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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 56C
4e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 12 DÉCEMBRE 2022
N° RG 20/05971
N° Portalis DBV3-V-B7E-UFZF
AFFAIRE :
[K] [R]
[T] [U] épouse [R]
C/
[G] [I]
et autres
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Octobre 2020 par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de VERSAILLES
N° chambre : 4
N° Section :
N° RG : 17/06069
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Mélina PEDROLETTI
Me Emmanuel
DESPORTES
Me Véronique
BUQUET-ROUSSEL
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DOUZE DÉCEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [K] [R]
[Adresse 1]
[Localité 8]
Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 et Me Dominica DE BELSUNCE, Plaidant, avocat au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 164
Madame [T] [U] épouse [R]
[Adresse 1]
[Localité 8]
Représentant : Me Mélina PEDROLETTI, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 et Me Dominica DE BELSUNCE, Plaidant, avocat au barreau de TOULOUSE, vestiaire : 164
APPELANTS
****************
Monsieur [G] [I]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Me Emmanuel DESPORTES de la SCP BROCHARD & DESPORTES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 243
Madame [O] [U]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentant : Me Emmanuel DESPORTES de la SCP BROCHARD & DESPORTES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 243
S.A.R.L. POTO MITAN
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462
Monsieur [F] [J]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentant : Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462
INTIMÉS
****************
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 24 Octobre 2022, Monsieur Emmanuel ROBIN, président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Emmanuel ROBIN, Président,
Madame Pascale CARIOU, Conseiller,
Madame Séverine ROMI, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Kalliopi CAPO-CHICHI
FAITS ET PROCÉDURE
Par actes des 1er octobre et 1er novembre 2010, M. [G] [I] et Mme [O] [U] ont confié à M. [F] [J] une mission de maîtrise d”uvre de conception et d’exécution pour la rénovation et l’agrandissement d’une maison située [Adresse 2] à [Localité 5] ; ils ont confié la réalisation de travaux à M. [K] [R] et à Mme [T] [U].
Par acte d’huissier du 18 septembre 2017, M. [K] [R] et Mme [T] [U] ont fait assigner M. [G] [I] et Mme [O] [U] devant le tribunal de grande instance de Versailles afin d’obtenir le paiement de la somme de 57 350 euros, correspondant au prix des travaux réalisés, outre celle de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts. La société Poto mitan et M. [F] [J] sont intervenus volontairement à l’instance en réclamant le paiement des sommes de 43 693,85 euros et de 50 000 euros.
Par jugement en date du 22 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Versailles a :
1) déclaré irrecevable l’intervention volontaire de la société Poto mitan, faute de qualité à agir,
2) déclaré recevable l’intervention de M. [F] [J], mais constaté que celui-ci ne formait aucune demande,
3) rejeté la fin de non-recevoir opposée à la demande de M. [K] [R] et de Mme [T] [U], mais débouté ceux-ci de leurs demandes,
4) condamné M. [F] [J], M. [K] [R] et Mme [T] [U] aux dépens et dit n’y avoir lieu à indemnité par application de l’article 700 du code de procédure civile.
Pour l’essentiel, le tribunal a considéré que la société Poto mitan, créée en 2012 par M. [F] [J] pour les besoins de son activité professionnelle, n’était liée à M. [G] [I] et Mme [O] [U] par aucun contrat ; s’agissant de l’action de M. [K] [R] et de Mme [T] [U], il a considéré que le point de départ de la prescription de leur action en paiement était leur dernière intervention sur le chantier, soit le 18 septembre 2012, mais que, par un message téléphonique du 12 avril 2014, Mme [O] [U] avait reconnu les droits des créanciers et que l’action avait été engagée moins de cinq ans plus tard ; en revanche, il a considéré que les demandeurs ne rapportaient pas suffisamment la preuve de leur créance et qu’ils ne pouvaient pallier l’absence de preuve en invoquant un enrichissement sans cause des défendeurs. ; il a rejeté la demande d’expertise au motif qu’une mesure d’instruction ne pouvait être ordonnée pour suppléer la carence d’une partie dans l’administration de la preuve.
*
Le 1er décembre 2012, M. [K] [R] et Mme [T] [U] ont interjeté appel de cette décision ; l’affaire a été enregistrée sous le numéro RG 20/5971. Le 2 décembre 2012, M. [F] [J] et la société Poto mitan ont également interjeté appel ; l’affaire a été enregistrée sous le numéro RG 20/5996. Par ordonnance du 21 septembre 2021, le conseiller de la mise en état a ordonné la jonction des deux instances.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 6 septembre 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience de la cour du 24 octobre 2022, à l’issue de laquelle elle a été mise en délibéré.
***
Par conclusions déposées le 27 septembre 2021, M. [K] [R] et Mme [T] [U] demandent à la cour de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a déclaré leur action recevable, de le réformer en ce qu’il les a déboutés de leurs demandes et de condamner M. [G] [I] et Mme [O] [U] à leur payer la somme de 57 350 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 30 août 2017 ; subsidiairement, ils sollicitent une mesure d’expertise afin de déterminer le montant de leur créance ; enfin, ils réclament une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts et une indemnité de 15 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
M. [K] [R] et Mme [T] [U] soutiennent qu’ils ont travaillé sur le chantier de la maison de M. [G] [I] et Mme [O] [U] jusqu’au 30 septembre 2012, date à laquelle M. [K] [R] a été victime d’un accident ; postérieurement à cet accident, ils seraient revenus sur le chantier jusqu’au 14 octobre 2012 et auraient continué d’apporter leur aide jusqu’en octobre 2013 ; dès lors, leur action engagée moins de cinq ans plus tard ne serait pas prescrite ; ils auraient seulement perçu une somme de 8 950 euros en contrepartie des travaux, laquelle serait insuffisante au regard de l’ampleur du chantier ; le 12 avril 2014, Mme [O] [U] aurait d’ailleurs reconnu l’existence de la dette.
M. [K] [R] et Mme [T] [U] invoquent l’impossibilité morale dans laquelle ils se trouvaient de se procurer un écrit, compte tenu de l’existence de liens familiaux entre eux-mêmes et les maîtres d’ouvrage, et évaluent leur temps de travail à 286 jours.
À titre subsidiaire, ils fondent leur demande en paiement sur l’enrichissement sans cause dont auraient bénéficié M. [G] [I] et Mme [O] [U], en soutenant que l’action sur ce fondement est recevable en cas d’échec de celle fondée sur l’existence d’un contrat.
Par ailleurs, le tribunal aurait rejeté à tort leur demande d’expertise au seul motif que le prix de la prestation n’avait pas été convenu par écrit.
Par conclusions déposées le 29 septembre 2021, la société Poto mitan et M. [F] [J] demandent à la cour d’infirmer le jugement entrepris, de déclarer recevable l’intervention volontaire de la société Poto mitan et de condamner solidairement M. [G] [I] et Mme [O] [U] à lui payer la somme de 43 693,85 euros avec intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2016, de débouter M. [G] [I] et Mme [O] [U] de leurs demandes à l’encontre de M. [F] [J], de les condamner à payer à la société Poto mitan la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts et de les condamner au paiement d’une indemnité de 5 000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
M. [F] [J] expose qu’il était associé au sein d’une société dénommée In situ architecture, avec laquelle M. [G] [I] et Mme [O] [U] ont contracté ; il aurait quitté cette société et le contrat aurait été repris par une nouvelle société dénommée Architectures d’ici et là ; cette société aurait cependant été dissoute et le contrat aurait alors été repris par la société Poto mitan, créée le 30 octobre 2012.
M. [F] [J] et la société Poto mitan soutiennent que l’action à l’encontre des maîtres d’ouvrage n’est pas prescrite puisqu’elle a été engagée moins de deux ans après l’émission des factures relatives au chantier litigieux ; ils ajoutent qu’ils ont saisi le conseil de l’ordre des architectes, le 25 novembre 2016, aux fins de conciliation et que cette démarche a interrompu le délai de prescription.
Quant au fond, ils font valoir que la rémunération de l’architecte avait été fixée à 12 % du prix des travaux et que le coût du chantier s’est finalement élevé à la somme de 846 000 euros hors taxes. Ils invoquent un travail important consacré à ce chantier et le préjudice causé à M. [F] [J] par les demandes de M. [G] [I] et Mme [O] [U].
Par conclusions déposées le 13 juin 2022, M. [G] [I] et Mme [O] [U] demandent à la cour de compléter le dispositif du jugement déféré et de le confirmer en toutes ses dispositions ; à titre subsidiaire, ils soulèvent la prescription de l’action de la société Poto mitan ; reconventionnellement, ils demandent la condamnation de la société Poto mitan à leur rembourser la somme de 36 403,62 euros ; enfin, ils demandent la condamnation de M. [F] [J] et de la société Poto mitan aux dépens et à leur payer une indemnité de 6 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
M. [G] [I] et Mme [O] [U] invoquent la prescription de l’action de M. [K] [R] et de Mme [T] [U], engagée plus de cinq ans après leur dernière intervention sur le chantier, et contestent l’interruption de la prescription retenue par le tribunal en soutenant que l’existence d’une dette n’a jamais été reconnue.
Ils relèvent que M. [K] [R] et Mme [T] [U] ne justifient pas de leur créance par la production d’une preuve écrite et soutiennent avoir exécuté l’accord conclu verbalement avec M. [K] [R] et Mme [T] [U] ; ainsi, outre des défraiements, ils auraient versé à ceux-ci une indemnité d’un montant total de 8 950 euros. Ils contestent l’existence d’un contrat de louage d’ouvrage. Ils contestent également l’enrichissement sans cause allégué par les demandeurs, faute notamment pour ceux-ci d’apporter la preuve d’un appauvrissement.
En réponse à l’appel de M. [F] [J] et de la société Poto mitan, M. [G] [I] et Mme [O] [U] approuvent le tribunal d’avoir considéré que la société n’avait aucune qualité pour agir à leur encontre et constaté que M. [F] [J] ne formulait lui-même aucune demande. À titre subsidiaire, ils invoquent la prescription de l’action de la société Poto mitan, alors que l’architecte avait mis fin à sa mission dès le 3 juillet 2015.
Quant au fond, ils contestent la demande en paiement d’honoraires en soutenant avoir déjà payé une somme supérieure à celle convenue. Ils contestent également avoir causé un quelconque préjudice à l’architecte.
MOTIFS
Sur la recevabilité de l’action de la société Poto mitan
Conformément à l’article 32 du code de procédure civile, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.
En l’espèce, la société Poto mitan entend réclamer à M. [G] [I] et Mme [O] [U] le paiement des honoraires résultant du contrat d’architecte conclu entre ceux-ci et M. [F] [J] ; pour prétendre avoir qualité à exercer cette action contractuelle, alors qu’elle n’était pas partie au contrat, elle invoque l’article 36 de ses statuts, relatif à la reprise d’engagements antérieurs à ces statuts.
Cependant, cet article se contente de renvoyer à un état annexé mentionnant les actes accomplis par M. [F] [J] pour le compte de la société en formation ; outre que l’état auquel il est ainsi renvoyé n’est pas versé aux débats, il convient de relever que le contrat conclu entre M. [G] [I] et Mme [O] [U], d’une part, et M. [F] [J] « contractant personnellement », d’autre part, n’a pas été conclu par celui-ci pour le compte d’une société en formation, mais qu’il a, au contraire, été signé dix-huit mois avant l’établissement des statuts de la société Poto mitan, alors que M. [F] [J] était engagé dans une société dénommée In situ architecture avant de créer, avant même la société Poto mitan, une autre société dénommée Architectures d’ici et là.
La société Poto mitan n’a donc pas qualité pour agir en paiement des honoraires dus en exécution du contrat d’architecte.
Elle n’a pas davantage qualité pour demander réparation du préjudice que M. [F] [J] aurait subi personnellement en raison de l’exécution du contrat d’architecte.
Il convient, en conséquence, de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a déclaré irrecevable l’intervention de la société Poto mitan, faute de qualité à agir.
Réciproquement, la société Poto mitan n’a pas qualité pour défendre à une action de M. [G] [I] et de Mme [O] [U] en remboursement de sommes versées par ceux-ci à M. [F] [J] en exécution du contrat d’architecte conclu avec celui-ci.
Il convient, en conséquence, de compléter le jugement déféré en déclarant irrecevable la demande de M. [G] [I] et Mme [O] [U] à l’encontre de la société Poto mitan.
Sur la relation contractuelle entre M. [G] [I] et Mme [O] [U], d’une part, et M. [K] [R] et Mme [T] [U], d’autre part
Il résulte des explications des parties que M. [G] [I] et Mme [O] [U] ont chargé M. [K] [R] et Mme [T] [U] de la réalisation de travaux dans une maison leur appartenant et que ces travaux devaient être réalisés moyennant une contrepartie ; M. [G] [I] et Mme [O] [U] se sont d’ailleurs acquittés à ce titre d’une somme supérieure à 8 000 euros, dont le montant est cependant considéré comme insuffisant par M. [K] [R] et Mme [T] [U]. En outre, aucun lien de subordination n’existait entre les parties.
La convention à titre onéreux par laquelle on charge quelqu’un de réaliser un ouvrage sans être soumis à un lien de subordination est un contrat d’entreprise régi par les articles 1787 et suivants du code civil.
Il importe peu que des liens familiaux existent entre les parties au contrat ou que le prix de la prestation n’a pas été déterminé lors de sa conclusion.
Sur la recevabilité de l’action de M. [K] [R] et Mme [T] [U]
Selon l’article 2224 du code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
En l’espèce, M. [K] [R] et Mme [T] [U] agissent en paiement d’une créance au titre des travaux qu’ils ont réalisés dans un bien immobilier appartenant à M. [G] [I] et Mme [O] [U]. Il résulte des documents versés aux débats qu’ils n’ont pas été sollicités successivement pour plusieurs tâches précises distinctes, mais que leur intervention avait été demandée de manière globale pour l’ensemble du chantier, alors même que la nature et l’ampleur des travaux était susceptible d’évoluer au gré des maîtres d’ouvrage ; notamment, par un courriel du 15 avril 2012, M. [G] [I] leur a transmis un planning établi par l’architecte en leur demandant « d’établir un calendrier sur les 3 prochains mois, voire jusqu’à la fin des travaux de gros ‘uvre » et « d’estimer le nombre de jours de travail que demanderont ces différentes tâches : ossature bois, charpente etc. » en leur précisant que « il y a cependant une partie importante des travaux où [K] est indispensable :
– la dalle du plafond de la cave à vin
– le gros poteau rond et sa fondation
– le plancher deuxième étage (y compris le balcon)
– la charpente et l’ossature bois du premier et deuxième étage
– la charpente de la chaufferie derrière l’atelier
– la reprise en sous ‘uvre du mur extérieur de la salle d’eau du rez de jardin ».
Ils n’ont pu déterminer le montant de leur créance au titre de ces travaux avant la fin de leur intervention ; il importe peu que, pour les besoins de l’évaluation de leur créance, ils se réfèrent au temps passé sur le chantier.
Par ailleurs il résulte également des pièces versées aux débats qu’ils ont travaillé sur le chantier jusqu’au 28 septembre 2012 au moins ; notamment, ils démontrent être arrivés en train ce jour-là, alors que, la veille, M. [G] [I] leur avait envoyé un message leur demandant de l’appeler « 15 min avant d’arriver » afin d’aller les chercher et en leur proposant un « petit dej à [Localité 6] avant de monter à la maison » et produisent des photographies du travail effectué ce jour-là.
Dès lors, à supposer même que le contrat ait pris fin dès cette date, en tout état de cause l’action en paiement de M. [K] [R] et de Mme [T] [U] n’était pas prescrite à la date de l’assignation délivrée le 18 septembre 2017.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par M. [G] [I] et Mme [O] [U].
Sur la créance de M. [K] [R] et Mme [T] [U]
Aucune disposition légale n’impose de déterminer le prix des travaux lors de la conclusion du contrat d’entreprise, ni même les modalités de fixation de ce prix.
En l’espèce, les échanges de courriels et de messages entre les parties démontrent que, outre des conseils et des informations données par M. [K] [R] et Mme [T] [U] à M. [G] [I] et Mme [O] [U], ceux-ci ont directement sollicité ceux-là pour la réalisation de travaux de gros ‘uvre, notamment en ce qui concerne la charpente et la maçonnerie.
Le courriel de M. [G] [I] du 15 avril 2012, cité ci-dessus, démontre que les maîtres d’ouvrage ont sollicité M. [K] [R] et Mme [T] [U] pour réaliser les travaux énumérés dans ce message, et qui correspondent aux compétences professionnelles des destinataires du message ; la réalisation par M. [K] [R] et Mme [T] [U] de ces travaux est corroborée par les déclarations de l’architecte, M. [F] [J], selon lesquelles le maître d’ouvrage « avait décidé de prendre en responsabilité les lots gros-oeuvre et charpente », alors que M. [G] [I] et Mme [O] [U] ne disposaient pas des compétences nécessaires pour réaliser ou diriger eux-mêmes des travaux relevant de ces domaines.
En outre, M. [G] [I] et Mme [O] [U] avaient commencé d’avoir recours aux compétences de M. [K] [R] et de Mme [T] [U] avant même ce courriel concernant les travaux de construction, notamment pour obtenir des conseils et faire réaliser des travaux de démolition, en particulier la dépose de la charpente existante. Notamment, dans un courriel adressé à l’architecte le 2 janvier 2011, M. [G] [I] explique à celui-ci qu’il faut « hiérarchiser les travaux, établir les priorités » et qu’il souhaite « y aller par étape » ; il précise à l’architecte qu’une première réunion de réflexion a eu lieu avec M. [K] [R], désigné comme « le charpentier », et que celui-ci doit préciser les postes sur lesquels il pourra intervenir « charpente, dépose, démolition ‘ ». Le tableau des courriels établi par M. [F] [J] confirme qu’en janvier 2011, le maître de l’ouvrage l’a avisé qu’il ferait exécuter certains travaux (démolitions, dépose toiture, couverture provisoire, câblage électrique) par son beau-frère et sa belle-s’ur, professionnels du bâtiment.
L’intervention de M. [K] [R] et Mme [T] [U] sur le chantier à compter du mois de mai 2011, est démontrée par leur courriel du 19 avril 2011, adressé à M. [G] [I] et Mme [O] [U] en réponse à une demande de ceux-ci, par lequel ils précisent quelles seront leurs dates de présence sur le chantier au cours des mois de mai, juin et août 2011 et donnent des instructions pour la location de bennes ; de même, par un courriel du 14 septembre 2011, Mme [T] [U] a indiqué à M. [G] [I] les dates de leur présence sur le chantier, en sollicitant le remboursement des frais exposés pour se rendre de [Localité 8] à [Localité 7], et, les 3 et 7 novembre 2011, elle a sollicité le remboursement de matériel et de frais de transport, en précisant les dates de présence sur le chantier en décembre 2011 et janvier 2012 ; le 11 janvier 2012, elle lui a adressé un planning des fins de semaine de présence sur le chantier jusqu’au mois de mars et le 23 janvier elle lui a demandé de rembourser les billets de train achetés pour se rendre à [Localité 7] jusqu’à la fin de mois de mars, ce à quoi M. [G] [I] a répondu « bien sûr je fais ça demain » en ajoutant qu’il y avait « beaucoup de choses que [il ne laisserait] pas faire sans la présence de [K] (fondation, ipn etc.) ».
Ces éléments, et l’état d’avancement du chantier au 30 septembre 2012, qui permettent d’établir la réalité et l’importance des travaux réalisés par leurs soins jusqu’à cette date, justifient de leur allouer une somme de 50 000 euros en contrepartie de leur intervention.
Dans la mesure où M. [G] [I] et Mme [O] [U] se sont déjà acquittés d’une somme de 8 950 euros, ils seront condamnés au paiement du solde d’un montant de [50 000 ‘ 8 950] 41 050 euros.
Cette somme sera assortie d’intérêts au taux légal à compter du 30 août 2017, date de la mise en demeure. La capitalisation de ces intérêts interviendra par années entières, conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du code civil.
Sur l’abus de procédure
M. [K] [R] et Mme [T] [U], qui réclament à M. [G] [I] et Mme [O] [U] une somme de 5 000 euros chacun à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, ne caractérisent aucune faute que ceux-ci auraient commise et qui aurait fait dégénérer en abus l’exercice de leur droit de se défendre en justice.
En conséquence, M. [K] [R] et Mme [T] [U] seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Sur les dépens et les autres frais de procédure
M. [G] [I] et Mme [O] [U], qui succombent à titre principal, seront condamnés aux dépens de première instance et d’appel, conformément à l’article 696 du code de procédure civile, à l’exception de ceux exposés par M. [F] [J] et la société Poto mitan qui seront laissés à la charge de ceux-ci. Les dépens pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l’article 699 du même code.
Selon l’article 700 1° de ce code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée.
Les circonstances de l’espèce justifient de condamner M. [G] [I] et Mme [O] [U] à payer à M. [K] [R] et Mme [T] [U] une indemnité de 10 000 euros au titre des frais exclus des dépens exposés à l’occasion du présent procès ; ils seront eux-mêmes déboutés de leur demande à ce titre, ainsi que la société Poto mitan.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a :
1) déclaré irrecevable l’intervention volontaire de la société Poto mitan pour défaut de qualité à agir,
2) rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription opposée par M. [G] [I] et Mme [O] [U] à l’action de M. [K] [R] et Mme [T] [U] ;
INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a :
1) débouté M. [K] [R] et Mme [T] [U] de l’intégralité de leurs demandes,
2) condamné M. [K] [R], Mme [T] [U] et M. [F] [J] aux dépens ;
Et, statuant à nouveau de ces chefs,
CONDAMNE M. [G] [I] et Mme [O] [U] à payer à M. [K] [R] et Mme [T] [U] la somme de 41 050 euros, avec intérêts au taux légal à compter 30 août 2017 ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts par années entières ;
DÉBOUTE M. [K] [R] et Mme [T] [U] de leur demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
CONDAMNE M. [G] [I] et Mme [O] [U] aux dépens de première instance, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l’article 699 du code de procédure civile, à l’exception de ceux exposés par M. [F] [J] et la société Poto mitan, que ceux-ci conserveront à leur charge ;
Ajoutant au jugement déféré,
DÉCLARE irrecevables les demandes de M. [G] [I] et de Mme [O] [U] contre la société Poto mitan ;
CONDAMNE M. [G] [I] et Mme [O] [U] aux dépens d’appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l’article 699 du code de procédure civile, à l’exception de ceux exposés par M. [F] [J] et la société Poto mitan, que ceux-ci conserveront à leur charge ;
CONDAMNE M. [G] [I] et Mme [O] [U] à payer à M. [K] [R] et Mme [T] [U] une indemnité de 10 000 euros, par application de l’article 700 du code de procédure civile, et les déboute de leur demande à ce titre ainsi que la société Poto mitan.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur Emmanuel ROBIN, Président et par Madame Kalliopi CAPO-CHICHI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT