Reddition des comptes : décision du 11 juillet 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/05715

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Reddition des comptes : décision du 11 juillet 2023 Cour d’appel de Rennes RG n° 20/05715
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1ère Chambre

ARRÊT N°209/2023

N° RG 20/05715 – N° Portalis DBVL-V-B7E-RDBB

Mme [G] [S] [E] [L]

C/

M. [J] [L]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 11 JUILLET 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Aline DELIÈRE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Véronique VEILLARD, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Caroline BRISSIAUD, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 23 janvier 2023 devant Madame Caroline BRISSIAUD, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 11 juillet 2023 par mise à disposition au greffe après prorogation du délibéré annoncé au 21 mars 2023 à l’issue des débats

****

APPELANTE :

Madame [G] [S] [E] [L]

née le 02 Mai 1962 à [Localité 9] (56)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Christophe GUEGUEN de la SCP JOYEUX-GUEGUEN-CHAUMETTE, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉ :

Monsieur [J] [L]

né le 07 Novembre 1964 à [Localité 9] (56)

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représenté par Me Virginie ROCHET BERNADAC de la SELARL P & A, avocat au barreau de VANNES

EXPOSÉ DU LITIGE

Aux termes d’un acte authentique reçu les 22 et 23 juillet 1988 par Maître [V] [Z], notaire associé à [Localité 8] de la STON [Z] Jegourel, M. [J] [L] et sa s’ur, Mme [G] [L], ont fait l’acquisition au prix de 240 000 francs (36 587,76 €), ce à concurrence de moitié indivise chacun, d’un bien immobilier sis [Adresse 3] à [Localité 12] (56).

L’immeuble était grevé au profit du vendeur, M. [R] [L], oncle de M. et Mme [L], d’un droit d’usage et d’habitation sur la cave et le rez-de-chaussée de l’immeuble, ce jusqu’à son décès survenu en mai 1999.

Après le décès de M. [R] [L], M. [J] [L] et Mme [G] [L] ont décidé, d’un commun accord, de conserver le bien immobilier et de le mettre en location après réalisation de travaux.

Considérant que depuis l’année 2001, Mme [L] a consenti divers baux d’habitation sur cette maison, se dispensant pour l’essentiel de toute reddition de comptes et de lui verser sa quote-part sur les loyers perçus, M. [L] l’a faite assigner devant le tribunal de grande instance de Lorient par acte d’huissier du 20 novembre 2017.

Au cours de la procédure, Mme [L], soutenant avoir réalisé des travaux dans le bien indivis à ses frais, a saisi le juge de la mise en état d’une demande de désignation d’un expert aux fins de constatation des travaux intervenus et d’évaluation du prix de la maison.

Par ordonnance en date du 15 février 2019, le juge de la mise en état l’a déboutée de sa demande.

Par jugement du 4 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Lorient a :

-Débouté Mme [L] de sa demande d’expertise du bien immobilier indivis ;

-Ordonné l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l’indivision existant entre M. [J] [L] et Mme [G] [L] ;

-Commis Maître [Y] de la SCP [Y], notaire associé à [Localité 12] pour y procéder ;

-Désigné Mme Desai Lebras, vice-président, pour surveiller lesdites opérations ;

-Dit qu’en cas d’empêchement des notaire ou juge commis, il sera pourvu à leur remplacement par simple ordonnance sur requête rendue à la demande de la partie la plus diligente ;

-Débouté Mme [L] de sa demande d’attribution préférentielle du bien indivis ;

Préalablement pour parvenir à la liquidation :

-Ordonné, aux requêtes, poursuites et diligences de :

* M. [J] [L], né à [Localité 9] le 7 novembre 1964, de nationalité française, officier de gendarmerie, demeurant Gendarmerie Nationale – [Adresse 1] ;

En présence ou elle dûment appelée, de :

* Mme [G], [S], [E] [L], née le 2 mai 1962 à [Localité 9](Morbihan), de nationalité française, en activité, demeurant [Adresse 2],

la vente par adjudication à la barre du tribunal judiciaire de Lorient sous la constitution d’un avocat, de l’immeuble suivant en un seul lot et sur la mise à prix suivante:

Sur la commune de [Localité 12] : une maison à usage d’habitation construite en pierres et couverte en tuiles sise [Adresse 3] comprenant :

– cave en sous-sol

– rez-de-chaussée avec cuisine et salle à manger

– à l’étage : deux chambres mansardées

-jardin

figurant au cadastre rénové de la commune de [Localité 12] section AD numéro [Cadastre 6] pour une contenance de 42 ares 67 centiares, l’acte d’acquisition étant publié au premier bureau des hypothèques de [Localité 11] le 22 septembre 1988, volume 5404 n°5 sur une mise à prix de 155 000 € ;

-Dit qu’à défaut d’enchères atteignant la mise à prix du bien susvisé, la vente pourra se faire avec possibilité de baisse d’un quart, puis de la moitié par application de l’article 1273 du Code de procédure civile ;

-Dit qu’il sera procédé à une publicité légale conformément aux articles R 322-31 à R 322-36 du Code des procédures civiles d’exécution et au besoin à une ou deux insertions sommaires, le cas échéant sur un site en ligne, outre l’affichage de la vente dans le hall du tribunal judiciaire de Lorient et sur les lieux de la vente ;

-Autorisé le demandeur et son conseil à faire imprimer des affiches format placard et si besoin quelques grandes affiches ;

-Dit que les dépens de la procédure de licitation seront mis à la charge de l’adjudicataire par une clause spéciale du cahier des charges ;

-Renvoyé les parties devant le notaire liquidateur susvisé en vue de l’établissement d’un état liquidatif ;

-Dit que l’indivision entre Mme [G] [L] et M. [J] [L] se trouve créancière à l’encontre de Mme [L] d’une somme de 23 248€ ;

-Débouté Mme [L] de sa demande tendant à voir dire que l’indivision est débitrice à son égard de la somme de 40 872,94 € ;

-Dit n’y avoir lieu de condamner Mme [L] de produire des pièces sous astreinte ;

-Déclaré forclose la demande de Mme [L] au titre de l’indemnité d’occupation entre juillet 2000 et septembre 2001 ;

-Débouté M. [L] de sa demande au titre de l’indemnité d’occupation entre le 16 décembre 2013 et le 30 avril 2015 ;

-Débouté M. [L] de sa demande de dommages et intérêts pour faute de Mme [L] ;

-Débouté Mme [L] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

-Condamné Mme [L] à verser à M. [L] la somme de 3 000€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

-Débouté M. [L] de sa demande sur le fondement de l’article 699 du Code de procédure civile ;

-Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

-Dit que les dépens sont employés en frais privilégiés de partages ;

-Ordonné l’exécution provisoire de la présente décision.

Suivant déclaration du 20 novembre 2020, Mme [G] [L] a interjeté appel de ce jugement. La déclaration d’appel mentionne « Objet/portée de l’appel : Appel limité aux chefs du jugement expressément critiqués». Un document intitulé « annexe indivisible à déclaration d’appel » et comportant les chefs du jugement critiqués était joint à la déclaration d’appel.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions transmises et notifiées au greffe le 2 août 2021, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des moyens et prétentions, Mme [G] [L] demande à la cour de :

-Réformer le jugement en toutes ses dispositions ;

-Constater qu’un accord entre les parties est intervenu pour l’attribution du bien indivis à Mme [G] [L] ;

-Constater l’absence de tout investissement personnel ou financier de M. [J] [L] afin de régler l’indivision [L] ;

-Constater la mauvaise foi manifeste de M. [J] [L] dans le cadre de cette procédure et dans ce cadre son absence totale de gestion de l’indivision ;

-Confirmer l’ouverture des comptes de liquidation et partage de l’indivision entre Mme [G] [L] et M. [J] [L] ;

-Désigner afin d’y procéder la SCP [Y] représentée par Maitre [B] [Y], notaire associé à [Localité 12] ;

-Juger que l’indivision entre Mme [G] [L] et M. [J] [L] se trouve débitrice à l’encontre de Mme [G] [L] d’une somme de 40 872,94 €, somme arrêtée à fin 2019, sauf supplément lié aux sommes complémentaires réglées au titre du compteur électrique, des impôts fonciers et de la mise aux normes des installations électriques postérieurement à cette date ;

-Condamner en conséquence M. [J] [L] à payer à Mme [G] [L] au titre des sommes avancées pour le compte de l’indivision la moitié de cette somme, soit 20 436,47 € à fin 2019, sauf sommes complémentaires postérieures ;

-Juger que l’indivision entre Mme [G] [L] et M. [J] [L] se retrouve débitrice vis à vis de Mme [G] [L] au titre de la gestion du bien indivis durant douze années pour une somme de 21 600 € ;

-Condamner en conséquence M. [J] [L] à payer à Mme [G] [L] à ce titre la somme de 10 800 € ;

-Condamner le même à régler à Mme [G] [L] une somme de 5 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens qui seront recouvrés par application de l’article 699 du Code de procédure civile au bénéfice de Maître Christophe Gueguen, avocat au barreau de Nantes.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises et notifiées au greffe le 2 janvier 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des moyens et prétentions, M. [J] [L] demande à la cour de :

-Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

*débouté Mme [L] de sa demande d’expertise du bien immobilier indivis

*ordonné l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l’indivision existant entre M. [J] [L] et Mme [G] [L] ;

*désigné Mme Desai Lebras, Vice-Président, pour surveiller lesdites opérations ;

*dit qu’en cas d’empêchement des notaire ou juge commis, il sera pourvu à leur remplacement par simple ordonnance sur requête rendue à la demande de la partie la plus diligente

*renvoyé les parties devant le notaire liquidateur susvisé en vue de l’établissement d’un état liquidatif ;

*dit que l’indivision entre Mme [G] [L] et M. [J] [L] se trouve créancière à l’encontre de Mme [L] d’une somme de 23 248€

*débouté Mme [L] de sa demande tendant à voir dire que l’indivision est débitrice à son égard de la somme de 40 872,94 € ;

*Déclaré forclose la demande de Mme [L] au titre de l’indemnité d’occupation entre juillet 2000 et septembre 2001 ;

*Débouté Mme [L] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

*Condamné Mme [L] à verser à M. [L] la somme de 3 000€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

*Constaté le désistement d’instance et d’action de Mme [G] [L] au titre de l’attribution préférentielle du bien indivis ;

*Commis Maître [F] [H], notaire associé à [Localité 12] de la STON Tanguy Pietresson de Saint Aubin, [F] [H], Marie-Caroline Riou, [C] [Z] en lieu et place de Me [B] [Y] pour procéder aux opérations de compte liquidation partage ;

*débouté Mme [G] [L] de l’intégralité de ses demandes et prétentions.

-Réformer le jugement en date du 4 novembre 2020 rendu par le tribunal judiciaire de Lorient en ce qu’il a :

*débouté M. [L] de sa demande au titre de l’indemnité d’occupation entre le 16 décembre 2013 et le 30 avril 2015 ;

*débouté M. [L] de sa demande de dommages et intérêts pour faute de Mme [L] ;

*débouté M. [L] de sa demande sur le fondement de l’article 699 du Code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau,

-Condamner Mme [G] [L] à payer à M. [J] [L] la somme de 18 000 € à titre de dommages et intérêts ;

-Dire et juger que l’indivision entre Mme [G] [L] et M. [J] [L] se trouve créancière à l’encontre de Mme [L] d’une somme de 9 900 € à titre d’indemnité d’occupation pour la période du 16 décembre 2013 au 30 avril 2015 ;

-Dire et juger que l’indivision entre Mme [G] [L] et M. [J] [L] se trouve créancière à l’encontre de Mme [L] d’une somme de 21 000 € à titre d’indemnité d’occupation pour la période du 20 février 2018 au 27 janvier 2021,

-Condamner en conséquence Mme [G] [L] à payer à M. [J] [L] au titre de l’indemnité d’occupation les sommes de 4 950 € et 10 500 € ;

-Dire et juger que l’indivision entre Mme [G] [L] et M. [J] [L] se trouve créancière à l’encontre de Mme [L] d’une somme de 5 500 € au titre du jugement prononcé par le tribunal d’instance de Lorient à l’encontre des consorts [X] ;

-Condamner en conséquence Mme [G] [L] à payer à M. [J] [L] à ce titre la somme de 2 750 € ;

-Condamner Mme [G] [L] à verser à M. [J] [L] une somme de 5 000 € sur le fondement de l’article 700 1° du Code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel ;

-Condamner Mme [G] [L] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

A l’audience du 23 janvier 2023, la cour a sollicité les observations des parties sur l’absence d’effet dévolutif au regard de la déclaration d’appel ne mentionnant pas expressément les chefs du jugement critiqués, lesquels figurent seulement dans une annexe.

Mme [L] a fait parvenir une note en délibéré le 27 février 2023 à laquelle la cour renvoie expressément pour le détail de l’argumentation, aux termes de laquelle la cour est invitée à admettre le recours à une annexe faisant corps avec la déclaration d’appel et précisant les chefs du jugement critiqués même si aucun empêchement technique ne le justifie et malgré l’absence de renvoi à une annexe dans la déclaration d’appel.

M. [L] a adressé une note en délibéré le 21 février 2023, à laquelle la cour renvoie expressément pour le détail de l’argumentation et aux termes de laquelle il conclut que la déclaration d’appel ne mentionnant pas les chefs du jugement critiqués, l’effet dévolutif n’a pas opéré. La cour n’est donc saisie d’aucune demande par Mme [L]. En revanche, il rappelle que l’absence d’effet dévolutif de la déclaration d’appel n’éteint pas l’instance et ne doit pas faire obstacle à ce qu’il soit statué sur son appel incident. Considérer qu’il n’y aurait pas d’élargissement de la dévolution malgré cette demande de réformation de M. [L] du jugement de première instance reviendrait à sanctionner l’intimé pour les erreurs procédurales commises par l’appelant. La cour n’est donc saisie que des demandes de réformation de M. [L].

MOTIVATION DE LA COUR

1) Sur l’absence d’effet dévolutif de la déclaration d’appel

 En application de l’article 562 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s’opérant pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

 

Ainsi, seule la déclaration d’appel, qui est un acte de procédure qui se suffit à lui seul, opère la dévolution des chefs critiqués du jugement. Lorsque la déclaration d’appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs du jugement critiqués, l’effet dévolutif n’opère pas (Cass. 2ème civ., 30 janvier 2020, pourvoi n° 18-22.528).

Par ailleurs, aux termes de l’article 901 du code de procédure civile dans sa rédaction antérieure au décret n°2022-245 du 25 février 2022, la déclaration d’appel est faite à peine de nullité par acte contenant notamment : “4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible”. En application des articles 748-1 et 930-1 du même code, cet acte est accompli et transmis par voie électronique.

 

L’obligation de mentionner dans la déclaration d’appel les chefs de jugement critiqués, dépourvue d’ambiguïté, encadre les conditions d’exercice du droit d’appel dans le but légitime de garantir la bonne administration de la justice en assurant la sécurité juridique et l’efficacité de la procédure d’appel.

 

Dans une série d’arrêts du 12 janvier 2023 (n° 21-16.804, n° 21-14.731, n° 21-14.732, n° 21-14.733, n° 21-14.734, n° 21-14.735, n° 21-14.736, n° 21-14.737, n° 21-14.738, n° 21-14.739), la cour de cassation a précisé au sujet de l’annexe qu’aucune disposition du code ne prévoit que l’acte d’appel est assorti d’un document annexe comprenant les chefs du jugement critiqué et que si la mention d’un tel document annexe apparaît dans la circulaire du 4 août 2017, celle-ci ne saurait ajouter valablement au décret (‘).

 

Cependant, en cas d’empêchement d’ordre technique, l’appelant peut compléter la déclaration d’appel par un document faisant corps avec elle et auquel elle doit renvoyer (Cass. 2ème civ., 13 janvier 2022, n° 20-17.516).

 

S’il n’est pas établi que la déclaration d’appel a dépassé sa taille maximale de 4080 caractères, les chefs de jugement critiqués doivent figurer sur la déclaration d’appel et non sur une annexe qui n’est pas la déclaration d’appel (Cass. 2ème civ., 2 mars 2023, n° 21-17.163).

 

Il est donc constant que, sauf cet empêchement technique et jusqu’à l’entrée en vigueur du décret du 25 février 2022 ayant modifié l’article 901 du code de procédure civile, seule la déclaration d’appel adressée au format XML énonçant les chefs du jugement critiqués, emportait l’effet dévolutif.

 

Enfin, l’absence d’effet dévolutif d’une déclaration d’appel peut être soulevée à tout moment de la procédure par les intimés ou par la cour d’appel.

 

En l’espèce, la déclaration d’appel du 20 novembre 2020 mentionne que l’objet de l’appel est un “Appel limité aux chefs du jugement expressément critiqués ».

 

Cette déclaration d’appel ne mentionne pas les chefs de jugement critiqués.

 

Aucun empêchement technique n’est caractérisé.

 

Cette irrégularité affectant la déclaration d’appel n’a pas été rectifiée par une nouvelle déclaration d’appel dans le délai imparti à l’appelant pour conclure au fond contrairement aux exigences de l’article 910-4 alinéa 1 du code de procédure civile et ne peut plus être réparée à ce jour.

 

Aucune indivisibilité n’est caractérisée.

 

Enfin, le fait qu’un document annexe ait été transmis concomitamment à la déclaration d’appel est sans effet sur la portée de l’effet dévolutif de l’appel.

 

Sous le bénéfice de ces observations, la déclaration d’appel dépourvue de la mention des chefs de jugement critiqués sans que soit caractérisé un empêchement technique n’a opéré aucun effet dévolutif.

 

En conséquence, la cour, constatant que l’effet dévolutif n’a pas opéré, n’est saisie d’aucune demande par l’appelante.

En revanche, cette absence d’effet dévolutif qui n’éteint pas l’instance, ne doit pas faire obstacle à ce que l’intimé se porte appelant incident, élargissant alors une dévolution qui était réduite à néant. La cour est donc uniquement saisie des demandes de réformation de M. [L], sur lesquelles il est statué ci-après.

2) Sur l’appel incident et les demandes de M. [L]

a. Sur la demande au titre des indemnités d’occupation

M. [L] considère que l’indivision [L] se trouve créancière à l’encontre de Mme [L] d’une somme de 9 900 € au titre des indemnités d’occupation dues pour la période du 16 décembre 2013 au 30 avril 2015 ainsi que d’une somme de 21 000 € au titre des indemnités d’occupation dues pour la période du 20 février 2018 au 27 janvier 2021.

Sur le fondement de l’article 815-9 du Code civil, il sollicite donc la condamnation de Mme [G] [L] à lui payer les sommes de 4 950 € et 10 500 € correspondant à ses droits dans l’indivision.

L’article 815-9 du code civil dispose que : « chaque indivisaire peut user et jouir des biens indivis conformément à leur destination, dans la mesure compatible avec le droit des autres indivisaires et avec l’effet des actes régulièrement passés au cours de l’indivision. A défaut d’accord entre les intéressés, l’exercice de ce droit est réglé, à titre provisoire, par le président du tribunal.

L’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité ».

La jouissance privative du bien indivis résulte de l’impossibilité de droit ou de fait pour les co-indiviaires d’user de la chose. L’indemnité est destinée à compenser la perte de jouissance causée par l’occupation ou la jouissance exclusive du co-indivisaire.

M. [L] doit donc démontrer que sa s’ur a eu la jouissance privative du bien indivis du 16 décembre 2013 au 30 avril 2015 et du 20 février 2018 au 27 janvier 2021, périodes correspondant à des vacances locatives.

Au soutien de sa demande, M. [L] fait valoir que Mme [L] a disposé de la jouissance exclusive du bien, dont elle a assuré seule, et à son profit, la gestion locative depuis 2002, qu’elle était seule en possession des clés entre chaque location et qu’elle a fait procéder au changement des serrures de la maison dès le mois d’avril 2014. Il estime que le tribunal ne pouvait sans contradiction considérer que la jouissance privative n’était pas établie, tout en retenant que Mme [L] avait souscrit de nombreux baux d’habitation sur le bien indivis sans l’aval de son frère, en constatant également qu’elle refusait de communiquer des informations précises sur la situation du bien et enfin, en relevant qu’elle s’était « comportée comme seule propriétaire du bien ».

Toutefois, M. [L] ne saurait déduire de la gestion locative de sa s’ur, une jouissance exclusive du bien indivis par elle-ci.

En effet, pendant les périodes de location, M. [L] n’a pas été privé de la jouissance du bien puisqu’en définitive, il en a perçu la part de loyers lui revenant.

Pour les périodes de vacances locatives, il n’est pas démontré que M. [L] aurait été empêché d’occuper les lieux .

Il ressort en effet d’un courrier daté du 21 janvier 2013 adressé par l’avocat de M. [L] à Mme [L], que M. [L] est en possession d’un jeu de clés depuis le 28 janvier 2011.

Il ne ressort d’ailleurs pas des pièces produites qu’il aurait été privé d’accès au bien indivis, au moyen d’un constat d’huissier en ce sens, par exemple.

M. [L] fait valoir que sa s’ur a changé les serrures de la maison et produit à cet égard deux factures, communiquées par Mme [L] elle-même.

La cour observe que la première facture, relative au remplacement d’un portillon, date du 30 septembre 2005 à une date où le bien était géré par les parents [L], la facture étant d’ailleurs libellée au nom de [J] [L]. Entre temps, M. [L] a obtenu les clés du bien indivis.

La facture dont M. [L] entend surtout se prévaloir est datée du 22 avril 2014 mais ne mentionne que le remplacement d’une « porte de service ». Il n’est donc pas avéré que l’accès principal à la maison ait été modifié.

Il est d’ailleurs observé que M. [L] a été en mesure de faire estimer le bien par l’office notarial [Y], ainsi qu’il résulte de l’attestation de valeur datée du 15 décembre 2016 qu’il produit.

En définitive, M. [L] ne justifie pas avoir été privé de la même utilisation du bien que sa co-indivisaire, du fait de cette dernière.

C’est à juste titre que le premier juge a considéré que la jouissance privative de Mme [L] n’était pas avérée. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande en paiement d’indemnités d’occupation pour la période du 16 décembre 2013 au 30 avril 2015 et M. [L] sera débouté pour les mêmes raisons de sa demande complémentaire formée en cause d’appel, pour la période du 20 février 2018 au 27 janvier 2021, date de la licitation du bien au profit de Mme [L].

b. Sur la responsabilité de l’indivisaire

M. [L] fait grief au jugement de l’avoir débouté de sa demande de dommages-et-intérêts à hauteur de 18.000 euros

M. [L] reproche à sa co-indivisaire d’avoir eu un comportement fautif en violant à plusieurs reprises la règle de l’unanimité instituée par l’article 815-13 du code civil en matière d’accomplissement d’actes d’administration, en souscrivant de manière successive plusieurs baux d’habitation, sans le moindre accord, ni prévenance de Mr [L]. Il lui reproche également une absence de reddition des comptes et d’avoir délibérément retardé, voire empêché la licitation de l’immeuble et la sortie d’indivision, tout en continuant de jouir à sa guise de l’immeuble et d’en encaisser les fruits. Enfin, il est fait grief à Mme [L] d’avoir mandaté un conseil en son nom, en parfaite fraude de ses droits.

*Sur la violation de la règle de l’unanimité

M.[L] reproche à sa s’ur la souscription de baux successifs sans son accord ainsi que la réalisation de travaux sans son accord.

L’article 815-2 du Code civil dispose que : « tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation du bien indivis même si elles ne présentent pas un caractère d’urgence. Il peut employer à cet effet les fonds de l’indivision détenus par lui et il est réputé en avoir la libre disposition à l’égard des tiers. A défaut de fonds de l’indivision, il peut obliger les co-indivisaires à faire avec lui les dépenses nécessaires ».

En l’espèce, M. [L] ne peut sérieusement contester le bien fondé des travaux d’entretien (espaces verts, chaudière) et de remise en état (sur la toiture, dans la cave) mis en ‘uvre par sa co-indivisaire, notamment au regard d’un problème ancien et persistant d’humidité.

Contrairement à ce qu’il prétend, M. [L] a été tenu régulièrement informé de l’état général du bien et de la nécessité d’effectuer tels ou tels travaux.

Par exemple, par courrier du 13 mai 2011, sa s’ur l’a avisé « de gros soucis d’infiltrations au niveau de la toiture » et de la nécessité de procéder au blocage du loyer pour financer son remplacement. Il est observé que M. [L] ne s’est plaint de cette décision qu’en janvier 2013. Par courrier du 10 octobre 2011, Mme [L] faisait le point avec son frère sur ses démarches concernant la toiture et l’humidité dont se plaignaient les locataires.

Par l’intermédiaire du notaire, M. [L] a été informé le 30 novembre 2015 de la nécessité de changer la chaudière datant d’une quarantaine d’années, un devis lui étant communiqué.

De nombreuses correspondances sont également produites par Mme [L] au sujet d’inondations dans la cave dans le courant de l’année 2018.

Par courrier du 29 juin 2018, Mme [L] adressait à son frère divers devis d’entretien du jardin.

Par ailleurs, dans un courrier adressé à Me [U] (notaire), Me [A] (conseil de M. [L]) indiquait : « qu’un accord existait entre sa s’ur et lui sur la gestion de cet immeuble. C’est ainsi qu’il avait été convenu qu’à compter de 2001, l’immeuble ferait l’objet d’une location et qu’à compter du mois de novembre 2001, les loyers ne seraient pas répartis entre les co-indivisaires mais affectés aux travaux de remise en état de la maison. »

M. [L] était donc d’accord pour louer le bien. Dans la mesure où les loyers devaient servir à financer les travaux, les contrats de location peuvent au même titre que les travaux réalisés, s’analyser en des actes conservatoires, pour lesquels l’unanimité n’était pas requise.

En tout état de cause, s’agissant du bail consenti à M. [N] entre le 1er août 2006 et le 31 octobre 2011, il est constant que M. [L] a perçu une somme de 13 200 euros au titre des loyers. Il a donc ratifié ce bail. S’agissant du bail suivant, consenti aux consorts [X] entre le 15 décembre 2011 et le 15 décembre 2013, M. [L] a manifestement été destinataire de ce contrat puisqu’il a été en mesure de le produire.

Il n’y a donc que pour le bail consenti à M. [W] entre le 1er mai 2015 et le 20 février 2018 que la preuve de l’accord de M. [L] n’est pas rapportée, sans que soit pour autant caractérisée une violation de la règle de l’unanimité, la cour ayant retenu la qualification d’acte d’administration.

Ce grief n’est donc pas fondé.

*Sur l’obstacle à la licitation

M. [L] reproche sans aucune preuve à sa s’ur d’avoir voulu retarder voire empêcher la sortie d’indivision.

Il n’est cependant pas démontré que le retard pris dans la liquidation de l’indivision durant plus de 8 ans soit exclusivement imputable à Mme [L].

Ce grief n’est pas fondé.

*Sur le choix du conseil et de la procédure civile faite à son insu

M. [L] soutient s’être vu signifier un arrêt prononcé le 19 mars 2019 par la cour d’appel de Rennes, à la requête des consorts [M] et qu’il a découvert avec stupéfaction sa qualité de partie à cette instance et sa représentation par Me [K], le conseil de sa s’ur dans le présent litige.

La cour observe cependant que contrairement à ce qu’il prétend, M. [L] s’est vu adresser un courrier recommandé avec avis de réception daté du 25 novembre 2016, dans lequel sa s’ur l’informait du procès les opposant aux consorts [M], où ils intervenaient en tant qu’ayants-droit de leur mère [O] [L], décédée en cours d’instance. L’avis de réception n’est pas produit mais la cour peine à croire que M. [L] n’a pas reçu ce courrier, adressé à la gendarmerie de [Localité 10], qui était alors son lieu de travail et qui était encore son adresse déclarée dans ses conclusions du 20 décembre 2018 devant le juge de la mise en état, saisi par Mme [L] aux fins d’expertise du bien indivis.

Aucune faute de Mme [L] en lien avec le bien indivis n’est établie et comme l’a justement relevé le tribunal, la responsabilité est ici davantage celle de l’avocat qui ne s’est pas assuré qu’il disposait d’un mandat de M. [L] et qui ne s’est pas inquiété d’un potentiel conflit d’intérêt.

En tout état de cause, M. [L] ne démontre pas en quoi cette situation lui a causé un préjudice matériel ou moral.

Ce grief n’est pas fondé.

* Sur l’absence de reddition de comptes

Il s’évince des correspondances échangées entre les parties que Mme [L] a été défaillante dans la reddition des comptes de l’indivision et qu’elle a manqué de transparence, notamment quant au sort des loyers perçus.

Toutefois, comme l’a retenu le tribunal, M. [L] ne justifie d’aucun préjudice particulier autre que les sommes dont l’indivision se trouve créancière à l’égard de Mme [L], qu’il aura vocation à percevoir à hauteur de ses droits à l’issue de la présente procédure.

Le préjudice moral résultant de cette situation n’est pas explicité et la cour ne peut que constater que ce manque de communication est le résultat d’un conflit exacerbé entre les parties, dont la responsabilité n’est pas exclusivement imputable à Mme [L].

Le jugement sera donc être confirmé en ce qu’il a rejeté la prétention indemnitaire de M. [L] à hauteur de 18 000 € .

c. Sur les autres demandes de M. [L]

En premier lieu, M. [L] demande à la cour de constater le désistement d’instance et d’action de Mme [L] au titre de l’attribution du bien indivis.

Il est constant que le bien indivis a été vendu à Mme [L]. De fait, les demandes d’attribution du bien indivis et de licitation sont devenues sans objet. Du fait de l’absence d’effet dévolutif, la cour n’est saisie d’aucune demande de réformation du jugement sur ce point, de sorte qu’il n’y a pas lieu de constater le désistement.

En second lieu, M. [L] expose que Mme [L] a obtenu par jugement du tribunal d’instance de Lorient du 3 août 2015, la condamnation des consorts [X] à lui payer la somme de 4 300 € outre la conservation du dépôt de garantie à hauteur de 1 200 €. Estimant que cette somme doit être intégrée à l’actif des comptes de l’indivision, il sollicite la condamnation de Mme [L] à lui payer la somme de 2 750 €.

Le jugement n’est pas produit mais il est justifié que Mme [L] a reçu de son conseil un chèque de 4 300 euros correspondant aux condamnations prononcées à l’encontre d’anciens locataires.

Mme [L] ne développe aux termes de ses conclusions aucun moyen opposant à cette demande.

Il y sera fait droit dans le cadre des opérations de liquidation partage de l’indivision.

Mme [G] [L] est donc condamnée à payer à M. [J] [L] la somme de 2 750 €.

3°/ Sur les frais irrépétibles et les dépens

Les dépens d’appel seront employés en frais privilégiés de partage.

En équité, il ne sera pas fait application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile. Les parties seront donc déboutées de leurs demandes au titre des frais irrépétibles d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Sur l’appel principal,

Constate que l’effet dévolutif de la déclaration d’appel n’a pas opéré,

Constate que la cour n’est saisie d’aucune demande par l’appelante,

Sur l’appel incident,

Constate que la cour est saisie des demandes de l’intimé,

Confirme le jugement rendu le 4 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Lorient en ce qu’il a :

*débouté M. [J] [L] de sa demande de dommages-et-intérêts ;

*débouté M. [J] [L] de sa demande en paiement d’indemnités d’occupation pour la période du 16 décembre 2013 au 30 avril 2015 ;

Y ajoutant :

Déboute M.[J] [L] de sa demande en paiement d’indemnités d’occupation pour la période du 20 février 2018 au 27 janvier 2021;

Condamne Mme [G] [L] à payer à M. [J] [L] la somme de 2 750 € au titre des sommes reçues en exécution du jugement du tribunal d’instance de Lorient du 3 août 2015,

Déboute les parties de leur demande sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Dit que les dépens d’appel seront employés en frais privilgiés de partage.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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