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Selon les dispositions de l’article 330 du code de procédure civile l’intervention est accessoire lorsqu’elle s’appuie sur les prétentions d’une partie. Elle est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie.
Il s’en déduit qu’un syndicat a intérêt à intervenir dans une instance soulevant une question de principe dont la solution est susceptible d’être étendue à tous les adhérents et de présenter un préjudice au moins indirect à l’intérêt collectif de la profession.
En l’espèce, la commission des actes de concurrence déloyale qui est reprochée aux journalistes en leurs qualités d’associés fondateurs de la société TG PRESS est directement liée aux circonstances dans lesquelles ils ont été amenés exercer le droit qui leur est reconnu de rompre leur contrat de travail de leur propre initiative, en cas de cession du journal pour lequel ils travaillent, reconnu à l’article L7112-5 du Code du travail.
La solution du litige est donc susceptible d’être étendue à tous les adhérents du SNJ et elle est susceptible de causer un préjudice au moins indirect à l’intérêt de la profession. Il en résulte que le Syndicat National des Journalistes est recevable en son intervention volontaire.
En l’occurrence, le préjudice du SNJ était caractérisé par l’insécurité juridique génératrice d’un trouble social que l’action en concurrence déloyale a indirectement fait peser sur ses adhérents, en remettant en cause la liberté du travail et le droit qui leur est reconnu par les dispositions de l’article L7112-5 du Code du travail de rompre leur contrat de travail de leur propre initiative, en cas de cession du journal pour lequel ils travaillent. Ce préjudice a été réparé par une somme de 10 000 euros.
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 11
ARRET DU 16 AVRIL 2021
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/21985 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6QCA
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Septembre 2018 -Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2017023803
APPELANTE
SAS TOURISME ET TRANSPORT DE VOYAGEURS
prise en la personne de ses représentants légaux
[…]
[…]
immatriculée au Registre du Commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 823 175 229
représentée par Me M TEYTAUD de l’AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : J125,
assistée de Me Frédéric BOUCLY, avocat plaidant barreau de PARIS, toque: K0167
INTIMES
Monsieur F G
né le […] à Epinay-sur-Seine
[…]
92500 RUEIL-MALMAISON
représenté par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
assistée de Me Sylvain ROUMIER, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C2081substitué par Me Lucie ALLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS : toque : C2081
Monsieur X-AK AL
né le […] à Lyon
[…]
[…]
représenté par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
assistée de Me Sylvain ROUMIER, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C2081substitué par Me Lucie ALLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS : toque : C2081
Monsieur X-F AI
né le […] à Montreuil-sous-Bois
[…]
92500 RUEIL-MALMAISON
représenté par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
assistée de Me Sylvain ROUMIER, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C2081substitué par Me Lucie ALLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS : toque : C2081
Monsieur H A
né le […] à Cholet
[…]
92300 LEVALLOIS-PERRET
représenté par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
assistée de Me Sylvain ROUMIER, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C2081substitué par Me Lucie ALLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS : toque : C2081
Monsieur I Z
né le […] à Laval
[…]
[…]
représenté par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
assistée de Me Sylvain ROUMIER, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C2081substitué par Me Lucie ALLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS : toque : C2081
Monsieur X-M S
né le […] à Lyon
5 ter, rue du Fort Saint-Irénée
[…]
représenté par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
assistée de Me Sylvain ROUMIER, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C2081substitué par Me Lucie ALLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS : toque : C2081
Monsieur J K
né le […] à Créteil
[…]
[…]
représenté par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
assistée de Me Sylvain ROUMIER, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C2081substitué par Me Lucie ALLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS : toque : C2081
Madame B-AS AG AH
née le […] à Bordeaux
[…]
[…]
représenté par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
assistée de Me Sylvain ROUMIER, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C2081substitué par Me Lucie ALLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS : toque : C2081
Madame L Y
née le […] à Paris
[…]
[…]
représenté par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
assistée de Me Sylvain ROUMIER, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C2081substitué par Me Lucie ALLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS : toque : C2081
SAS TG PRESS
prise en la personne de ses représentants légaux
[…]
92500 RUEIL-MALMAISON
immatriculée au Registre du Commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 824 861 876
représenté par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
assistée de Me Sylvain ROUMIER, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C2081substitué par Me Lucie ALLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS : toque : C2081
Syndicat SNJ – SYNDICAT NATIONAL DES JOURNALISTES
[…]
[…]
représenté par Me Thomas GHIDINI, avocat au barreau de PARIS, toque : G0115
assistée de Me Sylvain ROUMIER, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : C2081substitué par Me Lucie ALLARD, avocat plaidant du barreau de PARIS : toque : C2081
SAS SEPT ET DEMI PROMOTION TOURISTIQUE
prise en la personne de ses représentants légaux
[…]
[…]
immatriculée au Registre du Commerce et des sociétés de Paris sous le numéro 341 275 402
assistée de Me F AMIEL, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : E0235
Monsieur H AF C
né le […] à PARIS
[…]
[…]
assisté de Me F AMIEL, avocat plaidant du barreau de PARIS, toque : E0235
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Janvier 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme B-Ange SENTUCQ, Présidente de chambre.
Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues à l’article 804 du code de procédure civile.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme B-Ange SENTUCQ, Présidente de chambre
M. Denis ARDISSON, Président de la chambre
Mme Isabelle PAULMIER-CAYOL, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Saoussen HAKIRI.
ARRÊT :
— contradictoire,
— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
— signé par Mme B-Ange SENTUCQ, Présidente de chambre et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffier, présent lors de la mise à disposition.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Le groupe WOLTERS KLUWER est un groupe néerlandais spécialisé dans les domaines de l’information, des logiciels et des services à destination des entreprises. Il est implanté en France depuis 1989 par le biais de sa filiale WOLTERS KLUWER France (ci-après dénommée « WKF »).
Début 2010, WKF amorçait une réorientation stratégique et décidait de recentrer ses activités sur l’édition de logiciels et les services professionnels du droit, organisées autour de trois grands pôles :
— le Pôle « Droit & Réglementation »
— le Pôle « Annonces & Formalités légales »
— le Pôle « Formation & Conférences »
WKF cédait ainsi son pôle « Santé » en 2013 et son pôle « Presse professionnelle » en 2016.
Le pôle « Presse professionnelle » regroupait de nombreux titres de presse spécialisée, à savoir :
— Le Journal de la Marine Marchande
[…]
— Liaisons sociales Magazine
— Entreprises et Carrières
— Les Guides Néret
— Revue Droit et Patrimoine
— La lettre des juristes d’affaires
— Logistiques Magazine
[…]
— L’Officiel des Transporteurs
[…]
— Connexion Transports-Territoires
— Tourisme de Groupe
La cession du pôle « Presse professionnelle » s’effectuait le 1er juillet 2016 au profit de la société INFO6TM, filiale du groupe ATC dirigé par Monsieur M N, constituée à cet effet et spécialisée dans le développement et l’acquisition d’activités de presse et s’en est suivi une réorganisation des activités du pôle par métiers.
La société INFO6TM cédait ensuite les activités et fonds de commerce relatifs à la catégorie « Transport et Tourisme » à la société TOURISME ET TRANSPORT DE VOYAGEURS (ci-après dénommée « TTV »), société en nom collectif contrôlée par les sociétés INFO6TM et O P, spécialisée dans la gestion de titres de presse professionnelle dans le domaine du tourisme et du transport de voyageurs.
La société TTV a repris :
— deux titres de presse : « Connexion Transports-Territoires », et « Tourisme de groupe »
— des activités évènementielles destinées aux professionnels du secteur des transports/publics mobilité et du tourisme de groupe
— les clients abonnés des magazines et évènements
— les douze contrats de travail de collaborateurs (journalistes, pigistes, maquettistes, etc.) qui travaillaient initialement au sein de WKF sous la direction de Monsieur F G, rédacteur en chef de « Connexion Transports-Territoire » et « Tourisme de groupe ».
— les divers actifs matériels et immatériels nécessaires à l’exploitation des activités et fonds de commerce : noms commerciaux, marques, fichiers cliets annonceurs et partenaires, noms de domaine.
Par suite plusieurs collaborateurs quittaient la société TTV comme suit :
— le 2 juillet 2016, Monsieur Q R, pigiste régulier, faisait valoir sa clause de cession
— le 26 septembre 2016, Monsieur X-M S faisait valoir sa clause de cession
— le 28 septembre 2016, Monsieur T U, journaliste du magazine « Connexion Transports et Territoire », faisait valoir sa clause de cession
— le 2 octobre 2016, Monsieur J K, journaliste pigiste, faisait valoir sa clause de cession
— le 17 octobre 2016, Monsieur F G et Monsieur X-AK AL faisaient valoir sa clause de cession
— le 7 novembre 2016, Madame Y, rédactrice en chef adjointe du magazine « Tourisme de groupe », faisait valoir sa clause de cession
— le 8 novembre 2016, Monsieur Z et Madame AG-AH faisaient valoir leur clause de cession
— le 30 novembre 2016, Monsieur A, rédacteur pigiste pour les magazines Tour hebdo, Bus & Car, Tourisme de groupe », faisait valoir sa clause de cession.
Le 15 décembre 2016, la société TG PRESS, dont l’activité principale est la publication de magazines de presse professionnelle vendus sur abonnement, était créée, proposant une offre éditoriale de deux titres : Mobilité Magazine et Voyages & Groupes, entre les neuf associés suivants :
— Monsieur F G
— Monsieur X-AK AL
— Monsieur X-F AI
— Monsieur H A
— Monsieur I Z
— Monsieur X-M S
— Monsieur J K
— Madame B-AJ AG AH
— Madame L Y
Estimant avoir été victime d’une entreprise de concurrence déloyale et parasitaire mise en oeuvre par la société TG PRESS et ses neufs associés, la société TTV saisissait, le 30 mars 2017, le Tribunal de commerce de Paris. Elle assignait également la société SEPT ET DEMI PRODUCTION TOURISTIQUE (ci-après dénommée « SEPT ET DEMI ») et son président Monsieur H C, reprochant à ce dernier d’avoir démarché la clientèle de la société TTV au nom et pour le compte de la société TG PRESS alors que la société SEPT ET DEMI était auparavant le fournisseur logistique voyage régulier de la société TTV.
Par un jugement contradictoire du 10 septembre 2018, le Tribunal de commerce de Paris a:
— Dit les exceptions d’incompétence irrecevables ou mal fondées ;
— Dit irrecevable l’intervention volontaire du Syndicat National des Journalistes ;
— Déboute la SNC TOURISME ET TRANSPORT DE VOYAGEURS de toutes ses demandes ;
— Débouté les défendeurs de leurs demandes reconventionnelles ;
— Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du CPC ;
— Condamné la SNC TOURISME ET TRANSPORT DE VOYAGEURS aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 322,95 € dont 53,61 € de TVA.
La société TTV interjetait appel de ce jugement selon déclaration remise au greffe de la cour le 9 octobre 2018.
La société TG PRESS, Monsieur F G, Monsieur X-AK AL, Monsieur X-F AI, Monsieur H A, Monsieur I Z, Monsieur X-M S, Monsieur J K, Madame B-AJ AG AH, Madame L Y, dits les co-intimés, et le Syndicat National des Journalistes interjetaient appel incident de ce jugement selon déclaration remise au greffe de la cour le 24 janvier 2019.
Les deux appels étaient joints par ordonnance du magistrat de la mise en état du 13 juin 2019.
Par dernières conclusions notifiées le 11 juillet 2019, la société TTV demande à la Cour :
Vu l’article 1241 nouveau du Code civil,
Vu les pièces produites,
— de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il s’est déclaré compétent pour connaître du litige dont il était saisi et déclaré irrecevable le SNJ.
— d’infirmer le jugement entrepris dans toutes ses autres dispositions
Statuant à nouveau :
— Juger les Intimés, la société TG PRESS, ses associés fondateurs et dirigeants, ainsi que la société SEPT ET DEMI et son président Monsieur H C, solidairement responsables d’agissement de concurrence déloyale et parasitaire commis au détriment de la société TTV.
— Débouter les Intimés de l’ensemble de leurs demandes et prétentions.
En conséquence :
— Condamner in solidum la société TG PRESS, ses dirigeants et associés fondateurs et la société SEPT ET DEMI et son président Monsieur H C, à indemniser l’ensemble des préjudices subis par TTV se décomposant comme suit :
Perte sur marge au titre de l’exercice 2017 : 268.000 euros
Perte sur marge au titre de l’exercice 2018 : 240.000 euros
Perte de valeur du fonds de commerce TTV : 1.500.000 euros
— Condamner in solidum la société TG PRESS, ses dirigeants et associés fondateurs et la société SEPT ET DEMI et son président Monsieur H C à verser 35.000 euros à la société TTV au titre de l’article 700 CPC ;
— Condamner in solidum la société TG PRESS, ses dirigeants et associés fondateurs et la société SEPT ET DEMI et son président Monsieur H C aux entiers dépens et frais irrépétibles de première instance et d’appel dont distraction pour ceux le concernant au profit de Maître M TEYTAUD, Avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du CPC.
Par dernières conclusions notifiées le 11 avril 2019, la Société TG PRESS, Monsieur F G, Monsieur X-AK AL, Monsieur X-F AI, Monsieur H A, Monsieur I Z, Monsieur X-M S, Monsieur J K, Madame B-AJ AG AH, Madame L Y et le syndicat SNJ SYNDICAT NATIONAL des JOURNALISTES demandent à la Cour de
RECEVOIR les concluants en leur appel et leur constitution ;
CONFIRMER le jugement en ce qu’il a débouté la société TOURISME ET TRANSPORTS DE VOYAGEURS de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions.
L’INFIRMER POUR LE SURPLUS ;
STATUANT A NOUVEAU
Vu l’article 47 de la Convention collective nationale des journalistes,
Vu les articles L.1411-1, L.2132-3, L.1237-3 et L.7112-5 du Code du Travail,
Vu l’article 1240 du Code civil,
Vu les articles 32-1 et 700 du Code de procédure civile
DIRE ET JUGER que la procédure initiée par la société TOURISME ET TRANSPORTS DE VOYAGEURS porte gravement et abusivement atteinte à la réputation, l’honneur et la probité des défendeurs et que ce préjudice doit être réparé comme indiqué ci-après ;
DIRE ET JUGER que la procédure initiée par la société TOURISME ET TRANSPORTS DE VOYAGEURS est particulièrement abusive au sens de l’article 32-1 du Code de Procédure Civile ;
EN CONSEQUENCE,
CONDAMNER la société TOURISME ET TRANSPORTS DE VOYAGEURS à payer à Madame B-AJ AG AH, Madame L Y, Monsieur F G, Monsieur X-AK AL, Monsieur X-F AI, Monsieur H A, Monsieur I Z, Monsieur X-M S et Monsieur J K, sur le fondement de l’article 1240 du Code civil, la somme de 10.000 € de dommages et intérêts chacun ;
CONDAMNER la société TOURISME ET TRANSPORTS DE VOYAGEURS à payer à la société TG PRESS la somme de 80.000 € de dommages et intérêts au titre de l’article 1240 du Code civil et 32-1 du Code de Procédure Civile ;
DIRE ET JUGER recevable le Syndicat National des Journalistes (SNJ) en son intervention volontaire au titre de l’article L.2132-3 du Code du Travail ;
CONDAMNER la société TOURISME ET TRANSPORTS DE VOYAGEURS à payer au SNJ au titre des préjudices matériels et moraux subi par la profession de journaliste, la somme de 10.000€ sur le fondement de l’article 1240 du Code civil ;
CONDAMNER la société TOURISME ET TRANSPORTS DE la société TTV, à payer au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, à la somme de 2.500€ par associé, soit pour Madame B-AJ AG AH, Madame L Y, Monsieur F G, Monsieur X-AK AL, Monsieur X-F AI, Monsieur H A, Monsieur I Z, Monsieur X-M S et Monsieur J K, soit au total 22.500€ pour l’ensemble des associés ;
CONDAMNER la société TOURISME ET TRANSPORTS DE CONDAMNER à payer la somme de 15.000 € à la société TG PRESS, au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER la société TOURISME ET TRANSPORTS DE CONDAMNER à payer au Syndicat National des Journalistes la somme de 2.500€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER la société TOURISME ET TRANSPORTS DE aux entiers dépens.
Par dernières conclusions notifiées le 15 mars 2019, la société SEPT ET DEMI PROMOTION et Monsieur H C demandent à la Cour de :
— Confirmer purement et simplement le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Paris le 10 septembre 2018, en ce qu’il a débouté la société TTV de l’ensemble de ses demandes, notamment à l’encontre de la société SEPT ET DEMI et de Monsieur H C.
— Dire et juger, en tout état de cause, en application des dispositions de l’article 564 du CPC, irrecevables les demandes formées en cause d’appel par la société TTV, pour être nouvelles par rapport à celles formées en première instance, et subsidiairement mal fondées pour les motifs développés aux termes des présentes.
— Débouter dès lors et de plus fort la société TTV de l’ensemble de ses demandes.
— Infirmer le jugement déféré en ce qu’il a rejeté les demandes reconventionnelles des concluants.
— Dès lors, faire droit à l’appel incident de la société SEPT ET DEMI PROMOTION TOURISTIQUE et de Monsieur C et condamner dans ces conditions la société TTV à verser à ces derniers la somme chacun de 50.000,00 € à titre de dommages-intérêts pour procédure et appel abusifs, injustifiés et malicieux.
A titre infiniment subsidiaire, condamner l’ensemble des autres intimés et/ou tous succombants, dans l’hypothèse d’une condamnation prononcée à l’encontre de la société SEPT ET DEMI PROMOTION TOURISTIQUE et Monsieur C au profit de la société TTV, à garantir intégralement la société SEPT ET DEMI PROMOTION TOURISTIQUE et Monsieur C de l’ensemble desdites condamnations.
— Condamner en tout état de cause et en toute hypothèse la société TTV et/ou tous succombants à verser à Monsieur H C et la société SEPT ET DEMI PROMOTION TOURISTIQUE la somme chacun de 10.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du CPC.
— Condamner la société TTV et/ou tous succombants en tous les dépens, lesquels pourront être recouvrés directement par Maître F AMIEL, Avocat à la Cour, en application des dispositions de l’article 699 du CPC.
La clôture de l’instruction était prononcée le 5 novembre 2020 et l’affaire fixée à l’audience du 28 janvier 2021.
SUR QUOI,
LA COUR :
La compétence matérielle et territoriale du tribunal de commerce de Paris n’étant plus discutée en appel il n’y a pas lieu de statuer sur les développements présentés par l’appelante de ce chef.
Sur la recevabilité de l’intervention volontaire du Syndicat national des journalistes (SNJ)
L’appelante soutient que le SNJ n’a pas d’intérêt à agir à la présente instance, son intervention n’étant pas liée à la défense de l’intérêt collectif des journalistes mais à l’intérêt particulier des associés fondateurs de la société TG PRESS, créée et lancée au moyen d’agissements déloyaux et parasitaires, donc sur les fautes commises par d’anciens salariés, la présente action visant d’ailleurs à protéger les journalistes encore employés par TTV contre toute concurrence déloyale pouvant nuire à leur emploi.
La société SAS TG PRESS 2/ Monsieur F G 3/ Monsieur X-AK AL 4/ Monsieur X-F AI 5/ Monsieur H A 6/ Monsieur I Z 7/ Monsieur X-M S 8/ Monsieur J K 9/ Madame B-AJ AG AH 10/ Madame L Y et 11/ le Syndicat National des Journalistes (SNJ) opposent que pour décider irrecevable l’intervention volontaire du Syndicat National des Journalistes, le Tribunal de commerce de Paris a jugé à tort que les intérêts de la profession de journaliste ne seraient pas menacés par la présente assignation du fait qu’elle ne viserait pas la liberté de la presse ni la clause de cession alors que c’est précisément les droits et libertés fondamentaux des journalistes auxquels il est gravement porté atteinte, le droit fondamental reconnu aux journalistes de rompre leur contrat de travail de leur propre initiative en cas de cession du journal pour lequel ils travaillent étant reconnu à l’article L7112-5 du Code du travail et a été rappelé à de nombreuses reprises par les Pouvoirs Publics et les juridictions ; que l’action de l’appelante vise directement à remettre en cause le droit et la liberté de chaque journaliste de faire jouer sa clause de cession en reprochant aux journalistes d’avoir fait usage de ce droit, a fortiori dans un contexte où l’employeur les y a contraint, en prorogeant abusivement à plusieurs reprises la possibilité d’en user et alors que « [les journalistes] n’étaient liés par aucune clause de non-concurrence du fait de leur statut de journaliste, et qu’ils avaient donc toute liberté pour faire jouer leur clause de cession, le bénéfice de celle-ci leur ayant d’ailleurs été proposé à trois reprises par TTV » ; qu’ainsi l’intérêt du syndicat à agir est démontré par le fait que la présente procédure remet en cause l’indépendance des journalistes en tentant abusivement de les « décrédibiliser » au yeux des annonceurs et en leur portant un préjudice économique, alors que ceux-ci ont librement usé de leur clause de cession pour constituer une nouvelle entreprise de presse ce qui est constitutif d’ une grave atteinte au droit fondamental des journalistes d’user de leur clause de cession.
Selon les dispositions de l’article 330 du code de procédure civile l’intervention est accessoire lorsqu’elle s’appuie sur les prétentions d’une partie. Elle est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie.
Il s’en déduit qu’un syndicat a intérêt à intervenir dans une instance soulevant une question de principe dont la solution est susceptible d’être étendue à tous les adhérents et de présenter un préjudice au moins indirect à l’intérêt collectif de la profession.
En l’espèce, la commission des actes de concurrence déloyale qui est reprochée aux journalistes en leurs qualités d’associés fondateurs de la société TG PRESS est directement liée aux circonstances dans lesquelles ils ont été amenés exercer le droit qui leur est reconnu de rompre leur contrat de travail de leur propre initiative, en cas de cession du journal pour lequel ils travaillent, reconnu à l’article L7112-5 du Code du travail.
La solution du litige est donc susceptible d’être étendue à tous les adhérents du SNJ et elle est susceptible de causer un préjudice au moins indirect à l’intérêt de la profession.
Il en résulte que le Syndicat National des Journalistes est recevable en son intervention volontaire le jugement étant infirmé de ce chef.
Sur la recevabilité des demandes formées par la société TTV
Selon les dispositions de l’article 565 du code de procédure civile les prétentions ne sont pas nouvelles si elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.
Il résulte de ces dispositions que la société TTV est recevable à élever en cause d’appel le montant de ses réclamations fondées au demeurant sur les mêmes chefs que ceux sur lesquels il a été statué par le jugement.
Le moyen tiré de l’irrecevabilité soulevé par Monsieur H C et la société SEPT ET DEMI PROMOTION TOURISTIQUE doit être rejeté.
Sur les agissements constitutifs de concurrence déloyale
Selon l’appelante les actes de concurrence déloyales commis par la société TG PRESS et ses neuf associés fondateurs, sont caractérisés par :
— le débauchage abusif de la quasi-totalité de ses collaborateurs soit 10 collaborateurs investis de fonctions importantes disposant d’une certaine ancienneté dans le but d’accéder de manière illégitime à des connaissances acquises par le salarié dans ses précédentes fonctions mettant en scène des manoeuvres ayant conduit à la désorganisation de l’entreprise ( pièces 11, 13, 15, 1- et 17)
— la constitution d’une société concurrente TG PRESS par les anciens salariés de la société appelante en vue de détourner le savoir-faire, les fichiers et la clientèle de la société TTV ( pièce 11, 23 et 25)
— le détournement du savoir-faire de la société TTV en l’occurrence la volonté affichée ou revendiquée de réaliser des magazines et activités commerciales concurrentes ainsi la couverture de l’évènement auquel a participé Madame L Y en qualité de salariée de TTV qui devait donner lieu à un article dans le magazine de son employeur mais qui a finalement été publié par la société usurpatrice TV PRESS dans le premier numéro du magazine « Voyage et Groupe » ( pièce 38)
— le détournement des listes et des fichiers clients résultent des contacts entrepris par divers moyens démontrés par les pièces 19, 20, 21, 25 et 26 ainsi que les modalités techniques fournies aux annonceurs, les conditions générales de vente ( pièces 27 et 28) ; le démarchage des équipes de TG PRESS a débuté dès le mois de février 2017 alors que les factures fournies par les intimés relatives à l’achat de listes d’email professionnels date du 27 mars 2017 ;
— le démarchage déloyal de la clientèle en contactant de manière systématique tous les annonceurs et abonnés de TTC par les fichiers détournés
L’action en concurrence déloyale est fondée sur les articles 1382 et 1383 du code civil elle impose de démontrer une faute, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le préjudice pour chacun des comportements dont la déloyauté est alléguée..
1- L’embauche ou le débauchage du personnel du concurrent
Le principe étant celui de la liberté du travail, le salarié, qui n’est pas lié par une clause de non-concurrence est libre, lorsqu’il quitte son employeur, de se mettre au service d’un concurrent ou de créer une entreprise concurrente .
Ce principe associé à la liberté de la concurrence, impliquent pour l’employeur la liberté d’embaucher d’anciens salariés d’une entreprise concurrente, la simple embauche dans des conditions régulières d’anciens salariés d’une entreprise concurrente n’ étant pas elle- même fautive si elle ne s’accompagne pas d’actes de concurrence déloyale.
En l’espèce, il est constant que les 9 co-intimés journalistes, pigistes et ou rédacteur en chef, en tous cas anciens salariés de la société TTV et/ou de la société INFO6TM, ( lesquelles ne justifient pas de leur effectif global), non liés par une clause de non-concurrence, ont quitté l’une et l’autre de ces sociétés de manière échelonnée à partir du 15 octobre 2016 pour F G et jusqu’à la fin du mois de décembre 2016 pour les autres co-intimés afin de rejoindre la société TG PRESS créé par eux, à l’initiative de F G.
Le caractère concerté de ces départs n’est pas établi quand leur échelonnement, la pétition des salariés en date du 8 novembre 2016 et le courrier adressé au Ministre du Travail et de l’Emploi par les syndicats représentatifs des salariés dans la même période, faisant part de « leur inquiétude grandissante en l’absence d’informations sur les conditions de la reprise de la société INFO6TM par la société TTV, » ( pièce 6 et 7 intimées) et le climat social dénoncé par le Syndicat National du Journalisme ( pièces 16 et 17 intimées ) font la preuve qu’un grand nombre de salariés se sont interrogés sur la pérennité de leur emploi eu égard à l’opacité des conditions de reprise de l’activité
du pôle presse professionnelle par la société TTV dont INFO-TM est l’associée majoritaire.
Il ne peut être déduit de la similitude des lettres par lesquelles les co-intimés ont fait valoir auprès de la direction de TTV le droit reconnu par les dispositions de l’article L 7112-5 du code du travail au journaliste professionnel de rompre son contrat de travail en cas de cession du journal, une concertation caractéristique d’une manoeuvre déloyale quand d’une part le respect des dispositions légales impose la reprise des dispositions de ce texte et que d’autre part aucune démarche active de l’un des salariés envers l’un ou l’autre de ses collègues n’est établie, les pièces 11 et 12 des intimées justifiant, s’il en était besoin, que la plupart des co-intimés ont fait valoir immédiatement après leur départ de l’entreprise leurs droits auprès de Pôle Emploi.
Il est en revanche démontré par les pièces de l’appelante n°10, ( courrier de F G à la direction du 15 octobre 2016) et 17, ( convocation de la société TTV devant le Bureau de Jugement du Conseil des Prud’hommes de Paris) à l’initiative de la salariée W AA, l’importante dégradation du climat social au sein de l’entreprise TTV, dénoncée par un communiqué de presse de l’ensemble des organisations syndicales en date du 18 novembre 2016, soulignant que « plus de 40 journalistes ont fait valoir leur clause de cession et ne sont pas remplacés », déplorant « le manque de moyens » et s’interrogeant sur « la volonté délibérée de laisser pourrir la situation avec l’objectif de vider l’entreprise de sa substance pour faire table rase et rebâtir un modèle low-cost, alertant enfin sur « le sabordage des titres, le flou entretenu sur l’avenir des publications et le démantèlement dans des conditions scandaleuses d’un groupe de presse indispensable ».
Il est par conséquent établi que le départ des 9 salariés est consécutif à une dégradation du climat social au sein de la société TTV survenu à la suite de la cession de l’entreprise en 2016 par la société VKF, aucune circonstance ne venant étayer l’allégation de débauchage qui suppose que soit rapportée la preuve, qui fait en l’espèce défaut, que les dit salariés ont été l’objet d’offres particulières pour rejoindre la société TG PRESS ou que des avantages leur aient été concédés.
Par conséquent la société TTV échoue à faire la preuve que la désorganisation de l’entreprise qu’elle invoque ait été causée par le départ des 9 salariés co-intimés et ne saurait être suivie en ce moyen.
2- La constitution d’une société concurrente
Lorsque n’est pas établie la désorganisation de l’entreprise rivale, le recrutement, même massif et dans un temps rapproché, d’anciens salariés d’une entreprise concurrente ne peut à lui seul caractériser un comportement déloyal sauf à caractériser les manoeuvres déloyales.
En l’espèce la société par actions simplifiées TG PRESS a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 12 janvier 2017, son dirigeant est F G est l’ ancien rédacteur en chef des magazines CONNEXION TRANSPORTS TERRITOIRES et TOURISME DE GROUPE de TTV.
La création de cette société par un ancien salarié d’une entreprise concurrente, non lié par une clause contractuelle de non concurrence , après l’expiration du contrat de travail, fût-elle accompagnée d’un déplacement de clientèle vers l’entreprise créée, n’est pas en soi constitutive d’un acte de concurrence illicite ou déloyale sauf à ce qu’elle s’accompagne d’un détournement de la clientèle par le fait d’un démarchage déloyal auprès des annonceurs et abonnés ou indirectement par le détournement de l’utilisation des fichiers clients, de correspondance électronique, de commandes ou du savoir-faire de la société.
Il n’est en l’espèce aucunement contesté que la société TG PRESS s’adresse au même public professionnel que la société TTV, entreprise de presse disposant d’un savoir-faire spécifique dans les domaines du transport et du tourisme, organisatrice d’évènements destinés aux professionnels de ce secteur.
Le dirigeant de TG PRESS, F G, revendiquait à ce propos sans ambiguïté dans l’éditorial de MOBILITES MAGAZINES du mois de février 2017 son expérience passée expliquant
que :
« Certains seront surpris et d’autres moins, qu’après tant d’années passées au service des professions de ce secteur, autant de signatures connues de tous aient décidé in fine de s’investir dans ce nouvel éditeur TG PRESS »(‘) soulignant son souhait de renouveler la presse du secteur du transport des voyageurs de l’hexagone dans un souci d’indépendance.
Il en est de même pour l’article écrit par Madame Y publié à partir d’une interview donnée au mois de janvier 2017, alors qu’elle n’avait plus d’employeur, pour assurer la promotion du nouveau magazine, évoquant là encore la continuité d’une expérience professionnelle pour contribuer à une offre éditorialement renouvelée.
Ainsi en faisant connaître ses activités antérieures auprès de ses nouveaux lecteurs, en sollicitant des partenaires commerciaux comme Monsieur H C et la société SEPT ET DEMI PROMOTION TOURISTIQUE pour promouvoir ses publications et ses activités évènementielles, TG PRESS n’a fait qu’user du droit de démarcher loyalement une clientèle ciblée étant rappelé qu’une entreprise ne peut se prévaloir d’aucun droit privatif sur sa clientèle et que le seul fait que des clients suivent d’anciens salariés ne saurait caractériser en soi un acte de concurrence déloyale dès lors qu’aucun procédé déloyal n’est démontré et alors que l’utilisation de l’expérience professionnelle acquise dans un secteur concurrent représente l’expression d’une compétition par le mérite.
La constitution d’une société concurrente n’est donc pas en soi un acte de concurrence déloyale.
— 3 le détournement du savoir-faire de la société TTV
La société TG PRESS a été constituée entre 9 associés disposant d’une expérience professionnelle avérée dans le domaine des transports et du tourisme de groupe et revendiquant cette expérience comme un atout pour développer une offre de presse ciblée sur les acteurs de ces deux secteurs.
Le détournement de savoir-faire suppose que des connaissances particulières, non accessibles au public, résultant de l’expérience de la société TTV dans le domaine du journalisme professionnel aient été reprises de manière détournée par les intimés or la société TTV ne démontre pas un tel détournement quand les intimés, tous journalistes permanents ou pigistes depuis plus de vingt ans ce point n’est pas contesté, établissent avoir mis à profit leur propre expérience professionnelle pour évoluer dans un secteur d’activité concurrent de manière transparente et loyale ce qui est l’expression d’une compétition au mérite, la position clairement affichée par TG PRESSE de présenter au public une offre de presse renouvelée et « indépendante » centrée sur les acteurs et les évènements du transport et du tourisme de groupe, n’étant pas pas assimilable à une manoeuvre déloyale.
L’appelante ne saurait être suivie en ce moyen.
4- le détournement des listes et des fichiers clients
Les pièces 19, 20, 21, 25 et 26 établissent respectivement que :
— F G ( pièce 29) sur le site Linkeddln présente la société TG PRESS et sa nouvelle activité d’éditeur, présente son expérience professionnelle et ses activités de rédacteur en chef
— F G ( pièce 20) a rédigé l’éditorial de MOBILITES MAGAZINE au mois de février 2017 cité plus haut,
— Madame Y ( pièce 21) déjà citée plus haut, présente le magazine VOYAGES ET GROUPE dédié au tourisme de groupe,
— ces deux magazines ( pièce 25 ) sont évoqués dans un mail échangé entre Madame AB AC
( sans référence à une société ou une entité professionnelle particulière) et Monsieur H C comme provenant de « l’ancienne équipe de CONNEXION »
— F G ( pièce 26 ) a rédigé un communiqué de presse le 25 janvier 2017 pour présenter MOBILITES MAGAZINE et l’équipe de journalistes qu’il qualifie d’expérimentés ayant p r é c é d e m m e n t t r a v a i l l é d a n s l e s r e v u e s B U S & C A R , C O N N E X I O N TRANSPORTS-TERRITOIRES ET DE TOURISME DE GROUPE.
Ces éléments sont totalement défaillants à rapporter la preuve d’un comportement déloyal imputable à la société TG PRESS ou à l’un ou l’autre des co-intimés les contacts pris pour la promotion des nouveaux titres, fût-ce à partir du mois de février 2017 ne faisant pas la preuve d’un détournement de fichiers quand par ailleurs a société TG PRESS établit par ailleurs avoir procédé à l’achat de bases de données clients ( pièce 15 intimés), avoir recouru à des ressources disponibles gratuitement sur internet ( pièce 30).
En outre les modalités techniques mises en oeuvres pour contracter les annonceurs de publicité et les conditions générales de vente des encarts publicitaires produites procèdent d’un mode opératoire habituel dont les sources sont ouvertes et là encore aucun détournement n’est établi.
Enfin l’expérience professionnelle antérieure dans les titres vendus par TTV est assumée, présentée comme un atout ayant permis la maturation du projet de création d’une nouvelle offre de presse et s’inscrivant dans une continuité et non dans un détournement qui est exclusif de toute transparence.
La société TTV ne peut donc être suivie en ce moyen.
5- le démarchage déloyal de la clientèle en contactant de manière systématique tous les annonceurs et abonnés de TTC par les fichiers détournés
Il a été vu que le démarchage d’une clientèle concurrente n’est pas déloyal en soi et la société TTV se limite à affirmer qu’elle a été victime d’un détournement de fichiers sans étayer le détournement qui ne se présume pas et ne peut se déduire d’un démarchage loyal et transparent d’une clientèle ciblée qui vient d’être décrit.
La société TG PRESS ne saurait donc être suivie en ce moyen.
6- Le comportement déloyal de H C et de la société SAS SEPT ET DEMI PROMOTION TOURISTIQUE
La société appelante soutient que ceux-ci sont « au coeur de l’entreprise de concurrence déloyale » dès lors qu’ils ont mis à disposition des intimés les locaux dans lesquels TG PRESS a installé son siège.
La convention d’occupation du local professionnel mis à disposition par la société SEPT ET DEMI PROMOTION TOURISTIQUE pour héberger la société TG PRESS ne fait pas litige mais dès lors que les agissements déloyaux ne sont pas avérés, ce moyen manque en fait et ne saurait prospérer.
Il est également fait grief à la société SEPT ET DEMI PROMOTION TOURISTIQUE et de Monsieur H AD d’avoir utilisé les fichiers clients de TTV pour promouvoir TG PRESS dans ses activités de presse et évènementielles en détournant la clientèle et les actifs ( modalités techniques fournies aux annonceurs, conditions générales de vente ) de TTV.
A l’appui de ces griefs l’appelante produit un e mail adressé par Monsieur H AD à Madame AE AC, ainsi rédigé :
« Chers Amis de Club Manager en Islande,
Un nouvel éditeur est né avec 2 titres spécialisés dans le transport de Voyageurs et dans le voyage dc groupe: Mobilités magazine et Voyages & groupe.
Une jeune équipe de journalistes motivés et passionnés depuis plus dc vingt ans ont décidé de s’investir dans une presse indépendante et de qualité.
Plusieurs évènements événements et voyages professionnels dont l’organisation m’a été con’ée sont déjà programmés en 2017 avec la participation d’experts qui traiteront d’innovations, de développement et de performances.
J ‘espère bientôt vous retrouver sur ces événements, vous qui êtes des chefs d’entreprises en attente d’échanges, de réflexion et de découvertes originales dans une organisation haut de gamme.
Bien amicalement.»
Il est incontestable que ce mail, de manière claire et sans entretenir aucune confusion avec les activités de la société TTV, fait la promotion des activités de presse et évènementielles développées par la société TG PRESS nouvellement créé, cependant il ne fait pas la preuve des détournements de fichiers et des moyens techniques allégués quand rien ne vient étayer l’allégation selon laquelle l’organisation de l’évènement Rallye Bto Be promue par TG PRESS serait le détournement d’un projet initialement conçu par TTV ce qui est au demeurant fermement contesté par F G qui souligne qu’ayant eu l’idée de ce projet WFF n’a pas voulu y donner suite invoquant un manque de moyens.
Ce mail s’inscrit donc dans le cadre d’un démarche légitime de partenariat commercial et la société appelante échoue à faire la démonstration d’actes de concurrence déloyale.
Sur les agissements constitutifs de parasitisme
L’appelante soutient que la société TG PRESS a souhaité s’inscrire dans la continuité des titres de presse « Connexion Transports-Territoires » et « Tourisme de Groupe » de la société TTV en créant ses deux magazines « Mobilités Magazine » et « Voyages et Groupe » aux dénominations proches et destinés à une même clientèle, selon un même format d’abonnement.
Elle en déduit :
— l’usurpation de la notoriété de TTV en vue de créer la confusion dans l’esprit de sa clientèle ( pièce 19, 20 et 21 ) clairement déclarée par le dirigeant de TG PRESSE et ses rédacteurs en chef revendiquant « le savoir faire soudé des journalistes par de longues années de travail en commun »et l’usurpation du nom commercial Tourisme de Groupe en choisissant de nommer le magazine concurrent VOYAGE et GROUPE
— l’usurpation d’un savoir faire par l’imitation des magazines comme le montrent la reprise des unes éditoriaux et sommaires des magazines de TTV comparés aux magazines de TG PRESS entraînant la confusion au préjudice des lecteurs habituels
— l’imitation des évènements de TTV ( pièces 22, 24, 25) : concepts format, compte rendu, sont repris à l’identique pour TOUR & GROUP ( TTV à comparer avec les RENCONTRES DE VOYAGES ET GROUPE ( TG PRESS) mais également LES RALLYES BTOB qui étaient un projet en cours d’évolution au moment dont F G Rédacteur en chef de CONNEXION TRANSPORTS-TERRITOIRE et TOURISME de GROUPE s’occupait personnellement et dans laquelle TTV a investi des fonds ; ces imitations amènent une confusion évidente dans l’esprit des lecteurs et des participants puisqu’ils sont organisés par les mêmes personnes
— la copie servie des Conditions Générales de Vente ( pièce 36 ) reprises mot pour mot par TG PRESS pour son activité concurrente avec des tarifs préférentiels
A l’encontre de la société SEPT ET DEMI PROMOTION TOURISTIQUE et de Monsieur H AD la société TTV impute particulièrement a reprise à l’identique et parasitaire des concepts et formats des évènements TOUR & GROUP, du rallye BtoB reproduisant le concept des évènements organisés par TTV via H AD qui était le fournisseur logistique de WK puis de INFO6TM et TTV.
L’action en parasitisme relève des dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil, elle suppose que soient caractérisés des actes par lesquels un agent économique s’immisce dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser de ses efforts et de son savoir-faire, en s’appropriant de manière fautive la valeur économique d’autrui, individualisée, et procurant un avantage concurrentiel .
Pour caractériser le parasitisme le demandeur à l’action doit rapporter cumulativement la preuve :
— de l’investissement réalisé pour la confection ou l’exploitation de la valeur usurpée,
— de l’existence de la valeur économique résultant de l’investissement s’agissant d’une valeur non rentabilisée, ayant une consistance particulière ( savoir-faire, type de produits, image’ ) et qui soit originale
— que l’imitation n’est pas justifiée par une exigence légale ou l’intérêt général
— de la volonté de l’auteur de tirer profit de la notoriété de la marque de la demanderesse.
La société TTV produit une expertise du cabinet d’expertise comptable EXCO PARIS qui retrace la perte du chiffre d’affaires et de marge sur coûts variables subie par les sociétés INFO6TM et TTV en 2017 et de manière durable, du fait des agissements de concurrence déloyale et parasitaire que la société TTV impute aux sociétés TG PRESS et SEPT ET DEMIE PROMOTION TOURISTIQUE cette analyse étant faite « sous réserve de la décision de justice » .
Cependant, la société TTV omet de s’expliquer et conséquemment de rapporter la preuve, des investissements qu’elle a apportés à l’exploitation du savoir-faire, des évènements, de la notoriété et des offres de presse qu’elle dit avoir été usurpés.
De même, la preuve de la réalité de la valeur économique résultant de ces investissements n’est pas démontrée quand fait défaut la démonstration de la volonté de tirer profit de la notoriété de la marque de la demanderesse qui est contredite par la revendication assumée par la société TG PRESS et tous les intimés, démontrée notamment dans le cadre des éditoriaux et du communiqué de presse cités plus haut, de se différencier des éditions concurrentes en traitant de manière indépendante et en temps réel des sujets d’actualité touchants les principaux acteurs du secteur du tourisme de groupe et des transports.
Les faits de parasitisme qui supposent une immixtion dans le sillage d’une entreprise et une appropriation fautive de la valeur économique d’autrui ne sont donc pas établis alors que l’immixtion est contredite par la communication transparente qui a accompagné le lancement de la nouvelle activité de TG PRESS et que la seule mise en oeuvre d’une expérience professionnelle pour lancer un projet dans un secteur concurrent n’est pas assimilable à une appropriation fautive d’une valeur économique au demeurant non démontrée.
L’action en parasitisme ne saurait par conséquent prospérer.
La société TTV sera donc déboutée de son appel et le jugement confirmé de ce chef.
Sur les demandes reconventionnelles en dommages et intérêts
1- Le préjudice d’atteinte à la probité, à l’honneur et à l’image de la profession
La société TG PRESS et ses associés fondateurs soutiennent avoir subi un préjudice résultant de l’engagement de la présente action qui a jeté le discrédit sur leur profession dont ils justifient par l’annulation d’événements du fait de la réticence de participants liée à la présente procédure et par la perte de leurs locaux du fait de la dégradation de leurs relations avec leur bailleur Monsieur C « qui n’a pas apprécié d’être attrait à la cause. ».
Cette demande est étayée par le terme prématuré mis au bail consenti à la société TG PRESS par Monsieur C, attrait à la cause, qui a manifesté auprès du dirigeant de la société INFO6TM ses regrets « d’avoir en toute ignorance de la présente procédure, hébergé la société TG PRESS dans les locaux dont il est propriétaire jusqu’au mois de juillet 2017 », manifestant son souhait de poursuivre une collaboration constructive avec la société appelante dans un mail produit aux débats.
Il est également produit un e mail d’un participant à un évènement programmé par TG PRESS qui indique préférer suspendre sa participation compte tenu de l’action en justice en cours.
Cependant ces éléments ne caractérisent pas le préjudice subi par les intimés dans leur exercice professionnel à raison de ces faits qui, s’ils peuvent être vécus moralement comme attentatoire à l’honneur à la probité et à l’image de la profession, ne sont indemnisables qu’autant qu’un préjudice réparable est démontré ce à quoi échoue également le SNJ.
Il ne saurait par conséquent être fait droit à cette demande.
2- Le préjudice matériel et moral
La société TG PRESS et ses associés d’une part et le SNJ d’autre part font valoir le préjudice matériel et moral résultant de la présente procédure et des faits précités.
La société SEPT ET DEMI et son président soutiennent avoir subi un préjudice du fait de cette procédure particulièrement abusive et injustifiée en particulier ils soutiennent qu’ayant appris l’existence de la présente procédure, Monsieur X-AK AM, représentant de la société SC MEDIA, a choisi de suspendre sa collaboration avec la société SEPT ET DEMI.
Les intimés justifient de la réception d’un e mail en date du 31 mars 2017 ainsi rédigé :
« Monsieur C,
Nous venons d’apprendre que votre société fait l’objet d’une assignation du tribunal de commerce dans le cadre d’un conflit qui l’oppose à la société lnfo6TM.
En conséquence, et pour des raisons que vous comprendrez aisément, nous sommes dans l’obligation de suspendre notre collaboration et donc de renoncer au voyage de repérage « Jeunes dirigeants » initialement prévu les 3 et 4 avril, déplacement auquel devait participer notre collaborateur Hafid El Basri.
En vous remerciant de votre compréhension
X-AK AM
President
SC Média »
Aucun élément n’est produit pour justifier du préjudice économique subi en conséquence de la suspension de cette collaboration mais les faits précités : annulation de participation à un évènement programmé, rupture de bail, cessation de collaboration, caractérisent le discrédit qui a été jeté par la présente action sur les conditions dans lesquelles la société TG PRESS a été créée, sur la probité de ses associés, l’image de leur travail et conséquemment, sur son partenaire professionnel et alors que la procédure entamée au mois de mars 2017, a fait peser sur les intimés durant toute cette période, la crainte d’une condamnation remettant en cause l’intégrité des conditions d’exercice de leur profession.
Ce préjudice sera réparé par une somme de 5 000 euros que la société SAS TTV sera condamnée à régler à la SAS SEPT ET DEMIE PROMOTION TOURISTIQUE et à Monsieur H AD d’une part et par une somme de 10 000 euros que la société TTV sera condamnée à régler à la société TG PRESS d’autre part outre une somme de 1 000 euros pour chacune des co-intimés.
Le préjudice du SNJ est caractérisé par l’insécurité juridique génératrice d’un trouble social que la présente action a indirectement fait peser sur ses adhérents, en remettant en cause la liberté du travail et le droit qui leur est reconnu par les dispositions de l’article L7112-5 du Code du travail de rompre leur contrat de travail de leur propre initiative, en cas de cession du journal pour lequel ils travaillent.
Ce préjudice sera réparé par une somme de 10 000 euros.
3- Le caractère abusif de la procédure
La poursuite de la procédure en appel est la manifestation même du droit d’agir en justice et la preuve de l’utilisation abusive de ce droit n’étant pas rapportée, les intimés seront déboutés de ce chef.
Sur les frais irrépétibles
La société TTV sera condamnée à régler :
— à la société TG PRESS , à Monsieur F G, Monsieur X-AK AL, Monsieur X-F AI, Monsieur H A, Monsieur I Z, Monsieur X-M S, Monsieur J K, Madame B-AJ AG AH, Madame L Y et au SNJ, une somme globale de 5 000 euros compte tenu de la constitution unique des co-intimés.
— à la société SEPT ET DEMI PROMOTION et à Monsieur H C une somme de 5 000 euros
PAR CES MOTIFS
La cour,
Déboute la société TOURISME TRANSPORT DE VOYAGEURS de son appel ;
Confirme le jugement entrepris, excepté en ce qu’il a déclaré irrecevable l’intervention volontaire du Syndicat National du Journalisme et rejeté les demandes reconventionnelles des défendeurs ;
Statuant à nouveau de ce seul chef,
Déclare recevable en son intervention volontaire le Syndicat National du Journalisme ;
Condamne la société TOURISME ET TRANSPORT DE VOYAGEURS à régler au titre du préjudice moral :
— à la société TG PRESS une somme de 10 000 euros,
— aux co-intimés : AN F G, AT X-AK AL, AU X-F AI, AO H A, AP I Z, E X-M S, AQ J K, AV B-AJ AG AH, AR L Y : une somme de 1 000 euros chacun,
— au Syndicat National du Journalisme : une somme de 10 000 euros,
Condamne la société TOURISME ET TRANSPORT DE VOYAGEUR à régler au titre des frais irrépétibles :
— à la société TG PRESS une somme de 5 000 euros,
— à la société SEPT ET DEMI PROMOTION et à Monsieur H C : une somme de 5 000 euros,
— au Syndicat National du Journalisme : une somme de 5 000 euros,
Confirme le jugement pour le surplus de ces dispositions ;
Condamne la société TOURISME ET TRANSPORT DE VOYAGEUR aux dépens.
LE GREFFIER
LA PRÉSIDENTE