La Banque Populaire Méditerranée a accordé un prêt de 102 000 € à monsieur [C] en février 2020, avec un taux d’intérêt de 4,6 %. Après des impayés, un accord transactionnel a été conclu en mai 2017, prévoyant un remboursement en 24 mensualités de 1 000 € et une échéance globale de 69 953,96 € à un taux de 2,50 %. En janvier 2021, la banque a inscrit une hypothèque judiciaire provisoire sur des biens de monsieur [C]. Un jugement de mars 2022 a reconnu la créance et ordonné la mainlevée de l’hypothèque. En juillet 2022, une saisie-attribution sur le compte de monsieur [C] a échoué en raison d’un solde débiteur. En décembre 2022, la banque a inscrit une nouvelle hypothèque, suivie d’une assignation de monsieur [C] pour obtenir la mainlevée et des délais de paiement. Un jugement de novembre 2023 a ordonné la mainlevée de l’hypothèque, débouté monsieur [C] de ses demandes et condamné la banque aux dépens. La banque a fait appel, et une ordonnance de référé en mai 2024 a suspendu l’exécution du jugement et condamné monsieur [C] à une indemnité. La banque a demandé l’infirmation du jugement en appel, invoquant des circonstances menaçant le recouvrement de sa créance. Monsieur [C] a constitué avocat mais n’a pas déposé de conclusions. L’instruction a été close en mai 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Chambre 1-9
ARRÊT AU FOND
DU 26 SEPTEMBRE 2024
N° 2024/485
Rôle N° RG 23/14243 N° Portalis DBVB-V-B7H-BMFMS
Ste Coopérative banque Pop. BANQUE POPULAIRE MEDITERRANEE
C/
[V] [C]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Hubert ROUSSEL
Me Thomas TRIBOT
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Juge de l’exécution de MARSEILLE en date du 09 Novembre 2023 enregistré au répertoire général sous le n° 23/00834.
APPELANTE
Ste Coopérative BANQUE POPULAIRE MÉDITERRANÉE
anciennement dénommée BANQUE POPULAIRE PROVENCALE ET CORSE SA, inscrite au RCS de NICE sous le n° B 058 801 481, prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 2]/FRANCE
représentée et plaidant par Me Hubert ROUSSEL de l’ASSOCIATION ROUSSEL-CABAYE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIME
Monsieur [V] [C]
né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 4],
demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Thomas TRIBOT de la SCP SCP MOTEMPS & TRIBOT, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 26 Juin 2024 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Evelyne THOMASSIN, Président
Madame Pascale POCHIC, Conseiller
Monsieur Ambroise CATTEAU, Conseiller
qui en ont délibéré,
en présence de Mme [S] et Mme [O], auditrices de justice.
Greffier lors des débats : Madame Josiane BOMEA.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 26 Septembre 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 26 Septembre 2024,
Signé par Madame Evelyne THOMASSIN, Président et Madame Josiane BOMEA, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES
Selon acte du 3 février 2020, la Banque Populaire Méditerranée consentait à monsieur [V] [C] un prêt de 102 000 € au taux conventionnel de 4,6 % l’an. A la suite d’une mise en demeure de régulariser les échéances impayées, un accord transactionnel du 30 mai 2017 stipulait le paiement en 24 mensualités de 1 000 € puis une échéance globale de 69 953,96 € au taux de 2,50 % l’an.
Le 15 janvier 2021, la Banque Populaire Méditerranée dénonçait à monsieur [C], une inscription d’hypothèque judiciaire provisoire du 12 janvier 2021 prise sur les lots n°2 et 3 d’un immeuble en copropriété situé [Adresse 3].
Un jugement du 15 mars 2022, signifié le 4 avril 2022, disait la créance non prescrite, la liquidait à 71 350,92 €, et ordonnait la mainlevée de l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire du 15 janvier 2021.
Le 26 juillet 2022, la Banque Populaire Méditerranée tentait de procéder à une saisie-attribution sur le compte bancaire de monsieur [C], laquelle se révélait infructueuse pour cause de solde débiteur pour 931,51 €. Un jugement du 26 janvier 2023 du juge de l’exécution de Marseille déboutait monsieur [C] de ses demandes de caducité de la saisie et de délais de paiement.
Le 14 décembre 2022, la Banque Populaire Méditerranée inscrivait à nouveau une hypothèque judiciaire provisoire sur les lots n°2 et 3 d’un immeuble en copropriété situé [Adresse 3]. Cette inscription était dénoncée le 20 décembre suivant à monsieur [C].
Le 19 janvier 2023, monsieur [C] faisait assigner la Banque Populaire Méditerranée devant le juge de l’exécution de Marseille aux fins de mainlevée de l’inscription du 14 décembre 2022 et de délais de paiement avec imputation des remboursement sur le capital.
Un jugement du 9 novembre 2023 du juge de l’exécution de Marseille :
– se déclarait incompétent pour statuer sur la demande de délais de paiement et de rééchelonnement de la dette,
– déclarait irrecevable la demande de monsieur [C] en fixation de la créance,
– ordonnait la mainlevée de l’inscription d’hypothèque provisoire du 14 décembre 2022,
– déboutait monsieur [C] du surplus de ses demandes et la Banque Populaire Méditerranée de toutes ses demandes,
– condamnait la Banque Populaire Méditerranée aux dépens.
Ledit jugement était notifié par voie postale à la Banque Populaire Méditerranée selon accusé de réception non retourné au greffe. Par déclaration du 20 novembre 2023, la Banque Populaire Méditerranée formait appel du jugement précité.
Une ordonnance de référé du 27 mai 2024 du Premier Président de la cour ordonnait le sursis à l’exécution du jugement déféré et condamnait monsieur [C] au paiement d’une indemnité de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 30 janvier 2024, auxquelles il sera renvoyé pour plus ample exposé de leurs moyens, les appelants demandent à la cour de :
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a ordonné la mainlevée de l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire du 14 décembre 2023 et statuant à nouveau, débouter monsieur [C] de sa demande de mainlevée,
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a condamnée à payer une indemnité de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens et statuant à nouveau rejeter les demandes de monsieur [C] à ce titre,
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes et statuant à nouveau, condamner monsieur [C] au paiement d’une indemnité de 4 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance et d’appel.
Elle soutient qu’il existe des circonstances de nature à menacer le recouvrement de sa créance, lesquelles ne se confondent pas avec une insolvabilité totale, aux motifs que :
– sa créance, objet d’un acte notarié du 3 février 2010, est très ancienne et a déjà fait l’objet d’un premier plan amiable du 30 mai 2017, lequel n’a pas été respecté,
– depuis le jugement du 15 mars 2022 de mainlevée de l’inscription précédente, deux saisies-attribution des 26 juillet 2022 et 22 décembre 2023 se sont révélées infructueuses alors que l’enquête Ficoba établit qu’il s’agit des seuls comptes dont l’intimé est titulaire,
– monsieur [C] reconnaît ses difficultés financières puisqu’il a saisi, le 18 janvier 2023, le tribunal judiciaire de Marseille d’une demande de suspension de ses crédits sur le fondement des articles L 313-12 du code de la consommation et 1244-1 ancien du code civil,
– dans son assignation, il reconnaît être poursuivi par de nombreux créanciers,
– il existe un risque de distraction du prix en cas de vente de son bien immobilier, lequel constitue la seule garantie de paiement de sa créance.
Monsieur [C] a constitué avocat devant la cour mais n’a pas notifié de conclusions.
L’instruction de la procédure était close par ordonnance du 28 mai 2024.
La cour est saisie d’une demande d’infirmation des seules dispositions du jugement déféré relatives à la mainlevée de l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire du 14 décembre 2022.
L’article L 511-1 du code des procédures civiles d’exécution dispose que toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge, l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement.
– Sur l’existence d’une créance paraissant fondée en son principe,
Selon acte notarié du 3 février 2010, la Banque Populaire Méditerranée consentait à monsieur [C] un prêt de 102 000 € au taux conventionnel de 4,60 % à rembourser par le paiement de 228 échéances mensuelles du 2 mars 2010 au 2 mars 2030.
Suite à des mensualités impayées, les parties signaient un protocole transactionnel, le 30 mai 2017, lequel stipulait un remboursement de la dette, au taux de 2,50 %, en 24 mensualités de 1 000 € outre une dernière mensualité de 69 953,96 €.
Le titre exécutoire et le protocole transactionnel précités suffisent à établir l’existence d’une créance de la Banque Populaire Méditerranée paraissant fondée en son principe.
Sur son montant, le jugement du 15 mars 2022 du juge de l’exécution de [Localité 4], signifié le 4 Avril suivant et non frappé d’appel, ayant ordonné la mainlevée d’une précédente inscription d’hypothèque judiciaire provisoire, liquidait la créance à hauteur de 71 350,92 € (correspondant à l’échéance de 1 000 € du 8 septembre 2018 et à celle de 69 953,96 € au titre de l’échéance du 8 octobre 2018 outre les frais de l’acte de 396,96 €) et condamnait la Banque Populaire Méditerranée à payer une indemnité de 1 000 € pour frais irrépétibles.
Mais dans un décompte actualisé au 13 avril 2023, la Banque Populaire Méditerranée établit l’existence d’une créance paraissant fondée en son principe d’un montant de 73 256,79 € en principal outre intérêts et frais, lequel intègre sept versements partiels de 500 €.
– Sur l’existence de circonstances de nature à menacer son recouvrement,
Le jugement du 15 mars 2022, devenu définitif, ordonne la mainlevée de l’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire du 12 janvier 2021 prise par la Banque Populaire Méditerranée sur les lots n°2 et 3 de l’état descriptif de division de l’immeuble en copropriété situé [Adresse 3] à [Localité 4] au motif que la banque ne rapporte pas la preuve de menaces affectant le recouvrement de la créance.
Il appartient donc à la Banque Populaire Méditerranée de justifier d’un élément nouveau de nature à établir les circonstances de nature à menacer le recouvrement de sa créance.
A ce titre, elle justifie, pour recouvrer sa créance liquidée à 73 256,79 € outre intérêts et frais, avoir fait délivrer une saisie-attribution du 26 juillet 2022 sur les seuls comptes détenus par monsieur [C], selon l’enquête Ficoba produite (pièce n° 20), laquelle s’est révélée infructueuse en l’état d’un solde de 0 €. La contestation de monsieur [C] a été rejetée par jugement du 26 janvier 2023 du juge de l’exécution de [Localité 4].
Ainsi, la Banque Populaire Méditerranée justifie des difficultés financières de monsieur [C] de nature à menacer le recouvrement de sa créance.
Le péril dans le recouvrement de la créance est confirmé par les mentions de l’assignation du 19 janvier 2023 de monsieur [C] aux fins de suspension de l’exigibilité de son obligation de remboursement du prêt du 3 février 2010, selon lesquelles sa société de travaux a été placée en liquidation judiciaire et la saisie attribution du 26 juillet 2022 démontre qu’il traverse une période difficile sur le plan financier, et que ses problèmes financiers ont impacté tous ses créanciers dont la plupart ont initié des procédures de saisie sur ses biens.
Enfin, la saisie-attribution infructueuse du 22 décembre 2023 en l’état d’un solde créditeur de 89,94 € insaisissable confirme les difficultés financières persistantes de monsieur [C].
Le paiement par monsieur [C] de mensualités de 500 € depuis septembre 2022 relevé par le jugement déféré, sans avoir obtenu l’accord préalable du créancier pour une telle mensualité de remboursement, est insuffisant à démentir la menace dans le recouvrement d’une créance d’un montant important puisque supérieur à 73 000 €.
Par conséquent, le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a ordonné la mainlevée de l’inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire du 14 décembre 2022, les conditions de l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution, étant réunies.
– Sur les demandes accessoires,
L’équité commande d’allouer à la Banque Populaire Méditerranée une indemnité de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Monsieur [C], partie perdante, supportera les entiers dépens de première instance et d’appel.
La cour, statuant après débats en audience publique et en avoir délibéré, conformément à la loi, par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,
INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a ordonné la mainlevée de la prise d’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire du 14 décembre 2022 sur les lots n°2 et 3 de l’état descriptif de division d’un immeuble en copropriété situé [Adresse 3], propriété de monsieur [V] [C],
Statuant à nouveau,
DEBOUTE monsieur [V] [C] de sa demande de mainlevée de la prise d’inscription d’hypothèque judiciaire provisoire du 14 décembre 2022 sur les lots n°2 et 3 de l’état descriptif de division d’un immeuble en copropriété situé [Adresse 3],
CONDAMNE monsieur [V] [C] au paiement d’une indemnité de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la Banque Populaire Mediterranée,
CONDAMNE [V] [C] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE