Publicité en faveur de l’alcool
Sur l’initiative de l’ASSOCIATION NATIONALE DE PREVENTION EN ALCOOLOGIE ET ADDICTOLOGIE (ANPAA), le quotidien LE MONDE a été condamné pour publicité illicite en faveur de l’alcool. Le journal avait publié dans son numéro 20559 du dimanche lundi 27 et 28 février 2011 en page de couverture et en page 19 une publicité représentant une bouteille de champagne TSARINE associée à la cérémonie des Césars du 25 février 2011 au théâtre du Châtelet à Paris. Le site internet de la marque TSARINE (d’accès libre) comportait également une représentation de la même bouteille avec la mention “signe extérieur de richesse intérieure”.
Caractère illicite des publicités
L’article L 3323-4 du code de la santé publique pose le principe que la publicité autorisée pour les boissons alcooliques est limitée à l’indication du degré volumique d’alcool, de l’origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l’adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d’élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit. Cette publicité peut comporter des références relatives aux terroirs de production, aux distinctions obtenues, aux appellations d’origine telles que définies à l’article L. 115-1 du code de la consommation ou aux indications géographiques telles que définies dans les conventions et traités internationaux régulièrement ratifiés. Elle peut également comporter des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit (ces principes sont aussi applicables aux conditionnements).
Toute publicité en faveur de boissons alcooliques, à l’exception des circulaires commerciales destinées aux personnes agissant à titre professionnel ou faisant l’objet d’envois nominatifs ainsi que les affichettes, tarifs; menus ou objets à l’intérieur des lieux de vente à caractère spécialisé, doit être assortie d’un message de caractère sanitaire précisant que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé.
Il suffit que la publicité mette en valeur une boisson alcoolisée en dépassant le cadre autorisé, notamment en associant l’alcool à un contexte festif ou à des personnalités valorisantes pour que l’infraction aux dispositions légales soit constituée. Tel était le cas de la publicité sur support papier parue dans le journal LE MONDE associant le champagne TSARINE à la cérémonie des Césars, en tant que fournisseur qualifié d’officiel et “meilleur champagne” associé aux meilleurs acteurs et personnalités du cinéma y participant.
Par ailleurs, le fait de fournir la cérémonie des Césars, même s’il s’agit d’un client prestigieux, ne constitue pas une “distinction” décernée par les professionnels du vin au sens du texte. Il est dès lors superfétatoire de rechercher si cette publicité constitue également un parrainage illicite au sens de l’article L3323-2 du Code de la Santé Publique. Est pareillement illicite la publicité sur internet associant dans la rubrique “actualités” le champagne TSARINE à des films connus et par conséquent aux acteurs et personnalités du cinéma qui en consomment dans ces tournages et sont supposés l’apprécier. A également été jugé illicite la page d’accueil dépourvue de mention sanitaire sur le danger de l’abus d’alcool sur la santé avec le caractère ambivalent de là mention “signe extérieur de richesse intérieure”, valorisant et incitatif à la consommation. Le journal LE MONDE et l’exploitant du champagne TSARINE ont été condamnés à 15 000 euros de dommages et intérêts.
Indemnisation de l’ANPAA
Les juges ont rappelé que l’ASSOCIATION NATIONALE DE PREVENTION EN ALCOOLOGIE ET ADDICTOLOGIE (ANPAA) était pleinement recevable à agir contre toute publicité illicite en faveur de l’alcool. La publication de textes ou visuels promouvant la consommation de boisson alcoolisées contrecarre les efforts d’information et de prévention déployés par l’ANPAA dont l’action civile est autorisée par l’article L 3355-1 du code de la santé publique, et entraîne nécessairement pour une telle association un préjudice non seulement moral, mais également matériel puisque les efforts financiers qu’elle consent pour accomplir sa mission se trouvent en partie privés d’effet par de telles publications. En référence au coût de la publicité dans le journal LE MONDE, à sa diffusion nationale mais aussi au caractère unique de la parution, les juges ont alloué la somme de 15.000 euros de dommages et intérêts à l’ANPAA.
Responsabilité solidaire de l’agence
La société CHAMPAGNE CHANOINESSE FRERES DEPUIS 1730 (Champagne TSARINE) a sollicité avec succès la garantie de la société RIO GRANDE. Il était justifié de la signature d’un contrat de mission et mandat par lequel la société CHAMPAGNE CHANOINESSE chargeait la société RIO GRANDE de la réalisation des maquettes et programmes de communication, l’agence la société RIO GRANDE devant “veiller au respect de la réglementation de la publicité dans le cadre de la campagne qu’elle conçoit et diffuse pour le compte de l’annonceur” et “prévenir de toute infraction aux lois et règlements en vigueur en France dont elle ne pourrait ignorer l ‘application eu égard à son activité et à sa mission”. L’agence de publicité a été condamnée in solidum avec la société CHAMPAGNE CHANOINESSE envers l’ANPAA et à garantir sa cliente la société CHAMPAGNE CHANOINESSE de la condamnation prononcée au titre de la publicité du journal LE MONDE.
Mots clés : Publicite – Alcool
Thème : Publicite – Alcool
A propos de cette jurisprudence : juridiction : Tribunal de Grande instance de Paris | Date : 23 mai 2013 | Pays : France