Sommaire Contexte de l’affaireMadame [I] [A], âgée de 14 ans, a été témoin d’un attentat terroriste islamiste le 19 mars 2012 dans son établissement scolaire, [6], à [Localité 7]. Cet attentat a été perpétré par [D] [C], qui a causé la mort de plusieurs personnes, dont un enseignant et ses deux enfants. Demande d’indemnisationEn 2017, Madame [I] [A] a sollicité une indemnisation auprès du Fonds de Garantie des Victimes d’Actes de Terrorisme et d’Autres Infractions (FGTI). Cependant, le FGTI a rejeté sa demande, arguant qu’elle ne remplissait pas les conditions requises pour être reconnue comme victime. Arguments de Madame [I] [A]Madame [I] [A] a contesté la position du FGTI devant le tribunal, demandant à être reconnue comme victime de terrorisme et réclamant une indemnisation de 30.000 € pour préjudice exceptionnel, ainsi que 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Elle a également demandé que les condamnations soient assorties d’intérêts au taux légal. Position du FGTILe FGTI a soutenu que Madame [I] [A] ne pouvait pas prouver qu’elle avait été victime d’un acte de terrorisme au sens de la loi. Il a également contesté la portée d’une indemnisation antérieure accordée par la cour d’assises, affirmant que cela n’influençait pas la décision du tribunal civil. Éléments de preuveLes faits établis montrent que Madame [I] [A] était présente sur les lieux de l’attentat, mais le FGTI a fait valoir qu’elle n’avait pas été directement exposée à un danger mortel. Bien qu’elle ait été témoin de scènes traumatisantes, le FGTI a soutenu qu’elle ne pouvait pas être considérée comme une victime directe. Décision du tribunalLe tribunal a reconnu Madame [I] [A] comme victime indirecte de l’attentat, tenant compte de son traumatisme psychologique et de ses liens affectifs avec les victimes. Il a accordé une indemnité de 12.000 € pour son préjudice, ainsi qu’une somme de 1.500 € pour les frais de justice. ConclusionLe tribunal a condamné le FGTI à indemniser Madame [I] [A] et a statué que l’exécution provisoire était de droit concernant les frais et dépens. Les demandes supplémentaires des parties ont été rejetées. |
Questions / Réponses juridiques :
Quelle est la définition juridique d’un acte de terrorisme selon le code pénal ?L’article 421-1 du code pénal définit les actes de terrorisme comme suit : « Constituent des actes de terrorisme, lorsqu’elles sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, les infractions suivantes et notamment les atteintes volontaires à la vie, les atteintes à l’intégrité de la personne, l’enlèvement et la séquestration. » Cette définition souligne que les actes de terrorisme doivent avoir pour but de créer un climat de peur et d’intimidation au sein de la population. Il est important de noter que la qualification d’un acte comme terroriste repose sur l’intention de troubler l’ordre public, ce qui implique une analyse des circonstances entourant l’infraction. Quelles sont les conditions d’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme selon le code des assurances ?Les articles L126-1 et L422-1 du code des assurances stipulent que : « Les victimes des actes de terrorisme commis sur le territoire national et les victimes de nationalités françaises d’actes de terrorisme commis à l’étranger, ainsi que leurs ayants-droit, sont indemnisées des atteintes à leur personne par l’intermédiaire du fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions, FGTI. » Pour bénéficier de cette indemnisation, il est nécessaire de prouver la qualité de victime d’un acte de terrorisme, ce qui implique de démontrer que l’infraction a eu un impact direct sur la personne concernée. Comment la qualité de victime est-elle déterminée dans le cadre d’un attentat terroriste ?La qualité de victime d’un attentat terroriste est déterminée par l’exposition directe à un péril objectif de mort ou d’atteinte corporelle. Le FGTI conteste souvent cette qualité en se basant sur des critères stricts, comme le fait d’avoir été directement menacé par l’auteur de l’infraction. Dans le cas de Madame [I] [A], bien qu’elle ait été témoin des événements tragiques, le tribunal a conclu qu’elle ne pouvait pas se prévaloir d’une exposition directe au péril, car elle n’était pas présente au moment des tirs. Quelles sont les implications de l’autorité de la chose jugée dans le cadre de l’indemnisation des victimes ?L’article 1355 du code civil précise que : « Il y a autorité de la chose jugée lorsque la même demande a été jugée par une juridiction compétente. » Dans le cas présent, le FGTI a soutenu que l’arrêt civil rendu par la cour d’assises n’avait pas d’autorité de la chose jugée sur les intérêts civils à l’égard de la JIVAT. Cela signifie que la décision de la cour d’assises ne lie pas la juridiction civile, qui conserve son autonomie pour trancher la recevabilité de la demande d’indemnisation. Comment le tribunal évalue-t-il le préjudice subi par une victime indirecte d’acte de terrorisme ?Le tribunal évalue le préjudice en tenant compte des éléments de preuve fournis par la victime, notamment les témoignages et les rapports médicaux. Dans le cas de Madame [I] [A], le tribunal a reconnu qu’elle souffrait de stress post-traumatique, de troubles dépressifs et d’autres manifestations anxieuses. En conséquence, une indemnité de 12.000 € a été accordée pour réparer son préjudice, ce qui illustre la prise en compte des souffrances psychologiques dans l’évaluation du préjudice. Quelles sont les conséquences de la décision du tribunal concernant les dépens et les frais de justice ?Selon l’article 700 du code de procédure civile, le tribunal a condamné le FGTI à payer à Madame [I] [A] une somme de 1.500 € pour couvrir ses frais de justice. De plus, le FGTI a été condamné à prendre en charge les dépens de l’instance, ce qui signifie qu’il doit rembourser les frais engagés par la victime pour faire valoir ses droits. Cette décision souligne l’importance de garantir l’accès à la justice pour les victimes d’actes de terrorisme, en leur permettant de récupérer une partie des coûts liés à leur procédure. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le :
■
PRPC JIVAT
N° RG 22/07942 –
N° Portalis 352J-W-B7G-CWNAU
N° MINUTE :
Assignation du :
15 Mars 2022
JUGEMENT
rendu le 12 Décembre 2024
DEMANDERESSE
Madame [I] [A]
domiciliée : chez Me [P] [B]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me [P] [B], avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0697
DÉFENDEUR
FONDS DE GARANTIE DES VICTIMES DES ACTES DE TERRORISME ET D’AUTRES INFRACTIONS (FGTI)
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Patricia FABBRO, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0082
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Pascal LE LUONG, Premier Vice-Président
Géraldine CHARLES, Première Vice-Présidente adjointe
Laurence GIROUX, Vice-Présidente
assistés de Véronique BABUT, Greffier
DEBATS
A l’audience du 24 Octobre 2024 tenue en audience publique
Après clôture des débats, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 12 Décembre 2024.
Décision du 12 Décembre 2024
PRPC JIVAT
N° RG 22/07942
N° Portalis 352J-W-B7G-CWNAU
JUGEMENT
– contradictoire,
– En premier ressort,
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Madame [I] [A] était âgée de 14 ans lors de l’attentat terroriste islamiste perpétré le 19 mars 2012 par [D] [C] dans l’établissement scolaire [6] de [Localité 7], dans lequel cette dernière était scolarisée.
A la fin de l’année 2017, elle saisissait le Fonds de Garantie (FGTI) d’une demande d’indemnisation à la suite de laquelle, il lui était indiqué que le FGTI ne pouvait réserver une suite favorable à sa demande, à défaut pour Madame [A] de remplir les conditions d’indemnisation.
Le fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) conteste la qualité de victime de Madame [I] [A].
Madame [I] [A] demande au tribunal de débouter le FGTI de toutes ses demandes fins et prétentions, de lui reconnaître la qualité de victime de terrorisme, et de condamner ce dernier à lui régler, en réparation des préjudices consécutifs à l’attentat du 19 mars 2012 dont elle a été victime, les sommes suivantes :
– 30.000 € au titre du préjudice exceptionnel spécifique des victimes de terrorisme,
– 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions du 9 février 2023, elle demande à la JIVAT de dire que le montant des condamnations mises à la charge du FGTI devra porter intérêt au taux légal, à compter du prononcé du jugement à intervenir et de condamner ce dernier aux entiers dépens dont distraction au profit de [P] [B], Avocat au barreau de Paris.
Par conclusions signifiées par RPVA le 5 février 2024, le FGTI demande au tribunal de juger que Madame [A] ne rapporte pas la preuve d’avoir été victime d’une infraction constitutive d’un acte de terrorisme prévue par l’article 421-1 du code pénal et qu’elle ne peut prétendre au statut de victime d’acte de terrorisme au sens de la loi du 9 septembre 1986.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 30 mai 2024.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties quant à l’exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.
L’affaire a été mise en délibéré au 12 décembre 2024.
Sur le droit à indemnisation de Madame [I] [A] en qualité de victime directe
Aux termes des dispositions de l’article 421-1 du code pénal, « constituent des actes de terrorisme, lorsqu’elles sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, les infractions suivantes et notamment les atteintes volontaires à la vie, les atteintes à l’intégrité de la personne, l’enlèvement et la séquestration ».
En vertu des articles L126-1 et L422-1 du code des assurances, les victimes des actes de terrorisme commis sur le territoire national et les victimes de nationalités françaises d’actes de terrorisme commis à l’étranger, ainsi que leurs ayants-droit, sont indemnisées des atteintes à leur personne par l’intermédiaire du fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions, FGTI.
Il convient de rappeler que [D] [C], après avoir assassiné trois militaires français et blessé très grièvement un quatrième militaire qui a survécu, à [Localité 7] et [Localité 5], entre le 11 et le 15 mars 2012, se rendait le lundi 19 mars 2012 vers 8 heures devant l’école confessionnelle juive [6] où il ouvrait le feu sur un groupe de personnes rassemblées devant l’établissement scolaire. Il tuait un enseignant, [Y] [H], et ses deux enfants [V], âgé de 5 ans et [U], âgé de 3 ans, en leur tirant dans la tête avec une arme de poing. Le terroriste islamiste pénétrait ensuite dans la cour de l’école, mettait à terre la jeune [G] [E], fille du directeur, élève de CE2, âgée de huit ans, et lui tirait dans la tempe à bout portant. Le terroriste avait filmé les scènes d’assassinats avec une caméra portative Gopro.
Il résulte des pièces versées au dossier et des débats que [I] [A] était scolarisée au lycée [6] et âgée de 14 ans à l’époque des faits. Le lundi 19 mars 2012, son père, M. [S] [A], la déposait à l’école en voiture. Dans une déclaration écrite datée du 23 janvier 2020, elle expose que son père l’amenait au lycée [6] et qu’ils arrivaient presque à la hauteur du portail de l’école, à peine à quelques mètres de celui-ci, endroit où il la déposait systématiquement, lui ou sa mère, à tour de rôle, chaque jour. Elle explique que cette fois, ils ont été assommés par la scène qu’ils avaient sous les yeux, qu’elle avait hurlé d’horreur en voyant très clairement le corps au sol de M. [H], mari de sa professeur, avec sous lui, le corps de l’un de ses deux fils qu’il avait tenté de protéger. [I] [A] indique que le portail de l’école était fermé, que son père est descendu de la voiture pour se rapprocher un peu plus et qu’il lui a dit de se mettre à plat ventre dans la voiture, qui était bloqué par d’autres véhicules à l’arrêt. Elle ajoute que la situation était effrayante car elle ne savait pas si l’assassin n’allait pas repasser au même endroit pour les mitrailler. Elle décrit le visage de son père, terrifié, avec un regard qu’elle ne lui connaissait pas, ce dernier faisant état de sa crainte que l’assassin ne revienne les tuer aussi.
Décision du 12 Décembre 2024
PRPC JIVAT
N° RG 22/07942
N° Portalis 352J-W-B7G-CWNAU
Elle entendait son père discuter avec une autre personne, devant le corps de M. [H] et de son fils et dire qu’ils avaient été tués d’une balle dans la tête. Elle décidait de sortir de la voiture, terrorisée, ayant besoin de se rapprocher de son père et voyait les deux corps à quelques centimètres, scènes d’horreur qu’elle n’oublierait jamais et qui sont restées gravées en elle. Son père lui criait de ne pas rester là. Après être retournés à leur voiture, immobilisée dans la file de véhicules abandonnés par leurs conducteurs et passagers, ils entraient dans la cour de l’école où elle apprenait que la petite [G] [E] avait été touchée par balle et que son ami de classe, [N] [K], avait également été blessé par balle. Elle précise qu’elle était très proche de la jeune [G] [E], qu’elles arrivaient très souvent à l’école à la même heure et qu’elle avait l’habitude de lui faire un câlin.
Force est de constater que le FGTI ne conteste pas le déroulement des faits vécus par Madame [I] [A].
Cependant, pour s’opposer à la reconnaissance de la qualité de victime de Madame [I] [A], le FGTI soutient, citant notamment un commentaire de l’arrêt de la Cour de cassation du 20 mai 2020 (pourvoi 19-12780), que l’acte de terrorisme est celui qui provoque l’intimidation ou la terreur de personnes physiques, qui se trouvent ainsi directement menacées par le terroriste dans leur vie ou dans leur intégrité physique et qu’un simple témoin des faits, qui n’a pas eu à craindre pour sa vie, ne saurait donc être indemnisé par le FGTI, même si, fortement choqué par la prise d’otage et le déploiement des forces de police, il a développé un syndrome subjectif réactionnel.
Le FGTI ajoute que l’arrêt civil de la Cour d’assises de Paris du 17 juin 2019 dont se prévaut Madame [I] [A], qui lui a alloué une indemnité de 20.000 € en réparation de son préjudice, est dénué de toute portée car non susceptible d’exercer une influence sur la solution de l’instance civile dont la JIVAT est saisie, à défaut pour la cour d’assises d’avoir compétence d’attribution pour se prononcer, sur le bien-fondé de l’action civile de la requérante, et par conséquent sur une quelconque obligation indemnitaire du Fonds de Garantie à son égard, obligation conditionnée à la reconnaissance préalable du droit à indemnisation, ajoutant que l’action civile exercée devant les juridictions pénales, en matière d’infraction de terrorisme, permet seulement à la victime d’acquérir la qualité de partie au procès tel que le prévoit l’article 706-16-1 du code de procédure pénale. Il considère également que l’arrêt civil rendu par la cour d’assises n’est pas revêtu de l’autorité de la chose jugée sur les intérêts civils à l’égard de la JIVAT à défaut que soit réuni les trois conditions indispensables à savoir la triple identité d’objet, de cause et de parties prévue par l’article 1355 du code civil.
Il convient de rappeler qu’aux termes de l’article L.217-6 du code de l’organisation judiciaire (loi n°2019-222 du 23 mars 2019 – art.64 V entrée en vigueur le 3 juin 2019), le tribunal judiciaire de Paris a compétence exclusive pour connaître, en matière civile, à moins qu’ils n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire, des demandes formées par les victimes mentionnées à l’article L.126-1 du code des assurances contre le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions, après saisine de ce dernier, et relatives à la reconnaissance de leur droit à indemnisation, au versement d’une provisionnel à l’organisation d’une expertise judiciaire.
L`article 706-16-1 du code de procédure pénale dispose en son dernier alinéa que lorsque la juridiction répressive est saisie d’une demande tendant à la réparation du dommage causé par une infraction qui constitue un acte de terrorisme, elle renvoie l’affaire, par une décision non susceptible de recours, devant la juridiction civile compétente en application de l’article précité du code de l’organisation judiciaire qui l’examine d’urgence selon une procédure simplifiée déterminée par décret en Conseil d’Etat.
En application de ce texte, la cour d’assises spécialement composée aurait dû se limiter à déclarer Madame [I] [A] recevable en sa constitution de partie civile et renvoyer l’affaire devant la JIVAT.
Dans ces conditions, le moyen tiré de l’autorité de la chose jugée de l’arrêt civil du 17 juin 2019 ne saurait être accueilli, la juridiction civile conservant son autonomie pour trancher la recevabilité de la demande à l’égard du FGTI.
Il appartient en conséquence à Madame [I] [A] de rapporter la preuve d’avoir été victime de l’attentat terroriste, commis le 19 mars 2012 à l’école [6].
Il est établi et incontestable que le terroriste islamiste avait programmé l’assassinat de personnes de confession juive, peu important leur âge ou leur sexe, et notamment des enfants, se rendant spécifiquement dans une école juive dans cette perspective, et qu’il avait décidé de filmer ses crimes antisémites pour s’en glorifier, de sorte que Madame [I] [A] aurait pu être aussi la cible de [D] [C] si elle avait été présente sur les lieux en même temps que les cinq victimes du terroriste. Toutefois, sans occulter sa terrible souffrance psychique résultant de sa découverte des corps des victimes dont notamment ceux de trois jeunes enfants, dont elle déclare avoir été très proche, quelques instants après la commission des faits, il est parfaitement établi que le terroriste avait pris immédiatement la fuite, sans retourner à l’école [6], quand bien même elle ait pu légitimement craindre pour sa vie, comme son père, ou d’autres personnes présentes sur les lieux après le passage criminel de [D] [C], qui ont vu les corps sans vie des victimes ou s’en sont occupés.
Le fait que leur véhicule fut bloqué derrière celui d’une autre voiture qui a essuyé des tirs du terroriste, l’arme de ce dernier s’étant enrayée, ne peut pas, non plus, lui conférer la qualité de victime directe des actes de [D] [C], alors que ce dernier avait déjà quitté les lieux lorsque M. [A] et sa fille sont arrivés à l’école.
Ainsi, Madame [I] [A] ne peut se prévaloir d’avoir été directement exposée à un péril objectif de mort ou d’atteinte corporelle, quand bien même le traumatisme dont elle a souffert et souffre encore est indéniable.
Toutefois, tenant compte de la spécificité des crimes à caractère antisémite commis par [D] [C] contre le mari de sa professeure et de leurs jeunes garçons et de ses relations affectives très fortes qu’elle avait nouées avec les victimes et notamment avec la jeune [G] [E], il convient de dire que Madame [I] [A] peut se prévaloir de la qualité de victime indirecte d’actes de terrorisme.
Décision du 12 Décembre 2024
PRPC JIVAT
N° RG 22/07942
N° Portalis 352J-W-B7G-CWNAU
Sur l’évaluation du préjudice
Au vu de l’ensemble des éléments produits aux débats, le préjudice subi par Madame [I] [A], consistant notamment en un stress post-traumatique avec des troubles dépressifs et des manifestations anxieuses invalidantes, des troubles du sommeil avec cauchemars et insomnies, des troubles anxieux, et réminiscences phobiques avec de nombreux comportements d’évitement invalidants, liés à la perte d’êtres chers, une indemnité de 12.000 € lui sera accordée en réparation de son préjudice.
Sur les autres demandes
Le FGTI prendra à sa charge les dépens de l’instance.
En outre, il sera condamné à payer à Madame [I] [A] une somme de 1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, alors qu’une aide juridictionnelle peut être demandée par la victime en la matière sans condition de ressources.
En application de l’article 514 du code de procédure civile en vigueur au jour de l’assignation, l’exécution provisoire est de droit.
LE TRIBUNAL, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,
Déclare Madame [I] [A] recevable en ses demandes au titre de l’indemnisation des préjudices subis en qualité de victime indirecte de l’attentat terroriste commis le 19 mars 2012 ;
Condamne le FGTI à payer à Madame [I] [A] une indemnité de 12.000 € en réparation de son préjudice, augmentée des intérêts au taux légal à compter de ce jour ;
Condamne le FGTI à payer à Madame [I] [A] la somme de 1.500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne le FGTI aux dépens de l’instance dont distraction au profit de [P] [B], avocate au barreau de Paris ;
Constate que l’exécution provisoire est de droit en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Fait et jugé à Paris le 12 Décembre 2024
Le Greffier Le Président