Redressement de l’URSSAF : 21 juin 2022 Cour d’appel de Dijon RG n° 22/00018

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Redressement de l’URSSAF : 21 juin 2022 Cour d’appel de Dijon RG n° 22/00018

SD/LS

S.A.S. MDSA

C/

[K] [H]

Expédition et copie exécutoire délivrées le 21 Juin 2022

COUR D’APPEL DE DIJON

RÉFÉRÉ

ORDONNANCE DU 21 JUIN 2022

N° 22-022

N° RG 22/00018 – N° Portalis DBVF-V-B7G-F5ZV

DEMANDERESSE :

S.A.S. MDSA

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Pierrick BECHE de la SARL PIERRICK BECHE – CABINET D’AVOCATS, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 91

DÉFENDEUR :

Monsieur [K] [H]

né le [Date naissance 2] 1960 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Dominique CLEMANG de la SCP CLEMANG-GOURINAT, avocat au barreau de DIJON, avocat postulant vestiaire : 32

Représenté par Me Daniel RAVEZ, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B1024, avocat plaidant

COMPOSITION :

Président : Sophie DUMURGIER, Conseiller, suppléant Madame la premère présidente empêchée

Greffier : Laurence SILURGUET, Greffier

DÉBATS : audience publique du 31 Mai 2022 ; l’affaire a été mise en délibéré au 21 juin 2022

ORDONNANCE : rendu contradictoirement,

PRONONCÉE publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

SIGNÉE par Sophie DUMURGIER, Conseiller et par Laurence SILURGUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Sur la base d’un arrêt rendu le 7 octobre 2021 par la Cour d’appel de Paris, lui allouant diverses indemnités consécutivement à l’annulation de son licenciement, M. [K] [H] a fait pratiquer une saisie-attribution des avoirs détenus par le LCL Crédit Lyonnais et le CIC Lyonnaise de Banque au nom de la SAS MDSA, par acte d’huissier du 17 novembre 2021, dénoncée à la débitrice le 19 novembre 2021.

Saisi d’une contestation par la SAS MDSA, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Dijon a, par jugement rendu le 22 mars 2022 :

Sur la forme :

– déclaré irrecevable la contestation de la saisie intitulée ‘ saisie-attribution et de valeurs mobilières’, pratiquée le 17 novembre 2021 entre les mains de la SA LCL Le Crédit Lyonnais et dénoncée à la SAS MDSA sous forme de ‘ procès-verbal de saisie des droits d’associé ou valeurs mobilières ‘ en date du 19 novembre 2021,

– constaté la recevabilité de la contestation des saisies-attribution réalisées le 17 novembre 2021 eutre les mains du LCL Le Crédit Lyonnais et du CIC Lyonnaise de Banque et dénoncées à la SAS MDSA en date du 19 novembre 2021, à la demande de M. [K] [H],

Sur le fond,

– rejeté la contestation,

– dit que les saisies-attribution réalisées le 17 novembre 2021 entre les mains du LCL Le Crédit Lyonnais et du CIC Lyonnaise de Banque et dénoncées à la SAS MDSA en date du 19 novembre 2021, à la demande de M. [K] [H], sont valides,

En conséquence,

– rejeté les demandes de mainlevée de ces saisies-attribution,

– dit n’y avoir lieu au cantonnement de ces saisies-attribution,

– rejeté la demande de dommages et intérêts pour abus de saisie,

– condamné la SAS MDSA à verser à M. [K] [H] la somme de 1 800 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SAS MDSA aux dépens.

La société MDSA est appelante de cette décision.

Par actes du 14 avril 2022, la société MDSA a assigné, devant le premier président de la cour d’appel statuant en référé, M. [K] [H] pour obtenir, à titre principal, sur le fondement de l’article R 121-22 du code des procédures civiles d’exécution, un sursis à exécution de la décision du 22 mars 2022 dans l’attente de la décision d’appel à intervenir, à titre subsidiaire, sur le fondement de l’article 514-3 du code de procédure civile, voir arrêter l’exécution provisoire de la décision du 22 mars 2022, à titre infiniment subsidiaire, sur le fondement de l’article 521 du code de procédure civile, voir ordonner à titre de garantie la consignation des sommes sur un compte CARPA ou auprès de tel organisme et notamment la caisse des dépôts et consignations que la Cour désignera, fixer la nature, l’étendue et les modalités de ladite garantie à constituer, réserver les dépens et l’article 700 du code de procédure civile à la décision d’appel à intervenir sur le fond.

Au terme de ses conclusions n°2 notifiées le 2 mai 2022 et soutenues à l’audience, la SAS MDSA maintient l’ensemble de ses demandes.

M. [K] [H] conclut à l’irrecevabilité des demandes de la société MDSA et, subsidiairement, à leur rejet, en sollicitant l’allocation d’une indemnité de procédure de 3 000 euros.

Il a également sollicité la radiation de l’appel en application de l’article 524 du code de procédure civile, faute pour l’appelante d’avoir exécuté le jugement déféré.

SUR CE

Faisant valoir que l’arrêt du 7 octobre 2021 qui fonde les mesures d’exécution, dont le dispositif ne précise pas si la provision allouée à M. [H] est une somme nette ou brute, a fait l’objet d’un pourvoi en cassation, la requérante sollicite, à titre principal, un sursis à exécution de la décision du juge de l’exécution frappée d’appel, en application de l’article R 121-22 du code des procédures civiles d’exécution.

Elle rappelle que l’article R 121-1 du même code interdit au juge de l’exécution de modifier le dispositif d’une décision de justice servant de fondement aux poursuites et prétend, qu’en mentionnant dans le jugement critiqué que ‘ le juge de l’exécution doit alors interpréter la décision sur le point de savoir si le versement de la provision au titre de l’indemnité d’éviction doit être brut ou net ‘, le premier juge a violé ces dispositions légales, ayant ajouté et modifié le dispositif de l’arrêt en l’interprétant et en déclarant que la provision est une somme nette.

Elle se prévaut par ailleurs d’un arrêt de la cour de cassation du 3 juillet 2019 qui énonce que, lorsqu’une décision servant de fondement à des poursuites ne s’est pas prononcée sur l’imputation des cotisations et des contributions sociales, l’employeur doit procéder au précompte des sommes dues par le salarié sur la condamnation prononcée, et elle en déduit que la Cour d’appel de Paris ne s’étant pas prononcée sur la nature brute ou nette de la provision, celle-ci est nécessairement brute, ce qu’a d’ailleurs reconnu le premier juge dans sa décision.

Elle considère que l’analyse du juge de l’exécution n’a aucun sens car elle reviendrait pour le salarié à obtenir une somme comprenant les charges sociales alors que celles-ci ne lui sont pas dues.

Elle en déduit qu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision frappée d’appel qui ajoute au dispositif de l’arrêt de la Cour d’appel de Paris, alors que le juge de l’exécution n’a pas la compétence juridique pour qualifier la nature nette ou brute d’une somme.

M. [H] conclut à l’irrecevabilité de la demande de sursis à exécution, en l’absence de mesure susceptible de faire l’objet d’exécution forcée ordonnée par le juge de l’exécution.

Il considère, par ailleurs, qu’il n’existe aucun moyen sérieux de réformation du jugement du 22 mars 2022 en faisant valoir que le juge de l’exécution n’a apporté aucune modification aux dispositions claires et précises de l’arrêt du 7 octobre 2021, n’ayant fait qu’user du pouvoir d’interprétation dont il dispose en apportant une précision rendue nécessaire par les argumentations divergentes des parties.

Il prétend que la société MDSA opère systématiquement une confusion entre la somme de 696 734,38 euros qu’elle est condamnée à payer à titre de provision fixée au 31 mai 2021 et le montant de l’indemnité d’éviction brute qu’elle sera amenée à payer lorsque sa réintégration sera effectivement intervenue, dont il conviendra de déduire la provision, en précisant que le montant brut de l’indemnité d’éviction qui lui revient ne pourra être connu qu’après sa réintégration effective et fixé à cette date, et qu’il incombera alors à l’employeur d’établir les bulletins de salaire établissant le calcul détaillé des charges sociales et du prélèvement fiscal à la source.

Il soutient, qu’à l’inverse, le montant de la provision est une somme nette non soumis à précompte de charges sociales ou fiscales.

Selon l’article R 121-22 du code des procédures civiles d’exécution ‘ en cas d’appel, un sursis à l’exécution des décisions prises par le juge de l’exécution peut être demandé au premier président de la cour d’appel. La demande est formée par assignation en référé délivrée à la partie adverse et dénoncée, s’il y a lieu, au tiers entre les mains de qui la saisie a été pratiquée. Jusqu’au jour du prononcé de l’ordonnance par le premier président, la demande de sursis à exécution suspend les poursuites si la décision attaquée n’a pas remis en cause leur continuation ; elle proroge les effets attachés à la saisie et aux mesures conservatoires si la décision attaquée a ordonné la mainlevée de la mesure. Le sursis à exécution n’est accordé que s’il existe des moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision déférée à la cour ‘.

Contrairement à ce qu’affirme M. [H], l’article R 121-22 susvisé permet d’ordonner le sursis à exécution d’une décision par laquelle le juge de l’exécution rejette une demande de mainlevée d’une mesure d’exécution forcée, le texte visant ‘ les décisions prises’, et la demande présentée à cette fin par la société MDSA est recevable.

Le moyen tiré de l’excès de pouvoir du premier juge auquel il est reproché d’avoir modifié le dispositif de l’arrêt fondant les poursuites ne constitue pas un moyen sérieux d’annulation ou de réformation dès lors, qu’en application des dispositions de l’article R 121-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d’exécution, si le juge de l’exécution ne peut pas modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, il lui appartient d’en fixer le sens et, ainsi que l’a fait le premier juge, au regard de la contestation opposée par la débitrice saisie sur le caractère prétendument brut de la provision allouée par l’arrêt fondant les poursuites, de préciser que cette provision s’entend en net au regard des mentions de l’arrêt rendu le 7 octobre 2021.

Le moyen tiré des prétendues erreurs de droit commises par le juge de l’exécution auquel il est reproché d’avoir précisé que la somme allouée était une somme nette alors que, s’agissant d’une indemnité d’éviction accordée à M. [H], la condamnation est nécessairement prononcée en brut, l’employeur étant tenu de précompter sur la somme la part salariale de cotisations sociales et la saisie devant être cantonnée à la somme correspondant au montant net, ne constitue pas davantage un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision dès lors que la somme allouée par l’arrêt fondant les poursuites n’est pas une indemnité d’éviction mais une simple provision à valoir sur cette indemnité, laquelle est nécessairement une somme nette.

En conséquence, la société MDSA sera déboutée de sa demande de sursis à l’exécution provisoire.

A titre subsidiaire, en application de l’article 514-3 du code de procédure civile, la requérante sollicite l’arrêt de l’exécution provisoire dont le jugement frappé d’appel est assorti de plein droit, en arguant de moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision et des conséquences manifestement excessives que son exécution risque d’entraîner.

Elle prétend, à cet égard, qu’elle va devoir verser à M. [H] une somme de plus de 700 000 euros qu’elle risque de ne jamais revoir en cas de réformation du jugement ou de cassation/révision de l’arrêt 7 octobre 2021, le défendeur se trouvant en situation de surendettement et ne lui ayant jamais restitué la somme de 70 700 euros qu’elle lui avait versée en exécution d’un arrêt rendu en 2018, qui a fait l’objet d’une cassation.

Elle invoque ses propres difficultés financières, son activité ayant été fortement touchée par la crise sanitaire, étant exposée à un redressement URSSAF de plus de 300 000 euros et sa trésorerie étant négative avec potentiel passage en cessation des paiements.

C’est à bon droit que M. [H] objecte que les dispositions générales de l’article 514-3 du code de procédure civile ne sont pas applicables à la décision exécutoire de plein droit et par provision du juge de l’exécution, dès lors qu’a été prévu le régime spécifique de l’article R 121-22 du code des procédures civiles d’exécution, et la demande subsidiaire présentée sur ce fondement sera rejetée.

A titre infiniment subsidiaire, la société MDSA demande que la consignation des fonds soit ordonnée en application de l’article 521 du code de procédure civile, compte tenu du risque de ne pas récupérer les fonds versés en cas de réformation du jugement ou de cassation du titre exécutoire.

M. [H] conclut à l’irrecevabilité de cette demande au motif que la consignation n’est pas possible en application de l’article 521 du code de procédure civile car la somme qui lui est allouée est une provision.

Il demande subsidiairement que le montant de la somme à consigner soit réduit dans de plus justes proportions, compte tenu de sa situation.

Il résulte de l’article 521 du code de procédure civile que la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l’exécution provisoire soit poursuivie en consignant sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.

Or la condamnation prononcée par l’arrêt du 7 octobre 2021 est une condamnation au paiement d’une provision et, dès lors, l’alinéa 1er de l’article 521 du code de procédure civile interdit en l’espèce la possibilité d’une consignation.

La société MDSA ne pourra donc qu’être déboutée de cette demande subsidiaire.

Enfin, M. [H] sollicite, oralement à l’audience et en fin de plaidoierie, la radiation de l’appel sur le fondement de l’article 524 du code de procédure civile, dans sa rédaction postérieure au 01/01/2020.

La société MDSA s’oppose à cette demande en excipant de son irrecevabilité.

L’article 524 du code de procédure civile prévoit que : ‘ lorsque l’exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu’il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d’appel, décider, à la demande de l’intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l’affaire lorsque l’appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d’appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l’article 521, à moins qu’il lui apparaisse que l’exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l’appelant est dans l’impossibilité d’exécuter la décision’.

La décision rendue par le juge de l’exécution du Tribunal judiciaire de Dijon, frappée d’appel, a rejeté les demandes de mainlevée des saisies attribution mises en oeuvre par M. [H] et condamné la SAS MDSA à verser à ce dernier la somme de 1 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’exécution provisoire de la décision ne pouvait donc concerner que le versement de l’indemnité de procédure.

En formulant tardivement une demande de radiation de l’appel, ce qui ne permettait pas à son adversaire d’y répondre utilement, M. [H] a méconnu le principe du contradictoire énoncé par l’article 16 du code de procédure civile et sa demande ne pourra qu’être déclarée irrecevable.

L’équité ne justifie pas l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’une ou l’autre des parties.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par mise à disposition au greffe par ordonnance contradictoire et en dernier ressort,

DÉBOUTE la SAS MDSA de sa demande de sursis à l’exécution provisoire de droit du jugement du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Dijon du 22 mars 2022,

DÉBOUTE la SAS MDSA de ses demandes subsidiaires d’arrêt de l’exécution provisoire de droit du jugement du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Dijon du 22 mars 2022 et de consignation du montant de la condamnation,

DÉCLARE irrecevable la demande de radiation de l’appel formée par M. [H],

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SAS MDSA aux dépens du référé.

Le GreffierLe Président

Laurence SILURGUETSophie DUMURGIER

 


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