Publicité « Oui SNCF » : pratique trompeuse exclue

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Publicité « Oui SNCF » : pratique trompeuse exclue
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Attention à bien lire les Conditions générales d’annulation des billets Oui SNCF. Les clauses d’exclusion restent applicables en dépit des publicités prometteuses.  C’est à bon droit que le premier juge a considéré que les mentions « pour vos voyages en train, partez en toute tranquillité avec l’assurance annulation et l’assurance voyage » ou encore « en cas d’événement empêchant votre voyage, optez pour l’assurance annulation. Votre billet non échangeable/non remboursable vous sera intégralement remboursé » apparaissent être un message publicitaire de nature hyperbolique, sans qu’il puisse en être déduit une affirmation sans réserve de remboursement des billets dans tous les cas et de manière inconditionnelle par l’assurance proposée.

De même il est exact que les mentions : « Ce que nous garantissons-Evénements liés à votre vie personnelle : maladie, accident, décès mais aussi destruction ou vols dans les locaux privés, dommages graves à votre véhicule, vol de vos pièces d’identité, accident ou panne de transport durant votre pré-acheminement, convocation devant un tribunal, à un examen… » figurent sur une page internet de nature publicitaire qui comporte des informations qui ne peuvent avoir qu’un caractère minimal et qui sont immédiatement suivies d’un lien hypertexte visible renvoyant à la lecture des conditions générales.

En l’espèce seule la convocation à un examen de rattrapage était couverte par l’assurance-annulation et non le simple report d’un examen intervenant au cours de l’année universitaire.

Sur la publicité en litige, l’emploi de points de suspension à la fin de l’énumération « maladie, accident, décès mais aussi destruction ou vols dans les locaux privés, dommages graves à votre véhicule, vol de vos pièces d’identité, accident ou panne de transport durant votre pré-acheminement, convocation devant un tribunal, à un examen… » ne permet pas non plus de conclure à une couverture générale et inconditionnelle de tous les événements susceptibles d’empêcher le voyage, mais seulement à l’existence d’autres motifs non évoqués sur cette page publicitaire, un courrier de la société Europ-assistance évoquant par exemple le cas d’une convocation pour une greffe d’organe.

Pour rappel, l’article L120-1 du code de la consommation, dans sa version en vigueur du 6 août 2008 au 1er juillet 2016, applicable au présent litige, dispose que :

« Les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère, ou est susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service.

Le caractère déloyal d’une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d’une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s’apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe.

II.- Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L.121-1 et L.121-1-1et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L.122-11 et L.122-11-1 ».

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE METZ

1èRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 12 AVRIL 2022

R.G : N° RG 20/00185 – N° Portalis DBVS-V-B7E-FG3N

Z, X, Association ASSOCIATION POUR L’INFORMATION ET LA DEFENSE DES C ONSOMMATEURS SALARIES INDECOSA-CGT

C/

S.A.S. OUI.SNCF

APPELANTS :

Monsieur A Z

[…]

[…]

Représenté par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ

Madame C X

[…]

[…]

Représentée par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ

Association POUR L’INFORMATION ET LA DEFENSE DES C ONSOMMATEURS

SALARIES INDECOSA-CGT Association nationale régie par la loi du 1er juillet 1901

prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Représentée par Me François RIGO, avocat au barreau de METZ INTIMÉE :

SAS OUI.SNCF anciennement dénommée SAS VOYAGES-SNCF.COM, prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Représentée par Me Djaffar BELHAMICI, avocat au barreau de METZ

DATE DES DÉBATS :

A l’audience publique du 22 Février 2022, tenu par Mme Aline BIRONNEAU, Magistrat rapporteur qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposé, et en a rendu compte à la Cour dans son délibéré pour l’arrêt être rendu le 12 avril 2022 par mise à disposition au greffe en application de

l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

PRÉSIDENT : Mme FLORES, Président de Chambre

ASSESSEURS : Mme BIRONNEAU, Conseiller

Madame FOURNEL, Conseiller

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Mme Sonia DE SOUSA

GREFFIER PRÉSENT LORS DU DELIBERE: Mme Cindy NONDIER

EXPOSE DU LITIGE

Mme C X et M. A Z ont réservé en ligne et payé sur le site internet «Voyages-sncf.com » des billets de train «Prem’s», non échangeables et non remboursables, concernant un trajet aller-retour de Lorraine-TGV à Nantes devant s’effectuer du 22 au 27 mai 2014, et ce pour un montant total de 160 euros. Ils ont également souscrit une assurance-annulation auprès de la compagnie Europ Assistance qu’ils ont payée à hauteur de 12,80 euros pour les deux voyageurs.

Par courrier électronique du 6 mai 2014, Mme X a été informée par l’université de Lorraine de ce qu’un examen initialement prévu le 14 mai 2014 et auquel elle devait se présenter avait été reporté au 23 mai 2014.

Par courrier électronique du 9 mai 2014, Mme X et M. Z ont écrit à la société Europ Assistance afin de déclarer le sinistre et d’obtenir le remboursement de leurs billets de train.

Par courrier électronique du 12 mai 2014, la société Europ Assistance leur a fait savoir que le motif de leur annulation à savoir le report de leur date d’examen n’entrait pas dans le cadre des garanties du contrat, car il ne s’agissait pas de la convocation à un examen de rattrapage. En conséquence, elle a refusé la prise en charge du sinistre.

Par l’intermédiaire du syndicat INDECOSA-CGT Moselle, M. Z et Mme X se sont adressés le 27 juin 2014 au service « consommateurs » de la SNCF, pour contester cette absence de prise en charge, en faisant notamment valoir le fait que les allégations publicitaires du site internet de la SNCF n’étaient pas en concordance avec les informations plus restrictives délivrées par l’assureur.

Par courrier du 29 juillet 2014, le service « consommateur » de la SNCF a invité les demandeurs à s’adresser à la société Europ Assistance, seule concernée par leur demande de prise en charge.

Par acte d’huissier du 21 avril 2016, Mme X et M. Z ont saisi la juridiction de proximité de Metz afin de faire condamner la société Voyages-SNCF.com à leur rembourser le montant de leurs billets de train (160 euros) ainsi que les frais de l’assurance à raison de 12,80 euros, outre un préjudice moral chiffré à 1 000 euros.

L’association INDECOSA-CGT est intervenue volontairement à la procédure afin de solliciter la condamnation de la société Voyages-SNCF.COM à lui payer la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts. La défenderesse a soulevé l’incompétence de la juridiction de proximité au profit de celle du tribunal de grande instance.

Par jugement du 22 septembre 2017, le tribunal d’instance s’est déclaré compétent pour connaître de l’ensemble du litige mais par arrêt du 8 février 2018, la cour d’appel de Metz a dit que le tribunal d’instance était incompétent au profit du tribunal de grande instance.

Par décision du 17 août 2018, le tribunal d’instance a donc renvoyé l’affaire devant le tribunal de grande instance de Metz.

Dans leurs conclusions récapitulatives n°2 notifiées le 22 février 2019, M. Z, Mme X et l’association INDECOSA-CGT ont demandé au tribunal, au visa des articles 1382 du code civil et L. 121-1 du code de la consommation, 1240 du code civil, des articles 328 et 329 alinéa 1er du code de procédure civile et de l’article L. 621-9 du code de la consommation, subsidiairement de l’article L. 621-1 du même code, de :

• condamner la société Oui.SNCF anciennement Voyages-SNCF.com à payer à M. Z et à Mme X la somme de 172,80 euros en remboursement des billets de train et de l’assurance annulation y afférent (en réparation du préjudice financier) ;

• condamner la société Oui.SNCF anciennement Voyages-SNCF.com à payer à M. Z la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts (en réparation de son préjudice moral) ;

• condamner la société Oui.SNCF anciennement Voyages-SNCF.com à payer à Mme X la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts (en réparation de son préjudice moral) ;

• condamner la société Oui.SNCF anciennement Voyages-SNCF.com à payer à l’association INDECOSA-CGT la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif des consommateurs ;

• condamner la société Oui.SNCF anciennement Voyages-SNCF.com à payer à l’association INDECOSA-CGT la somme de 875,54 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice financier ;

Subsidiairement,

ordonner ce paiement au visa des articles 695 et suivants du Code de procédure civile ;•

En tout état de cause,

• condamner la société Oui.SNCF anciennement Voyages-SNCF.com à payer à M. Z et Mme X la somme de 2 500 euros ;

• condamner la société Oui.SNCF anciennement Voyages-SNCF.com à payer à l’association INDECOSA-CGT la somme de 2 500 euros ; condamner la société Oui.SNCF anciennement Voyages-SNCF.com aux entiers frais et• dépens, y compris ceux devant la juridiction de proximité, du Tribunal d’instance et le cas échéant, de la Cour d’appel ;

• débouter la société Oui.SNCF anciennement Voyages-SNCF.com de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

• ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir, conformément à l’article 515 du Code de procédure civile.

Dans ses conclusions récapitulatives notifiées le 9 mai 2019, la SAS Oui.SNCF anciennement dénommée Voyages.SNCF.com prise en la personne de son représentant légal, a demandé à la juridiction de :

• déclarer les demandes de l’association INDECOSA-CGT irrecevables pour défaut d’intérêt à agir ;

subsidiairement,

débouter l’association INDECOSA-CGT de l’ensemble de ses demandes ;• déclarer les demandes de M. Z et de Mme X irrecevables et mal fondées ;• débouter M. Z et Mme X de l’ensemble de leurs demandes;•

• condamner solidairement M. Z, Mme X et l’association INDECOSA-CGT à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux frais et dépens de la procédure.

Par jugement du 14 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Metz a :

• rejeté l’exception d’irrecevabilité de l’intervention volontaire de l’association INDECOSA-CGT soulevée par la SAS Oui.SNCF anciennement dénommée Voyages-SNCF.com prise en la personne de son représentant légal ;

• déclaré en conséquence l’association INDECOSA-CGT recevable en son intervention volontaire ; débouté M. A Z de l’ensemble de ses demandes en indemnisation ;

• débouté Mme C X de l’ensemble de ses demandes en indemnisation ;

• débouté l’association INDECOSA-CGT de l’ensemble de ses demandes en indemnisation ;

• rejeté les demandes formées par M. A Z, par Madame C X et par l’association INDECOSA-CGT en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;• rejeté la demande formée par la SAS Oui.SNCF en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

• condamné in solidum M. A Z, Madame C X et l’association INDECOSA-CGT aux dépens ;

• rejeté la demande de l’association INDECOSA-CGT prise en la personne de son représentant légal tendant à ce que soit ordonné le paiement de la somme de 875,54 euros au titre des dépens ; débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;• dit n’y avoir lieu à exécution provisoire du présent jugement.•

Le tribunal a considéré qu’aucun élément versé aux débats n’était de nature à établir le paiement par les demandeurs, particulièrement M. Z, du coût du transport en ce compris l’assurance annulation. Il a ajouté que M. Z n’établissait pas davantage par les pièces produites avoir été convoqué à un quelconque examen.

S’agissant de Mme X, le tribunal a considéré qu’elle ne rapportait pas la preuve du paiement du coût du transport, la seule circonstance de ce qu’elle versait aux débats la confirmation de commande étant insuffisante à le démontrer.

Il a indiqué que l’intervention de l’association de consommateurs était bien recevable, dans la mesure où la demande initiale de M. Z et de Mme X portait sur un préjudice subi par eux en leur qualité de consommateurs.

Il a toutefois retenu que l’association ne démontrait pas l’existence de pratiques commerciales trompeuses, les termes employés correspondant à un vocabulaire simple, qui ne prête pas à ambiguïté, compréhensible par tout profane y compris par le souscripteur d’un contrat d’assurance, dont la nature n’est pas inhabituelle pour un consommateur, de sorte qu’il ne s’en évince aucune confusion dans l’esprit d’un consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

Il a ajouté que les mentions portées sous le même titre « Assurance Annulation» « En cas d’événement empêchant votre voyage, optez pour l’assurance Annulation. / Votre billet non échangeable /non remboursable vous sera intégralement remboursé …», apparaissent être un message publicitaire de nature hyperbolique, sans qu’il puisse en être déduit une affirmation sans réserve de remboursement en tous cas et hors contexte des garanties de l’assurance proposée.

Le tribunal a aussi relevé que ces garanties sont présentées par le biais d’une page internet s’inscrivant dans un message de nature publicitaire comportant des informations qui ne peuvent avoir qu’un caractère minimal et qui sont au demeurant immédiatement suivies d’un lien hypertexte visible, situé sur la même page et renvoyant à la lecture des conditions générales.

Il a également indiqué qu’aucun élément versé au dossier ne permettait d’établir que l’absence de précision quant aux garanties du contrat d’assurance avait pu altérer ou être de nature à altérer de manière substantielle le consentement du consommateur pour l’amener à acquérir lesdits billets de train.

Par déclaration reçue au greffe le 15 janvier 2020, M. Z, Mme X et l’association INDECOSA-CGT ont interjeté appel aux fins d’infirmation de l’ensemble des chefs du jugement précité.

Par conclusions déposées le 12 octobre 2021, M. Z, Mme X et l’association INDECOSA-CGT demandent à la cour de :

• dire et juger recevable et bien fondée l’appel interjeté par M. Z, Mme X et l’association INDECOSA-CGT ;

• infirmer en tous points le jugement de première instance sauf en ce qu’il a déclaré l’association INDECOSA CGT recevable en son intervention volontaire;

statuant à nouveau,

• condamner la société Oui.SNCF à payer à M. Z et Mme X au titre du préjudice financier, la somme de 172,80 euros en remboursement des billets de train et de l’assurance annulation y afférent ;

• condamner la société Oui.SNCF à payer à M. Z au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral, la somme de 1 000 euros ;

• condamner la société Oui.SNCF à payer à Mme X au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral, la somme de 1 000 euros ;

• condamner la société Oui.SNCF à payer à l’association INDECOSA CGT en réparation du préjudice causé à l’intérêt collectif des consommateurs, la somme de 20 000 euros ;

• condamner la société Oui.SNCF à payer à l’association INDECOSA CGT en réparation de son préjudice financier, la somme de 875, 54 euros ;

• condamner la société Oui.SNCF à payer à M. Z et à Mme X la somme de 2 500 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; condamner la société Oui.SNCF à payer à l’association INDECOSA CGT, la somme de 2 500• euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; condamner la société Oui.SNCF aux entiers frais et dépens d’instance et d’appel.•

Au soutien de leurs demandes les appelants s’étonnent que le tribunal ait considéré qu’ils ne rapportaient pas la preuve d’avoir payé les billets de train et l’assurance litigieuse alors que la confirmation de commande, avec indication du prix, a bien été produite.

Ils considèrent que c’est également à tort que le premier juge a estimé que M. Z ne rapportait pas la preuve de la convocation à l’examen justifiant la mobilisation de l’assurance annulation et que Mme X ne rapportait pas la preuve de la participation à l’examen reporté.

Ils soutiennent que la société Oui.SNCF a commis une faute, sous la forme d’une pratique commerciale trompeuse et d’un manquement à l’obligation d’information ou la délivrance d’une information déloyale au sujet des conditions d’assurance.

Ils soulignent que les polices d’assurance figurant sur la confirmation de commande ont le même numéro, de sorte qu’il est démontré que les deux passagers étaient couverts par cette police.

Ils reprochent à l’intimée de sous-entendre, via son site internet, que son assurance couvre de très larges cas d’annulation alors qu’en réalité les conditions d’ouverture sont restrictives, ce qui caractérise une pratique commerciale trompeuse au sens des articles L.121-1 et suivants du code de la consommation.

Les appelants estiment que la société Oui.SNCF pousse le consommateur à contracter avec elle, pour l’achat de billets de train même non remboursables, précisément dans la mesure où une assurance annulation peut être souscrite et est censée permettre, dans de larges cas, le remboursement.

Ils relèvent que sur cette page internet, le message publicitaire prend soin d’employer la première personne du pluriel à savoir « nous », faisant ainsi penser que la SNCF et son assureur ne constituent qu’une seule et même entité.

Ils ajoutent que les conditions générales de l’assurance ne sont pas proposées d’emblée mais nécessitent un « clic » mis exactement au même niveau que le lien « déclarer un sinistre », sans mise en garde sur la nécessité de prendre connaissance de ce document.

Les appelants font aussi valoir que le processus d’achat des places ne mentionnait en rien l’existence d’un assureur tiers, que ce n’est que postérieurement à l’achat que les voyageurs se voient notifier un mail à double en-tête Europe Assistance et Voyages-scnf.com confirmant la souscription d’assurance.

Ils soutiennent également que la société Voyages-scnf.com connaissait parfaitement le contenu du contrat d’assurance puisqu’elle agissait en partenariat avec Europ Assistance et ils considèrent que l’intimée encourage les voyageurs à souscrire l’assurance-annulation de leur partenaire commercial pour faire échec à l’inconvénient majeur des billets Prem’s à savoir qu’ils ne sont ni échangeables ni remboursables.

Selon les appelants, cette faute leur a causé un préjudice direct et certain, dans la mesure où en l’absence d’information trompeuse, les consorts Z-X auraient étudié la possibilité de faire le trajet de manière moins onéreuse et notamment par le bus, le cas échéant, en contractant une assurance réellement adaptée à leur cas.

A titre subsidiaire, les appelants s’en rapportent à la jurisprudence de la cour de cassation selon laquelle le vendeur intermédiaire de l’assurance doit s’assurer du caractère adapté de l’assurance proposée au consommateur en même temps que l’achat principal du bien.

Ils estiment que la société Voyages-SNCF.com n’a pas fait le nécessaire, se contentant de vendre une assurance qui n’assure que très peu de cas d’empêchement ou d’annulation de voyage.

Ils expliquent que le préjudice des consorts Z-X est constitué par l’intégralité du prix des billets perdus.

A titre infiniment subsidiaire, ils font valoir que le préjudice doit être réparé sur la base d’une perte d’une chance de ne pas contracter avec la société Oui.SNCF pour l’assurance-annulation qui ne présentait aucun intérêt pour eux.

Ils soutiennent qu’il y a bien eu un préjudice moral pour les consorts Z-X, puisque la SNCF en situation de quasi-monopole a fait preuve de mépris à leur égard.

Pour justifier l’intervention de l’association INDECOSA-CGT, ils font valoir que les consorts Z-X sont des consommateurs ordinaires victimes de la tromperie d’un vendeur professionnel de réputation nationale disposant d’un monopole et que leur litige touche à l’intérêt collectif des consommateurs.

Ils soutiennent que chaque consommateur qui se rend sur le site internet de l’intimée et qui lit les conditions de l’assurance-annulation telles qu’exposées par celui-ci sera directement trompé.

Enfin ils indiquent que l’association INDECOSA-CGT a payé les dépens d’instance et d’appel auxquels les consorts Z-X ont été condamnés (arrêt sur la compétence du 8 février 2018) et que cela représente une perte financière pour l’association à hauteur de 875,54 euros.

Dans ses conclusions déposées le 16 novembre 2021, la SAS Oui.SNCF venant aux droits de la SAS Voyages-SNCF.com demande à la cour de :

dire et juger l’appel de M. Z et de Mme X irrecevable et non fondé;• dire et juger l’appel de l’association INDECOSA-CGT non fondé ;• confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;•

• condamner chacun des appelants à lui payer la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

• condamner M. Z, Mme X et l’association INDECOSA-CGT aux entiers dépens d’appel.

L’intimée rappelle qu’elle a saisi le conseiller de la mise en état afin de faire déclarer irrecevable l’appel de M. Z et de Mme X en raison du taux du ressort.

Sur le fond, la SAS Oui.SNCF soutient que les appelants étaient parfaitement informés des conditions dans lesquelles leurs billets de train pouvaient être remboursés par Europ Assistance en cas d’annulation et qu’elle-même n’a pas à se substituer à la compagnie d’assurances en raison d’un éventuel défaut d’information sur les motifs d’annulation.

Elle ajoute que les informations données par la société Voyages-SNCF.com sur les garanties pouvant être souscrites ne peuvent être exhaustives, qu’elles ne constituent pas en elles-mêmes les conditions générales ou particulières des contrats d’assurance souscrits et qu’en bas de la page dont l’extrait est versé aux débats figure un lien vers les conditions générales du contrat d’assurance en litige.

La SAS Oui.sncf indique que si les appelants reprochent à la société Europ Assistance de ne pas avoir pris en charge le montant de leurs billets de train alors que cette prise en charge était prévue dans leurs conditions générales ou particulières du contrat d’assurance ou s’ils considèrent ne pas avoir été suffisamment informés par la société Europ Assistance des conditions générales ou particulières du contrat, il leur appartient de se retourner contre ladite compagnie.

Elle rappelle qu’elle-même n’était pas partie à ce contrat d’assurance et qu’elle n’a pas à assumer une éventuelle difficulté dans son exécution.

Pour le surplus, l’intimée s’en réfère à la motivation du jugement de première instance.

Elle estime que M. Z et M. X ne rapportent pas la preuve d’un préjudice moral supplémentaire et elle souligne que saisie de leurs réclamations, elle les a toujours invités à s’adresser à la compagnie d’assurance.

Elle rappelle aussi qu’après réception de l’assignation devant le juge de proximité, elle leur avait proposé pour solder le litige et à titre commercial une somme de 400 euros que M. Z et Mme X ont refusée.

S’agissant de la demande d’indemnisation portée par l’association INDECOSA-CGT, la SAS Oui-SNCF estime qu’aucun élément nouveau ne permet d’infirmer la décision rendue en première instance.

La SAS Oui-SNCF, qui s’en réfère toujours à la motivation du jugement de première instance, fait aussi valoir qu’il ne peut être déduit ni de l’emploi du sujet à la première personne du pluriel ni des termes employés la confusion ou l’affirmation sans réserve et trompeuse alléguée.

Elle indique que les termes employés relèvent d’un vocabulaire simple, qui ne prête pas à ambiguïté, compréhensible de tout profane y compris par le souscripteur d’un contrat d’assurances, contrat dont la nature n’est pas inhabituelle pour un consommateur, de sorte que ce vocabulaire ne crée aucune confusion dans l’esprit d’un consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

L’intimée ajoute que la seule présence de points de suspension dans l’énumération des cas couverts ne suffit pas à caractériser une présentation volontairement trompeuse des garanties données par la société d’assurance.

De même, elle estime que les mentions portées sous le titre « Assurance Annulation» « En cas d’événement empêchant votre voyage, optez pour l’assurance Annulation. / Votre billet non échangeable / non remboursable vous sera intégralement remboursé… », apparaissent être un message publicitaire de nature hyperbolique, sans qu’il puisse en être déduit une affirmation sans réserve de remboursement en tous les cas et hors contexte des garanties de l’assurance proposée.

La SAS Oui-SNCF considère également que les demandes de l’association INDECOSA-CGT doivent être rejetées, dans la mesure où les demandes de M. Z et de Mme X sont non fondées.

Elle relève que le préjudice financier que l’association allègue consiste en un remboursement des dépens acquittés par elle en vertu d’une condamnation par la cour d’appel de Metz selon arrêt du 8 février 2018.

MOTIFS DE LA DECISION

Vu les conclusions déposées le 12 octobre 2021 par M. Z, Mme X et l’association INDECOSA-CGT et le 16 novembre 2021 par la SAS Oui.SNCF venant aux droits de la SAS Voyages-scnf.com, conclusions auxquelles il sera expressément renvoyé pour les conclusions et les moyens des parties conformément à l’article 455 du code de procédure civile ;

Vu l’ordonnance de clôture du 15 février 2022 ;

I- Sur la recevabilité de l’appel de M. Z et de Mme X

La SAS Oui-SNCF rappelle qu’elle a saisi le conseiller de la mise en état pour faire valoir l’irrecevabilité de l’appel de M. Z et de Mme X, au motif du taux du ressort.

La cour relève toutefois que par ordonnance du 8 mars 2021, le conseiller de la mise en état a répondu à ce moyen, rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la SAS Oui-SNCF et déclaré recevable l’appel de M. Z et de Mme X. Devant la cour, la SAS Oui-SNCF ne fait pas valoir d’autres moyens pour soutenir l’irrecevabilité de l’appel.

En conséquence, la cour déclare recevable l’appel formé par M. Z et Mme X à l’encontre du jugement rendu le 14 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Metz.

II- Sur la demande de dommages et intérêts de M. Z et Mme X

Sur la pratique commerciale trompeuse•

L’article L120-1 du code de la consommation, dans sa version en vigueur du 6 août 2008 au 1er juillet 2016, applicable au présent litige, dispose que :

« Les pratiques commerciales déloyales sont interdites. Une pratique commerciale est déloyale lorsqu’elle est contraire aux exigences de la diligence professionnelle et qu’elle altère, ou est susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service.

Le caractère déloyal d’une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs ou un groupe de consommateurs vulnérables en raison d’une infirmité mentale ou physique, de leur âge ou de leur crédulité s’apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement de la catégorie ou du groupe.

II.-Constituent, en particulier, des pratiques commerciales déloyales les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L.121-1 et L.121-1-1et les pratiques commerciales agressives définies aux articles L.122-11 et L.122-11-1 ».

A titre liminaire, la cour relève que l’achat de billets de train par Mme X et M. Z avec souscription d’une assurance-annulation pour un trajet aller-retour de Lorraine-TGV à Nantes devant s’effectuer du 22 au 27 mai 2014 ne fait aucun doute, dès lors que la « confirmation de commande » versée aux débats par les intéressés établit le paiement de ces billets et de cette assurance, étant observé par ailleurs que ni la SAS Oui-SNCF ni la société Europ-assistance n’ont jamais contesté la réalité de cet achat.

Pour établir la pratique commerciale trompeuse, M. Z et Mme X se fondent sur le document « vos assurances voyages », dont la SAS Oui-SNCF ne conteste pas qu’il s’agit d’une impression papier issue de son propre site internet et lisible lors des opérations d’achat de billets par M. Z et Mme X.

Néanmoins, c’est à bon droit que le premier juge a considéré que les mentions « pour vos voyages en train, partez en toute tranquillité avec l’assurance annulation et l’assurance voyage » ou encore « en cas d’événement empêchant votre voyage, optez pour l’assurance annulation. Votre billet non échangeable/non remboursable vous sera intégralement remboursé » apparaissent être un message publicitaire de nature hyperbolique, sans qu’il puisse en être déduit une affirmation sans réserve de remboursement des billets dans tous les cas et de manière inconditionnelle par l’assurance proposée.

De même il est exact que les mentions : « Ce que nous garantissons-Evénements liés à votre vie personnelle : maladie, accident, décès mais aussi destruction ou vols dans les locaux privés, dommages graves à votre véhicule, vol de vos pièces d’identité, accident ou panne de transport durant votre pré-acheminement, convocation devant un tribunal, à un examen… » figurent sur une page internet de nature publicitaire qui comporte des informations qui ne peuvent avoir qu’un caractère minimal et qui sont immédiatement suivies d’un lien hypertexte visible renvoyant à la lecture des conditions générales.

Si ces conditions générales ne sont pas produites, les appelants ne contestent pas le fait qu’il y était expressément mentionné que seule la convocation à un examen de rattrapage était couverte par l’assurance-annulation et non le simple report d’un examen intervenant au cours de l’année universitaire.

L’emploi de points de suspension à la fin de l’énumération « maladie, accident, décès mais aussi destruction ou vols dans les locaux privés, dommages graves à votre véhicule, vol de vos pièces d’identité, accident ou panne de transport durant votre pré-acheminement, convocation devant un tribunal, à un examen… » ne permet pas non plus de conclure à une couverture générale et inconditionnelle de tous les événements susceptibles d’empêcher le voyage, mais seulement à l’existence d’autres motifs non évoqués sur cette page publicitaire, un courrier de la société Europ-assistance évoquant par exemple le cas d’une convocation pour une greffe d’organe.

De plus, les appelants n’expliquent pas en quoi l’emploi du pronom personnel sujet « nous » constituerait une pratique commerciale trompeuse quant à l’assurance-annulation proposée, étant observé par ailleurs que le logo « Europ Assistance » était parfaitement visible sur la page internet.

Enfin, les termes employés correspondent à un vocabulaire simple, qui ne prête pas à ambiguïté, compréhensible par tout profane y compris par le souscripteur d’un contrat d’assurance, contrat dont la nature n’est d’ailleurs pas inhabituelle pour un consommateur, de sorte que le vocabulaire employé n’entraîne aucune confusion dans l’esprit d’un consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

En définitive, la pratique commerciale trompeuse imputée à la SAS Oui-SNCF par M. Z et Mme X n’apparaît pas établie.

Sur le manquement à l’obligation d’information•

Il sera observé que M. Z et Mme X ne précisent pas le fondement légal du manquement allégué de la SAS Voyages.SNCF.com à son obligation d’information.

Certes, il se déduit de l’article 1147 du code civil dans sa version en vigueur du 17 février 1804 au 1er octobre 2016, applicable au présent litige, que la société de transports qui propose à son client un contrat d’assurance afin de garantir le remboursement du titre de transport en cas d’événement empêchant le voyage est tenue à une obligation d’information à son égard, en ce sens qu’elle doit lui communiquer les documents précontractuels.

Pour autant, le devoir d’information et de conseil qui pèse sur la société de transport ne lui impose pas d’intervenir auprès de l’assuré lorsque celui-ci est, comme en l’espèce, en mesure, à la simple lecture des conditions générales de l’assurance, de connaître les conditions précises du contrat.

La SAS Voyages.SNCF.com a bien communiqué les conditions générales du contrat d’assurance à M. Z et Mme X et il ne peut être considéré que la SAS Voyages. SNCF.com avait l’obligation de s’informer précisément de la situation scolaire et/ou professionnelle de Mme X afin de vérifier les conditions dans lesquelles un examen pourrait être inopinément reporté.

En conséquence, le manquement de la SNCF à son obligation d’information n’est pas établi.

La cour confirme le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. Z et Mme X de leurs demandes de dommages et intérêts à l’égard de la SAS Oui-SNCF.

III- Sur la demande de dommages et intérêts de l’association INDECOSA-CGT

La SAS Oui-SNCF ne conteste plus la recevabilité de l’action de cette association.

Néanmoins, l’association INDECOSA-CGT fait valoir une pratique commerciale trompeuse sur la base des mêmes moyens que ceux précédemment écartés par la cour en ce qui concerne les demandes de M. Z et Mme X.

De plus, le préjudice financier dont l’association sollicite la réparation consiste en un remboursement des dépens acquittés par elle en vertu d’une condamnation par la cour d’appel de Metz à cette fin selon arrêt du 8 février 2018, condamnation qu’il n’appartient pas à la présente juridiction de remettre en cause dans le cadre d’une autre instance.

En conséquence, la cour confirme la décision entreprise en ce qu’elle a débouté l’association INDECOSA-CGT de l’ensemble de ses demandes en indemnisation et en ce qu’elle a rejeté la demande de l’association tendant à ce que soit ordonné le paiement de la somme de 875,54 euros au titre des dépens.

IV- Sur les dépens et frais irrépétibles

La cour confirme le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande formée par la SAS Oui.SNCF en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et en ce qu’il a condamné « in solidum » M. Z, Mme X et l’association INDECOSA-CGT aux dépens.

La cour condamne M. Z, Mme X et l’association INDECOSA-CGT qui succombent aux dépens de l’appel.

Pour des considérations d’équité, M. Z, Mme X et l’association INDECOSA-CGT seront condamnés chacun à payer à la SAS Oui-SNCF la somme de 800 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, par arrêt mis à disposition au greffe,

DECLARE recevable l’appel formé par M. A Z et Mme C X à l’encontre de la décision du tribunal de grande instance de Metz du 14 novembre 2019 ;

CONFIRME ce jugement en toutes ses dispositions déférées à la cour;

Y ajoutant,

CONDAMNE M. A Z, Mme C X et l’association INDECOSA-CGT aux dépens de l’appel ;

CONDAMNE M. A Z, Mme C X et l’association INDECOSA-CGT à payer à la SAS Oui-SNCF venant aux droits de la SAS Voyages-SNCF.com la somme de 800 euros chacun en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été rendu publiquement par sa mise à disposition au greffe de la 1erchambre civile de la Cour d’appel de Metz le 12 Avril 2022, par Mme FLORES, Présidente de Chambre, assistée de Mme NONDIER , Greffier, et signé par elles.

La Greffière La Présidente de Chambre


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