Reddition des comptes : 7 février 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 20/02737

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Reddition des comptes : 7 février 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 20/02737
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7 février 2023
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
20/02737

2ème chambre

Texte de la décision


07/02/2023

ARRÊT N°65

N° RG 20/02737 – N° Portalis DBVI-V-B7E-NYFF

FP – AC

Décision déférée du 22 Septembre 2020 – Tribunal de Commerce de TOULOUSE – 2018J26

Monsieur STEIN

S.A.S. DISTRIBUTION CASINO FRANCE

C/

[X] [S]

[R] [K] épouse [S]

Infirmation

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU SEPT FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

S.A.S. DISTRIBUTION CASINO FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Bruno MERLE, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [X] [S] Sans emploi

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me Nicole-pauline LIENARD, avocat au barreau de SAINT-GAUDENS

Madame [R] [K] épouse [S]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Nicole-pauline LIENARD, avocat au barreau de SAINT-GAUDENS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant F. PENAVAYRE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargé du rapport et V.SALMERON, Présidente. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

P. BALISTA, conseiller

F. PENAVAYRE,magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

Greffier, lors des débats : A. CAVAN

ARRET :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par V. SALMERON, présidente, et par C. OULIE, greffier de chambre.



EXPOSE DU LITIGE

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE et les époux [S] [K] ont signé le 30 mai 2007 un contrat de cogérance mandataire non-salariée pour l’exploitation de ses magasins de détail.

À partir du 6 février 2015, ils se sont vus confier des contrats de cogérance mandataire non-salariée intérimaire lors des congés ou absence des titulaires.

Les époux [S] [K] n’ayant pas repris leur activité le 7 novembre 2016 à l’issue d’un congé, ils ont été convoqués pour un entretien préalable par lettre recommandée du 14 novembre 2016 mais ne se sont pas présentés. La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a procédé à la rupture du contrat de cogérance par lettre recommandée du 28 novembre 2016.

Le compte général de dépôt ( pièce n° 60) faisant ressortir un solde débiteur de 31 143,70 euros, ils ont été vainement mis en demeure par lettre recommandée du 9 juin 2017 de régler ces sommes.

En réponse ils ont fait savoir qu’ils bénéficiaient d’une procédure de surendettement.

Par acte d’huissier du 18 décembre 2017, la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a assigné Monsieur [X] [S] et Madame [R] [K] devant le tribunal de commerce pour obtenir leur condamnation solidaire à lui payer le solde débiteur de leur compte général de dépôt avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 9 juin 2017.

Par jugement du 22 septembre 2022, le tribunal de Commerce de Toulouse s’est déclaré compétent pour connaître du litige ( conformément à l’article L7322-2 et suivants du code de travail et de l’Accord collectif des maisons d’alimentation du 18 juillet 1963) et a :

-débouté Monsieur [X] [S] et Madame [R] [K] de leur demande de forclusion (car la créance est une créance de nature professionnelle qui est exclue du plan de surendettement)

-débouté la SAS CASINO DISTRIBUTION de sa demande en paiement (car les arrêtés de compte servant de base comptable à la demande n’ont pas un caractère contradictoire)

-dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamné la société SAS CASINO DISTRIBUTION aux dépens.

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE a interjeté appel de ce jugement par déclaration enregistrée au greffe le 12 octobre 2020 qu’elle critique en ce qu’elle a été déboutée de sa demande en paiement et condamnée aux dépens.

La DISTRIBUTION CASINO FRANCE a déposé ses conclusions le 4 janvier 2021. Elle demande:

A titre principal ,sur le fondement de l’article 7322-5 du code de travail et considérant la nature professionnelle de la dette des époux [S] [K],

-de confirmer le jugement du tribunal de Commerce de Toulouse du 22 septembre 2020 en ce qu’il s’est déclaré compétent pour connaître du litige et de rejeter le moyen de forclusion soulevée

Sur le fond :

-de réformer le jugement du 22 septembre 2020 en ce qu’il a débouté la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de sa demande en paiement et l’a condamnée aux dépens de l’instance

-de retenir que le solde débiteur du compte général de dépôt des époux [S] [K] s’élève à la somme de 31 143,70 euros

-de débouter les époux [S] [K] de l’ensemble de leurs prétentions

-de condamner solidairement Monsieur [S] et Madame [K] à payer à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE la somme de 31 143,70 euros avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 9 juin 2017 outre la somme de 2000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile avec capitalisation des intérêts

– de les condamner solidairement aux entiers dépens de l’instance.

Elle soutient pour l’essentiel que les attestations d’inventaire ont été signées par les co-gérants et leur sont donc parfaitement opposables, le compte général de dépôt après inventaire du 12 janvier 2016 (pièce n° 6) est signé et approuvé par les 2 cogérants, que l’ensemble des justificatifs des commandes et des recettes réalisées et reversées est fournie ainsi que les attestations successives de stocks, et qu’au vu de ces éléments qui ont un caractère contradictoire, le solde débiteur du compte général de dépôt s’établit à la somme de 31 143,70 euros en sorte que sa demande en paiement est justifiée.


Au terme de leurs conclusions notifiées le 20 mai 2021, Monsieur [X] [S] et Madame [R] [K] demandent à la cour:

-de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de Commerce de Toulouse le 22 septembre 2020

– de débouter la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de son action en paiement

-de la condamner aux entiers dépens ainsi qu’au paiement de la somme de 1500 € pour procédure abusive et injustifiée outre celle de 1500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile .

Ils soutiennent pour l’essentiel que les arrêtés de compte versés aux débats ne leur sont pas opposables en sorte que la créance n’est pas établie.

Il y a lieu de se reporter expressément aux conclusions susvisées pour plus ample informé sur les faits de la cause, moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile

L’ordonnance de clôture est en date du 11 avril 2022.


MOTIFS DE LA DECISION

La cour d’appel ne statue que sur les chefs du jugement qui lui sont expressément déférés.

A hauteur d’appel, le litige porte exclusivement sur la reddition des comptes du mandat confié aux cogérants et le bien-fondé de la réclamation de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE.

Les intimés contestent pour l’essentiel le caractère contradictoire des arrêtés de compte qui leur sont opposés faute de les avoir signés. Or ces arrêtés de compte comprennent en plus des états d’inventaire, des mouvements de caisse et de banque qu’ils n’ont pas acceptés en sorte que ces arrêtés qui servent de base à la demande, ne leur sont pas opposables.

La société DISTRIBUTION CASINO FRANCE soutient pour sa part que les inventaires de prise de possession et de sortie ont été régulièrement signés par les cogérants et reportés sur le compte général de dépôt des gérants et que les comptes y afférents leur ont été régulièrement notifiés, conformément à l’article 21 de l’Accord collectif national des maisons d’alimentation par un courrier leur ouvrant un délai de 15 jours pour les examiner et présenter, le cas échéant, leurs observations. À défaut d’avoir contesté ces états, la demande en paiement est fondée car elle repose sur l’arrêté de compte et le compte général de dépôt approuvé par les cogérants, les documents comptables mensuels qui leur ont été transmis et non contestés et enfin les inventaires contradictoires de prise de possession et de reprise de la supérette.

Selon le contrat , les cogérants de supérettes ne sont que dépositaires de la marchandise qui leur est confiée par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE en début de contrat puis, lors des commandes de réapprovisionnement passées en cours d’exécution du contrat.

Lors de la prise de possession d’une supérette, les cogérants signent un inventaire de prise de possession lequel correspond à l’état détaillé du recensement des marchandises en magasin en vue de la valorisation des existants réels ainsi constatés.

Il est établi en fin de mois un relevé de compte et un relevé détaillé des débits et des crédits qui est communiqué aux cogérants pour vérification. L’inventaire de fin de mois donne lieu à un arrêté de compte qui est ensuite reporté sur le compte général de dépôt des cogérants.

À la sortie, il est établi un inventaire de reprise qui fait apparaître soit un excédent soit un manque, par comparaison entre le stock de marchandises et d’emballage à l’entrée et à la sortie.

Les arrêtés de compte ne sont donc que la traduction comptable des constatations faites lors des différents inventaires de prise de possession et de reprise approuvés par les cogérants.

Le manquement est constitué par le fait pour le gérant de ne pas pouvoir présenter utilement les marchandises dont il est le simplement dépositaire en nature ou d’en restituer le prix de vente .

Selon l’article 5 du contrat intitulé «  Inventaires », un arrêté de compte est établi à la suite de chaque inventaire et les cogérants mandataires non-salariés disposent à partir de la réception de ce document , d’un délai de 15 jours pour l’examiner et présenter, le cas échéant, leurs observations. À défaut les cogérants mandataires non-salariés sont réputés avoir accepté le résultat de l’inventaire.

Dans ces conditions,il importe peu que l’arrêté de compte ne soit pas signé par ces derniers dès lors qu’il leur a été envoyé pour vérification, qu’ils disposaient d’un délai contractuel de 15 jours pour le contester et ne l’ont pas fait.

En l’espèce les différents inventaires d’entrée et de sortie sont produits aux débats et ont tous été signés par les époux [S] qui ont certifié leur exactitude.Ils leur sont donc opposables.

Pour la supérette E 1209, ils ont reconnu avoir vérifié le compte général de dépôt qu’ils ont signé le 11 mars 2016 (pièce numéro 6). Par contre ils n’ont pas signé les arrêtés de compte suivants (pour la gestion des magasins E0623, E3428, E5067,E1209 ) qui leur ont été périodiquement communiqués ainsi qu’il est justifié aux débats, la lettre de communication rappelant qu’en cas de contestation,ils devaient, au plus tard dans les 15 jours qui suivent la réception , établir une lettre de réclamation en y joignant les justificatifs concernés.

Des arrêtés de compte périodiques ont été envoyés à titre documentaire aux cogérants pour qu’ils puissent le vérifier, puis les résultats ont été reportés sur un compte général de dépôt qui a été soumis à leur approbation et qu’ils n’ont pas contesté dans un délai de 15 jours.

Il sera constaté que les intimés qui n’ont pas repris leurs activités à la suite de l’inventaire du magasin E 1209 (Leader Price) du 24 octobre 2016 faisant ressortir un manque de marchandises de – 27 703 € (pièce numéro 54) et n’ont nullement contesté le montant de la créance dans leur courrier en réponse à la mise en demeure du 9 juin 2017.

Dans le cours de la procédure, ils n’ont produit aucun élément à l’appui de leur contestation de nature à établir le mal fondé des imputations réalisées par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE, notamment pour les mouvements bancaires.

Faute pour eux de rapporter la preuve que le compte général de dépôt fourni par la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE comporterait des erreurs comptables ou aurait déduit des valeurs qui en réalité auraient dû être représentées, il y a lieu d’infirmer la décision déférée, la preuve étant rapportée par la société appelante du bien fondé de sa créance tant en son principe qu’en son montant par les justificatifs produits.

Compte tenu de la disparité existant dans la situation économique des parties, il n’apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société appelante partie des frais irrépétibles qu’elle a exposés pour assurer sa représentation en justice.

Par contre la partie qui succombe doit supporter les entiers dépens de l’instance.


PAR CES MOTIFS

La cour statuant après en avoir délibéré,

Infirme le jugement du tribunal de Commerce de Toulouse en date du 22 septembre 2022 en ce qu’il a rejeté la demande en paiement de la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE et l’a condamnée au dépens,

Et statuant à nouveau de ces chefs,

Condamne solidairement Monsieur [X] [S] et Madame [R] [K] épouse [S] à payer à la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE la somme de 31 143,70 euros augmentée des intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 9 juin 2017 ,

Dit que ces sommes se capitaliseront par année entière à compter de la présente décision,

Rejette l’ensemble des demandes formées par Monsieur [X] [S] et Madame [R] [K] épouse [S],

Déboute la société DISTRIBUTION CASINO FRANCE de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ,

Condamne solidairement Monsieur [S] et Madame [K] aux entiers dépens de l’instance.

Le greffier, La présidente,

.

 


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