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Selon l’accord du 20 juin 1988 relatif aux classifications annexées à la convention collective, le réacteur en chef est responsable, sous l’autorité de la direction, de la conception, de la réalisation du journal et de l’organisation de la rédaction. Il a autorité sur l’ensemble du personnel de la rédaction, et le Rédacteur en chef adjoint l’assiste ou le supplée dans ses fonctions.
Il en résulte que les tâches exécutées par un rédacteur ou un rédacteur en chef adjoint sont similaires, si bien que cet élément ne suffit pas, à, lui seul, à conférer à un salarié le titre de rédacteur en chef.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D’APPEL DE PARIS Pôle 6 – Chambre 3 ARRÊT DU 06 Avril 2022 Numéro d’inscription au répertoire général : S N° RG 19/02383 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7KF7 Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 janvier 2019 par le Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de PARIS Section encadrement RG n° 14/16208 APPELANTE Madame A X […] […] née le […] à […] comparante en personne, assistée de Me Anne LELEU-ÉTÉ, avocat au barreau de PARIS, toque : B745, substituée par Me Marine JEGOU, avocat au barreau de PARIS INTIMEES SCP BTSG prise en la personne de son représentant légal en exercice Maitre B Y domicilié en cette qualité audit siège, ès qualité de mandataire liquidateur de la Société 1633 désigné par jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 24 février 2016, […] […] représentée par Me Marion LOMBARD, avocat au barreau de PARIS, toque : R067 Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST représentée par sa Directrice, Madame C D […] […] représentée par Me Claude-marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953 COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 Février 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame I J-K, […] exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Fabienne ROUGE, Présidente de chambre Madame I J-K, […] Madame Véronique MARMORAT, Présidente de chambre Greffier : Mme Juliette JARRY, lors des débats ARRET : – Contradictoire – par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. – Signé par Madame Fabienne ROUGE, présidente de chambre et par Juliette JARRY, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Madame A X a été embauchée par la société 1633 le 1er août 2012 en qualité de rédactrice en chef adjointe, classification cadre, coefficient 160 catégorie B. Le 5 décembre 2014, elle a été convoquée par la société 1633 à un entretien préalable à licenciement économique qui s’est tenu le 17 décembre et aucours duquel lui a été remis un document de présentation du CSP (Contrat de Sécurisation Professionnelle). Par jugement du 17 décembre 2014, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire de la société 1633, Me DIDIER étant désignée en qualité d’administrateur judiciaire. Le 18 décembre 2014, Madame X a saisi le Conseil de Prud’hommes de Paris pour solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail. Le 6 janvier 2015, Me DIDIER a notifié à Madame X son licenciement pour motif économique et impossibilité de reclassement par lettre ainsi motivée : ‘Par jugement du 17 décembre 2014, le Tribunal de Commerce de Paris a ouvert une procédure de Redressement Judiciaire à l’égard de la société 1633 SAS et m’a désignée Administrateur Judiciaire avec pour mission d’assister la société dans tous les actes relatifs à la gestion. C’est donc en cette qualité et sur ordonnance rendue 1e 31/12/2014 par Monsieur 1e Juge Commissaire, autorisant la société a procéder à votre licenciement pour motif économique, que la présente vous est adressée. Vous avez été convoquée à un entretien préalable 1e 17 décembre 2014. Cet entretien s’est tenu avec M. Dominique Rol, Directeur Administratif et Financier, tandis que vous étiez assistée par Madame F G, salariée de l’entreprise. Il vous a d’abord été exposé la situation économique catastrophique de la société, qui l’a conduite à déposer une déclaration de cessation des paiements aux fins d’une ouverture de redressement judiciaire. C’est dans ce contexte que la suppression de votre poste s’est malheureusement imposée, dans le cadre d’une profonde réorganisation de la structure de la société, concernant l’ensemble de ses services : administration et finances, services de rédaction (éditorial, photo, maquette et secrétariat de rédaction), direction marketing et service technique digital. Le seul objectif de la sauvegarde de 1633 SAS, dont la pérennité même est comme vous le savez largement menacée, justifie 1’ampleur de cette restructuration : seules une redéfinition stratégique de sa politique éditoriale, une rationalisation encore plus grande de l’organisation de ses services et des mesures radicales d’économie de fonctionnement et d’adaptation aux contraintes d’un marché de la presse en crise et en pleine mutation technologique, permettront peut être à 1633 SAS de surmonter la situation actuelle. Comme indiqué lors de l’entretien, l’entreprise a d’abord recherché au sein de ses services toute possibilité de reclassement interne à vous offrir, mais cette recherche s’est malheureusement avérée infructueuse, faute de poste disponible, correspondant à votre qualification, voire de catégorie inférieure ou de catégorie supérieure. La recherche de reclassement externe menée en parallèle auprès du syndicat des éditeurs de la presse magazine et d’un large nombre de sociétés de presse, susceptibles de disposer d’un poste correspondant à votre emploi et à votre qualification, est également demeurée sans réponse positive à ce jour. Il vous a été remis, lors de l’entretien préalable un document de présentation du Contrat de Sécurisation Professionnelle (CSP) et précisé que vous disposiez d’un délai de réflexion de 21 jours à compter de l’entretien préalable, délai expirant le 07 janvier 2015 à minuit, pour faire connaître à la société votre réponse par 1e renvoi du bulletin d’acceptation du CSP figurant dans 1e dossier. Votre bulletin d’acceptation nous ayant été retourné 1e 19/12/2014, il s’ensuit que votre contrat de travail sera réputé rompu d’un commun accord le 07 janvier 2015 à minuit. Vous seront alors remis les documents relatifs à la rupture de votre contrat de travail (…). La convention collective applicable à la relation de travail est celle des journalistes. A la date de la rupture, la société 1633 occupait habituellement plus de 10 salariés et le salaire mensuel brut perçu par Madame X s’élevait à 3.199,99 Euros. Le 6 janvier 2016, un plan de cession a été arrêté par le tribunal de commerce qui a prononcé la liquidation judiciaire de la société 1633 par jugement du 24 février 2016, la société B.T.S.G., prise en la personne de Me Y, étant désignée en qualité de mandataire liquidateur. Par jugement du 10 janvier 2019 le juge départiteur du Conseil de Prud’hommes a débouté Madame X de l’intégralité de ses demandes. Le 4 février 2019, Madame X a interjeté appel de cette décision. Par ses dernières conclusions du 2 mai 2019 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens Madame X demande à la cour d’infirmer le jugement, de dire qu’elle occupait les fonctions de rédactrice en chef, de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail, et de fixer sa créance aux sommes de : – 21.647 Euros à titre de rappel de salaires et les congés payés afférents . – 50. 000 Euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; A titre subsidiaire, elle demande à la cour de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, de fixer sa créance à la somme de 50.000 Euros à titre de d’indemnité de licenciement ou 50.000 Euros à titre de dommages et intérêts pour non respect de l’obligation de reclassement, et de déclarer ces créances opposables aux AGS CGEA. Par ses dernières conclusions du 22 juillet 2019 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société B.T.S.G, prise en la personne de Me Y, demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter Madame X de l’intégralité de ses demandes et de la condamner à lui payer, en sa qualité de mandataire liquidateur de la Société 1633, une somme de 1.500 Euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Par ses dernières conclusions du 12 juillet 2019 auxquelles il est expressément renvoyé en ce qui concerne ses moyens, l’Unedic délégation AGS CGEA Ile de France Ouest demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter Madame X de l’intégralité de ses demandes, en tout état de cause de limiter à six mois le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dire que, s’il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale telle que prévue par les dispositions des articles L.3253-8 du code du travail, et des plafonds fixés par les articles L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail. MOTIFS Sur la discrimination L’article L 1132-1 du code du travail interdit toute mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de promotion professionnelle, d’affectation, de qualification, de classification, en raison notamment de l’appartenance à l’un ou l’autre sexe. Le salarié doit, en vertu de l’article L 1134-1 du même code, présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination et il appartient à l’employeur d’établir que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Mme X fait valoir qu’elle a été engagée par la société 1633 en qualité de rédactrice en chef adjointe pour remplacer le rédacteur en chef, M. M , qui a quitté l’entreprise en août 2012. Elle prétend que la seule raison pour laquelle le journal lui a refusé le poste de rédacteur en chef est qu’il s’agissait du magazine ‘Men’s Health’ destiné aux seuls lecteurs masculins et qui ne pouvait donc être dirigé par une femme. Toutefois, ainsi que le fait valoir l’intimée, Mme X était simple pigiste lorsqu’elle a été recrutée au poste de rédactrice en chef adjointe, tandis que M. M, au vu de son bulletin de paie de juin 2012, était le rédacteur en chef du magazine depuis deux ans ; elle n’avait donc ni son expérience ni son parcours professionnel, ce qui explique que le poste de rédactrice en chef ne lui a pas été proposé. Le lien entre son sexe et son recrutement en tant que rédactrice en chef adjointe n’est donc pas caractérisé. Sur le rappel de salaires Mme X H valoir que l’ancien rédacteur en chef n’ayant jamais été remplacé, c’est elle qui, dans les faits, a assumé ses fonctions sans en avoir le titre ni la rémunération. Selon l’accord du 20 juin 1988 relatif aux classifications annexées à la convention collective, le réacteur en chef est responsable, sous l’autorité de la direction, de la conception, de la réalisation du journal et de l’organisation de la rédaction. Il a autorité sur l’ensemble du personnel de la rédaction, et le Rédacteur en chef adjoint l’assiste ou le supplée dans ses fonctions. Il en résulte que les tâches exécutées par un rédacteur ou un rédacteur en chef adjoint sont similaires, si bien que cet élément ne suffit pas, à, lui seul, à conférer à Mme X le titre de rédacteur en chef. Et il n’est d’ailleurs pas contesté par l’intéressée que, comme l’a relevé le premier juge, les tâches exécutées telles qu’elles figuraient dans son contrat de travail, conformes à celles qui sont décrites dans ses écritures, relevaient de son poste de rédactrice en chef adjointe. S’agissant des rapports hiérarchiques, il était précisé dans le contrat de travail de Mme X que ses fonctions seraient ‘exercées sous l’autorité du rédacteur en chef ou du directeur des rédactions en l’absence de rédacteur en chef ou de toute personne qui lui serait substituée’.Dans un mail du 16 décembre 2012, versé aux débats par Mme X, M. PG indique qu’il rejoint ‘1633″ en tant que conseiller des rédactions et de la direction éditoriale en décembre 2012. Il ressort des autres emails versés aux débats par la salariée que c’est bien M. P qui avait autorité sur les rédactions. Et si Mme X le conteste, il n’en demeure pas moins qu’elle devait bien rendre compte de son activité à la direction du journal, quelle que soit la personne qui l’ait incarnée. En toute hypothèse, ainsi que le fait valoir l’intimée sans être contredite par la salariée, son salaire était supérieur aux minima prévus par la convention collective aussi bien ceux fixés pour les rédacteurs en chef que des rédacteurs en chef adjoints. N’ayant ni la même expérience, ni le même parcours professionnel ni la même ancienneté dans l’entreprise que M. M, ce qui n’est pas contesté par Mme X, elle n’est pas fondée à revendiquer un salaire identique. Le jugement sera confirmé en ce qu’il l’a déboutée de ce chef de demande. Sur la rupture du contrat de travail La discrimination salariale n’étant pas établie, il n’y a pas lieu de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail pour ce motif. Concernant le licenciement, la société B.T.S.G. fait valoir que l’ordonnance du juge commissaire autorisant le licenciement de Mme X a été rendue le 31 décembre 2014, que le contrat n’a été rompu d’un commun accord que le 7 janvier 2015, soit à l’issue du délai de réflexion laissé à celle-ci pour accepter le CSP ; que le licenciement a été notifié le 6 janvier, et donc après l’autorisation donnée par le juge commissaire de licencier Mme X. Elle ajoute que Mme X a été parfaitement informée de l’intégralité des motifs économiques de son licenciement avant son acceptation du CSP, ainsi que cela ressort du PV de son entretien oral et du PV des réunions de délégués du personnel communiqués à l’ensemble du personnel. Selon les dispositions de l’article L 1233-67 du code du travail, l’adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle emporte rupture du contrat de travail. L’employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d’information sur ce dispositif remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu’il est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement imposé par les articles L. 1233-15 et L. 1233-39 du code du travail, soit encore, lorsqu’il n’est pas possible à l’employeur d’envoyer cette lettre avant l’acceptation par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation. L’employeur est donc tenu d’énoncer la cause économique de la rupture dans un écrit comportant le motif précis qui a justifié la mise en place de la procédure de licenciement, au plus tard au moment de l’acceptation par le salarié du CSP. En outre, lorsque le CSP est proposé par un administrateur judiciaire en application de l’ordonnance du juge-commissaire autorisant des licenciements économiques, le document de CSP ne peut être remis au salarié avant cette ordonnance et le document écrit doit comporter le visa de cette ordonnance. A défaut, la rupture est dépourvue de cause réelle et sérieuse. Il est constant, en l’espèce, que Mme X a accepté le CSP le 19 décembre sans avoir eu connaissance de l’ordonnance du juge commissaire rendue le 31 décembre, dont l’autorisation constituait, comme le fait valoir la société B.T.S.G., le véritable motif du licenciement. Il en résulte que Mme X, avant d’accepter le CSP, n’a pas été régulièrement informée sur le motif de son licenciement lequel doit, dès lors, être déclaré sans cause réelle et sérieuse, le jugement étant infirmé de ce chef. Compte tenu de l’ancienneté de Mme X dans l’entreprise, du montant de sa rémunération et des conséquences du licenciement à son égard, telles qu’elles ressortent des pièces produites, il convient de lui allouer, en application des dispositions de l’article l235-3 du code du travail alors applicable, une somme de 20.000 Euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par la rupture. PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement et contradictoirement, Confirme le jugement en ce qu’il a débouté Madame X de sa demande de résiliation judiciaire et de rappel de salaires ; L’infirme sur le surplus et statuant à nouveau ; Dit le licenciement de Madame X sans cause réelle et sérieuse ; Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société 1633 la somme de 20.000 Euros en réparation du préjudice causé par la rupture du contrat de travail ; Dit que l’Unedic délégation AGS doit sa garantie dans les limites de la garantie légale telle que prévue par les dispositions des articles L.3253-8 du code du travail, et des plafonds fixés par les articles L.3253-17 et D.3253-5 du code du travail ; Déboute les parties de toutes leurs autres demandes ; Met les dépens à la charge de la liquidation judiciaire. La Greffière La Présidente |