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délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 29 SEPTEMBRE 2022
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 16/08686 – N° Portalis DBVK-V-B7A-M6DI
ARRET N°
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 23 novembre 2016
TRIBUNAL D’INSTANCE DE SETE
N° RG 11-16-0117
APPELANTS :
Madame [N] [O]
[Adresse 3]
[Localité 2]
et
Monsieur [T] [P]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentés par Me Patrick MELMOUX de la SCP VERBATEAM MONTPELLIER, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
EURL ARCHISPACE
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Jérémy BALZARINI de la SCP LEVY, BALZARINI, SAGNES, SERRE, LEFEBVRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l’audience par Me Rémy LEVY, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 31 Mai 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 JUIN 2022,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre et M. Fabrice DURAND, Conseiller, chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre
M. Fabrice DURAND, Conseiller
Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée par ordonnance du premier président du 20 avril 2022
Greffier lors des débats : Mme Camille MOLINA
en présence de Mme Ingrid HABOLD, greffière stagiaire
ARRET :
– contradictoire ;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffier.
*
**
EXPOSE DU LITIGE
Par contrat d’architecte signé le 2 juillet 2012, Mme [N] [O] et M. [T] [P] ont confié à l’EURL Archispace une mission complète de maîtrise d’oeuvre de rénovation d’une maison individuelle édifiée [Adresse 3] (34).
Le contrat stipulait une rémunération de l’architecte de 11% du montant final HT des travaux évalués à hauteur de 165 000 euros.
Par courrier du 15 juin 2015, l’EURL Archispace a mis en demeure Mme [N] [O] et M. [T] [P] de lui payer la somme de 6 020,47 euros représentant le solde des honoraires de sa mission.
Une réunion de conciliation a été organisée en vain entre les parties le 23 novembre 2015 devant un représentant de l’ordre des architectes.
Par ordonnance du 20 janvier 2016, il a été fait injonction à Mme [O] et à M. [P] de payer cette somme à l’EURL Archispace. Cette ordonnance leur a été signifiée le 18 février 2016.
Mme [O] et M. [P] ont formé opposition à l’ordonnance d’injonction de payer et contestent devoir les honoraires exigés par l’EURL Archispace.
Par jugement du 23 novembre 2016, le tribunal d’instance de Sète :
‘ a déclaré recevable l’opposition à ordonnance aux fins d’injonction de payer rendue le 20 janvier 2016 ;
‘ a réduit à néant l’ordonnance du 20 janvier 2016 ;
‘ s’est déclaré compétent pour statuer sur la demande principale formée par l’EURL Archispace ;
‘ a condamné solidairement Mme [N] [O] et M. [T] [P] à payer à l’EURL Archispace la somme de 6 020,47 euros l’intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 15 juin 2015 ;
‘ s’est déclaré incompétent pour statuer sur la demande reconventionnelle formée par M. [T] [P] et Mme [N] [O] et les a invités à saisir le tribunal de grande instance de Montpellier après avoir, conformément à l’article G10 du cahier des clause générales du contrat de maîtrise d”uvre signé le 2 juillet 2012, saisi l’ordre des architectes pour avis ;
‘ a condamné solidairement Mme [N] [O] et M. [T] [P] à payer 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
‘ a rejeté les plus amples prétentions ou demandes ;
‘ a condamné solidairement les requis aux dépens.
Par déclaration au greffe du 13 décembre 2016, Mme [N] [O] et M. [T] [P] ont relevé appel total de ce jugement à l’encontre de l’EURL Archispace.
Vu les dernières conclusions de Mme [N] [O] et de M. [T] [P] remises au greffe le 16 juin 2017 ;
Vu les dernières conclusions de l’EURL Archispace remises au greffe le 20 avril 2017 ;
L’ordonnance de clôture a été rendue le 31 mai 2022.
MOTIFS DE L’ARRET
Aux termes de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 applicable en l’espèce, « Les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. »
L’article 1315 ancien du code civil précise que « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le payement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. »
Il n’est pas contesté par les parties que la SARL Archispace s’est vu confier une mission complète de maîtrise d’oeuvre et que sa rémunération a été fixée à hauteur de 11% du montant prévisionnel des travaux HT évalués 165 000 euros HT.
Il appartient à la SARL Archispace d’apporter la preuve de ce qu’elle a satisfait à son engagement contractuel et qu’elle a effectivement réalisé les prestations prévues par le contrat.
Mme [O] et M. [P] soutiennent étonnamment dans leurs écritures que l’EURL Archispace ne produit aucune facture alors qu’elle a versé aux débats (pièce n°6) son courrier de mise en demeure LRAR du 15 juin 2022 auquel sont jointes les trois factures afférentes aux demandes en paiement des sommes suivantes :
‘ solde de 2 289,14 euros TTC à régler sur la facture n°14-10-26 du 31 octobre 2014 à échéance au 31 octobre 2014 ;
‘ 2 709,27 euros TTC sur la facture n°14-12-36 du 31 décembre 2014 à échéance du 30 janvier 2015 ;
‘ 1 022,06 euros TTC sur la facture n°15-03-04 du 10 mars 2015 à échéance du 31 mars 2015 ;
soit un total de 6 020,47 euros TTC.
Le contrat prévoit un achèvement de la mission de l’architecte à la plus tardive des deux dates suivantes : levée des éventuelles réserves ou remise du DOE au maître d’ouvrage.
Par des motifs pertinents que la cour d’appel adopte expressément, le jugement déféré a considéré que l’EURL Archispace avait accompli l’intégralité de sa mission en retenant :
‘ que la première tranche des travaux s’est achevée par une réception avec réserves le 25 juillet 2014 qui ont été levées le 18 septembre 2014 ; que la réception des travaux de la seconde tranche est intervenue le 18 décembre 2014 avec levée des réserves le 5 février 2015 ;
‘ que les maîtres d’ouvrage ne peuvent pas utilement soutenir que la signature du procès-verbal de réception par M. [P] ne serait pas valable au motif que les époux seraient mariés sous le régime de la séparation de biens et que le bien immobilier concerné constituerait un bien propre de Mme [O] ;
‘ qu’en effet, M. [P] a signé le contrat de maîtrise d’oeuvre en qualité de maître d’ouvrage conjointement avec Mme [O], qu’il occupait les lieux, qu’il a été l’interlocuteur constant de l’architecte durant le chantier et qu’il s’est comporté comme l’aurait fait un légitime propriétaire; qu’il a manifestement agi comme le mandataire de son épouse qui n’a jamais contesté ce mandat apparent au sens de l’article 1998 du code civil couvrant les actes d’administration et de disposition, ni jamais remis en cause les multiples interventions de son mari agissant comme son mandataire ;
‘ que M. [P] reconnaît implicitement le rôle de maître d’ouvrage qu’il a joué durant les travaux en sollicitant de substantiels dommages-intérêts à titre reconventionnel en sa qualité de partie au contrat de maîtrise d’oeuvre ;
‘ qu’il se déduit des pièces versées aux débats et notamment des procès-verbaux de chantiers et courriers échangés entre les parties que l’architecte a parfaitement assuré sa mission de coordination du chantier et de surveillance des travaux ; que ce chantier s’est achevé avec la réception expresse des ouvrages et la levée des réserves intervenue successivement pour la première et pour la seconde tranche des travaux sans que les maîtres d’ouvrage n’émettent de contestation, et ce jusqu’à ce que l’EURL Archispace réclame le règlement du solde de ses honoraires ;
‘ que Mme [O] et M. [P] ne sont fondés à reprocher à l’architecte ni un dépassement du budget prévisionnel qui résulte de leurs propres demandes de modification du projet ayant donné lieu à plus-values, ni le non respect d’un délai de livraison qui n’était pas stipulé au contrat.
La cour d’appel partage cette analyse du premier juge.
Dès lors, les dispositions de l’article 1536 et 1540 du code civil ne permettent pas d’invalider les procès-verbaux de réception et de levée des réserves contestés par Mme [O] et par M. [P].
Les appelants invoquent également les dispositions du code civil et notamment ses articles 1538, 815-2 et 815-3 pour remettre en cause les procès-verbaux signés par M. [P].
Toutefois, outre le fait que la maison objet du litige constitue un bien propre de Mme [O], les articles précités ne sauraient faire obstacle au fait constant que M. [P] s’est comporté comme agissant au nom de son épouse, avec son consentement au moins implicite, apparaissant comme détenteur d’un mandat apparent qui lui a permis d’engager les deux indivisaires sans que soient exclus de ce mandat les actes de disposition.
Il convient d’ajouter que Mme [O] et M. [P] ne font état d’aucune réserve non levée leur portant un préjudice significatif et justifiant de retenir une partie des honoraires dus à l’architecte en application du contrat.
Il ressort en effet de la liste des réserves maintenues par l’architecte le 5 février 2015 avec l’accord de M. [P] que l’EURL Archispace a fait preuve d’une vigilance irréprochable dans le suivi de ces réserves et que celles qui subsistaient à cette date, au demeurant mineures et peu nombreuses, ne lui sont aucunement imputables.
Par ailleurs, les échanges de courriers entre l’entreprise Procéram et les maîtres d’ouvrage en février 2015 ne traduisent aucune faute imputable à l’architecte mais démontrent au contraire un manque de coopération et une forme de raideur autoritaire des maîtres d’ouvrage manifestement peu disposés à rechercher une solution satisfaisante en vue d’une levée rapide des réserves.
Les échanges de courriers versés aux débats établissent que l’EURL Archispace a été parfaitement diligente lors des opérations de réception et de suivi des réserves en lien avec les entreprises concernées. Ces courriers démontrent également que Mme [O] et M. [P] sont largement responsables des difficultés pratiques rencontrées pour lever la totalité des réserves. Ces derniers ont ensuite refusé de payer l’architecte sans motif valable, et ce alors qu’ils avaient reçu les ouvrages depuis plusieurs mois et qu’ils ne formaient plus aucun grief contre le maître d’oeuvre ni contre les entreprises intervenues.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu’il a condamné Mme [O] et M. [P] à payer à l’EURL Archispace la somme de 6 020,47 euros TTC représentant le solde de ses honoraires.
S’agissant des intérêts de retard conventionnels sollicités par l’EURL Archispace, il convient de rappeler que l’article P-5.6.1 du contrat d’architecte stipule :
« Les notes d’honoraires et demandes de remboursement de frais sont réglées dans le délai de 30 jours.
Tout retard de paiement donne droit au paiement de l’indemnité de retard prévue par l’article G-5.4.2 du cahier des clauses générales. »
L’article G-5.4.2 du CCG précise que cette indemnité de retard est égale à 3,5/10 000ème du montant HT de la facture par jour calendaire et qu’elle est due sans mise en demeure préalable.
Mme [O] et M. [P] ne motivent pas leur demande et ne versent aucun élément aux débats établissant que cette clause pénale stipulant des intérêts moratoires conventionnels serait manifestement excessive de sorte que cette clause contractuelle doit recevoir application.
L’EURL Archispace apporte la preuve de ce que les trois factures précitées représentant un montant total de 6 020,47 euros TTC (soit 5 473,15 euros HT en tenant compte du taux de TVA applicable de 10%) ont été portées à la connaissance de Mme [O] et de M. [P] au plus tard par courrier LRAR du 15 juin 2015 réceptionné le 29 juin 2015.
Les intérêts moratoires conventionnels seront donc dus par Mme [O] et M. [P] à l’EURL Archispace à compter du 30 juin 2015.
Le jugement déféré sera donc infirmé du seul chef ayant accordé à l’EURL Archispace l’intérêt au taux légal à compter du 15 juin 2015 sur le montant dû TTC en lieu et place de l’intérêt conventionnel dû sur le montant HT en application du contrat de maîtrise d’oeuvre.
La capitalisation des intérêts moratoires a été demandée pour la première fois par conclusions des intimés signifiées le 20 avril 2017. Ces intérêts moratoires courent depuis le 30 juin 2015.
En conséquence, et conformément à l’article 1154 ancien du code civil, cette capitalisation des intérêts dus pour une durée supérieure à une année par Mme [N] [O] et M. [T] [P] à l’EURL Archispace sera ordonnée à partir du 20 avril 2017 ainsi qu’à chaque date anniversaire suivante.
Mme [O] et M. [P] succombent intégralement en appel et seront donc tenus de supporter les entiers dépens.
L’équité commande en outre de mettre à leur charge une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l’exception de celle ayant assorti la somme de 6 020,47 euros TTC due par Mme [O] et M. [P] à l’EURL Archispace d’intérêt de retard journalier au taux légal à compter du 15 juin 2015 ;
Statuant à nouveau sur l’unique disposition infirmée,
Dit que Mme [N] [O] et M. [T] [P] devront verser à l’EURL Archispace les intérêts moratoires conventionnels à hauteur de 3,5/10 000èmes par jour calendaire appliqués sur la somme de 5 473,15 euros HT à compter du 30 juin 2015 assortie de la TVA au taux applicable à la date du paiement ;
Y ajoutant,
Ordonne la capitalisation des intérêts moratoires dus par Mme [N] [O] et M. [T] [P] à l’EURL Archispace à partir du 20 avril 2017 et ensuite à chaque date anniversaire suivante jusqu’à apurement de la dette ;
Dit que Mme [N] [O] et M. [T] [P] seront tenus aux entiers dépens d’appel ;
Condamne Mme [N] [O] et M. [T] [P] à verser à l’EURL Archispace la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de leurs plus amples demandes.
Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président,