Publicité illicite de boissons alcooliques sur Instagram

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Publicité illicite de boissons alcooliques sur Instagram
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Les comptes instagram qui mettent en valeur la consommation d’alcool tombent sous le coup de l’article L. 3323-4 du code de la santé publique qui dispose que :

La publicité autorisée pour les boissons alcooliques est limitée à l’indication du degré volumique d’alcool, de l’origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l’adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d’élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit.

Cette publicité peut comporter des références relatives aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d’origine telles que définies à l’article L. 115-1 du code de la consommation ou aux indications géographiques telles que définies dans les conventions et traités internationaux régulièrement ratifiés. Elle peut également comporter des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit.

Le conditionnement ne peut être reproduit que s’il est conforme aux dispositions précédentes.

Toute publicité en faveur de boissons alcooliques, à l’exception des circulaires commerciales destinées aux personnes agissant à titre professionnel ou faisant l’objet d’envois nominatifs ainsi que les affichettes, tarifs, menus ou objets à l’intérieur des lieux de vente à caractère spécialisé, doit être assortie d’un message de caractère sanitaire précisant que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé.

Sur l’illicéité des contenus du compte Instagram ‘YourBestRiflon’

La cour a confirmé l’illicéité des contenus du compte Instagram ‘YourBestRiflon’ en vertu de l’article L. 3323-4 du code de la santé publique, qui encadre la publicité pour les boissons alcooliques. La société Meta ne conteste plus cette illicéité, et la cour adopte les motifs du jugement initial.

Sur le champ d’application des mesures propres à la prévention du dommage en matière de procédure accélérée au fond

La société Meta conteste le pouvoir du président du tribunal judiciaire d’ordonner la communication des données d’identification du titulaire du compte Instagram. Elle soutient que cette mesure est limitée aux procédures pénales et vise à concilier différents droits fondamentaux. Cependant, la cour estime que le président a le pouvoir d’ordonner de telles mesures pour prévenir un dommage.

Sur la proportionnalité des mesures de retrait et de communication des données d’identification du titulaire du compte de publicités de boissons alcooliques illicites

La société Meta conteste la communication des données d’identification du titulaire du compte Instagram, invoquant des violations de droits fondamentaux. Cependant, la cour considère que ces mesures sont nécessaires pour prévenir le dommage causé par la publicité illicite de boissons alcooliques.

Sur le bien fondé de la mesure d’astreinte

La cour confirme la mesure d’astreinte ordonnée par le président du tribunal judiciaire, considérant qu’elle est proportionnée à l’objectif de faire cesser le dommage causé par la publicité illicite.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société Meta est condamnée aux dépens et au paiement des frais irrépétibles, en raison de sa défaite dans l’action en justice.

1. Respectez les dispositions légales en matière de publicité pour les boissons alcooliques, telles que celles énoncées dans l’article L. 3323-4 du code de la santé publique, pour éviter toute sanction juridique.

2. Assurez-vous de respecter les procédures accélérées au fond en matière de prévention du dommage en ligne, conformément à l’article L. 213-2 du code des organisation judiciaire, pour agir de manière efficace et conforme à la loi.

3. Veillez à ce que les mesures de retrait et de communication des données d’identification du titulaire du compte en ligne soient proportionnées et nécessaires pour prévenir tout dommage causé par des contenus illicites, en tenant compte des droits fondamentaux des parties impliquées.

Réglementation applicable

– Code de la santé publique
– Article L. 3323-4
– Article L. 3351-7
– Code des organisations judiciaires
– Article L. 213-2
– Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication
– Article 1er
– Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN)
– Article 1er
– Article 6.I.
– Article 20, alinéa 1
– Loi n° 2021-998 du 30 juillet 2021
– Article 17
– Code de procédure civile
– Article 145
– Code des postes et des communications électroniques
– Article L. 34-1
– Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données)

Avocats et magistrats intervenants

– Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS
– Me Bertarnd LIARD, avocat au barreau de PARIS
– Me François LAFFORGUE, avocat au barreau de PARIS

Mots-clefs

– compte Instagram ‘YourBestRiflon’
– article L. 3323-4 du code de la santé publique
– publicité pour les boissons alcooliques
– LCEN (Loi pour la confiance dans l’économie numérique)
– procédure accélérée au fond
– président du tribunal judiciaire
– communication des données d’identification
– liberté d’expression
– protection des données personnelles
– proportionnalité des mesures
– retrait des contenus illicites
– astreinte
– dépens et frais irrépétibles

Définitions juridiques

Le compte Instagram ‘YourBestRiflon’ est au centre d’une affaire concernant la publicité pour les boissons alcooliques, en violation de l’article L. 3323-4 du code de la santé publique. Cette affaire relève de la LCEN (Loi pour la confiance dans l’économie numérique) et a été traitée en procédure accélérée au fond par le président du tribunal judiciaire. La communication des données d’identification a été nécessaire pour garantir la protection des données personnelles, tout en respectant la liberté d’expression. Les mesures prises pour le retrait des contenus illicites ont été jugées proportionnées, avec une astreinte en cas de non-respect. Les dépens et frais irrépétibles ont également été pris en compte dans cette affaire.

Montants / Préjudice

– Somme allouée à l’Association nationale de Prévention en alcoologie et addictologie : 5.000 euros
– Somme allouée aux dépens : non spécifiée

Parties impliquées

– Société META PLATFORMS IRELAND LIMITED
– ASSOCIATION NATIONALE DE PRÉVENTION EN ALCOOLOGIE ET ADDICTOLOGIE (ANPAA)

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 11

ARRÊT DU 09 FEVRIER 2024

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/18920 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGVKR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2022 -Tribunal judiciaire de PARIS 17 – RG n° 22/52829

APPELANTE

Société META PLATFORMS IRELAND LIMITED

Société de droit irlandais, prise en la personne de ses représentants légaux

Merrion Road Dublin 4 D04 X2K5

IRLANDE

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Assistée de Me Bertarnd LIARD, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

ASSOCIATION NATIONALE DE PRÉVENTION EN ALCOOLOGIE ET ADDICTOLOGIE ( ANPAA)

Prise en la personne de son Président en exercice domicilié ès qualité au siège social

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me François LAFFORGUE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0268

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 07 Décembre 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Denis ARDISSON, Président de chambre, chargé du rapport

Marie-Sophie L’ELEU DE LA SIMONE, Conseillère,

CAROLINE GUILLEMAIN, Conseillère,

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Damien GOVINDARETTY

ARRÊT :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Denis ARDISSON, Président de chambre et par Damien GOVINDARETTY, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

1. L’Association nationale de Prévention en alcoologie et addictologie (‘l’ANPAA’), habilitée pour agir pour la prévention contre l’alcoolisme et les addictions, a fait établir par huissier de justice à Paris le 21 mai 2021, sur Internet, l’accès depuis la plateforme ‘Instagram’, service de communication au public en ligne ouvert par la société Meta Plateforms Ireland (‘société Meta), à un compte nommé ‘YourBestRiflon’ offrant au public des animations vidéos promouvant la consommation de l’alcool de pastis associée à la marque Ricard.

2. Estimant que ces contenus violaient le cadre légal de la publicité ou de la propagande directe ou indirecte de boissons alcooliques fixé à l’article L. 3323-4 du code de la santé publique, l’ANPAA a informé de cette contravention, le 14 février 2022, les sociétés Facebook France et Facebook Ireland Limited, devenue Meta Plateforms Ireland (‘société Meta’), et leur a vainement réclamé, en application de l’article 6.I., alinéa 5, de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, la communication des coordonnées de l’éditeur du compte Yourbestriflon ainsi que le retrait des contenus litigieux.

3. L’ANPAA a alors assigné le 24 mars 2022 en procédure accélérée au fond les sociétés Facebook France et Facebook Ireland Limited devant le tribunal judiciaire de Paris qui, par jugement du 20 mai 2022, a, avec exécution provisoire :

– constaté le caractère parfait du désistement d’instance et d’action de l’ANPAA à l’endroit de la société Facebook France,

– dit qu’il emporte extinction de l’instance et d’action entre les parties susvisées,

– déclaré l’ANPAA recevable en toutes ses demandes,

– déclaré l’assignation délivrée le 24 mars 2022 régulière,

– retenu sa compétence territoriale pour connaître du litige,

– ordonné à la société Meta de supprimer les contenus illicites numérotés par le tribunal, dans l’ordre visuel du procès-verbal de constat d’huissier du 21 mai 2021, n°1, 2, 3, 5 à 7, 9, 10, 13 à 17, 20 à 23, 27, 29 à 31 et 33, mis en ligne sur la page ‘your bestriflon’ hébergée sur le réseau social ‘Instagram’, accessible à l’adresse URL www.instagram.com/yourbestriflon et ce, dans le délai de deux mois à compter de la communication d’un procès-verbal de constat par tel huissier de justice du choix et aux frais de l’ANPAA, au sein duquel les publications sus visées seront identifiées, isolément, par leur adresse URL, puis sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard durant trois mois,

– ordonné à la société Meta de communiquer à la l’ANPAA les données de nature à identifier le ou les éditeurs du compte ‘your bestriflon’ qu’elle héberge, et a minima : les nom et prénom, la date et le lieu de naissance ou la raison sociale, ainsi que les nom et prénom, date et lieu de naissance de la personne agissant en son nom lorsque le compte est ouvert au nom d’une personne morale ; la ou les adresses de courrier électronique de l’utilisateur et du ou des comptes associés le cas échéant ; le ou les numéros de téléphone – ce dans le délai de deux mois à compter de la signification du jugement, puis sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard durant trois mois,

– débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires,

– condamné la société Meta à payer à l’ANPAA la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Meta aux dépens.

4. La société Meta Plateforms Ireland a interjeté appel du jugement le 8 novembre 2022.

PROCÉDURE EN APPEL :

5.Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 24 novembre 2023 pour la société Meta Platforms Ireland Ltd. afin d’entendre, en application du Règlement général sur la protection des données (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, les articles 6 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance en l’économie numérique, tel que modifié par la loi n°2021-998 du 30 juillet 2021, L. 34-1 II bis et III du code des postes et des communications électroniques et 122 du code de procédure civile :

– infirmer le jugement en ce qu’il a déclaré l’ANPAA recevable en toutes ses demandes, assorti d’une astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard durant trois mois l’injonction faite à la société Meta de supprimer les contenus illicites numérotés par le tribunal, dans l’ordre visuel du procès-verbal de constat d’huissier du 21 mai 2021, n°1, 2, 3, 5 à 7, 9, 10, 13 à 17, 20 à 23, 27, 29 à 31 et 33, mis en ligne sur la page ‘your best riflon’ hébergée sur le réseau social Instagram, accessible à l’adresse URL www.instagram.com/yourbestriflon et ce, dans le délai de deux mois à compter de la communication d’un procès-verbal de constat par tel huissier de justice du choix et aux frais de l’ANPAA, au sein duquel les publications sus visées seront identifiées, isolément, par leur adresse URL, ordonné à la société Meta de communiquer à l’ANPAA les données de nature à identifier le ou les éditeurs du compte ‘your best riflon’ qu’elle héberge, et a minima : les nom et prénom, la date et le lieu de naissance ou la raison sociale, ainsi que les nom et prénom, date et lieu de naissance de la personne agissant en son nom lorsque le compte est ouvert au nom d’une personne morale ; la ou les adresses de courrier électronique de l’utilisateur et du ou des comptes associés le cas échéant ; le ou les numéros de téléphone, dans le délai de deux mois à compter de la signification du jugement, puis sous astreinte provisoire de 100 euros par jour de retard durant trois mois, – débouté les parties de toutes demandes plus amples ou contraires mais seulement lorsqu’il déboute la société Meta de ses demandes; -condamné la société Meta à payer à l’ANPAA la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, condamné la société Meta aux dépens, rappelé que l’exécution provisoire est de droit,

sur la demande de communication des données de nature à identifier le titulaire du compte Instagram ‘YourBestRiflon’,

à titre principal,

– juger que le président du tribunal judiciaire de Paris, statuant selon la procédure accélérée au fond, était dépourvu du pouvoir juridictionnel pour statuer sur la demande de l’ANPAA tendant à la communication des données de nature à identifier le titulaire du compte Instagram ‘YourBestRiflon’ accessible à l’adresse URL www.instagram.com/yourbestriflon/ que la société Meta héberge, et a minima les nom et prénom, la date et le lieu de naissance ou la dénomination sociale, ainsi que les nom et prénom, date et lieu de naissance de la personne agissant pour son compte lorsque le compte est ouvert au nom d’une personne morale ; la ou les adresses de courrier électronique de l’utilisateur et du ou des comptes associés, le cas échéant ; le ou les numéros de téléphone, sur le fondement de l’article 6.I.8 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique,

– déclarer l’ANPAA irrecevable en sa demande formulée sur ce fondement,

à titre subsidiaire,

– juger que l’ANPAA ne peut fonder sa demande de communication de données d’identification du titulaire du compte Instagram ‘YourBestRiflon’ accessible à l’adresse URL www.instagram.com/yourbestriflon sur l’article 6.II de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique et qu’il était en mesure de communiquer avec le titulaire du compte Instagram ‘YourBestRiflon’,

– débouter l’ANPAA de ses demandes à ce titre,

à titre plus subsidiaire,

– limiter toute communication des informations d’identification relatives au titulaire du compte Instagram ‘YourBestRiflon’ accessible à l’adresse URL www.instagram.com/yourbestriflon/ en tenant compte des réserves suivantes :

(i) cette communication est limitée aux informations d’identification de base des utilisateurs du titulaire du compte Instagram ‘YourBestRiflon’ en la possession de la société Meta qui comprennent les informations suivantes : le prénom ‘YourBestRiflon’ du titulaire du compte ; la date de création du compte ; une adresse électronique associée au compte ; une adresse IP correspondant à la création du compte ; et 54 adresses IP différentes correspondant aux connexions au compte, avec les dates et heures de connexion pour chaque adresse IP,

(ii) il ne soit pas ordonné à la société Meta de communiquer d’autres données que ces informations d’identification de base mentionnées au point (i) ci-dessus dans la mesure où seules ces données existent,

sur les demandes de condamnation sous astreintes,

– débouter l’ANPAA de ses demandes de condamnations sous astreintes,

en tout état de cause,

– débouter l’ANPAA de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– condamner l’ANPAA à verser la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner l’ANPAA aux entiers dépens ;

* *

6.Vu les conclusions remises par le réseau privé virtuel des avocats le 30 novembre 2023 pour l’Association nationale de Prévention en alcoologie et addictologie, afin d’entendre :

– confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions

– condamner la société Meta à payer la somme de 5.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel,

– condamner la société Meta aux entiers dépens de la procédure d’appel ;

* *

Le président a ordonné la clôture de l’affaire à l’audience du 7 décembre 2023.

SUR CE, LA COUR,

7. Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties.

I. Sur l’illicéité des contenus du compte Instagram ‘YourBestRiflon’

8. Il est rappelé les termes de l’article L. 3323-4 du code de la santé publique disposant que :

La publicité autorisée pour les boissons alcooliques est limitée à l’indication du degré volumique d’alcool, de l’origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l’adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d’élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit.

Cette publicité peut comporter des références relatives aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d’origine telles que définies à l’article L. 115-1 du code de la consommation ou aux indications géographiques telles que définies dans les conventions et traités internationaux régulièrement ratifiés. Elle peut également comporter des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit.

Le conditionnement ne peut être reproduit que s’il est conforme aux dispositions précédentes.

Toute publicité en faveur de boissons alcooliques, à l’exception des circulaires commerciales destinées aux personnes agissant à titre professionnel ou faisant l’objet d’envois nominatifs ainsi que les affichettes, tarifs, menus ou objets à l’intérieur des lieux de vente à caractère spécialisé, doit être assortie d’un message de caractère sanitaire précisant que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé.

9. D’après ses conclusions d’appel, la société Meta ne conteste plus l’illicéité des contenus du compte Instagram ‘YourBestRiflon’ dénoncés par l’ANPAA, et, connaissance prise de ceux-ci, la cour adopte les motifs du jugement par lesquels il a retenu que ces contenus étaient étrangers aux seules indications énumérées par l’article L. 3323-4 du code de la santé publique.

II. Sur le champ d’application des mesures propres à la prévention du dommage en matière de procédure accélérée au fond

10. Il est rappelé les termes de l’article L. 213-2 du code des organisation judiciaire :

En toutes matières, le président du tribunal judiciaire statue en référé ou sur requête. Dans les cas prévus par la loi ou le règlement, il statue selon la procédure accélérée au fond.

11. Telles qu’elles sont disponibles sur le compte Instagram offert par la société Meta, les publications illicites en litige sont soumises aux dispositions de la loi n°’2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (‘LCEN’) disposant,

à l’article 1er :

L’article 1er de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est ainsi rédigé :

Art. 1er. – La communication au public par voie électronique est libre.

L’exercice de cette liberté ne peut être limité que dans la mesure requise, d’une part, par le respect de la dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d’autrui, du caractère pluraliste de l’expression des courants de pensée et d’opinion et, d’autre part, par la sauvegarde de l’ordre public, par les besoins de la défense nationale, par les exigences de service public, par les contraintes techniques inhérentes aux moyens de communication, ainsi que par la nécessité, pour les services audiovisuels, de développer la production audiovisuelle.

à l’article 20, alinéa 1 :

Toute publicité, sous quelque forme que ce soit, accessible par un service de communication au public en ligne, doit pouvoir être clairement identifiée comme telle. Elle doit rendre clairement identifiable la personne physique ou morale pour le compte de laquelle elle est réalisée.

à l’article 6.I., alinéa 8 :

Le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond, peut prescrire à toute personne susceptible d’y contribuer toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un service de communication au public en ligne.

12. La société Meta entend infirmer le jugement en ce qu’il a reconnu le principe de la communication des données d’identification du titulaire du compte Instagram en soutenant que le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond n’est pas investi par l’article 6.I., alinéa 8, précité du pouvoir juridictionnel d’ordonner cette communication et en concluant d’autre part que l’ANPAA est dépourvue du droit d’agir.

13. Elle se prévaut ainsi, en premier lieu, de précédentes décisions judiciaires écartant le bien fondé de la demande de communication des données au visa de l’article 145 du code de procédure civile.

14. En second lieu, elle soutient que le jugement a ajouté un contenu exclu de la liste de ceux susceptibles d’être l’objet d’une mesure de communication des données d’identification dont elle soutient qu’ils sont limités aux procédures pénales, à l’exclusion des procédures civiles, suivant les termes de l’article 6.II de la LCEN qui dispose :

Dans les conditions fixées aux II bis, III et III bis de l’article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques, les personnes mentionnées aux 1 et 2 du I du présent article détiennent et conservent les données de nature à permettre l’identification de quiconque a contribué à la création du contenu ou de l’un des contenus des services dont elles sont prestataires.

Elles fournissent aux personnes qui éditent un service de communication au public en ligne des moyens techniques permettant à celles-ci de satisfaire aux conditions d’identification prévues au III.

Un décret en Conseil d’Etat, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, définit les données mentionnées au premier alinéa et détermine la durée et les modalités de leur conservation.

15. L’article L.34-1 du code des postes et des communications électroniques disposant que :

II bis.- Les opérateurs de communications électroniques sont tenus de conserver :

1° Pour les besoins des procédures pénales, de la prévention des menaces contre la sécurité publique et de la sauvegarde de la sécurité nationale, les informations relatives à l’identité civile de l’utilisateur, jusqu’à l’expiration d’un délai de cinq ans à compter de la fin de validité de son contrat ;

2° Pour les mêmes finalités que celles énoncées au 1° du présent II bis, les autres informations fournies par l’utilisateur lors de la souscription d’un contrat ou de la création d’un compte ainsi que les informations relatives au paiement, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un an à compter de la fin de validité de son contrat ou de la clôture de son compte ;

3° Pour les besoins de la lutte contre la criminalité et la délinquance grave, de la prévention des menaces graves contre la sécurité publique et de la sauvegarde de la sécurité nationale, les données techniques permettant d’identifier la source de la connexion ou celles relatives aux équipements terminaux utilisés, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un an à compter de la connexion ou de l’utilisation des équipements terminaux.

III.- Pour des motifs tenant à la sauvegarde de la sécurité nationale, lorsqu’est constatée une menace grave, actuelle ou prévisible, contre cette dernière, le Premier ministre peut enjoindre par décret aux opérateurs de communications électroniques de conserver, pour une durée d’un an, certaines catégories de données de trafic, en complément de celles mentionnées au 3° du II bis, et de données de localisation précisées par décret en Conseil d’Etat.

L’injonction du Premier ministre, dont la durée d’application ne peut excéder un an, peut être renouvelée si les conditions prévues pour son édiction continuent d’être réunies. Son expiration est sans incidence sur la durée de conservation des données mentionnées au premier alinéa du présent III.

III bis.-Les données conservées par les opérateurs en application du présent article peuvent faire l’objet d’une injonction de conservation rapide par les autorités disposant, en application de la loi, d’un accès aux données relatives aux communications électroniques à des fins de prévention et de répression de la criminalité, de la délinquance grave et des autres manquements graves aux règles dont elles ont la charge d’assurer le respect, afin d’accéder à ces données.

16. La société Meta conclut encore que cette liste est d’autant plus exclusive des contenus relatifs à la publicité illicite des boissons alcoolisées que l’article 17 de la loi n°2021-998 du 30 juillet 2021 a évincé l’outil procédural qui permettait à un tribunal d’ordonner la communication de données d’identification auprès des hébergeurs par la suppression, à l’article 6.II précité, de la prévision selon laquelle ‘L’autorité judiciaire peut requérir communication auprès des prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I. des données mentionnées au premier alinéa’.

17. Enfin, elle estime que cette limitation à certaines procédures pénales vise à concilier le droit au respect de la vie privée, le droit à la protection des données et le droit à la liberté d’expression des utilisateurs des services en ligne avec les objectifs de valeur constitutionnelle relatifs à la sauvegarde de l’ordre public et la recherche des auteurs d’infractions.

18. Au demeurant, en premier lieu, la norme d’appréciation du ‘motif légitime’ énoncée à l’article 145 du code de procédure civile réservé à la matière des mesures d’instruction et pour la conservation des preuves est sans application à la procédure accélérée instituée par les articles 839 et 481-1 et suivants du code de procédure civile qui tend à trancher le fond d’un litige.

19. En deuxième lieu, la liste des contenus visés aux II bis, III et III bis de l’article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques, à laquelle renvoie le II. de l’article 6 LCEN, se limite à énoncer des durées de conservation de contenus propres à la poursuite à venir de certaines infractions pénales.

20. Et tels qu’ils sont ordonnancés, le II. de l’article 6 LCEN, y compris depuis la suppression de la référence à ‘l’autorité judiciaire’, ne déroge pas au pouvoir que le I., alinéa 8 réserve, sans distinction de contenus de communication électronique, au président du tribunal judiciaire de prendre toutes mesures propres à prévenir tout dommage ou à faire cesser un dommage actuel.

21. Alors enfin que de par son autorité et son indépendance, le président du tribunal judiciaire est garant des libertés fondamentales, le moyen tiré de son défaut de pouvoir juridictionnel sera rejeté comme celui du défaut d’intérêt à agir de l’ANPAA.

III. Sur la proportionnalité des mesures de retrait et de communication des données d’identification du titulaire du compte de publicités de boissons alcooliques illicites

22. Si au dispositif de ses conclusions, la société Meta demande l’infirmation du jugement en ce qu’il a ordonné une mesure de retrait du contenu, elle ne conteste pas dans ses écritures l’adaptation de cette mesure à la prévention du dommage invoqué par l’ANPAA.

23. En revanche, la société Meta soutient en premier lieu que la mesure de communication des données d’identification viole les droits du titulaire du compte Instagram garantis par les articles 10, paragraphe 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 16 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne ainsi que 8, paragraphe 1, de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

24. Elle estime en deuxième lieu que la décision de retrait des contenus illicites met fin à leur publication et donc à la possibilité pour le public de les visualiser, de sorte que la communication des données d’identification est dépourvue d’objet.

25. En troisième lieu, elle conclut qu’il existe un doute légitime sur le fait que l’ANPAA avait réellement besoin des données d’identification, alors qu’elle a pu échanger des courriels avec le titulaire du compte Instagram aux termes desquels il lui a été proposé d’organiser une réunion pour discuter plus avant du respect de la loi Evin, de sorte que sa tentative de dissimuler son identité ou ses coordonnées n’est pas démontrée.

26. Enfin, subsidiairement, la société Meta réclame la limitation des données d’identification du compte Instagram ‘YourBestRiflon’ devant être communiquées dans les termes du dispositif de ses conclusions rapportés au paragraphe 6 ci-dessus.

27. Néanmoins, ainsi que s’en prévaut la société Meta dans ses conclusions, la Cour de justice de l’Union européenne, troisième chambre, saisie d’une demande de communication d’un registre de personnels d’une entreprise, a dit pour droit dans son arrêt du 2 mars 2023 (CJUE, aff. C-268/21, Norra Stockholm Bygg AB c. Per Nycander AB) que :

‘l’article 6, paragraphes 3 et 4, du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil, du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données), doit être interprété en ce sens que : cette disposition s’applique, dans le cadre d’une procédure juridictionnelle civile, à la production en tant qu’élément de preuve d’un registre du personnel contenant des données à caractère personnel de tiers collectées principalement aux fins de contrôle fiscal.

‘les articles 5 et 6 du règlement 2016/679 doivent être interprétés en ce sens que : lors de l’appréciation du point de savoir si la production d’un document contenant des données à caractère personnel doit être ordonnée, la juridiction nationale est tenue de prendre en compte les intérêts des personnes concernées et de les pondérer en fonction des circonstances de chaque espèce, du type de procédure en cause et en tenant dûment compte des exigences résultant du principe de proportionnalité ainsi que, en particulier, de celles résultant du principe de la minimisation des données visé à l’article 5, paragraphe 1, sous c), de ce règlement.’

28. En fait, telle que les premiers juges l’ont relevées, l’étendue et la forme des messages pour la publicité illicite de boissons alcooliques depuis le compte Instagram ‘YourBestRiflon’ caractérisent une atteinte à la santé publique dont la gravité de l’infraction est par ailleurs susceptible d’être punie, suivant l’article L. 3351-7 du code de la santé publique, d’une peine de 75.000 euros d’amende.

29. Et au jour ou il a statué, le président a relevé la persistance du titulaire du compte Instagram ‘YourBestRiflon’ à publier leurs contenus illicites ainsi que cela se déduisait de leur réponse à l’injonction de les supprimer selon laquelle : ‘On fera tout pour continuer la passion et les valeurs du jaune, car on le sait tous : le riflon c’est pas qu’un alcool, c’est un art de vivre [flatté par un ’emoji’ coeur jaune]’ et par le maintien de leur compte en ligne et de son objet même revendiquant de : ‘regrouper une communauté autour de la bonne humeur et de cette passion partagée pour le pastis et la marque ‘Ricard’.

30. Tandis qu’au jour des débats devant la cour, la société Meta n’établit pas davantage la preuve de l’effectivité de l’indisponibilité du compte Instagram ‘YourBestRiflon’, ni non plus le détail de celles des données de ce compte propres à établir l’identité de leur titulaire, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné les mesures de retrait et de communication des données d’identification du titulaire du compte manifestement nécessaires, proportionnées et propres à faire cesser le dommage les dommages entraînés par la publicité illicite.

IV. Sur le bien fondé de la mesure d’astreinte

31. Ainsi que cela est relevé au paragraphe 27, la société Meta n’établit pas la preuve que le compte est indisponible, et tandis que la plateforme ne justifie pas d’un obstacle particulier pour obtempérer à très bref délai aux mesures de retrait et de communication des données, l’astreinte et ses modalités que le président a ordonnées sont proportionnées à l’objectif de la cessation du dommage, de sorte que jugement sera aussi confirmé de ce chef.

V. Sur les dépens et les frais irrépétibles

32. La société Meta succombant à l’action, le jugement sera confirmé en ce qu’il l’a condamnée aux dépens et au paiement des frais irrépétibles et statuant de ces chefs en cause d’appel, elle sera aussi condamnée aux dépens et à à payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions déférées ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Meta Platforms Ireland Ltd aux dépens ;

CONDAMNE la société Meta Platforms Ireland Ltd à payer à l’Association nationale de Prévention en alcoologie et addictologie la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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