Sommaire Contexte de la liquidation judiciaireLe 13 octobre 2020, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société Rodrigues Construction, désignant la société BTSG² comme liquidateur. Déclaration de créance par la BTPLe 1er décembre 2020, la Banque du bâtiment et des travaux publics (BTP) a déclaré une créance de 24 776,07 euros à titre chirographaire dans le cadre de la procédure collective. Décision du juge-commissaireLe 12 mars 2023, le juge-commissaire a partiellement rejeté la créance de la BTP, en admettant 19 820,85 euros et en rejetant 4 955,22 euros. Appel de la BTPLe 30 mars 2023, la BTP a interjeté appel de cette décision, demandant l’infirmation du rejet partiel de sa créance et son admission au passif chirographaire à hauteur de 24 776,07 euros. Conclusions des partiesLe 9 janvier 2024, la BTP a réitéré sa demande d’infirmation de l’ordonnance et a sollicité des condamnations à l’encontre du liquidateur et de la société Rodrigues Construction. En réponse, le 9 octobre 2023, Rodrigues Construction et son liquidateur ont demandé le rejet de l’appel de la BTP et la confirmation de l’ordonnance initiale. Clôture de l’instructionL’instruction de l’affaire a été clôturée le 5 septembre 2024, avec renvoi aux conclusions des parties pour plus de détails sur leurs moyens et prétentions. Motifs de la décisionLe juge a retenu que la BTP pouvait déclarer l’intégralité de la créance cédée, indépendamment du montant financé, en raison de la garantie solidaire du cédant. Décision de la courLa cour a infirmé l’ordonnance du juge-commissaire, admettant la créance de la BTP pour un montant complémentaire de 4 955,22 euros à titre chirographaire, et a statué sur les dépens sans allouer d’indemnité de procédure. |
Questions / Réponses juridiques :
Quelle est la nature de la créance déclarée par la BTP dans la procédure collective ?La créance déclarée par la Banque du bâtiment et des travaux publics (BTP) dans la procédure collective de la société Rodrigues Construction est une créance chirographaire d’un montant total de 24 776,07 euros. Cette créance a été partiellement admise par le juge-commissaire, qui a rejeté une partie de celle-ci à hauteur de 4 955,22 euros, tout en admettant le reste, soit 19 820,85 euros. Selon l’article L. 313-24 du Code monétaire et financier, le cédant est garant solidaire des créances cédées, ce qui signifie que la BTP, en tant que cessionnaire, peut déclarer l’intégralité de la créance cédée à la procédure collective, même si elle a acquis cette créance pour un montant inférieur. Il est donc essentiel de comprendre que la nature de la créance, en tant que chirographaire, implique qu’elle est soumise à un certain ordre de paiement dans le cadre de la liquidation judiciaire, mais que la BTP a le droit de revendiquer la totalité de la créance en raison de la garantie solidaire. Quelles sont les conséquences de l’infirmation de l’ordonnance du juge-commissaire ?L’infirmation de l’ordonnance du juge-commissaire a pour conséquence directe l’admission de la créance de la BTP pour un montant complémentaire de 4 955,22 euros, à titre chirographaire. Cela signifie que la BTP est désormais reconnue comme créancière de la société Rodrigues Construction pour l’intégralité de la somme initialement déclarée, soit 24 776,07 euros. Cette décision est fondée sur le principe selon lequel, en vertu des articles L. 313-23 et suivants du Code monétaire et financier, le cessionnaire peut déclarer l’intégralité de la créance cédée, indépendamment du montant effectivement financé. Ainsi, la BTP, en tant que cessionnaire, a le droit de revendiquer la totalité de la créance, ce qui modifie l’ordre des créanciers dans le cadre de la liquidation judiciaire. En conséquence, la BTP sera désormais en mesure de récupérer une part plus importante des actifs de la société débitrice, ce qui peut avoir un impact significatif sur le montant des remboursements qu’elle peut espérer obtenir. Quels sont les droits et obligations des parties dans le cadre de cette procédure ?Dans le cadre de la procédure collective, les droits et obligations des parties sont régis par le Code de commerce et le Code monétaire et financier. La BTP, en tant que créancière, a le droit de déclarer sa créance et de participer à la procédure de liquidation judiciaire. Elle est également tenue de respecter les décisions du juge-commissaire et de la cour d’appel concernant l’admission de sa créance. De son côté, la société Rodrigues Construction et son liquidateur ont l’obligation de fournir toutes les informations nécessaires concernant les créances et les actifs de la société. Ils doivent également respecter les décisions judiciaires, notamment celles relatives à l’admission ou au rejet des créances. L’article L. 622-24 du Code de commerce précise que le liquidateur a pour mission de réaliser l’actif et de répartir le produit de cette réalisation entre les créanciers, selon l’ordre de priorité établi par la loi. Cela signifie que les créanciers chirographaires, comme la BTP, seront remboursés après les créanciers privilégiés, ce qui peut influencer le montant qu’ils peuvent récupérer. Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans cette affaire ?L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés pour la défense de ses droits. Dans cette affaire, la BTP a demandé la condamnation du liquidateur et de la société Rodrigues Construction à lui verser 3 000 euros en application de cet article. Cette somme est destinée à couvrir les frais de justice engagés par la BTP dans le cadre de l’appel. Le juge a la faculté d’accorder cette indemnité en tenant compte de l’équité et des circonstances de l’affaire. Il est important de noter que cette indemnité ne couvre pas l’intégralité des frais, mais constitue une aide pour compenser les dépenses engagées par la partie qui a dû défendre ses droits en justice. Dans le cas présent, la cour a décidé de ne pas allouer d’indemnité de procédure à aucune des parties, ce qui signifie que chaque partie devra supporter ses propres frais. Cette décision peut être motivée par le fait que les deux parties ont eu des arguments valables et que l’équité ne justifie pas une indemnisation dans ce contexte. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DE
VERSAILLES
Code nac : 4DC
Chambre commerciale 3-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 10 DECEMBRE 2024
N° RG 23/02136 – N° Portalis DBV3-V-B7H-VYQ5
AFFAIRE :
SA BTP BANQUE
C/
SCP BTSG
LE PROCUREUR GENERAL
…
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendu le 12 Mars 2023 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° RG : 2020J00479
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU
Me Dan ZERHAT
PG
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX DECEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
APPELANT
SA BTP BANQUE
Ayant son siège
[Adresse 3]
[Localité 5]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l’ASSOCIATION AVOCALYS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 620 – N° du dossier 005544
Plaidant : Me Bertrand MAHL de l’ASSOCIATION OLTRAMARE GANTELME MAHL, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R032 –
INTIMES
LE PROCUREUR GENERAL
POLE ECOFI – COUR D’APPEL DE VERSAILLES
[Adresse 4]
[Localité 6]
S.C.P. BTSG représentée par Maître [I] [P], pris en sa qualité de liquidateur judiciaire de la Société RODRIGUES CONSTRUCTION, nommé à cette fonction par Jugement du 13 Octobre 2020, dont le siège social est sis [Adresse 1]
Ayant son siège
[Adresse 1]
[Localité 8]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Dan ZERHAT de l’AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d’Avocats, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731 – N° du dossier 23078121
Plaidant : Me Noellia AUNON de l’ASSOCIATION L & P ASSOCIATION D’AVOCATS,avocat au barreau de PARIS – vestiaire : R241
S.A.S. RODRIGUES CONSTRUCTION
Ayant son siège
[Adresse 2]
[Localité 7]
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social
Représentant : Me Dan ZERHAT de l’AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d’Avocats, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731 – N° du dossier 23078121
Plaidant : Me Noellia AUNON de l’ASSOCIATION L & P ASSOCIATION D’AVOCATS,avocat au barreau de PARIS –
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 21 Octobre 2024, Monsieur Cyril ROTH, président ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Monsieur Ronan GUERLOT, Président de chambre,
Monsieur Cyril ROTH, Président de chambre,
Madame Gwenael COUGARD, Conseillère,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN
Le 13 octobre 2020, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société Rodrigues Construction et désigné la société BTSG² en qualité de liquidateur.
Le 1er décembre 2020, la société Banque du bâtiment et des travaux publics (la BTP) a déclaré à la procédure collective une créance de 24 776,07 euros à titre chirographaire.
Le 12 mars 2023, accueillant la contestation du liquidateur, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Nanterre a prononcé :
– le rejet de la créance à hauteur de : 4 955,22 euros ;
– l’admission de la créance à hauteur de : 19 820,85 euros ;
– à titre : chirographaire.
Le 30 mars 2023, la BTP a interjeté appel de cette ordonnance en tous ses chefs de disposition.
Par dernières conclusions du 9 janvier 2024, elle demande à la cour d’infirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a emporté rejet partiel de la demande d’admission à titre chirographaire au passif de la débitrice à concurrence de 4 955,22 euros ;
– en conséquence, l’admettre au passif chirographaire de la société Rodrigues Construction à concurrence de 24 776,07 euros ;
– à cet effet, juger qu’elle a acquis une créance d’encaissement à concurrence de ce montant par application des dispositions de l’article L. 313-24 du code monétaire et financier ;
– lui donner acte de ce qu’elle se désistera du bénéfice de l’effet exécutoire de la décision d’admission prononcée à son profit à due concurrence des encaissements auxquels elle aura pu procéder postérieurement à l’ouverture de la procédure ;
– condamner le liquidateur, ès qualités, in solidum avec la société Rodrigues Construction, à lui payer 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance et d’appel, avec distraction au profit de M. [Y].
Par dernières conclusions du 9 octobre 2023, la société Rodrigues Construction et son liquidateur demandent à la cour de :
– débouter l’appelante de sa demande tendant à voir infirmer l’ordonnance entreprise et de toutes demandes plus amples ;
Et en conséquence,
– confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance du 17 mars 2023 (sic.) en ce qu’il a :
rejeté la créance déclarée par la BTP à hauteur de 4 955,22 euros ;
admis la créance déclarée par la BTP à hauteur de 19 820,85 euros à titre chirographaire ;
– débouter la BTP de toutes demandes plus amples ou contraires ;
– condamner la BTP à régler à la société BTSG, ès-qualités, la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile dont distraction au profit de son conseil ;
– condamner la BTP aux entiers dépens et de ses suites.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 5 septembre 2024.
Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux conclusions susvisées.
Sur l’admission de la créance
Pour rejeter partiellement la créance, le juge-commissaire retient que les cessions de factures Dailly sont financées à hauteur de 80% du montant total des factures.
La BTP fait valoir que la cession qui lui a été consentie porte sur un montant nominal de factures de 24 776,07 euros ; que sa créance n’est pas limitée à l’avance faite à la débitrice.
La société débitrice et son liquidateur soutiennent que la BTP n’a financé que 80% de la créance, ce qui justifie la décision du juge-commissaire.
Réponse de la cour
Dans les conditions prévues aux articles L. 313-23 et suivants du code monétaire et financier, par un bordereau dit Dailly, une personne morale de droit privé peut céder à un établissement de crédit toute créance professionnelle sur un tiers.
Selon l’article L. 313-24 de ce code, sauf convention contraire, le cédant est garant solidaire des créances cédées.
De là suit que le cessionnaire peut déclarer à la procédure collective du cédant, qui demeure débiteur principal, l’intégralité de la créance cédée, pour son montant nominal, alors même qu’il l’aurait acquise pour un prix inférieur (voir notamment Com., 3 nov. 2010, n° 09-69.870, publié ; Com., 4 décembre 2001, n° 98-17.052, publié au rapport ; Com., 20 octobre 2009, n°08-18.233 ; Com, 30 juin 2051, n°14-13.784, publié).
Par deux bordereaux des 19 févier 2019 et 28 mai 2018, la société Rodrigues Construction a cédé à la BTP deux créances sur des maîtres d’ouvrage ; il est constant que la créance globale nominale subsistante est de 24 776,07 euros, montant déclaré à la procédure collective par la banque.
Contrairement à ce qu’a retenu le juge-commissaire, il est indifférent que la BTP n’ait consenti des crédits à la débitrice qu’à hauteur de 80% de cette somme : dès lors que la débitrice est demeurée garante des créances cédées, la créance de la BTP doit être admise en totalité.
L’ordonnance entreprise doit en conséquence être infirmée en ce qu’elle partiellement rejeté la créance, qui doit être admise en totalité.
Sur les demandes accessoires
L’équité commande de n’allouer d’indemnité de procédure à aucune des parties.
la cour, statuant contradictoirement,
Infirme l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a rejeté partiellement la créance déclarée par la BTP ;
Statuant à nouveau de ce chef,
Admet la créance pour un montant complémentaire de 4 955,22 euros, à titre chirographaire ;
Dit que les dépens seront employés en frais privilégié de la procédure collective ;
Rejette les demandes formulées au titre des frais non compris dans les dépens.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Ronan GUERLOT, Président, et par Madame Françoise DUCAMIN, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT