Reddition des comptes : 15 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 19/11194

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Reddition des comptes : 15 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 19/11194
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15 février 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
19/11194

Pôle 3 – Chambre 1

Texte de la décision


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 3 – Chambre 1

ARRET DU 15 FEVRIER 2023

(n° 2023/ , 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/11194 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CABPM

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Avril 2019 – Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 17/03769

APPELANTS

Monsieur [R] [MN]

né le 21 Décembre 1957 à [Localité 28] (61)

[Adresse 4]

Madame [O] [MN] épouse [E]

née le 04 Janvier 1959 à [Localité 34] (61)

[Adresse 26]

Monsieur [N] [MN]

né le 24 Juin 1960 à [Localité 34] (61)

[Adresse 23]

Monsieur [H] [MN]

né le 14 Août 1961 à [Localité 19] (31)

[Adresse 14]

Madame [V] [MN] épouse [WS]

née le 22 Juillet 1962 à [Localité 34] (61)

#[Adresse 8]

Madame [ZR] [MN]

née le 25 Octobre 1966 à [Localité 33] (61)

[Adresse 3]

représentés et plaidant par Me André ROULLEAUX DUGAGE, avocat au barreau de PARIS, toque : C1139

INTIMES

Monsieur [Z] [MN]

né le 09 Février 1934 à [Localité 18] (61)

‘[Adresse 25]

Madame [PY] [MN] veuve [W]

née le 28 Janvier 1926 à [Localité 18] (61), décédée le 07 Janvier 2020 à [Localité 30] (75)

[Adresse 9]

Madame [KP] [MN] veuve [GU]

née le 02 Mars 1929 à [Localité 18] (61)

[Adresse 13]

Madame [F] [MN] veuve [A]

née le 03 Novembre 1930 à [Localité 18] (61)

[Adresse 15]

Madame [SK] [MN] veuve [RJ]

née le 23 Juin 1932 à [Localité 18] (61)

[Adresse 17]

Monsieur [HF] [MN]

né le 04 Septembre 1937 à [Localité 18] (61)

[Adresse 6]

Monsieur [DJ] [MN]

né le 18 Octobre 1963 à [Localité 32] (61)

[Adresse 11]

Madame [P] [MN] épouse [D]

née le 22 Novembre 1974 à [Localité 30]

[Adresse 17]

Monsieur [X] [MN]

né le 14 Juin 1973 à [Localité 30]

[Adresse 17]

Madame [I] [MN]

née le 16 Janvier 1978 à [Localité 30]

[Adresse 12]

Madame [UI] [JD] veuve [MN]

née le 22 Juillet 1942 à [Localité 29] (ALGERIE)

[Adresse 1]

représentés par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

ayant pour avocat plaidant Me Mathieu ROGER-CAREL, avocat au barreau de PARIS, toque : D901

Madame [B] [MN], assignée par acte d’huissier du 10.09.2019 remis à étude

[Adresse 2]

PARTIES INTERVENANTES

Madame [WG] [A]

née le 24 Janvier 1953 à [Localité 22] (GUINEE)

[Adresse 10]

Monsieur [T] [A]

né le 22 Septembre 1958 à [Localité 36] (65)

[Adresse 16]

Madame [S] [RJ] épouse [CK]

née le 26 Septembre 1963 à [Localité 35] (92)

[Adresse 7] (USA)

Madame [C] [RJ] épouse [G]

née le 20 Décembre 1971 à [Localité 35] (92)

[Adresse 27]

Madame [P] [MN] épouse [D]

née le 22 Novembre 1974 à [Localité 30]

[Adresse 17]

représentés par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

ayant pour avocat plaidant Me Mathieu ROGER-CAREL, avocat au barreau de PARIS, toque : D901

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 04 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Patricia GRASSO, Président

Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseiller

Mme Agnès MARCADE, Conseiller désigné par ordonnance du Premier Président de la Cour d’appel de Paris en vertu de l’article R 312-3 du code de l’organisation judiciaire pour compléter la chambre

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme [EW] [M] dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON

ARRET :

– rendu par défaut

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Patricia GRASSO, Président, et par Mme Emilie POMPON, Greffier.


EXPOSE DU LITIGE :

[L] [MN] et [OL] [J] se sont mariés en avril 1924 sous le régime contractuel de la communauté réduite aux acquêts.

[L] [MN] est décédé le 15 avril 1978, laissant pour lui succéder ses enfants et son épouse bénéficiaire de la donation de l’usufruit de l’universalité de son patrimoine selon acte authentique reçu par Me [U], notaire à [Localité 21], le 2 mai 1972.

[OL] [J], domiciliée à [Localité 30], est décédée le 14 août 2003 laissant pour lui succéder :

-ses filles : [PY], [KP], [F], [SK],

-ses fils [Z], [HF] et [FH],

-ses petits-enfants [R], [O], [H], [N], [V], [DJ], et [ZR], venant en représentation de son fils aîné [UU], prédécédé le 20 février 1992, ainsi que son arrière-petite-fille [B], venant en représentation de son petit-fils [K] fils de [UU].

[FH] [MN] est décédé le 20 juin 2011 laissant pour lui succéder :

-son épouse, Mme [UI] [JD],

-leurs enfants [P], [X] et [I] [MN].

Mme [UI] [JD], donataire de la plus forte quotité disponible entre époux, a opté pour un quart de la succession en pleine propriété et 3/4 en usufruit.

La succession de [OL] [J] se compose uniquement de liquidités dont le partage amiable n’a pu être réalisé en raison de la mésentente existant entre la branche aînée et les branches cadettes de la famille.

Par exploits des 15, 16, 17 et 20 février 2017, Mmes [PY], [KP], [F], [SK], [P], [I], et [UI] [MN] ainsi que MM. [Z], [HF], [DJ] et [X] [MN] ont assigné Mmes [O], [V], [ZR] et [B] [MN] et MM. [R], [N] et [H] [MN] aux fins d’ordonner le partage judiciaire de la succession de [OL] [J].

Par jugement du 11 avril 2019, le tribunal de grande instance de Paris a statué dans les termes suivants :

-dit recevable l’action en partage judiciaire de la succession de[OL]e [J],

-rejette la fin de non-recevoir formée par Mmes [PY], [KP], [F], [SK], [P], [I], et [UI] [MN] ainsi que MM. [Z] [HF], [DJ] et [X] [MN] tirée de la prescription de la demande de rapport de libéralités formée par Mmes [O], [V], [ZR] et [B] [MN] et MM. [R], [N] et [H] [MN],

-déboute Mmes [PY], [KP], [F], [SK], [P], [I], et [UI] [MN] ainsi que MM. [Z], [HF], [DJ] et [X] [MN] de leur demande que soient écartées les pièces n°21, 22, 24 et 25 produites par Mmes [O], [V], [ZR] et [B] [MN] et MM. [R], [N] et [H] [MN],

-ordonne comme suit le partage des liquidités et valeurs mobilières après réalisation, détenues sur le compte n°13.268 ouvert auprès de la banque Crédit Suisse et de celles consignées à la Caisse des dépôt et consignations à hauteur de :

‘ 1/8 ème pour Mme [PY] [MN], veuve [W],

‘ 1/8 ème pour Mme [KP] [MN], épouse [GU],

‘ 1/8 ème pour Mme [F] [MN], épouse [A],

‘ 1/8 ème pour Mme [SK] [MN], épouse [RJ],

‘ 1/8 ème pour M. [Z] [MN],

‘ 1/8 ème pour M. [HF] [MN],

‘ 1/64 ème pour M. [R] [MN],

‘ 1/64 ème pour Mme [O] [MN] épouse [Y],

‘ 1/64 ème pour M. [N] [MN],

‘ 1/64 ème pour M. [H] [MN],

‘ 1/64 ème pour Mme [V] [MN] épouse [WS],

‘ 1/64 ème pour M. [DJ] [MN],

‘ 1/64 ème pour Mme [ZR] [MN],

‘ 1/64 ème pour Mme [B] [MN],

‘ 1/8 ème pour l’indivision existant entre Mme [UI] [JD], Mme [P] [MN], M. [X] [MN] et Mme [I] [MN].

-dit en conséquence n’y avoir lieu à désignation d’un notaire et d’un juge commis,

-déboute Mmes [O], [V], [ZR] et [B] [MN] et MM. [R], [N] et [H] [MN] de leurs demandes formulées à l’encontre de MM. [Z], [HF] et [FH] [MN] et des ayant-droits de ce dernier outre Mme [KP] [MN] de rendre compte de leur gestion et de fournir les relevés récapitulatifs annuels du compte ouvert dans les livres du Crédit Suisse pour la période de 1978 jusqu’à la date de décès du titulaire du compte,

-déboute Mmes [O], [V], [ZR] et [B] [MN] et MM. [R], [N] et [H] [MN] de leur demande dirigée à l’encontre de M. [Z] [MN] en vue de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feue [OL] [MN] sur la totalité des parcelles de bois sis [Adresse 20] avec exploitation de coupes de bois et de droit de chasse attaché,

-déboute Mmes [O], [V], [ZR] et [B] [MN] et MM. [R], [N] et [H] [MN] de leur demande de rapport par M. [Z] [MN] des bénéfices perçus de cette exploitation depuis 1982,

-déboute Mmes [O], [V], [ZR] et [B] [MN] et MM. [R], [N] et [H] [MN] de leur demande dirigée à l’encontre de M. [HF] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feue [OL] [MN] sur l’exploitation du Domaine du Prieuré de Sainte,

-déboute Mmes [O], [V], [ZR] et [B] [MN] et MM. [R], [N] et [H] [MN] de leur demande de rapport par M. [HF] [MN] des bénéfices perçus de cette exploitation depuis 1982,

-déboute Mmes [O], [V], [ZR] et [B] [MN] et MM. [R], [N] et [H] [MN] de leur demande dirigée à l’encontre de Mmes [KP], [SK] et [F] [MN] ainsi que des consorts [FH] [MN] de rendre compte des conditions d’acquisition de 12 places de parking dans l’immeuble mitoyen du [Adresse 17],

-déboute Mmes [O], [V], [ZR] et [B] [MN] et MM. [R], [N] et [H] [MN] de leur demande de rapport par Mmes [KP], [SK] et [F] [MN], Mme [UI] [JD] et Mmes [P] et [I] [MN] et M. [X] [MN] de la somme de 152 450 euros payés à leur profit par feue [OL] [MN] lors de l’acquisition en 1996 desdites places de parking,

-déboute les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles,

-ordonne l’emploi des dépens en frais généraux de partage,

-dit qu’ils seront supportés par les copartageants dans la proportion de leurs parts dans l’indivision,

-ordonne l’exécution provisoire.

MM. [R], [N], [H] [MN] et Mmes [O], [V], [ZR] [MN] ont interjeté appel de cette décision par déclaration du 28 mai 2019.

[PY] [MN], intimée, est décédée le 7 janvier 2020.



Par conclusions du 11 juin 2021, M. [T] [A], Mme [S] [RJ], Mme [C] [RJ], Mme [WG] [A] et Mme [P] [MN], déclarant agir en qualité de légataires universels de [PY] [MN], sont intervenus volontairement à la procédure d’appel en sollicitant qu’il leur soit donné acte de leur état civil.

Les appelants ont saisi le conseiller de la mise en état d’un incident aux fins principalement de dire irrégulières l’intervention volontaire des « consorts [PY] [MN] » à défaut de production de testament en l’absence d’héritiers présomptifs et de déclaration de succession s’y rapportant.

Par ordonnance sur incident du 7 décembre 2021, le conseiller de la mise en état a notamment :

-rejeté la demande de MM. [R], [N] et [H] [MN], et Mmes [O], [V] et [ZR] [MN] tendant à voir dire irrégulière l’intervention volontaire de M. [T] [A], Mme [S] [RJ], Mme [C] [RJ], Mme [WG] [A] et Mme [P] [MN],

-constaté la reprise de l’instance au fond,

-rejeté la demande de retrait du rôle formée par MM. [R], [N] et [H] [MN], et Mmes [O], [V] et [ZR] [MN].

MM. [R], [N] et [H] [MN], et Mmes [O], [V] et [ZR] [MN] ont déféré cette ordonnance par requête du 22 décembre 2021.

Par arrêt du 20 avril 2022, la cour d’appel de Paris a confirmé l’ordonnance du 7 décembre 2021.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées le 31 décembre 2022, les appelants demandent à la cour de :

-déclarer les consorts [UU] [MN] ci-après Mmes [O], [V] et [ZR] [MN], et MM. [R], [N] et [H] [MN] recevables et bien fondés en leur appel du jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 11 avril 2019,

-l’infirmer en ses dispositions contraires au dispositif requis,

-ordonner à MM [Z], [KP], [HF] [MN]  et aux ayants-droits de feu [FH] [MN], comme ayant eu procuration pour gérer le compte Crédit Suisse de feue [OL] [MN] de rendre compte de leur gestion et de fournir les relevés récapitulatifs annuels dudit compte pour la période de 1978 jusqu’à la date de décès du titulaire du compte,

-ordonner à M. [Z] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feue [OL] [MN] portant sur la totalité des parcelles de bois sis [Adresse 20] avec exploitation de coupes de bois et de droits de chasse attachés, et de faire rapport à la succession des bénéfices qu’il a perçu de son exploitation depuis 1982,

-ordonner à M. [HF] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feu [OL] [MN] portant notamment sur les immeubles [Adresse 17] et [Adresse 5] et des avantages financiers alors perçus et sur l’exploitation du Domaine du Prieuré de Sainte Gauburge avec droits locatifs attachés du fait de sa prise en location par le Conseil Général de l’Orne, et de faire rapport à la succession des bénéfices qu’il a perçu de son exploitation depuis 1982,

-ordonner à Mmes [KP], [SK] et [F] [MN] ainsi qu’aux consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des conditions d’acquisition et d’exploitation locative de 12 places de parking dans l’immeuble mitoyen du [Adresse 17] et les condamner d’ores et déjà au rapport de la somme de 152 450 euros payés à leur profit par feue [OL] [MN] lors de l’acquisition en 1996 à leur profit direct desdites places de parking, outre des bénéfices tirés de leur exploitation locative,

-ordonner à Mmes [KP] [MN], [RJ] et [A] ainsi qu’aux consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des avantages dont ils ont bénéficié l’occasion de leur occupation de l’immeuble [Adresse 17] et des bénéfices qu’ils ont tirés à l’occasion de leur sous location,

-dire n’y avoir lieu à répartition de fonds tant que les redditions de comptes précités ne seront pas intervenues,

-ordonner en tant que besoin une expertise comptable avec mission d’usage à l’effet de liquider les avantages précités perçus par les consorts [Z] [MN] (sic) et surseoir à statuer pour le surplus,

-débouter les consorts [Z] [MN] (sic) de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

-les condamner solidairement à payer aux consorts [MN] (sic sous-entendu [UU] [MN]) une somme de 5 000 euros chacun sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d’incident, de première instance et d’exécution de la présente décision, dont distraction pour ceux d’instance au profit de Me André Roulleaux Dugage, avocat aux offres de droit en application de l’article 699 du même code et à employer en frais de partage.

Aux termes de leurs conclusions notifiées le 10 juin 2021, MM. [Z], [T], [HF], [DJ], [X] [MN] et Mmes [WG], [S], [C], [P], [KP], [F], [SK], [P], [I] [MN] et Mme [UI] [JD] veuve [MN], intimés et intervenants volontaires, demandent à la cour de :

-confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 11 avril 2019 dans toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir des concluants tirée de la prescription de la demande de rapport de libéralités formée par les appelants,

-recevoir et dire bien fondée l’intervention volontaire en qualité de légataires universels de [PY] [MN] de :

*M. [T] [A] à hauteur de 1/4 de la succession de [PY] [MN],

*Mme [WG] [A] à hauteur de 3/16e de la succession de [PY] [MN],

*Mme [S] [RJ] à hauteur de 3/16e de la succession de [PY] [MN],

*Mme [C] [RJ] à hauteur de 3/16e de la succession de [PY] [MN],

*Mme [P] [MN] à hauteur de 3/16e de la succession de [PY] [MN],

et statuant de nouveau,

-dire et juger les demandes de rapport de libéralités formées par les appelants prescrites,

-déclarer irrecevables les demandes nouvelles formulées par M. [R] [MN], Mme [O] [Y], M. [N] [MN], M. [H] [MN], Mme [V] [WS] et Mme [ZR] [MN] tendant à faire :

* « ordonner à M. [HF] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feu [OL] [MN] portant notamment sur les immeubles [Adresse 17] et [Adresse 5] et des avantages financiers alors perçus »,

* « ordonner à Mmes [KP], [SK] et [F] [MN] ainsi qu’aux Consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des conditions [‘] d’exploitation locative de 12 places de parking dans l’immeuble mitoyen du [Adresse 17] et les condamner d’ores et déjà au rapport [‘] des bénéfices tirés de leur exploitation locative »,

* « ordonner à Mmes [KP] [MN], [RJ] et [A] ainsi qu’aux Consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des avantages dont ils ont bénéficié à l’occasion de leur occupation de l’immeuble [Adresse 17] et des bénéfices qu’ils ont tiré à l’occasion de leur sous-location »,

-débouter M. [R] [MN], Mme [O] [Y], M. [N] [MN], M. [H] [MN], Mme [V] [WS] et Mme [ZR] [MN] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

-condamner en cause d’appel solidairement M. [R] [MN], Mme [O] [Y], M. [N] [MN], M. [H] [MN], Mme [V] [WS], Mme [ZR] [MN] et Mme [B] [MN] à verser à chacun des requérants la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Mme [B] [MN], intimée, n’a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des moyens développés par les parties au soutien de leurs prétentions, il sera renvoyé à leurs écritures susvisées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 décembre 2022.

L’affaire a été appelée à l’audience du 4 janvier 2023.


MOTIFS DE LA DECISION

L’actif de la succession se compose des avoirs détenus sur un compte bancaire suisse, non porté à l’actif de la succession de la défunte car occulte, et de l’actif détenu entre les mains de Maître [U], notaire, se composant de la somme de 40 884,42 euros et ayant fait l’objet d’un projet de partage établi par le notaire en 2017 pour 38 184,42 euros. Cette somme a été consignée à la Caisse des Dépôts et Consignations.

Les appelants soutiennent que le partage ne pourra intervenir tant qu’il n’aura pas été statué sur leurs demandes :

– 1/ de reddition des comptes par les titulaires de procurations sur le compte suisse auxquels il appartiendra de fournir les récapitulatifs annuels du compte depuis 1978, date du décès de [L] [MN],

– 2/ de reddition de la gestion par M. [Z] [MN] des droits d’usufruit de la défunte sur la totalité des parcelles de bois sis à [Adresse 20] et à Gemages en vue du rapport à la succession des bénéfices perçus de son exploitation depuis 1982,

– 3/ de reddition par M. [HF] [MN] de sa gestion des droits d’usufruit de la défunte au titre de l’exploitation du domaine du Prieuré de Sainte en vue du rapport à la succession des bénéfices perçus de son exploitation depuis 1982,

– 4/ de rendu compte par Mmes [KP], [F] et [SK] [MN] et les consorts [FH] [MN] des conditions d’acquisition de 12 places de parking dans l’immeuble mitoyen du [Adresse 17] et du rapport de la somme de 152 450 euros payée par la défunte lors de leur acquisition en 1996.

Sur l’irrecevabilité des demandes nouvelles formulées par les appelants

Les intimés soulèvent l’irrecevabilité des demandes qu’ils considèrent comme nouvelles en appel à savoir :

– « Ordonner à M. [HF] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feu (sic) [OL] [MN] portant notamment sur les immeubles [Adresse 17] et [Adresse 5] et des avantages financiers alors perçus » ;

– « Ordonner à Mesdames [KP], [SK] et [F] [MN] ainsi qu’aux Consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des conditions [‘] d’exploitation locative de 12 places de parking dans l’immeuble mitoyen du [Adresse 17] et les condamner d’ores et déjà au rapport [‘] des bénéfices tirés de leur exploitation locative » ;

– « Ordonner à Mesdames [KP] [MN], [RJ] et [A] ainsi qu’aux Consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des avantages dont ils ont bénéficié à l’occasion de leur occupation de l’immeuble [Adresse 17] et des bénéfices qu’ils ont tiré à l’occasion de leur sous-location ».

Ils font valoir que l’examen des dernières conclusions de première instance des appelants et du jugement permet de constater que ces demandes sont nouvelles.

Cependant, si l’article 564 du code de procédure civile dispose que « les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait », en matière de liquidation et partage, les parties sont respectivement demanderesses et défenderesses, de telle sorte que toute demande doit être considérée comme une défense à la prétention adverse.

Par suite, ces demandes seront jugées recevables.

Sur la demande de reddition de compte

Il n’est pas contesté que M. [Z] [MN] a reçu procuration sur le compte suisse dès 1978 de même que ses frères et s’urs par la suite.

Il résulte de l’article 1993 du code civil que tout mandataire doit rendre compte de sa gestion et que le titulaire d’une procuration sur le compte bancaire d’une personne décédée doit reddition de compte à ses héritiers ; s’il ne peut prouver que les sommes correspondant à des dépenses effectuées par ses soins ont été réalisées dans l’intérêt du défunt, il en doit alors rapport à la succession.

Toutefois, il appartient préalablement aux héritiers de prouver l’existence de prélèvements de fonds et de dépenses litigieuses effectuées par le mandataire.

En l’espèce, le compte est subdivisé en 5 sous-comptes en monnaies différentes :

– le sous-compte n°13268-41 en francs suisses,

– le sous-compte n°13268-42 en dollars US,

– le sous-compte n°13268-42-4 en yen,

– le sous-compte n°13268-42-5 en livres Sterling,

-le sous-compte n°13268-42-6 en euros.

Il s’agissait d’un compte occulte pour lequel la situation a depuis été régularisée auprès des services fiscaux au regard de laquelle le compte a fait l’objet d’un partage.

Ces circonstances administratives ne modifient pas le fait que les fonds détenus dépendent de la succession non encore effectivement partagée puisque la banque a refusé de procéder au partage des avoirs, ni même à leur rapatriement en [V], à défaut d’accord de tous les indivisaires.

MM. [Z], [HF] et [FH] [MN] et Mme [KP] [MN] produisent les relevés des sous- comptes pour les années 2003 à 2017 dont il résulte, ainsi que l’ont relevé les premiers juges, qu’aucun retrait d’argent ni transfert vers un compte extérieur n’a été réalisé.

Le compte litigieux est un « compte de transaction pour mandat », entièrement géré par la banque conformément à un mandat de gestion conclu avec le déposant aux termes duquel la banque réalisait seule toutes les opérations financières de placements sur le compte dans l’intérêt du déposant, contre une commission trimestrielle en rémunération de son mandat et les seules opérations qui apparaissent en débit sont des opérations financières réalisées par la banque (achat de titre, émission de parts de fonds, opération de change, etc…), des transferts entre les différents sous-comptes et des frais de gestion et de fonctionnement du compte.

La banque a refusé aux consorts [Z] [MN] la communication des relevés pour la période de 1978 à 2003, antérieure au décès de [OL] [J], notamment en raison de l’ancienneté des pièces demandées.

Il appartient aux appelants, en application de l’article 9 du code de procédure civile, de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de leur prétention et non aux intimés d’apporter une preuve négative impossible.

Or, aucune preuve n’étant produite d’une utilisation du compte et du prélèvement de fonds par les titulaires des procurations, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande.

Sur les donations et avantages indirects

La défunte a consenti à ses enfants une donation-partage reçue le 17 mai 1982, rectifiée par acte du 27 novembre suivant, aux termes de laquelle ont été attribués :

– à [PY], le montant de son rapport de dot outre 2.766,22/10.000èmes indivis de l’immeuble situé [Adresse 5],

– à [UU], le montant de son rapport de dot, le capital par lui remboursés à ses parents, une parcelle de pré à [Localité 32] dans l’Orne (15 hectares), outre 462,96/10.000èmes indivis de l’immeuble situé [Adresse 5],

– à [KP], la ferme du Memnard et les lots n° 9,10, 11,15 et 16, de l’immeuble situé [Adresse 17] outre 1080,77/10.00èmes indivis de l’immeuble situé [Adresse 5],

– à [F], le montant de son rapport de dot comprenant à [Adresse 24], les lots n° 1, 8, 17, 19, 25 et 27 de l’immeuble [Adresse 17] outre 2273,72/10.000èmes indivis de l’immeuble situé [Adresse 5],

– à [SK], le montant de son rapport de dot, les lots n° 2, 6, 7, 14, 18 et 26 de l’immeuble situé [Adresse 17], outre 1428,57/10.000èmes indivis de l’immeuble situé [Adresse 5],

– à [Z], après échange avec sa s’ur [F] (cf. acte rectificatif du 27 novembre 1982), la totalité des parcelles de bois sis [Adresse 20] pour une surface de 100 hectares environ, libre de toute charge et occupation, outre 1058,47/10.000èmes indivis de l’immeuble situé [Adresse 5],

– à [HF], le montant de son rapport de dot incluant l’important domaine du Prieuré de Sainte Gauburge, les lots n° 24, 28, 29 et 30 de l’immeuble situé [Adresse 17], outre 186,55/10.000èmes indivis de l’immeuble situé [Adresse 5],

– à [FH], le montant de son rapport de dot, les lots n° 3, 4, 5, 12, 13, 20, 21, 22, 31 et 32 de l’immeuble situé [Adresse 17] outre 1422,74/10.000èmes indivis de l’immeuble situé [Adresse 5].

Les appelants ne contestent pas la donation-partage de 1982 mais estiment que la gestion particulière des intérêts de l’usufruitière par ses enfants s’est avérée très avantageuse pour certains d’entre eux et constituerait des donations ou avantages déguisés que ceux-ci doivent rapporter à la succession.

Il demandent en conséquence que soit ordonné à :

– M. [Z] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feue [OL] [MN] portant sur la totalité des parcelles de bois sis [Adresse 20] avec exploitation de coupes de bois et de droits de chasse attachés, et de faire rapport à la succession des bénéfices qu’il a perçu de son exploitation depuis 1982,

– M. [HF] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feue [OL] [MN] portant notamment sur les immeubles [Adresse 17] et [Adresse 5] et des avantages financiers alors perçus et sur l’exploitation du Domaine du Prieuré de Sainte Gauburge avec droits locatifs attachés du fait de sa prise en location par le Conseil Général de l’Orne, et de faire rapport à la succession des bénéfices qu’il a perçu de son exploitation depuis 1982,

– Mmes [KP], [SK] et [F] [MN] ainsi qu’aux consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des conditions d’acquisition et d’exploitation locative de 12 places de parking dans l’immeuble mitoyen du [Adresse 17] et les condamner d’ores et déjà au rapport de la somme de 152 450 euros payés à leur profit par feue [OL] [MN] lors de l’acquisition en 1996 à leur profit direct desdites places de parking, outre des bénéfices tirés de leur exploitation locative,

– Mmes [KP] [MN], [RJ] et [A] ainsi qu’aux consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des avantages dont ils ont bénéficié à l’occasion de leur occupation de l’immeuble [Adresse 17] et des bénéfices qu’ils ont tirés à l’occasion de leur sous-location.

Les intimés font valoir que les demandes de reddition des comptes au titre de la donation-partage de 1982 sont couvertes par la prescription quinquennale prévue à l’article 2224 du code civil, à tout le moins à compter du décès de [OL] [J] en 2003, soit depuis 2008.

Les appelants n’ont pas répondu sur ce point.

Parce que le rapport successoral prévu par l’article 843 du code civil est une opération de partage qui ne peut se prescrire avant la clôture des opérations de partage, le tribunal, pour juger la demande non prescrite, a estimé que les demandes de reddition de comptes formulées par les appelants avaient pour objectif d’établir l’existence de donations indirectes ou déguisées afin d’en obtenir le rapport et que le délai d’une demande de rapport, en ce qu’elle s’inscrit dans les opérations de partage et tend à en assurer l’égalité, a pour point de départ la clôture des opérations de comptes, liquidation et partage.

Cependant, les appelants soutiennent en substance que les bénéficiaires de la donation-partage n’auraient pas rempli leur mère de ses droits d’usufruit, soit en conservant les fruits qui étaient dus à l’usufruitière, soit en gérant mal les biens de sorte que ceux-ci n’auraient pas suffisamment produit de fruits.

Ils supposent ainsi l’existence de dettes contractées par les nus-propriétaires à l’égard de l’usufruitière, dont celle-ci, dans une intention libérale, n’aurait pas réclamé le paiement.

Or seule une dette existante peut faire l’objet d’une libéralité à charge pour les demandeurs de démontrer l’intention libérale et l’appauvrissement du défunt.

En conséquence, pour apprécier si la dette est ou non prescrite, il y a lieu de se placer au jour de l’ouverture de la succession.

En l’espèce la demande portée par les appelants tend à voir faire les comptes entre les parties sur les 40 dernières années et la demande de reddition de comptes destinée à établir une dette ayant pu donner lieu à une donation indirecte ou déguisée.

Or est prescrite tout demande portant sur des dettes ayant pu naître avant le 14 août 1998, soit 5 ans avant le décès de [OL] [J].

Si une défense au fond, au sens de l’article 71 du code de procédure civile, c’est-à-dire un moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l’adversaire, échappe à la prescription, il est souligné qu’en l’espèce la demande portée par les appelants défendeurs en première instance à la demande de partage est une demande reconventionnelle.

Par infirmation du jugement, les demandes portant sur la période antérieure au 14 août 1998 seront donc déclarées irrecevables comme prescrites.

*Sur les demandes de rapport

-les demandes relatives aux 12 emplacements de parking

Les appelants demandent à la cour d’ordonner à Mmes [KP], [SK] et [F] [MN] ainsi qu’aux consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des conditions d’acquisition et d’exploitation locative de 12 places de parking dans l’immeuble mitoyen du [Adresse 17] et les condamner d’ores et déjà au rapport de la somme de 152 450 euros payés à leur profit par feue [OL] [MN] lors de l’acquisition en 1996 à leur profit direct desdites places de parking, outre des bénéfices tirés de leur exploitation locative.

Ils exposent que M. [HF] [MN] a cédé courant 1989 ses lots en nue-propriété au promoteur SPI les Jardins de Linné, la défunte abandonnant alors ses droits d’usufruit dans des conditions inconnues ; que le programme ayant été retardé puis cédé à un autre promoteur, la SARL les Jardins de Linné, les parties se sont à nouveau rapprochées et que la copropriété a acquis 12 places de parking souterrain dans l’immeuble mitoyen nouvellement promu pour un prix de 1.000.000 francs, soit 152.450 euros, payé par la défunte, copropriétaire unique en usufruit ; que M. [HF] [MN] a non seulement encaissé un prix de vente appréciable mais a fait payer par sa mère des places de parking au profit de ses frères et s’urs occupants l’immeuble.

Ils font ainsi valoir :

-d’une part que M. [HF] [MN] doit rendre compte des conditions dans lesquelles il a cédé courant 1989 les droits d’usufruit de sa mère au promoteur SPI les Jardins de Linné,

-d’autre part que les nus-propriétaires occupant l’immeuble de la [Adresse 17] ont été bénéficiaires par syndicat de copropriétaires interposé de l’attribution courant 1996 de 12 places de parking pour un prix d’origine de 152.450 euros payé par la défunte ce qui constitue une donation déguisée rapportable et qu’ils doivent incidemment rendre compte des bénéfices locatifs réalisés et avantages personnels procurés à eux même à partir de ces places de parking.

La date des faits allégué étant 1989 et 1996, la demande est irrecevable comme prescrite.

-la demande de rapport au titre des parcelles de [Adresse 20]

Il est demandé à la cour d’ordonner à M. [Z] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feue [OL] [MN] portant sur la totalité des parcelles de bois sises à [Localité 31] avec exploitation de coupes de bois et de droits de chasse attachés, et de faire rapport à la succession des bénéfices qu’il a perçu de son exploitation depuis 1982.

Selon les appelants, ces biens ont été attribués à M. [Z] [MN] et en sa qualité d’usufruitière, la défunte devait bénéficier des droits de chasse et d’exploitation forestière de sorte que M. [Z] [MN] était mandataire de fait et doit rendre compte de sa gestion.

Ils affirment que M. [Z] [MN] a été mandataire de fait pour gérer les tailles et coupes ainsi que les droits de chasse s’y rapportant parce qu’il habite à côté et qu’il serait « évident » que les revenus de cet important élément de patrimoine ont été perçus par son gestionnaire et que, d’un commun accord entre eux, l’usufruitière n’en a jamais bénéficié.

Seuls les droits de chasse et d’exploitation forestière pour la période du 14 août 1998 au 14 août 2003 peuvent être ici examinés.

L’article 1985 du code civil prévoit que  « le mandat peut être donné par acte authentique ou par acte sous seing privé, même par lettre. Il peut aussi être donné verbalement, mais la preuve testimoniale n’en est reçue que conformément au titre : Des contrats ou des obligations conventionnelles en général. »

La preuve du mandat, même verbal, ne peut être donc reçue que conformément aux règles générales sur la preuve des conventions.

S’il résulte de l’état de notaire que l’usufruitière n’a rien perçu, c’est à juste titre que pour rejeter la demande, le tribunal a estimé que la preuve n’était pas rapportée du mandat évoqué ainsi que d’une exploitation et des revenus qui en résultaient.

– le rapport des libéralités et avantages au titre de l’immeuble de la [Adresse 17]

Il est demandé à la cour d’ordonner à M. [HF] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feue [OL] [MN] portant notamment sur les immeubles [Adresse 17] et [Adresse 5] et des avantages financiers alors perçus.

Les appelants soutiennent que les donataires indivis en nue-propriété de l’immeuble de la [Adresse 17] ont bénéficié d’avantages indirects rapportables en ce que :

– plusieurs appartements de cet immeuble, géré par l’administrateur de biens Choquet Seignot, leur ont été loués moyennant des sous-loyers non indexés et devenus au fil du temps parfaitement dérisoires : 800 euros par trimestre pour un 100 m² dans un immeuble parisien de bon standing équivalent à une occupation gratuite,

– l’usufruitière acquittait l’intégralité des impôts locaux,

– elle a supporté la dépense de travaux :

‘ pour une somme de 3.365.697 francs soit 513 097,20 euros pour la période 1994-1999,

‘ pour une somme de 45 496,52 euros + 54 215,03 soit 99 711,55 euros sur la période 2001-2002, soit une somme totale de 612.808 euros qui n’aurait jamais dû, en l’état des conventions passées avec les occupants et des dispositions de l’article 606 du code civil, être imputée sur le compte de l’usufruitière.
Il déduisent l’intention libérale de la défunte du caractère manifestement symbolique des loyers demandés et estiment qu’il existe un déficit global de quasiment 6 millions d’euros au détriment de la succession de l’usufruitière au profit des occupants et qu’une expertise doit être réalisée pour évaluer les avantages perçus.

Seuls la période du 14 août 1998 au 14 août 2003 pouvant être ici encore examinée, c’est à juste titre que pour rejeter les demande, les premiers juges ont relevé que la demande de rapport n’est pas précisément chiffrée mais simplement évaluée à 6 millions d’euros et que les pièces produites démontraient en réalité que les loyers pratiqués pour les membres de la famille n’étaient pas manifestement sous-évalués au regard des loyers appliqués aux autres locataires de l’immeuble et n’avait pas comme prétendu un caractère purement symbolique.

S’agissant des travaux réalisés , ni leur date précise, ni leur réalité en l’absence de facture, ni l’auteur du paiement de leur prix ne sont établis.

-le rapport des revenus des 109 hectares de parcelles de bois de Gemages et le Domaine du prieuré de Sainte Gauburge donnés à MM. [HF] et [Z] [MN]

Les appelants demandent à la cour d’ordonner à M. [HF] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feue [OL] [MN] portant sur l’exploitation du Domaine du Prieuré de Sainte Gauburge avec droits locatifs attachés du fait de sa prise en location par le Conseil Général de l’Orne courant 1989, et de faire rapport à la succession des bénéfices qu’il a perçu de son exploitation depuis 1982,

Ils demandent encore que sommation soit faite à M. [HF] [MN] de rendre compte de cette gestion car il ne ressort pas du projet d’état liquidatif de Me [U] que la défunte en ait tiré profit.

Ils émettent la supposition que les revenus de ces deux importants éléments de patrimoine ont été perçus par leurs gestionnaires respectifs, à savoir M. [Z] [MN] et M. [HF] [MN] et que l’usufruitière n’en a jamais bénéficié.

En présence de simples allégations sans production d’aucune pièce probante pour établir la réalité de la gestion et des bénéfices prétendument perçus pour la période du 14 août 1998 au 14 août 2003, la demande sera rejetée.

Force est de constater que les appelants qui, en application de l’article 9 du code de procédure civile, doivent prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de leurs prétentions, procèdent par voie d’affirmations, voire de suppositions et demandent finalement à la partie adverse de justifier du bien fondé de leurs soupçons, manquent à rapporter la preuve du moindre fait allégué et font néanmoins grief au tribunal d’avoir refusé les opérations sollicitées et d’avoir voulu « évacuer le dossier », alors que celui-ci, puisqu’il avait les moyens de le faire, a procédé au partage pour mettre fin au litige.

Par suite, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté l’ensemble des demandes des appelants.

Sur les demandes accessoires

L’équité commande de faire droit à la demande des intimés présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ; les appelants sont condamnés à leur verser à ce titre la somme fixée au dispositif de la présente décision.

Partie perdante, les appelants ne sauraient prétendre à l’allocation de frais irrépétibles et doivent supporter les dépens.


PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement par défaut et en dernier ressort,

Déclare recevables les demandes formulées par les appelants tendant à voir :

-ordonner à M. [HF] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feue [OL] [MN] portant notamment sur les immeubles [Adresse 17] et [Adresse 5] et des avantages financiers alors perçus et sur l’exploitation du Domaine du Prieuré de Sainte Gauburge avec droits locatifs attachés du fait de sa prise en location par le Conseil Général de l’Orne, et de faire rapport à la succession des bénéfices qu’il a perçu de son exploitation depuis 1982,

-ordonner à Mmes [KP], [SK] et [F] [MN] ainsi qu’aux consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des conditions d’acquisition et d’exploitation locative de 12 places de parking dans l’immeuble mitoyen du [Adresse 17] et les condamner d’ores et déjà au rapport de la somme de 152 450 euros payés à leur profit par feue [OL] [MN] lors de l’acquisition en 1996 à leur profit direct desdites places de parking, outre des bénéfices tirés de leur exploitation locative,

-ordonner à Mmes [KP] [MN], [RJ] et [A] ainsi qu’aux consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des avantages dont ils ont bénéficié l’occasion de leur occupation de l’immeuble [Adresse 17] et des bénéfices qu’ils ont tirés à l’occasion de leur sous location ;

Infirme le jugement en ce qu’il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de la demande de rapport de libéralités formée par les appelants ;

Y substituant,

Déclare prescrites, pour la période antérieure au 14 août 1998, les demandes formées par M. [R] [MN], Mme [O] [Y], M. [N] [MN], M. [H] [MN], Mme [V] [WS] et Mme [ZR] [MN] tendant à voir :

-ordonner à M. [Z] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feue [OL] [MN] portant sur la totalité des parcelles de bois sis [Adresse 20] avec exploitation de coupes de bois et de droits de chasse attachés, et de faire rapport à la succession des bénéfices qu’il a perçu de son exploitation depuis 1982,

-ordonner à M. [HF] [MN] de rendre compte de sa gestion des droits d’usufruit de feue [OL] [MN] portant notamment sur les immeubles [Adresse 17] et [Adresse 5] et des avantages financiers alors perçus et sur l’exploitation du Domaine du Prieuré de Sainte Gauburge avec droits locatifs attachés du fait de sa prise en location par le Conseil Général de l’Orne, et de faire rapport à la succession des bénéfices qu’il a perçu de son exploitation depuis 1982,

-ordonner à Mmes [KP], [SK] et [F] [MN] ainsi qu’aux consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des conditions d’acquisition et d’exploitation locative de 12 places de parking dans l’immeuble mitoyen du [Adresse 17] et les condamner d’ores et déjà au rapport de la somme de 152 450 euros payés à leur profit par feue [OL] [MN] lors de l’acquisition en 1996 à leur profit direct desdites places de parking, outre des bénéfices tirés de leur exploitation locative,

-ordonner à Mmes [KP] [MN], [RJ] et [A] ainsi qu’aux consorts [FH] [MN] comme venant aux droits de feu [FH] [MN], de rendre compte des avantages dont ils ont bénéficié l’occasion de leur occupation de l’immeuble [Adresse 17] et des bénéfices qu’ils ont tirés à l’occasion de leur sous-location ;

Rejette les demandes pour la période postérieure au 14 août 1998 ;

Confirme le jugement en ce qu’il a ordonné comme suit le partage des liquidités et valeurs mobilières après réalisation, détenues sur le compte n°13.268 ouvert auprès de la banque Crédit Suisse et de celles consignées à la Caisse des dépôt et consignations à hauteur de:

‘ 1/8 ème pour Mme [PY] [MN], veuve [W],

‘ 1/8 ème pour Mme [KP] [MN], épouse [GU],

‘ 1/8 ème pour Mme [F] [MN], épouse [A],

‘ 1/8 ème pour Mme [SK] [MN], épouse [RJ],

‘ 1/8 ème pour M. [Z] [MN],

‘ 1/8 ème pour M. [HF] [MN],

‘ 1/64 ème pour M. [R] [MN],

‘ 1/64 ème pour Mme [O] [MN] épouse [Y],

‘ 1/64 ème pour M. [N] [MN],

‘ 1/64 ème pour M. [H] [MN],

‘ 1/64 ème pour Mme [V] [MN] épouse [WS],

‘ 1/64 ème pour M. [DJ] [MN],

‘ 1/64 ème pour Mme [ZR] [MN],

‘ 1/64 ème pour Mme [B] [MN],

‘ 1/8 ème pour l’indivision existant entre Mme [UI] [JD], Mme [P] [MN], M. [X] [MN] et Mme [I] [MN]

et dit en conséquence n’y avoir lieu à désignation d’un notaire et d’un juge commis ;

Y ajoutant,

Dit que la part de 1/8ème de Madame [PY] [MN] veuve [W] sera répartie entre ses légataires universels pour :

*M. [T] [A] à hauteur de 1/4 de la succession de [PY] [MN],

*Mme [WG] [A] à hauteur de 3/16e de la succession de [PY] [MN],

*Mme [S] [RJ] à hauteur de 3/16e de la succession de [PY] [MN],

*Mme [C] [RJ] à hauteur de 3/16e de la succession de [PY] [MN],

*Mme [P] [MN] à hauteur de 3/16e de la succession de [PY] [MN] ;

Condamne in solidum M. [R] [MN], Madame [O] [Y], M. [N] [MN], M. [H] [MN], Madame [V] [WS], et Madame [ZR] [MN] à verser à chacun des requérants la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [R] [MN], Madame [O] [Y], M. [N] [MN], M. [H] [MN], Madame [V] [WS], et Madame [ZR] [MN] aux dépens de l’appel.

Le Greffier, Le Président,

 


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