Recevabilité des demandes et l’expertise dans le cadre d’un incident survenu dans un aéroport

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Recevabilité des demandes et l’expertise dans le cadre d’un incident survenu dans un aéroport
Ce point juridique est utile ?

La société STARR ADJUSTMENT SERVICES et la société RELATED 2019 LLC ont assigné en référé la SAS AVIAPARTNER NICE et la SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR suite à un accident survenu le 12 août 2024, où un aéronef de type GULFSTREAM a été percuté par un véhicule de piste. Les demanderesses demandent une expertise judiciaire pour évaluer les dommages et obtenir les enregistrements vidéo de l’accident. La SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR conteste la qualité à agir des demanderesses et refuse la transmission des vidéos, invoquant des raisons de sécurité et de réglementation. La SAS AVIAPARTNER n’a pas comparu. L’affaire a été mise en délibéré pour décision.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

24 septembre 2024
Tribunal judiciaire de Nice
RG n°
24/01622
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NICE
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

N° RG 24/01622 – N° Portalis DBWR-W-B7I-P6KE
du 24 Septembre 2024
M.I 24/00000970
N° de minute

affaire : Société STARR ADJUSTMENT SERVICES, INC, Société RELATED 2019
c/ S.A.S. AVIAPARTNER [Localité 8], S.A. AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR

Expédition délivrée
à Me PONTI
[X]
[Z]
Me DEUR
AVIAPARTNER

Copie et côte
au service EXPERTISE

le
l’an deux mil vingt quatre et le vingt quatre Septembre

Nous, Céline POLOU, Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de Nice, juge des référés, assistée de Madame Laura PLANTIER, greffier avons rendu l’ordonnance suivante :

A la requête de :

La société STARR ADJUSTMENT SERVICES dont le siège social est sis INC, [Adresse 2] (USA) prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Alberto PONTI SIMONIS DI VALLARIO, avocat postulant au barreau de NICE et Maître Benjamin POTIER, avocat plaidant au Barreau de Paris

La Société RELATED 2019 dont le siège social est sis LLC, [Adresse 4], Etats Unis prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Alberto PONTI SIMONIS DI VALLARIO, avocat postulant au barreau de NICE et Maître Benjamin POTIER, avocat plaidant au Barreau de Paris

DEMANDERESSES

Contre :

S.A.S. AVIAPARTNER [Localité 8] dont le siège social est sis [Adresse 5] prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
Ayant pour avocat Me Sigrid PREISSL, avocat au Barreau de Paris, non constitué à l’audience
Non comparant, non représenté

La société AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR dont le siège social est sis [Adresse 3] prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Nicolas DEUR, avocat au barreau de NICE

DÉFENDERESSES

Après avoir entendu les parties en leurs explications à l’audience du 17 Septembre 2024 au cours de laquelle l’affaire a été mise en délibéré au 24 Septembre 2024,

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par acte du commissaire de justice du 13 septembre 2024, la société de droit américain STARR ADJUSTMENT SERVICES et la société de droit américain RELATED 2019 LLC ont fait assigner en référé d’heure à heure, sur ordonnance de Mme la Première Vice-présidente du tribunal judiciaire de Nice du 12 septembre 2024, devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Nice, la SAS AVIAPARTNER NICE et la SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR, aux fins de:
– voir ordonner une expertise judiciaire visant à déterminer les circonstances et causes de l’accident, évaluer les dommages à l’aéronef, le coût des réparations et de remise en état et fixer les autres préjudices résultant de l’arrêt d’exploitation et de l’immobilisation de l’aéronef ainsi que la perte d’usage
– enjoindre à la SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR de leur communiquer l’enregistrement vidéo de l’accident par les caméras de vidéo-surveillance, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la présente ordonnanc
– dire que la présente ordonnance sera exécutoire sur simple présentation de la minute
– réserver les dépens

A l’audience du 17 septembre 2024, la société de droit américain STARR ADJUSTMENT SERVICES et la société de droit américain RELATED 2019 représentées par leur conseil, ont maintenu leurs demandes.

Elles font valoir que la société RELATEF 2019 LCC est l’exploitant d’un aéronef de marque GULFSTREAM de type G600, portant la marque d’identification [Immatriculation 7], que ce dernier est assuré auprès de la compagnie STARR ADJUSTMENT SERVICES, que le 12 août 2024, alors qu’il était stationné à l’aéroport de [Localité 8], ce dernier a été percuté par un véhicule de piste appartenant à la société de services aéroportuaires AVIAPARTNER, que selon les déclarations du chauffeur, ce dernier aurait perdu connaissance alors qu’il conduisait le véhicule et qu’il a heurté l’aile gauche de l’aéronef, en l’endommageant. Elles ajoutent s’agissant de la fin de non recevoir soulevée en défense, tirée du défaut de qualité à agir qu’elle relève d’un débat au fond et non pas du pouvoir du juge des référés et qu’elles sont respectivement l’exploitante de l’aéronef et l’assureur de sorte qu’elle ont bien qualité à agir. Elles font valoir que des dommages sont suspectés au niveau des trains d’atterrissage et possiblement au niveau de la coque, qu’une expertise amiable a déjà été organisée sur site en présence des experts techniques de la société STARR et de la SAS AVIAPARTNER mais qu’une expertise judiciaire se montre utile pour déterminer de manière contradictoire l’étendue des dommages et les réparations nécessaires. Elles ajoutent qu’il est en outre nécessaire que les enregistrements des caméras de vidéoprotection de l’aéroport leur soient communiquées par la SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR, qui a refusé d’y procéder sans motif légitime et ce afin de vérifier la vitesse d’impact du véhicule sur l’aéronef, procéder le plus rapidement possible aux réparations qui s’imposent et
d’ assurer une reprise de l’exploitation en toute sécurité eu égard aux potentiels dommages invisibles, tout en ajoutant que cet enregistrement sera selon toute vraisemblance sollicité par l’expert judiciaire. Elles ajoutent que l’aéroport est susceptible d’effacer cet enregistrement à tout moment ce qui les priverait de la possibilité de déterminer de façon précise l’étendue des dommages et les réparations nécessaires, que l’immobilisation de l’aéronef engendre des préjudices immatériels importants qui devront être réparés, que le juge civil peut enjoindre la communication de ces vidéos sous astreinte aux parties qui ont intérêt à les visionner et que les contestations soulevées en défense ne sont pas sérieuses.

La SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR représentée par son conseil , demande aux termes de ses écritures, reprises à l’audience:
– de juger irrecevables les demandes formules par les sociétés demanderesses faute de justifier de leur qualité à agir
– subsidiairement, de rejeter la demande d’expertise formée à son encontre
– si une expertise était ordonnée, de lui donner acte de ses protestations et réserves
– de rejeter la demande tendant à obtenir la communication des enregistrements de vidéoprotection du 12 août 2024

– de condamner les sociétés demanderesses aux dépens de l’instance et à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile avec distraction au profit de son conseil

Elle expose qu’elle s’est vue confier par concession, la gestion et l’exploitation de l’aéroport [9] et que la SAS AVIAPARTNER [Localité 8] avec laquelle elle a conclu des conventions d’autorisation d’activité d’assistance en escale, gère le quidage des aéronefs, leur stationnement et leur chargement et déchargement. Elle ajoute que le 12 août 2024, un accident impliquant un véhicule de piste de la SAS AVIAPARTNER [Localité 8] et un aéronef [Immatriculation 7] s’est produit, que le chauffeur du véhicule aurait perdu connaissance, que le véhicule a heurté l’aile gauche de l’aéronef et que cet accident a donné lieu à l’ouverture d’une enquête préliminaire par la gendarmerie des transports aériens qui s’est fait remettre, par elle, sur réquisition du Procureur de la République, les images captées par le système de vidéoprotection de l’aéroport.

Elle soutient que les demanderesses ne justifient pas de leur qualité à agir, la société STAR ADJUSTMENT SERVICE se présentant comme étant l’assureur de l’aéronef impliqué dans l’accident sans verser le contrat d’assurance affèrent et la société RELATED 2019 LLC ne justifiant de sa qualité d’exploitant de l’aéronef. Elle ajoute à supposer qu’elles justifiraient de leur qualité à agir en cours d’instance, que la demande d’expertise formée à son encontre n’est pas justifiée car l’accident implique un véhicule conduit par un préposé de la société AVIAPARTNER [Localité 8] de sorte que sa responsabilité ne peut pas être recherchée dans cet accident. S’agissant de la transmission des images enregistrées par le système de viodéprotection de l’aéroport de [Localité 8], elle précise s’être légitimement opposée à leur transmission aux sociétés demanderesses car ces vidéos captent des images d’un site très sensible permettant d’assurer la protection des bâtiments, la défense nationale et la prévention d’actesde terrorisme, que le système est réglementé, qu’elle a déjà remis les enregistements au service d’enquête, qu’aucune modification ou effacement des vidéos ne peut avoir lieu et que ces enregistrements sont désormais couverts par le secret prévu à l’article 11 du code de procédure pénale. Elle expose ainsi que la transmission de ces enregistrements se heurte à des contestations sérieuses et qu’elle ne peut y faire droit.

La SAS AVIAPARTNER [Localité 8] régulièrement assignée à personne morale n’a pas comparu et ne s’est pas faite représenter.

L’affaire a été mise en délibéré au 24 septembre 2024 .

En cours de délibéré, les sociétés demanderesses, ont adressé dans le respect du contradictoire, la police d’assurance n°1000226695-08 souscrite par la société RELATED 2019 LLC auprès de la société STARR ADJUSTMENT SERVICES. Les sociétés défenderesses n’y ont pas répondu.

MOTIFS

Sur la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir

Selon l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

En l’espèce, il est établi que le 12 août 2024, un accident s’est produit au sein de l’aéroport de [9], ce dernier impliquant un véhicule de piste de la société AVIA PARTNER [Localité 8] et un aéronef identifié [Immatriculation 7].

Les sociétés américaines RELATED 2019 LLC et STARR ADJUSTMENT SERVICES qui exposent être respectivement l’exploitante et l’assureur de l’aéronef de marque GULFSTREEAM, [Immatriculation 7],

sollicitent une mesure d’expertise et la communication sous astreinte des enregistrements des caméras de vidéoprotection ayant capté l’accident.

La SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR soulève l’irrecevabilité des demandes, aux motifs que ces sociétés étrangères, ne justifient pas de leur qualité à agir en ce qu’elles n’ont versé aucune pièce démontrant leur qualité d’exploitante et d’assureur de l’aéronef.

Bien que les sociétés américaines RELATED 2019 LLC et STARR ADJUSTMENT SERVICES soutiennent que la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir relève d’un débat au fond et non pas du pouvoir du juge des référés, force est de relever que toute personne qui justifie d’un intérêt légitime au succès d’une prétention peut introduire une action en référé et qu’il appartient au juge des référés de se prononcer sur la fin de non recevoir soulevée en défense, tirée d’un défaut de qualité à agir du demandeur, que cette contestation soit sérieuse ou non. Dès lors, le moyen soulevé est inopérant.

Il ressort des éléments initiaux de la procédure que les sociétés demanderesses avaient versé trois photogaphies de l’aéronef endommagé suite à la collision et les mails échangés avec la SA Aéroports [9], le 2 septembre 2024, dans lesquels elles sollicitaient une copie des enregistrements des caméras de vidéoprotection de l’aéroport afin d’apprécier la vitesse et la force de l’impact entre le véhicule de la SAS AVIAPARTNER et l’aéronef et évaluer l’étendue des réparations.

Suite à la fin de non recevoir soulevée à l’audience par la SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR, les sociétés demanderesses ont adressé en cours de délibéré, dans le respect du contradictoire, la police d’assurance n°1000226695-08 souscrite par la société RELATED 2019 LLC auprès de la société STARR ADJUSTMENT SERVICES.

Il ressort de ce document rédigé en anglais et non traduit que la société RELATED 2019 LLC a souscrit auprès de la société américaine STARR ADJUSTMENT SERVICES un contrat d’assurance portant sur l’aéronef GULFSTREAM [Immatriculation 7].

Dès lors, force est de considérer, suite aux nouveaux éléments transmis, à savoir la police d’assurance souscrite, que les sociétés demanderesses, justifient bien de leur qualité à agir.

La fin de non recevoir soulevée sera en conséquence rejetée et leur action déclarée recevable.

Sur la demande d’expertise

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir, avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, notamment par voie de référé.

En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats que la SA AEROPORTS DE LA COTE AZUR qui exploite la concession des aérodromes de [9], a conclu le 27 octobre 2022 avec la SAS AVIAPARTNER [Localité 8] un contrat d’autorisation d’activité d’assistance en escale au sein de l’aéroport de [Localité 8].

Il est établi que le 12 août 2024, un accident s’est produit au sein de l’aéroport de [9], ce dernier impliquant un véhicule de piste de la société AVIA PARTNER [Localité 8] et un aéronef identifié [Immatriculation 7]. Selon les parties, le conducteur du véhicule de piste aurait perdu connaissance puis percuté l’aile gauche de l’aéronef qui était stationné.

Il ressort des pièces versées aux débats, que l’aéronef GULFSTREAM [Immatriculation 7] a été endommagé.

Bien que la SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR s’oppose à la demande d’expertise formée à son encontre, en faisant valoir que sa responsabilité ne pourra pas être recherchée car l’accident qui implique un véhicule de la SAS AVIAPARTNERT, n’est pas dû à un ouvrage public dont l’entretien lui incombe, force est de relever que l’expertise sollicitée a justement pour finalité de rechercher les causes de l’accident, de déterminer les dommages causés à l’aéronef et de donner tous éléments utiles à la juridiction notamment sur les responsabilités qui pourraient être engagées. Dès lors, le moyen soulevé est prématuré et inopérant car il n’appartient pas au juge des référés de déterminer les responsabilités engagées à ce stade de la procédure.

En conséquence, la lecture de ces éléments conduit à considérer que la demande d’expertise en l’état des difficultés apparues et des dommages causés à l’aéronef mais également du différend opposant les parties est parfaitement justifiée. Elle fournira à la juridiction éventuellement saisie les éléments d’ordre technique indispensables à la solution du litige et elle se déroulera au contradictoire de l’ensemble des parties susceptibles d’être, en définitive, concernées.

Il y sera en conséquence fait droit au contradictoire de l’ensemble des parties.

La mission de l’expert et les modalités de cette expertise, ordonnée aux frais avancés des sociétés demanderesses, qui ont intérêt à ce qu’elle soit pratiquée, seront précisées dans le dispositif de la présente ordonnance.

Sur la demande de communication de pièces sous astreinte

Selon l’article 142 du code de procédure civile, les demandes de production des éléments de preuve détenus par les parties sont faites, et leur production a lieu, conformément aux dispositions des articles 138 et 139.

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir, avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, notamment par voie de référé.

Selon l’article 11 du même code, les parties sont tenues d’apporter leur concours aux mesures d’instruction sauf au juge à tirer toute conséquence d’une abstention ou d’un refus. Si une partie détient un élément de preuve, le juge peut, à la requête de l’autre partie, lui enjoindre de le produire, au besoin à peine d’astreinte. Il peut, à la requête de l’une des parties, demander ou ordonner, au besoin sous la même peine, la production de tous documents détenus par des tiers s’il n’existe pas d’empêchement légitime.

La juridiction des référés, saisie en application de l’article 145, dispose d’un pouvoir souverain pour apprécier si le demandeur justifie d’un motif légitime.

En l’espèce, les sociétés RELATED 2019 LLC et STARR ADJUSTMENT SERVICES demandent que la SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR leur transmette sous astreinte, une copie de l’enregistrement des caméras du système de vidéoprotection de l’aéroport de [Localité 8] car elle a refusé d’y procéder et ce alors qu’elle est susceptible de l’effacer à tout moment ce qui les priverait de la possibilité de déterminer précisément l’étendue des dommages causés à l’aéronef. Elles ajoutent que cet enregistrement est de surcroît nécessaire pour évaluer la vitesse de l’impact du véhicule sur l’aéronef et les réparations nécessaires afin qu’elles soient effectuées le plus rapidement possible et qu’il sera selon toute vraisemblance, demandé par l’expert judiciaire dans le cadre de sa mission.

De son côté, la SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR qui s’oppose à cette demande, fait valoir qu’une enquête pénale a été ouverte, qu’elle a déjà remis les enregistements au service d’enquête, sur réquisition du Procureur de la république, qu’aucune modification ou effacement des vidéos ne peut avoir lieu, que le système de vidéosurveillance, capte les images d’un site très sensible dont la protection intèresse la sureté de l’Etat et des personnes, que leur transmission est réglementée et que ces enregistrements sont désormais couverts par le secret prévu à l’article 11 du code de procédure pénale. Elle expose ainsi que la transmission de ces enregistrements se heurte à des contestations sérieuses.

En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats que les sociétés demanderesses ont demandé par mail du 2 septembre 2024, à la société AEROPORTS DE LA COTE AZUR, une copie des enregistrements des caméras de vidéoprotection de l’aéroport de [Localité 8] du 12 août 2024 et que cette dernière s’y est opposée aux motifs que les enregistrements avaient déjà été transmis à la gendarmerie des Transport aériens et qu’elle n’était pas autorisée à leur en fournir une copie.

Il est établi que suite à l’accident, une enquête pénale a été ouverte et que sur réquisition du Procureur de Nice en date du 21 août 2024, les enregistrements du système de vidéoprotection du 12 août 2024 ont été transmises à la gendarmerie des transport aériens le 22 août 2024 par la SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR.

Dès lors, le moyen soulevé par les sociétés RELATED 2019 LLC et STARR ADJUSTMENT SERVICES tiré du fait que les images enregistrées par le système de vidéoprotection pourraient être effacées par la SA AEROPORT DE LA COTE D’AZUR est inopérant puisqu’elles ont déjà été transmises, il y a près d’un mois, au service d’enquête, sur réquisition du Procureur de la république.

En outre, il doit être relevé que le système de vidéoprotection de l’aéroport de [Localité 8] autorisé par la Préfecture des Alpes-Maritimes, selon un arrêté du 1er avril 2022 a pour finalité d’assurer entre autres, la sécurité des personnes, la protection des bâtiments publics, la défense nationale et la prévention de actes terroristes, de sorte qu’il enregistre les images d’un site particulièrement protégé. Ce système est à ce titre, régi par les dispositions des articles L 252-2 suivants du code de la sécurité intérieure et R253-3 et suivant du même code, qui règlementent les cas de visionnage et de transmission des images aux personnes habilitées, et permettent d’en limiter l’accès aux personnes concernées pour des motifs liés notamment à la sécurité publique, au déroulement de procédures engagées devant les juridictions ou d’opérations préliminaires à de telles procédures. Or, ainsi que le soulève la SA AEROPORT DE LA COTE D’AZUR, la copie des enregistrements du système de vidéoprotection du 12 août 2024 a été déjà été transmise aux fins d’exploitation aux services de gendarmerie dans le cadre de l’enquête en cours, cet élément étant susceptible d’être couvert par le secret de l’enquête pénale.

Enfin, bien que les sociétés demanderesses exposent avoir d’ores et déjà besoin de la transmission d’une copie de cet enregistrement afin d’éviter toute perte de temps et débuter le plus rapidement les réparations nécessaires en concertation avec le fabriquant de l’aéronef, force est de relever que l’expertise judiciaire qu’elles sollicitent et à laquelle il a été fait droit, a justement pour finalité d’analyser au contradictoire des parties, les causes, la nature, l’ampleur des dommages et de déterminer les réparations nécessaires de l’aéronef afin de permettre son utilisation en toute sécurité. Dès lors, pour répondre à l’ensemble des chefs de mission, l’expert doit être en mesure, d’examiner l’état de l’aéronef suite à l’accident étant précisé qu’il lui appartiendra, si nécessaire, de solliciter la transmission de l’enregistrement de vidéoprotection.

Dès lors, au vu de la transmission de l’enregistrement du système de vidéoprotection au service de gendarmerie, de l’enquête pénale qui est en cours et de l’expertise judiciaire ordonnée en vue de déterminer les causes de l’accident, les dommages occasionnés et les travaux nécessaires, la demande de communication de pièces, non justifiée à ce stade, sera rejetée.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :

Au vu de l’issue et de la nature du litige, chaque partie supportera ses propres dépens.

Il convient, en équité et pour les mêmes motifs, de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La demande visant à dire que l’ordonnance sera exécutoire au seul vu de la minute sera rejetée, comme n’étant pas fondée, la nécessité n’étant pas démontrée.

Il convient de rappeler que la présente décision est de plein droit revêtue de l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Nous Céline POLOU, juge des référés, statuant par ordonnance réputée contradictoire, en premier ressort, mise à disposition au greffe,

Tous droits et moyens des parties demeurant réservés, au principal renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais d’ores et déjà, en application de l’article 145 du nouveau code de procédure civile,

Rejetons la fin de non recevoir soulevée par la SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR .

Déclarons recevables les sociétés de droit américain STARR ADJUSTMENT SERVICES et RELATED 2019 LLC en leurs demandes,

Ordonnons une expertise ;

Commettons pour y procéder M. [N] [G], expert judiciaire inscrit sur la liste de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, demeurant AIRBUS HELICOPTERS SAS Aéroport international [6][Localité 1] avec mission de :

* se rendre sur les lieux en présence des parties ou à défaut celles-ci régulièrement convoquées par lettre recommandée avec accusé de réception ;

* se faire communiquer par les parties tous documents ou pièces qu’il estimera nécessaires à l’accomplissement de sa mission et entendre, si besoin est seulement, tous sachants ;

* rechercher les conventions verbales ou écrites intervenues entre les parties et annexer à son rapport copie de tous documents contractuels ;

* décrire les circonstances de l’accident et en rechercher les causes ;

* vérifier la réalité des dommages causés à l’aéronef allégués par les sociétés STARR ADJUSTMENT SERVICES et RELATED 2019 LLC dans leur assignation et les pièces versées aux débats; décrire les dommages ;

* préciser les moyens et réparations nécessaires pour y remédier, en chiffrer le coût, et en préciser la durée ;

* fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre, le cas échéant, à la juridiction compétente de déterminer les responsabilités éventuellement encourues  ;

* fournir éventuellement tous éléments d’appréciation des préjudices subis résultant de l’accident, notamment les frais résultant de l’arrêt d’exploitation et d’immobilisation de l’aéronef et la perte d’usage;

* s’expliquer techniquement dans le cadre de ces chefs de mission sur les dires et observations des parties après leur avoir fait part de ses pré-conclusions ;

DISONS que la société de droit américain STARR ADJUSTMENT SERVICES et la société de droit américain RELATED 2019 LLC devront consigner à la régie du tribunal judiciaire, dans le délai de deux mois à compter du prononcé de la présente décision la somme de 4000 euros afin de garantir le paiement des frais et honoraires de l’expert ;

DISONS qu’à défaut de consignation selon les modalités ainsi fixées, la désignation de l’expert sera caduque à moins que le magistrat chargé du contrôle de l’expertise, à la demande d’une partie se prévalant d’un motif légitime, ne décide une prorogation du délai ou un relevé de forclusion ;

DISONS que si l’une des parties obtient l’aide juridictionnelle en cours d’instance, elle sera dispensée d’office de consigner les frais d’expertise et devra transmettre la copie de la décision d’aide juridictionnelle au service des expertises ;

DISONS que l’expert devra faire connaître sans délai son acceptation et qu’à défaut ou en cas de carence dans l’accomplissement de sa mission, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance du magistrat chargé du contrôle de l’expertise ;

DISONS que l’expert commencera ses opérations dès qu’il aura été avisé par le Greffe que la consignation ou que le montant de la première échéance dont la consignation a pu être assortie a été versée en application des dispositions de l’article 267 du code de procédure civile ;

DISONS que lors de la première réunion ou au plus tard de la deuxième réunion des parties, l’expert dressera un programme de ses investigations et évaluera d’une manière aussi précise que possible le montant prévisible de ses honoraires et de ses dépenses ;

DISONS qu’à l’issue de cette réunion l’expert fera connaître au magistrat, en justifiant, la somme globale qui lui parait nécessaire pour garantir en totalité le recouvrement de ses honoraires et sollicitera, le cas échéant, le versement d’une consignation complémentaire, après en avoir informé concomitamment les parties et en produisant les justificatifs ;

DISONS que préalablement l’expert communiquera aux parties sa demande de consignation complémentaire en les invitant à faire valoir leurs observations dans le délai de quinze jours ;

DISONS que l’expert adressera au magistrat chargé du contrôle des expertises sa demande de consignation complémentaire en y joignant soit les observations des parties, soit en précisant que les parties n’ont formulé aucune observation. Lorsque l’expert aura ainsi porté à la connaissance du magistrat le montant complémentaire de consignation sollicité, ce dernier rendra une ordonnance condamnant une des parties à consigner au greffe le complément qui lui paraîtra nécessaire ;

DISONS qu’à défaut de consignation dans le délai et selon les modalités fixées par le magistrat, et sauf prorogation de ce délai, l’expert déposera son rapport en l’état en application de l’article 280 du code de procédure civile ;

DISONS que l’expert devra accomplir sa mission en présence des parties ou elles dûment convoquées, les entendre en leurs explications et répondre à l’ensemble de leurs derniers dires récapitulatifs conformément aux dispositions de l’article 276 du code de procédure civile ;

DISONS qu’avant la première réunion organisée par l’expert les parties devront lui communiquer dans les huit jours de la connaissance de la date de la réunion tous les documents se rapportant au litige et leurs pièces numérotées sous bordereau daté ;

DISONS que l’expert devra impartir aux parties un délai de rigueur pour déposer les pièces justificatives qui lui paraîtraient nécessaires et qui ne lui auraient pas été communiquées spontanément, et le cas échéant, à l’expiration de ce délai en application des dispositions de l’article 275 alinéa 2 du code de procédure civile, saisir le magistrat chargé du contrôle des expertises pour faire ordonner la production de ces documents, s’il y a lieu sous astreinte ou être autorisé à passer outre, poursuivre ses opérations et conclure sur les éléments en sa possession;

DISONS que lors de la première ou au plus tard de la deuxième réunion des parties, il devra adresser au magistrat mandant et à chacune des parties ou à leurs avocats, la liste des personnes susceptibles d’être concernées par la procédure, afin que leur mise en cause éventuelle puisse être envisagée dans les meilleurs délais ;

DISONS que l’expert accomplira personnellement sa mission conformément aux dispositions des articles 263 à 284-1 du code de procédure civile, qu’en particulier il pourra recueillir les déclarations et l’avis de toutes personnes informées et qu’il aura la faculté de s’adjoindre tout spécialiste dans une spécialité distincte de la sienne conformément aux dispositions de l’article 278 du code de procédure civile ;

DISONS que pour l’exécution de sa mission l’expert commis s’entourera de tous renseignements utiles à charge pour lui d’en mentionner l’origine, qu’il pourra recueillir toutes informations orales ou écrites des toutes personne en précisant dans son rapport, leurs nom, prénom, adresse, profession ainsi que, le cas échéant, leur lien de parenté ou d’alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d’intérêts avec elles ;

DISONS que, sauf prorogation dûment autorisée par le juge chargé du contrôle des expertises, l’expert devra remettre directement un rapport à chacune des parties et en déposera un exemplaire au greffe du Tribunal, (article 173 du code de procédure civile) au plus tard le 24 mars 2025 de son rapport auquel sera joint, le cas échéant, l’avis du technicien qu’il s’est adjoint ;

DISONS que l’expert devra solliciter du Magistrat chargé du contrôle des expertises une prorogation de ce délai, si celui-ci s’avérait insuffisant ;

DISONS qu’il devra vérifier que les parties ont été à même de débattre des constatations ou des documents au vu desquels il entend donner son avis ;

DISONS que l’expert, une fois ses opérations terminées, et au moins un mois avant le dépôt de son rapport définitif, communiquera à chacune des parties, sous forme de pré-rapport le résultat de ses constatations ainsi que les conclusions auxquelles il sera parvenu, recevra et répondra aux observations que les parties auront jugé utile de lui adresser sous forme de dires à annexer au rapport définitif ;

DISONS que lorsque l’expert transmettra son pré-rapport aux parties il leur impartira un délai maximum de six semaines pour recueillir leurs observations ou réclamations récapitulatives conformément aux dispositions de l’article 276 du code de procédure civile, et qu’à l’expiration de ce délai il ne sera pas tenu de prendre en compte les observations tardives sauf cause grave et dûment justifiée, auquel cas il en fera rapport au juge chargé du contrôle de la mesure d’instruction et précisera s’il n’a reçu aucune observations ;

DISONS que passé le délai imparti, l’expert ne sera pas tenu de prendre en compte les observations tardives sauf cause grave et dûment justifiée, auquel cas il en fera rapport au juge chargé du contrôle de la mesure d’instruction ;

DISONS que dans le cas où les parties viendraient à se concilier, l’expert devra constater que sa mission est devenue sans objet et en faire rapport au juge chargé du contrôle des expertises;

DISONS qu’à l’issue de ses opérations l’expert adressera au magistrat taxateur sa demande de recouvrement d’honoraires en même temps qu’il justifiera l’avoir adressée concomitamment aux parties;

DISONS que les parties disposeront à réception de ce projet de demande de recouvrement d’honoraires, d’un délai d’un mois pour faire valoir leurs observations sur cet état de frais, que ces observations seront adressées au magistrat taxateur afin, si nécessaire, d’en débattre contradictoirement préalablement à l’ordonnance de taxe ;

DISONS que l’expert devra rendre compte de sa mission au magistrat chargé du contrôle des expertises;

DISONS qu’il devra informer immédiatement le magistrat chargé du contrôle des expertises de toutes difficultés rencontrées dans l’accomplissement de sa mission ;

DISONS qu’en application des dispositions des articles 748-1 et suivants du code de procédure civile, dans l’hypothèse où l’expert judiciaire aurait recueilli l’accord des parties à l’utilisation de la plate-forme OPALEXE, celle-ci devra être utilisée, conformément à la convention entre le ministère de la justice et le conseil national des compagnies d’experts de justice concernant la dématérialisation de l’expertise civile du 18 avril 2017 et à l’arrêté du 14 juin 2017 portant application des dispositions du titre XXI du livre 1° du code de procédure civile aux experts judiciaire, aux envois, remises et notifications mentionnés à l’article 748-1 du code de procédure civile ;

REJETONS la demande de communication sous astreinte de l’enregistrement de l’accident émanant du système de vidéoprotection formée par la société de droit américain STARR ADJUSTMENT SERVICES et la société de droit américain RELATED 2019 LLC à l’encontre de la SA AEROPORTS DE LA COTE D’AZUR;

DISONS n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DISONS que chacune des parties supportera ses propres dépens;

REJETONS tout autre chef de demande;

RAPPELLONS que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire;

Ainsi ordonné et prononcé au tribunal judiciaire de Nice

LE GREFFIER LE JUGE DES REFERES


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