Redressement de l’URSSAF : 26 février 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 18-20.544

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Redressement de l’URSSAF : 26 février 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 18-20.544
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SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 février 2020

Cassation

M. CATHALA, président

Arrêt n° 247 FS-P+B

Pourvoi n° C 18-20.544

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 26 FÉVRIER 2020

La société des Autoroutes Esterel, Côte d’Azur, Provence, Alpes, société anonyme, dont le siège est […], a formé le pourvoi n° C 18-20.544 contre l’arrêt rendu le 7 juin 2018 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (17e chambre B), dans le litige l’opposant à M. B… W…, domicilié […], défendeur à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société des Autoroutes Esterel, Côte d’Azur, Provence, Alpes, de Me Balat, avocat de M. W…, et l’avis de M. Weissmann, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 22 janvier 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Pécaut-Rivolier, Ott, Sommé, conseillers, Mme Lanoue, MM. Joly, Le Masne de Chermont, conseillers référendaires, M. Weissmann, avocat général référendaire, et Mme Pontonnier, greffier de chambre.

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 juin 2018), les salariés de la société des Autoroutes Esterel, Côte d’Azur, Provence, Alpes (la société) bénéficiaient, au moyen d’une carte professionnelle, d’une circulation gratuite sur le réseau autoroutier Esterel Côte d’Azur exploité par la société. En application d’un accord d’entreprise nº 61 du 13 décembre 1995 auquel s’est substitué un accord nº 104 du 29 février 2008, cette gratuité était également accordée au moyen d’une carte senior aux anciens salariés de la société ayant fait valoir leurs droits à la retraite.

2. Au mois d’octobre 2012, l’Urssaf des Alpes-Maritimes a signifié à la société que la gratuité de circulation accordée à ses salariés ainsi qu’à ses anciens salariés retraités était soumise à cotisations sociales. A la suite du redressement opéré à ce titre, la société a, le 4 juin 2013, notifié la dénonciation de l’accord du 29 février 2008 à l’ensemble de ses signataires puis informé les bénéficiaires de la carte senior, parmi lesquels M. W… qui avait fait valoir ses droits à retraite depuis le 1er mars 2006, que le dispositif de gratuité de circulation cesserait à l’expiration de la période de survie de l’accord, et qu’il serait remplacé par un badge de télépéage comportant une réduction de 30 % pour les passages sur le réseau ESCOTA. M. W… a refusé ce dispositif et a saisi la juridiction prud’homale le 12 février 2015 en restitution de la carte senior et en remboursement de ses frais de péage.

Examen du moyen

Enoncé du moyen, pris en sa première branche

3. La société fait grief à l’arrêt de dire que la gratuité de circulation sur le réseau concédé ESCOTA accordée au salarié depuis son départ à la retraite constitue un avantage de retraite intangible qui ne pouvait être supprimé par la société à défaut de substitution de l’accord du 29 février 2008 dénoncé, d’ordonner la restitution par la société à M. W… de la carte senior et de la condamner à lui payer une certaine somme en remboursement des sommes acquittées au titre des péages autoroutiers, alors « que le maintien à d’anciens salariés devenus retraités de la gratuité des péages attachée à leur qualité d’usagers d’un réseau d’autoroutes géré par leur ancien employeur ne constitue pas un avantage de retraite ; qu’en l’espèce, il résulte des constatations de l’arrêt attaqué qu’en application d’un accord d’entreprise du 16 décembre 1995 auquel s’est substitué un accord du 29 février 2008, les anciens salariés devenus retraités de la société ESCOTA bénéficiaient du maintien de la gratuité de circulation reconnue au bénéfice des salariés sur le réseau concédé par le biais de l’attribution d’une ”carte senior” et que cet accord avait été régulièrement dénoncé par la société ESCOTA, dénonciation dont les salariés, dont M. W…, avaient été informés par courrier précisant que la gratuité de circulation cesserait de s’appliquer à compter du 14 août 2014 et proposant une réduction de 30 % sur le montant des péages ; que, pour faire droit aux demandes de M. W… tendant à la restitution de la carte senior ainsi qu’au remboursement des sommes acquittées au titre des péages depuis le 22 décembre 2014, la cour d’appel a retenu que la gratuité de la circulation accordée aux retraités de l’entreprise constituait un avantage de retraite intangible, en sorte que la dénonciation de l’accord du 29 février 2008, sans qu’intervienne un accord de substitution, ne pouvait modifier les droits acquis et liquidés des retraités ; qu’en statuant ainsi, cependant que le maintien à d’anciens salariés devenus retraités de la gratuité des péages attachée à leur qualité d’usagers du réseau autoroutier géré par leur ancien employeur ne constitue pas un avantage de retraite, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016, devenu l’article 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

4. Le maintien à d’anciens salariés devenus retraités de la gratuité de circulation attachée à leur qualité d’usager éventuel du réseau autoroutier exploité par l’ancien employeur ne constitue pas un avantage de retraite.

5. Pour juger que la gratuité de circulation accordée à M. W… depuis son départ à la retraite constitue un avantage de retraite intangible qui ne pouvait être supprimé par la société à défaut de substitution de l’accord du 29 février 2008 dénoncé, l’arrêt constate que si la société produit le règlement qu’elle a effectué par virement le 9 janvier 2013 de la somme de 1 499 875 euros au bénéfice de l’Urssaf, elle ne verse pas pour autant la décision de redressement de l’Urssaf, se contentant d’affirmer que cet organisme avait considéré que la gratuité de circulation accordée aux salariés ainsi qu’aux retraités était un avantage en nature et qu’elle devait être réintégrée pour sa valeur réelle. L’arrêt énonce qu’en réalité, l’Urssaf n’a pu que considérer que la gratuité de circulation était un avantage de retraite pour les retraités, soumis à cotisations, puisque les retraités ne peuvent bénéficier d’un avantage en nature qui ne concerne que les salariés. Il en déduit que c’est à juste titre que M. W… relève que la société, qui n’a pas formé de recours contre la décision de redressement de l’Urssaf, n’a pas contesté que la gratuité de circulation accordée aux retraités constituait un avantage de retraite soumis à cotisations sociales et que la gratuité de circulation accordée sous la forme de l’attribution d’une carte senior à tous les retraités de l’entreprise lors de leur cessation d’activité constitue bien un avantage de retraite intangible.

6. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres branches, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 7 juin 2018, entre les parties, par la cour d’appel de d’Aix-en-Provence ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne M. W… aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt.

 


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