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Redressement fiscal : le sursis contre garantie ? 

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Redressement fiscal : le sursis contre garantie ? 

Il est possible de demander un sursis au paiement suite à un redressement à l’impôt sur les sociétés (IS), toutefois, seules sont prises en compte les garanties ayant fait l’objet d’une écriture comptable certifiée.

Proposer à l’administration fiscale des titres en garantie d’une dette

Une société a proposé le nantissement de ses propres titres en garantie de paiement des impositions dont le sursis était demandé.

Cette garantie, faute de caution bancaire, et alors qu’aucun des éléments de valorisation comptable n’a pu justifier qu’elle puisse couvrir le montant de la dette en litige, ne peut être regardée comme étant de nature à garantir son recouvrement.

Le principe du sursis à paiement

Pour rappel, aux termes de l’article L. 277 du livre des procédures fiscales (LPF) :

Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s’il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes.

Suspension de l’action en recouvrement

L’exigibilité de la créance et la prescription de l’action en recouvrement sont suspendues jusqu’à ce qu’une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l’administration, soit par le tribunal compétent.

La constitution de garanties

Lorsque la réclamation porte sur un montant important, le débiteur doit constituer des garanties portant sur le montant des droits contestés. A défaut de constitution de garanties ou si les garanties offertes sont estimées insuffisantes, le comptable peut prendre des mesures conservatoires pour les impôts contestés.

Aux termes de l’article R. 277-1 du LPF : « Le comptable compétent invite le contribuable qui a demandé à différer le paiement des impositions à constituer les garanties prévues.

Ces garanties peuvent être constituées par un versement en espèces qui sera effectué à un compte d’attente au Trésor, par des créances sur le Trésor, par la présentation d’une caution, par des valeurs mobilières, des marchandises déposées dans des magasins agréés par l’Etat et faisant l’objet d’un warrant endossé à l’ordre du Trésor, par des affectations hypothécaires, par des nantissements de fonds de commerce.

Si le comptable estime ne pas pouvoir accepter les garanties offertes à sa demande ou spontanément par le contribuable parce qu’elles ne répondent pas aux conditions prévues, il lui notifie sa décision.

Aux termes de l’article A. 277-9 du LPF : « Les valeurs mobilières qui ne sont pas cotées à une bourse française ne peuvent être admises que si elles sont accompagnées d’une caution bancaire souscrite pour la différence entre le montant de l’évaluation des titres et le montant des impôts contestés. ».

Le juge du référé décide dans le délai d’un mois si les garanties offertes répondent aux conditions légales.

Dans les huit jours suivant la décision du juge, le redevable et le comptable peuvent, par simple demande écrite, faire appel devant le président de la cour administrative d’appel ou le magistrat qu’il désigne à cet effet.

Celui-ci, dans le délai d’un mois, décide si les garanties doivent être acceptées comme répondant aux conditions exigées par les textes.

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
 
Cour administrative d’appel de Paris
28 octobre 2022
N° 22PA04366
 
Vu la procédure suivante :
 
Procédure contentieuse antérieure :
 
La société par actions simplifiée (SAS) Hedgeguard Financial Software a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant en matière fiscale sur le fondement de l’article L. 279 du livre des procédures fiscales, de dire que la garantie qu’elle a offerte au comptable public à l’appui de sa demande de sursis de paiement d’une somme de 369 215 euros, correspondant aux cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre de l’exercice 2016, était suffisante pour en assurer le recouvrement.
 
Par ordonnance n° 2218038 du 23 septembre 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté la requête de la SAS Hedgeguard Financial Software.
 
Procédure devant la Cour :
 
Par une requête, enregistrée le 3 octobre 2022, et un mémoire en réplique, enregistré le 19 octobre 2022, la SAS Hedgeguard Financial Software, représentée par Mes Benichou et Hamoui, avocats, demande au juge des référés, dans le dernier état de ses écritures :
 
1°) d’annuler l’ordonnance n° 2218038 du 23 septembre 2022 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que le nantissement des titres de sa filiale, la SAS Lynx Digital, soit admis à titre de garantie ;
 
2°) de valider la garantie proposée ;
 
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
 
Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :
 
— l’ordonnance entreprise est entachée d’erreur de fait ;
 
— les dispositions de l’article A. 277-9 du livre des procédures fiscales n’impliquent la présentation d’une caution bancaire que dans la mesure où la valeur des titres de société non cotée proposée en garantie ne permet pas de garantir en totalité le montant des impositions dont le sursis d’imposition est demandé ;
 
— l’instruction BOI-IS-FUS-30-20 n° 40 permet de ne pas opposer les valeurs d’actif net retenues à l’occasion d’une opération d’apport partiel d’actif ;
 
— c’est à tort que l’administration a estimé que la garantie proposée ne portait pas sur ses propres titres, offerts en nantissement ;
 
— la valeur de ces titres se déduit, d’une part, de celle des titres de sa filiale la SAS Lynx Digital, qui peut être valorisée à la somme de 6 143 742 euros, et à laquelle elle a effectivement apporté, pour une valeur nette de 592 054 euros, sa branche d’activité d’édition de logiciels de cryptomonnaie, et, d’autre part, de la valeur des droits de propriété intellectuelle inscrits à l’actif de son bilan, pour la somme de 1 248 924,33 euros compte tenu de l’apport mentionné à la SAS Lynx Digital.
 
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2022, et un mémoire en réplique, enregistré le 24 octobre 2022 et non communiqué, le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
 
Il fait valoir, dans le dernier état de ses écritures, que :
 
— les dispositions de l’article A. 277-9 du livre des procédures fiscales impliquent de se référer, non pas à la valeur comptable des titres en cause, mais à leur valeur de cession ;
 
— les énonciations doctrinales invoquées sont inopérantes dans le présent litige ;
 
— la valorisation de la SAS Lynx Digital ne repose que sur des prévisions aléatoires sur les résultats des cinq prochains exercices, aucune valorisation des titres acquis en rémunération de l’apport n’ayant été par ailleurs constatée au bilan de la requérante, la valeur des titres de la SAS Lynx Digital remis en contrepartie de l’apport partiel d’actif étant purement conventionnelle et la valeur retenue pour l’apport n’ayant pas été validée par un comptable ;
 
— les actifs incorporels de la société requérante ne peuvent être retenus à titre de garantie compte tenu de leur caractère cessible.
 
Par une décision en date du 1er septembre 2022, la conseillère d’Etat, présidente de la Cour, a désigné M. Carrère, président de la 9ème chambre, pour statuer en qualité de juge des référés de la Cour.
 
Vu les autres pièces du dossier.
 
Vu :
 
— le livre des procédures fiscales ;
 
— le code de justice administrative.
 
Considérant ce qui suit :
 
1. La SAS Hedgeguard Financial Software relève appel de l’ordonnance du 23 septembre 2022 n° 2218038 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris a refusé de faire droit à sa demande tendant à ce qu’il soit jugé que la garantie qu’elle a proposée, constituée par un nantissement de ses propres titres, en vue d’obtenir le sursis de paiement d’une cotisation supplémentaire d’impôt sur les sociétés de 369 215 euros mise à sa charge au titre de l’exercice 2016, et refusée par décision du comptable public du 26 juillet 2022, était suffisante pour assurer le recouvrement de la créance du Trésor à garantir. Il ne résulte pas de l’instruction que la requérante n’aurait pas consigné auprès du comptable, en application du deuxième alinéa de l’article L. 279 du livre des procédures fiscales, une somme égale au dixième des impôts contestés.
 
Sur la valeur des garanties offertes :
 
2. Aux termes de l’article L. 277 du livre des procédures fiscales : « Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s’il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. / L’exigibilité de la créance et la prescription de l’action en recouvrement sont suspendues jusqu’à ce qu’une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l’administration, soit par le tribunal compétent. / Lorsque la réclamation mentionnée au premier alinéa porte sur un montant de droits supérieur à celui fixé par décret, le débiteur doit constituer des garanties portant sur le montant des droits contestés. / A défaut de constitution de garanties ou si les garanties offertes sont estimées insuffisantes, le comptable peut prendre des mesures conservatoires pour les impôts contestés (). ». Aux termes de l’article R. 277-1 du même livre : « Le comptable compétent invite le contribuable qui a demandé à différer le paiement des impositions à constituer les garanties prévues à l’article L. 277. () Ces garanties peuvent être constituées par un versement en espèces qui sera effectué à un compte d’attente au Trésor, par des créances sur le Trésor, par la présentation d’une caution, par des valeurs mobilières, des marchandises déposées dans des magasins agréés par l’Etat et faisant l’objet d’un warrant endossé à l’ordre du Trésor, par des affectations hypothécaires, par des nantissements de fonds de commerce. Si le comptable estime ne pas pouvoir accepter les garanties offertes à sa demande ou spontanément par le contribuable parce qu’elles ne répondent pas aux conditions prévues au deuxième alinéa, il lui notifie sa décision (). ». Aux termes de l’article A. 277-9 du même livre : « Les valeurs mobilières qui ne sont pas cotées à une bourse française () ne peuvent être admises que si elles sont accompagnées d’une caution bancaire souscrite pour la différence entre le montant de l’évaluation des titres et le montant des impôts contestés. ». Aux termes de l’article L. 279 du même livre : « () Le juge du référé décide dans le délai d’un mois si les garanties offertes répondent aux conditions prévues à l’article L. 277, (). Dans les huit jours suivant la décision du juge, le redevable et le comptable peuvent, par simple demande écrite, faire appel devant le président de la cour administrative d’appel ou le magistrat qu’il désigne à cet effet. Celui-ci, dans le délai d’un mois, décide si les garanties doivent être acceptées comme répondant aux conditions de l’article L. 277. (). ».
 
3. En premier lieu, la valeur de 6 143 742 euros, estimée par la SAS Hedgeguard Financial Software, des titres détenus au capital de sa filiale ultra-majoritaire, la SAS Lynx Digital, au demeurant non inscrits comptablement au bilan de la requérante eu égard au caractère récent de l’acquisition des titres, le 1er août 2022, en rémunération de l’apport partiel d’actif du 24 mai précédent, approuvé formellement par la bénéficiaire, la SAS Lynx Digital, repose exclusivement sur une prévision actualisée de flux de recettes et de dépenses de cette dernière société, portant sur la période 2022-2027, qui n’a pas fait l’objet d’une validation par un expert-comptable et revêt un caractère hypothétique eu égard à la création récente de la SAS Lynx Digital, immatriculée le 4 février 2022, et à l’absence d’actif de cette société, autre que la branche d’activité apportée, ressortant des pièces du dossier. A cet égard, la valeur de cette branche d’activité retenue à l’occasion de l’opération d’apport autorisée le 1er août 2022, fixée par les parties à la valeur nette de 592 054 euros, qui a servi de base à la fixation de l’augmentation de capital de la SAS Lynx Digital, n’a pas non plus fait l’objet d’une certification par un expert-comptable. En outre, le traité d’apport versé au dossier stipule, en sa sixième partie, intitulée « Déclarations », que la société bénéficiaire dispense la société apporteuse, dont les dirigeants sont les mêmes, d’indiquer le montant du chiffre d’affaires et des résultats réalisé au cours des trois derniers exercices, de dresser l’inventaire des livres comptables, et donner de plus amples explications sur l’origine de propriété de la branche, et de dresser la liste des litiges transmis. Dès lors, à supposer que la requérante soit regardée comme proposant, à titre de garantie, le nantissement des titres de sa filiale acquis en contrepartie de l’apport de la branche en cause, la valeur de 592 054 euros ne peut être retenue comme pouvant justifier du montant de la garantie offerte.
 
4. En deuxième lieu, la valeur des actifs incorporels inscrits au bilan de la SAS Hedgeguard Financial Software, qui peut être estimée, compte tenu de l’apport de la branche d’édition de logiciels de cryptomonnaie, transmise le 1er août 2022 à la SAS Lynx Digital ainsi qu’il a été dit ci-dessus, à la somme de 1 248 924,33 au 31 décembre 2021, ne peut être retenue à titre de garantie pour l’application des dispositions précitées de l’article L. 279 du livre des procédures fiscales, cette valeur n’étant pas certifiée par un expert-comptable et correspondant à des éléments d’actif de durée variable et susceptibles de faire l’objet de cession à des tiers.
 
5. Il résulte de ce qui précède qu’à supposer que la SAS Hedgeguard Financial Software puisse être regardée comme proposant le nantissement de ses propres titres en garantie de paiement des impositions dont le sursis est demandé, cette garantie, faute de caution bancaire, et alors qu’aucun des éléments de valorisation décrits ci-dessus ne peut justifier qu’elle puisse couvrir le montant de la dette en litige, ne peut être regardée comme étant de nature à garantir son recouvrement.
 
6. En dernier lieu, les dispositions précitées de l’article A. 277-9 du livre des procédures fiscales, qui se réfèrent à la valeur vénale des titres, et les énonciations doctrinales invoquées, qui ont trait à la détermination de l’impôt sur les sociétés en cas d’opération placée en report d’imposition, ne peuvent venir à l’appui de la contestation du refus de garantie en litige. Il en va de même de l’erreur de fait qu’aurait commise le premier juge, laquelle ne relève pas d’une cause d’appel mais d’une cause de cassation.
 
7. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions tendant à l’annulation de l’ordonnance entreprise et à ce que le juge des référés de la Cour dise que les garanties offertes par la SAS Hedgeguard Financial Software sont suffisantes pour assurer le recouvrement des impositions en litige doivent être rejetées.
 
Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
 
8. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par la SAS Hedgeguard Financial Software et non compris dans les dépens.
 
O R D O N N E :
 
Article 1er : La requête de la SAS Hedgeguard Financial Software est rejetée.
 
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la société par actions simplifiée (SAS) Hedgeguard Financial Software et au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
 
Copie en sera adressée à l’administratrice des finances publiques chargée de la direction régionale des finances publiques d’Île-de-France et de Paris.
 
Fait à Paris, le 28 octobre 2022.
 
Le juge des référés,
 
S. CARRERE
 
La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
 

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