembre 2018, la somme en capital de 195.877,79 € (cent quatre-vingt-quinze mille huit cent soixante-dix-sept euros et soixante-dix-neuf centimes), avec intérêts au taux légal :
* sur la somme de 129.915,12 € à compter de la mise en demeure du 29 mars 2013,
* sur la somme de 1.031,94 € à compter de l’assignation du 2 octobre 2013,
* sur le solde à compter du présent jugement,
— ordonné la capitalisation des intérêts dus par années entières à compter du jugement en application de l’article 1343-2 du code civil,
— déclaré irrecevable comme prescrite l’action en responsabilité personnelle engagée la SPRE à l’encontre de Mme [O] [S] pour la période antérieure au 16 septembre 2010,
— dit que Mme [O] [S] sera tenue de la condamnation ci-dessus prononcée, in solidum avec la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE, à concurrence de la somme de 116.290,30 € (cent seize mille deux cent quatre-vingt-dix euros et trente centimes) pour la période du 16 septembre 2010 au 30 novembre 2018,
— dit que Mme [O] [S] sera également tenue, in solidum avec la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE, des intérêts au taux légal produits par cette somme pour la période du 16 septembre 2010 au 30 novembre 2018, dans les conditions précédemment énoncées, et avec capitalisation des intérêts à compter du présent jugement,
— condamné in solidum la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [O] [S] à payer à la SPRE la somme de 3.000 € de dommages et intérêts en réparation des préjudices matériel et moral subis,
— condamné in solidum la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [O] [S] à payer à la SPRE la somme 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— condamné in solidum la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [O] [S] aux dépens de l’instance, avec droit de recouvrement direct au profit des avocats de la cause conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
— dit n’y avoir lieu à exécution provisoire du jugement,
— rejeté toutes autres demandes comme non fondées.
Mme [S] et la société La Couleur de la culotte ont relevé appel de ce jugement par déclaration du 18 avril 2019.
Par conclusions déposées le 9 mars 2022, elles demandent à la cour de :
— ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture du 1er mars 2022,
Rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées,
— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a :
* déclaré irrecevable, comme prescrite, l’action en responsabilité personnelle engagée par la SPRE à l’encontre de Mme [O] [S] pour la période antérieure au 16 septembre 2010
* rejeté toutes autres demandes comme non fondées, et en cela, rejeté la demande de la SPRE tendant a voir ordonner la publication du jugement,
— reformer le jugement pour le surplus et statuant a nouveau :
— juger que la SPRE ne peut valablement considérer que la société LA COULEUR DE LA CULOTTE relève du régime de la rémunération équitable applicable aux discothèques et établissements similaires,
— juger que la societe LA COULEUR DE LA CULOTTE relève du regime applicable aux Bars et restaurants à ambiance musicale à partir de 22 heures
— juger que l’exploitation d’une terrasse non sonorisée constitue une particularité au sens des décisions réglementaires du 30.11.2001 et 05.01.2010,
— juger que le chiffre d’affaires réalisé sur une terrasse non sonorisée doit être, quel que soit le régime applicable (BAM ou discotheque), exclu de l’assiette de calcul de la rémunération équitable,
En conséquence,
— débouter la SPRE de l’ensemble de ses demandes,
— juger qu’en application du regime BAM et des abattements s’y rapportant la rémunération équitable due par la COULEUR DE LA CULOTTE s’élève au titre des années 2007 à juin 2018 à un montant total de 47 878,69 € TTC.
— ordonner la production par la SPRE sous astreinte de 100 € par jour de retard des factures correspondantes avec mention du taux et du calcul de la TVA, et des avoirs sur les factures précédemment émises,
— juger que la société LA COULEUR DE LA CULOTTE a d’ores et déjà réglé a la SPRE la somme totale de 49.407,26 € TTC au titre de cette même periode de 2007 à juin 2018
— condamner la SPRE à lui rembourser le trop-perçu de 1.528,57 € TTC,
— juger que Mme [S], en sa qualité de dirigeante de la société LA COULEUR DE LA CULOTTE n’a commis aucune faute détachable de ses fonctions qui engagerait sa responsabilité civile personnelle sur le fondement de l’article 1382 du code civil,
En conséquence,
— débouter la SPRE de sa demande tendant à la voir condamner solidairement au paiement des rémunérations équitables dues par la société LA COULEUR DE LA CULOTTE,
À titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire, et au motif que la diffusion de musique amplifiée attractive à partir de 22 h ait pu induire, à des heures tardives et pour un nombre tout a fait marginal de clients , l’envie de danser sans que l’etablissement soit aménagé à cet effet, il était considéré que la COULEUR DE LA CULOTTE exercerait une activité de discothèque à partir de 22h,
— juger que la rémunération équitable due par la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE doit être calculée :
* Sur la base non pas de l’intégralité du chiffre d’affaires réalisé après 22 heures comme l’avait fait la SPRE dans le cadre de son calcul subsidiaire et comme l’ avait retenu les juges de première instance mais en excluant le chiffre d’affaires réalisé en terrasse,
* Et avec l’abattement de 12% pour justification des recettes dans les délais, de 2011 à 2017, pour l’ années 2011 de 30% , pour l’ année 2012 de 15 % et de 10 % pour adhésion au syndicat UMIH,
— enjoindre la production par la SPRE un décompte de rémunération équitable établi sur ces bases,
En toute hypothèse,
— ordonner la main levée des mesures conservatoires prises, sous astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir,
— débouter la SPRE de ses demandes,
— débouter la SPR de sa demande de dommages et intérêts comme étant injustifiée,
— condamner la société SPRE au paiement de la somme de 15.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Par conclusions déposées le 23 février 2022, la SPRE demande à la cour de :
Confirmant le jugement intervenu en toutes ses dispositions, en retenant la qualification de discothèque et l’application du barème afférent à compter de 22 heures,
— condamner la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE à régler à la SPRE, au titre de la rémunération équitable impayée entre le 1er janvier 2007 et le 30 novembre 2018, en vertu du barème discothèques et établissements similaires, la somme en capital de 195.877,79 € (cent quatre-vingt-quinze mille huit cent soixante-dix-sept euros et soixante-dix-neuf centimes), outre intérêts au taux légal sur la somme de 129.915,12 € à compter de la mise en demeure du 29 mars 2013, sur la somme de 1.031,94 € à compter de l’assignation du 2 octobre 2013, et sur le solde à compter du jugement, avec capitalisation de ces intérêts à compter du jugement,
Cette condamnation étant à prononcer en quittance, le paiement ayant été intégralement effectué en cours d’instance d’appel
— condamner in solidum Mme [O] [S] à prendre en charge la condamnation prononcée à concurrence de 116.290,30 € (cent seize mille deux cent quatre-vingt-dix euros et trente centimes) en capital, au titre de la période de droits non prescrite pour elle du 16 septembre 2010 au 30 novembre 2018, avec intérêts de droit au taux légal dans les mêmes conditions que pour la société LA COULEUR DE LA CULOTTE, et capitalisation de ces intérêts à compter du jugement,
Cette condamnation étant à prononcer en quittance, le paiement ayant été intégralement effectué en cours d’instance d’appel
— condamner in solidum la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [O] [S] au paiement de la somme de 3.000 € à titre de dommages-intérêts délictuels,
Cette condamnation étant à prononcer en quittance, le paiement ayant été intégralement effectué en cours d’instance d’appel,
— condamner in solidum la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [O] [S] à verser à la SPRE la somme de 2.500 € en application de l’article 700 code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance,
Cette condamnation étant à prononcer en quittance, le paiement ayant été intégralement effectué en cours d’instance d’appel
— condamner in solidum la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [O] [S] aux dépens d’instance, en application de l’article 699 du code de procédure civile dont distraction au profit de Me Laurence BARRE.
Cette condamnation étant à prononcer en quittance, le paiement ayant été intégralement effectué en cours d’instance d’appel,
Y ajoutant en cause d’appel :
— constater que la SAS LA COULEUR DE LA CULOTTE a réglé toutes les factures de rémunération équitable émises en cause d’appel,
— condamner in solidum la société LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [O] [S] à verser à la SPRE la somme de 6.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel,
— condamner in solidum la société LA COULEUR DE LA CULOTTE et Mme [O] [S] aux dépens d’appel, en application de l’article 699 du code de procédure civile dont distraction au profit de Maître Annie Taillard.
L’affaire a été fixée à l’audience collégiale du 15 mars 2022.
L’instruction a été clôturée par ordonnance du 1er mars 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
À titre liminaire, il sera précisé que l’exécution par la société la Couleur de la Culotte de l’entièreté des condamnations prononcées par le tribunal, en ce compris les intérêts de retard, les dommages et intérêts, l’indemnité prévue à l’article 700 du code de procédure civile et les dépens, ne vaut pas acquiescement au jugement, les appelantes indiquant dans leurs écritures qu’elles contestent le bien-fondé des demandes de l’intimée.
En revanche, la question relative à la prescription de l’action de la SPRE en paiement de la rémunération équitable n’étant pas contestée par les appelantes, la cour n’en n’est pas saisie.
Sur la clôture de l’instruction
Au regard de l’accord des parties, il convient, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, de révoquer l’ordonnance du 1er mars 2022 et de reporter la clôture de l’instruction au jour de l’audience.
Sur la nature de l’activité exercée par la société La Couleur de la Culotte
L’article 2 de la décision réglementaire du 5 janvier 2010 dispose : ‘La rémunération due par les établissements exerçant une activité de bars et/ou de restaurants à ambiance musicale, ci-après dénommés respectivement BAM et RAM est déterminée comme suit.
Sont considérés comme BAM et/ou RAM tous établissements recevant du public diffusant de la musique amplifiée attractive constituant une composante essentielle de l’activité commerciale’.
Il est par ailleurs constant que le critère essentiel emportant la qualification de discothèque et l’application du barème ‘discothèques et établissements similaires’ résultant de la décision réglementaire du 30 novembre 2001, réside dans la possibilité pour la clientèle de danser sur de la musique constituée de phonogrammes et diffusée à un niveau d’amplification important.
En l’espèce, les débats portent en appel uniquement sur le barème applicable à partir de 22 heures.
La société La Couleur de la Culotte fait valoir qu’elle n’a pas d’activité de discothèque ou d’établissement similaire, qu’elle a seulement une activité de bar à ambiance musicale et revendique l’application de la décision réglementaire du 5 janvier 2010. Elle fait en outre valoir qu’elle exploite une terrasse non sonorisée et estime que le chiffre d’affaires qui y est réalisé doit être exclu de l’assiette de la rémunération équitable, quel que soit le régime applicable.
En réponse, la SPRE demande la confirmation du jugement qui a considéré que l’établissement exploité par la société La Couleur de la Culotte a une activité duale, soumise jusqu’à 22h à l’application du barème ‘bars et restaurants à ambiance musicale’, issu de la décision réglementaire du 5 janvier 2010 et entré en vigueur le 1er février 2010, et à partir de 22h jusqu’à la fermeture, à l’application du barème ‘discothèques et établissements similaires’, issu de la décision réglementaire du 30 novembre 2001 et entré en vigueur le 1er janvier 2002. Elle se prévaut de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Toulouse du 22 septembre 2010 dans la première affaire ayant opposé la société La Couleur de la Culotte à la SPRE pour le paiement de la rémunération équitable sur la période comprise entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2006, lequel a relevé que la clientèle de l’établissement dansait et a en conséquence jugé que l’activité exercée par la société La Couleur de la Culotte relevait du barème applicable aux discothèques et établissements similaires. La SPRE fait valoir que l’activité de la société appelante n’a pas changé depuis cette période.
La société La Couleur de la Culotte ne conteste pas que la diffusion de musique attractive est au coeur de l’activité de l’établissement qu’elle exploite, mais elle soutient que celui-ci n’offre pas la possibilité à sa clientèle de danser.
Indépendamment de l’arrêt rendu le 22 septembre 2010 par la cour d’appel de Toulouse, la SPRE produit à la procédure trois procès-verbaux dressés par des agents agréés par le ministère de la Culture et assermentés dans les conditions prévues aux articles L.331-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle.
S’il est exact que le procès-verbal dressé le 9 février 2013 n’est pas signé, ainsi que la soulève la société La Couleur de la Culotte, les griefs formulés à l’encontre des procès-verbaux dressés le 6 septembre 2014 et le 3 juin 2017 ne sont pas de nature à remettre en cause leur valeur probante.
Aux termes du procès-verbal du 29 septembre 2014 (pièce 1.8 SPRE), l’agent assermenté de la SPRE relate s’être rendu le 6 septembre 2014, de 0h35 à 0h50, dans l’établissement à l’enseigne ‘La Couleur de la Culotte’ et expose avoir constaté que de nombreuses personnes patientent pour y entrer et qu’un portier est disposé devant l’entrée. Il indique qu’une fois entré dans l’établissement, il constate qu’un disc-jockey ‘diffuse de la musique enregistrée ‘electro’ à un volume sonore élevé, via une platine’ ; qu’il est ‘impossible de tenir une conversation sans élever la voix’ et que ‘ des enceintes de grande taille sont orientées de façon à permettre à la clientèle de profiter de la musique. Des jeux de lumière sont disposés dans la salle et contribuent à rendre l’ambiance festive’. Il précise qu’il lui est impossible de dénombrer le nombre de clients ‘tant la salle est pleine’ et que ‘certains consomment, d’autres dansent en rythme avec la musique diffusée’.
Dans le dernier procès-verbal, dressé à la suite de sa visite effectuée le 3 juin 2017 de 23h à 23h50 (pièce 1.15 SPRE), l’agent assermenté relate la présence de deux vigiles, chacun posté devant l’une des deux entrées de l’établissement La Couleur de la Culotte. A l’intérieur, il a constaté les éléments suivants :
— ’Un DJ est installé à gauche de l’entrée sur une table haute, son matériel est composé d’une platine vinyle et d’un ordinateur. Il regarde son écran pendant que le titre ‘Get down on saturday night’ d'[N] [U] passe à volume sonore très élevé (…)’ ;
— ’Plusieurs clients dansent devant le DJ dans cette zone. Des enceintes sont disposées sur des rampes au plafond et aux angles des murs. Des jeux de lumière et des stroboscopes balaient la salle et contribuent à l’animation festive (…)’ ;
— ’Je ne remarque aucune affiche faisant état d’un événement exceptionnel ce soir (…)’ ;
— ’La musique enregistrée diffusée à très fort volume sonore est de style RnB, disco et Rap’ ;
— ’Quand je quitte l’établissement à 23h50, les danseurs sont toujours devant le DJ’.
Il résulte de ces éléments que l’activité dansante de la clientèle, sur des phonogrammes diffusés à un niveau sonore élevé, est établie.
Les constats d’huissier dressés à la requête de la société La Couleur de la Culotte, aux mois d’avril 2013, avril et juin 2014, septembre et octobre 2018, ne sont pas de nature à remettre en cause les constatations effectuées par les agents assermentés de la SPRE.
Ces constatations sont par ailleurs corroborées par les mentions portées par les appelantes sur le site internet de l’établissement (lacouleurdelaculotte.com), comme sur son compte facebook, dont les extraits suivants démontrent que la musique attractive mixée et diffusée par des disc-kockeys et la danse, constituent l’élément essentiel de la communication et de la publicité de la société La Couleur de la Culotte dans le cadre de la promotion des soirées qu’elle organise de façon récurrente :
— Soirées ‘Groovy Night’ : ‘Viens BootyShaker ton corps tous les premiers samedi et troisième jeudi du mois !’ ;
— Soirées ‘le Chant de la Machine’ sur le thème : ‘Happy playlist, Fun, Dance et Déconnade’ ;
— Soirées ‘Kermanight’ : ‘Moustache aiguisée et disques nettoyés tous les vendredis’.C’est au tour de KermAn de te faire danser toute la nuit !’ ;
— Soirée du 27 décembre 2017 ‘Lamache fête Noël avec ses copains !’ : ‘Quoi de mieux qu’une bonne fiesta pour digérer les repas de fêtes ‘ (‘) Fiesta and old classic house music all night long ! On lâche les chevaux’et on élimine l’aligot !’ ;
— Soirées ‘Vener pop party’ : ‘Dancing all night loooooong and only pop music avec la Davyd Vener POP PARTY !’ ;
— Soirée ’15 ans de pop’ du 8 juin 2017 avec la présence d’un disc-jockey pour ‘faire danser les clients du bar sur les sons de la musique pop actuelle et passée’.
— Soirée du 10 janvier 2018 ‘Parce que c’est notre soirée !’ : ‘Une ambiance de feu pour bien commencer l’année’, ‘Nous vous attentons nombreux le mercredi 10 janvier pour bien fêter la rentrée de 19 heures à minuit’, ‘Pour trinquer, danser et s’éclater’.
Les photographies extraites du site internet et du compte facebook de la société La Couleur de la Culotte produites en pièce 1.24 par la SPRE, confirment également l’activité dansante de la clientèle de l’établissement.
Le moyen développé par les appelantes tenant à l’absence de mention d’une activité de discothèque sur l’extrait kbis de la société la Couleur de la Culotte n’est pas de nature à contredire l’exercice effectif d’une telle activité et le moyen tenant à l’absence d’une piste de danse semblable à celle d’une discothèque, est inopérant, notamment dès lors que l’établissement dispose d’espaces au sein desquels les clients pratiquent la danse, ainsi que les agents assermentés de la SPRE ont pu le relever, le procès-verbal du 3 juin 2017 indiquant à cet égard la présence d’un espace de danse, dans la catégorie ‘moyens techniques constatés’.
Il résulte de ces éléments que la société La Couleur de la Culotte diffuse au sein de son établissement des phonogrammes à une forte intensité sonore qui incitent les clients à danser, avec des jeux de lumière, ainsi qu’une animation par un disc-jockey, ce qui correspond à une activité de discothèque.
Cependant et ainsi que l’a justement relevé le tribunal, la SPRE ne produit aucun élément justifiant de l’application du barème ‘discothèques et établissements similaires’ entre 18 heures et 22 heures. Les procès-verbaux dressés par les agents assermentés de la SPRE et versés à la procédure constatent une activité dansante correspondant à celle d’une discothèque après 22 heures. Aucune activité dansante n’est par ailleurs mentionnée entre 18 heures et 22 heures dans les constats dressés par les huissiers de justice mandatés à la demande de la société La Couleur de la Culotte et produits par elle, dont la valeur probante n’est pas utilement remise en cause par les éléments produits par la SPRE. Enfin, il convient de relever que les contrats de travail des disc-jockeys ainsi que des portiers salariés de l’établissement (pièces 25 à 29 appelantes) stipulent que leur service démarre à 22 heures. Il en est de même pour les factures de M. [K] [J], disc-jockey indépendant, qui mentionnent des prestations de ‘deejay’ de 22h à 2h (pièces 30 appelantes).
En conséquence de l’ensemble des éléments ci-dessus développés, l’établissement exploité par la société La Couleur de la Culotte doit être soumis au barème applicable aux ‘discothèques et établissements similaires’ visé par la décision réglementaire du 30 novembre 2001, concernant son activité exercée de 22 heures jusqu’à la fermeture et est redevable de la rémunération équitable due à la SPRE à ce titre. Le jugement sera ainsi confirmé sur ces points.
Sur le montant de la rémunération équitable due par la société La Couleur de la Culotte
La question relative à la prescription de l’action de la SPRE en paiement de la rémunération équitable n’étant pas contestée par les appelantes, la cour n’en n’est pas saisie. Il convient dès lors de déterminer le montant de la rémunération équitable due en application du barème ‘discothèques et établissements similaires’ à partir de 22 heures, dont les modalités d’application par la SPRE sont contestées par la société La Couleur de la Culotte et sa gérante.
L’article 1er de la décision réglementaire du 30 novembre 2001 prévoit : ‘La rémunération due par les discothèques et établissements similaires est déterminée sur la base d’une assiette qui comprend l’ensemble des recettes brutes produites par les entrées ainsi que par la vente des consommations ou la restauration, services inclus, hors taxes, confirmées par la production des éléments comptables et fiscaux permettant à la fois la vérification par la société de perception et de répartition et, le cas échéant, la prise en compte des particularités d’un établissement’.
Au termes de l’article 2 de la même décision : ‘Le taux applicable à cette assiette est de 1,65 %. Sont déduits de cette assiette :
1- Un abattement de 12 % pour les établissements qui communiquent dans les quatre mois suivant la clôture de leur exercice social une déclaration certifiée de l’ensemble des recettes brutes détaillées réalisées au titre de cet exercice et une copie certifiée conforme par un expert-comptable ou un comptable agréé de la déclaration effectuée auprès de l’administration fiscale au titre de cet exercice ; cet abattement est pris en compte pour le calcul des paiements mensuels ;
2- Un abattement supplémentaire de 15 % pour les établissements qui s’acquittent, avant le 25 du mois d’émission de la facture, du montant facturé mensuellement ; cet abattement est porté à 17 % en cas de paiement par prélèvement automatique’.
Mme [S] et la société la Couleur de la Culotte demandent, à titre subsidiaire et dans l’hypothèse où la cour retient que l’établissement a une activité de discothèque à partir de 22 heures, qu’il soit enjoint à la SPRE d’établir un décompte de la rémunération équitable due :
— en excluant le chiffre d’affaires réalisé en terrasse de l’assiette de calcul ;
— en appliquant les abattements de 12% pour justification des recettes dans les délais au titre des années 2011 à 2017 et de 10% pour adhésion au syndicat UMIH.
La SPRE fait valoir que la terrasse constitue un service rendu aux clients de l’établissement dans le cadre de l’activité de discothèque et que le chiffre d’affaires qui y est réalisé doit être inclus dans l’assiette de calcul, la décision réglementaire du 30 novembre 2001 prévoyant que la rémunération équitable est assise sur l’ensemble des recettes de l’exploitation, service inclus.
Il ressort des termes de l’article 1er de la décision réglementaire du 30 novembre 2001, que la rémunération équitable est assise sur ‘l’ensemble des recettes brutes produites par les entrées ainsi que par la vente des consommations ou la restauration, services inclus, hors taxes’.
En l’espèce, dans le cadre de l’activité de discothèque de la Couleur de la Culotte, la terrasse non sonorisée ne saurait constituer une ‘particularité de l’établissement’ au sens de l’article 1er de la décision réglementaire du 30 novembre 2001 dès lors que les modalités d’exploitation et de fonctionnement de cette terrasse non sonorisée démontrent qu’elle fait partie intégrante de l’établissement, les clients pouvant y accéder librement durant les heures d’ouverture de la discothèque.
Sur ce point, dans son procès-verbal dressé à la suite de sa visite du 3 juin 2017 de 23h à 23h50, l’agent agréé par le ministère de la Culture et assermenté dans les conditions prévues aux articles L.331-2 et suivants du code de la propriété intellectuelle, a notamment constaté que: ‘L’accès à la terrasse est libre et les clients vont et viennent entre la terrasse et l’intérieur de la discothèque. De nombreux clients viennent commander au bar et sortent avec les verres pour consommer en terrasse et revenir ensuite à l’intérieur’ (pièce 1.15 SPRE).
Il ressort de ces constatations que la clientèle qui consomme en terrasse est la même que celle qui fréquente l’intérieur de l’établissement, ces mêmes clients allant et venant de l’intérieur vers l’extérieur et inversement, selon les moments de la soirée. Il apparaît également que les commandes de consommations s’effectuent après 22 heures, non sur la terrasse, mais au bar à l’intérieur et que les clients sortent éventuellement avec leur verre pour boire, fumer et discuter.
Il en résulte que l’accès à la terrasse de la Couleur de la Culotte est une simple prestation supplémentaire offerte à la clientèle et accessoire à l’activité principale de discothèque se déroulant à l’intérieur de l’établissement, cet agrément permettant aux clients de s’aérer au cours de la soirée ou de discuter plus au calme qu’à l’intérieur.
Dès lors, c’est à bon droit que le tribunal a considéré que la tarification de la rémunération équitable due par l’établissement La Couleur de la Culotte dans le cadre de l’application du barème ‘discothèques et établissements similaires’ devait être assise sur son chiffre d’affaires global, incluant celui réalisé sur la terrasse non sonorisée après 22 heures, laquelle ne constitue pas, en l’espèce, une particularité au sens de la décision réglementaire du 30 novembre 2001.
Par ailleurs, il convient de constater que les abattements pour justification des recettes dans les délais au titre des années 2011 à 2017 et adhésion au syndicat UMIH, dont l’application est demandée par la société la Couleur de la Culotte, ont déjà été retenus et appliqués par la SPRE lorsqu’ils devaient l’être, comme il ressort des factures qu’elle produit en pièces 4.1 à 4.5.
Ainsi, les méthodes de calcul détaillées par la SPRE et les montants par elle obtenus dans ce cadre, sont conformes aux dispositions légales et réglementaires applicables en l’espèce et rappelées supra, tandis que les données qu’elle a prises en compte sont confirmées par les justificatifs comptables, les factures et les décomptes produits à la procédure. Il est également établi que le dernier décompte produit par la SPRE en pièce 2.20, tient compte de tous les montants réglés par la société la Couleur de la Culotte jusqu’au 24 février 2022, en ce compris le paiement intégral de la condamnation prononcée par le jugement du 5 février 2019.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société la Couleur de la Culotte à payer à la SPRE, au titre de la rémunération équitable due en vertu du barème discothèque et établissements similaires pour la période du 1er janvier 2007 au 30 novembre 2018,la somme en capital de 195.877,79 €, avec intérêts au taux légal, sur la somme de 129.915,12 € à compter de la mise en demeure du 29 mars 2013, sur la somme de 1.031,94 € à compter de l’assignation et sur le solde à compter du jugement du 5 février 2019 et de constater l’entier paiement en cours d’instance d’appel par la société La Couleur de la Culotte de la condamnation prononcée par le tribunal.
Sur la responsabilité personnelle de Mme [S]
Mme [S] demande la confirmation du jugement en ce qu’il a retenu que l’action en responsabilité personnelle engagée contre elle par la SPRE est prescrite pour la période antérieure au 16 septembre 2010. Elle critique cependant le jugement en ce qu’il a retenu sa responsabilité personnelle pour la période du 16 septembre 2010 au 30 novembre 2018 et l’a condamnée in solidum avec la société La Couleur de la Culotte au paiement des condamnations prononcées, à concurrence de 116.290,30 €, faisant valoir qu’elle ne cherche pas à échapper au paiement de la rémunération équitable, qu’elle souhaite seulement que les particularités de son établissement soient prises en compte et qu’aucune faute détachable de ses fonctions n’est établie.
La SPRE ne conteste pas la prescription de son action en responsabilité personnelle de la dirigeante concernant de la période antérieure au 16 septembre 2010. Pour la période postérieure, elle fait valoir que le défaut de versement de la rémunération équitable est un délit, qu’il est de jurisprudence constante que le dirigeant qui diffuse des phonogrammes dans son établissement sans régler la rémunération équitable commet une faute détachable de ses fonctions engageant sa responsabilité civile personnelle et que Mme [S] a une connaissance précise de ses obligations, puisqu’elle a déjà été condamnée à titre personnel par arrêt de la cour d’appel de Toulouse du 22 septembre 2010, pour avoir exploité le même établissement de 2002 à 2006 sans régler la rémunération équitable. La SPRE sollicite dès lors la confirmation du jugement sur la responsabilité personnelle de Mme [S] et la fixation du quantum de son obligation à la somme de 116 290,30 €, outre intérêts légaux et capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l’article 1343-2 du code civil.
Les parties ne contestant pas la prescription de l’action en responsabilité personnelle de Mme [S] pour la période antérieure au 16 septembre 2010, le jugement sera confirmé sur ce point.
Concernant la période postérieure à cette date, il est constant que le dirigeant d’une société commerciale qui commet dans l’exercice de ses fonctions une infraction pénale intentionnelle, détachable de ses fonctions, engage sa responsabilité civile personnelle sur le fondement de l’article 1382 devenu 1240 du code civil, à l’égard des tiers auxquels cette faute a causé un préjudice.
Par ailleurs, le défaut de versement de la rémunération équitable due aux artistes-interprètes et aux producteurs de phonogrammes constitue une faute d’une particulière gravité, sanctionnée pénalement par les dispositions de l’article L.335-4 alinéa 3 du code de la propriété intellectuelle et en conséquence détachable de ses fonctions pour le dirigeant qui la commet.
En l’espèce, Mme [S] fait diffuser quotidiennement de la musique enregistrée dans son établissement La Couleur de la Culotte, sans pour autant s’acquitter du paiement de la rémunération équitable, laquelle constitue une créance alimentaire pour les artistes, en application des articles L.131-8 et L.333-2 du code de la propriété intellectuelle.
Au surplus, il convient de relever que Mme [S] ne procède pas aux règlements dus à la SPRE au titre de la rémunération équitable depuis le 1er janvier 2007, alors même qu’elle a déjà été condamnée à titre personnel par arrêt de la cour d’appel de Toulouse du 22 septembre 2010 à raison du non paiement de la rémunération équitable entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2006 par la société La Couleur de la Culotte, s’agissant précisément du même établissement que celui dont il est question dans le cadre de la présente instance.
Ainsi, Mme [S] avait une parfaite connaissance de ses obligations en la matière, dont elle n’a eu de cesse de retarder l’exécution et pour lesquelles elle a engagé et prolongé des pourparlers à des fins manifestement dilatoires. Elle a en outre persisté durant plusieurs années dans son refus de communication à la SPRE d’éléments nécessaires au calcul des sommes dues.
Il résulte de ces éléments que Mme [S] a commis une faute civile, qui engage sa responsabilité personnelle en sa qualité de dirigeante de la société La Couleur de la Culotte.
En conséquence, la responsabilité civile personnelle de Mme [S] en raison du non paiement par la société La Couleur de la Culotte de la rémunération équitable doit être retenue et le jugement confirmé en ce qu’il l’a condamnée in solidum avec la société La Couleur de la Culotte à payer à la SPRE la condamnation prononcée par le tribunal à ce titre, à concurrence de 116.290,30 € pour la période du 16 septembre 2010 au 30 novembre 2018, étant précisé que l’intégralité de ces sommes a été réglée en cours d’instance d’appel.
Sur la demande indemnitaire formée la SPRE
La SPRE fait valoir qu’elle est une société de perception et de répartition des droits et non une société de recouvrement de créances et que le recouvrement contentieux de la rémunération équitable constitue pour elle un coût non inhérent à la gestion des droits, qui vient s’imputer sur le montant revenant aux ayants droit. Elle fait ainsi valoir qu’elle subit un préjudice matériel, correspondant au coûts pré-contentieux et contentieux internes et un préjudice moral, résultant de l’atteinte à sa mission légale et du trouble causé à son fonctionnement du fait de l’infraction commise par la dirigeante de la société La Couleur de la Culotte. Elle sollicite en réparation la condamnation in solidum des appelantes à lui payer la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts, en quittance, le paiement ayant été intégralement effectué en cours d’appel.
En réponse, les appelantes estiment que la SPRE ne démontre pas les préjudices qu’elle invoque et concluent au débouté de sa demande de dommages et intérêts.
Il est en l’espèce établi que le comportement fautif de la société La Couleur de la Culotte et de sa dirigeante, Mme [S], a contraint la SPRE à supporter des frais de gestion supplémentaires pour la mise en recouvrement des sommes dues au titre de la rémunération équitable, ce qui constitue pour elle un préjudice matériel. En outre, l’atteinte portée à son fonctionnement et aux droits des artistes-interprètes et producteurs de phonogrammes, dont elle assure la gestion dans le cadre de sa mission légale, constitue pour elle un préjudice moral. Ces préjudices subis par la SPRE seront réparés par la condamnation in solidum des appelantes à lui payer la somme de 3.000 €, confirmant le jugement de ce chef.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Il y a lieu de confirmer le jugement du 5 février 2019 en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. Sur ce fondement, la société La Couleur de la Culotte et Mme [S] supporteront la charge des dépens.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée.
En l’espèce, la société La Couleur de la Culotte et Mme [S] seront condamnées à verser à la SPRE la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
— Révoque l’ordonnance de clôture;
— Prononce la clôture de l’instruction à la date du 15 mars 2022;
— Confirme le jugement du 5 février 2019 en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
— Constate que la SAS La Couleur de la Culotte s’est acquittée de l’intégralité des condamnations prononcées à son encontre par le jugement du 5 février 2019 et a réglé l’ensemble des factures de rémunération équitable émises en cause d’appel ;
— Condamne in solidum la SAS La Couleur de la Culotte et Mme [O] [S] à payer à la SPRE une somme de 4.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
— Déboute les parties de leur demandes plus amples ou contraires ;
— Condamne in solidum la SAS La Couleur de la Culotte et Mme [O] [S] aux dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier,Le Président,