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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize septembre deux mille trois, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de la société civile professionnelle LE GRIEL, la société civile professionnelle BOUZIDI et BOUHANNA, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général FRECHEDE ;
Statuant sur les pourvois formés par :
– X… Cédric,
– Y… Jean-Yves,
– Z… Christophe,
1°) contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de NANCY, en date du 29 mars 2001, qui, dans l’information suivie contre eux pour provocation à commettre des atteintes volontaires à la vie et à l’intégrité physique, provocation à la haine raciale, dégradation volontaire d’un monument et détention illicite d’armes ou de munitions, a dit n’y avoir lieu à annulation d’actes de la procédure ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I – Sur les pourvois formés contre l’arrêt en date du 29 mars 2001 ;
Sur la validité des pourvois :
Attendu que selon l’article 59 de la loi du 29 juillet 1881, le pourvoi contre les arrêts des cours d’appel, ayant statué en matière de presse, sur les incidents et exceptions autres que les exceptions d’incompétence, ne peut être formé, à peine de nullité, qu’après l’arrêt sur le fond et en même temps que le pourvoi contre cet arrêt ;
Attendu que, le 30 mars 2001, Cédric X…, Jean-Yves Y… et Christophe Z… se sont pourvus contre l’arrêt de la chambre de l’instruction, en date du 29 mars 2001, rejetant leurs demandes d’annulation d’actes de la procédure ; que Cédric X… et Christophe Z… ont renouvelé leur pourvoi le 24 juin 2002, après que l’arrêt sur le fond, en date du 20 juin 2002, eut été rendu ;
Attendu que, l’arrêt en date du 29 mars 2001 entrant dans les prévisions de l’article 59 de la loi du 29 juillet 1881, les pourvois formés le 30 mars suivant contre ledit arrêt par Jean-Yves Y… et Christophe Z…, condamnés uniquement pour délits de presse, se trouvent frappés de nullité ; qu’il s’ensuit que seuls sont recevables, en application de ce texte et de l’article 568 du Code de procédure pénale, les pourvois formés les 30 mars 2001 et 24 juin 2002 par Cédric X…, condamné à la fois pour des délits de presse et des délits de droit commun et le pourvoi formé à nouveau le 24 juin 2002 par Christophe Z… ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le second moyen de cassation proposé pour Cédric X… et Christophe Z…, pris de la violation des articles 50 de la loi du 29 juillet 1881 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
“en ce que l’arrêt attaqué a rejeté les requêtes aux fins de nullité du réquisitoire introductif du 24 mars 2000 ;
“aux motifs que “le réquisitoire introductif articule de manière très précise .., les faits qui, selon le procureur de la République, tombent sous le coup des textes répressifs”, que “ces faits étaient qualifiés au regard des infractions auxquelles ils pouvaient correspondre”, qu’ “il s’agissait d’abord de provocation à l’atteinte à la vie et à l’intégrité par cris ou image dans un lieu public, notamment en criant “Mort aux juifs” et en évoquant une “baston concertée”, ainsi que par des chants invitant à tuer, crever ou achever les juifs”, que “l’article 23 de la loi mentionnée comme texte applicable correspond très exactement à cette infraction”, que “l’absence d’indication que la provocation avait été suivie d’effet renvoyait nécessairement à l’article 24 de la loi également visé, mais dans sa globalité, alors qu’était spécialement le premier alinéa dudit article qui prévoit une peine de cinq ans d’emprisonnement”, que “par ailleurs, le procureur de la République avait relevé les faits pouvant constituer le délit de provocation à la haine à l’égard d’un groupe de personnes à raison de leur appartenance à une race déterminée, consistant dans le fait d’imprimer ou de chanter des chants dont il avait énuméré la liste”, que “ces faits correspondaient très exactement dans les termes utilisés à la définition que donne ce délit l’article 23 de la loi précitée, visé par le magistrat, auquel renvoie l’article 24, également visé mais dans sa globalité et non en précisant l’alinéa précis auquel ils se rapportaient”, que “la référence globale faite dans le réquisitoire introductif aux articles 23 et 24 de la loi suffisait à informer le juge d’instruction sur l’étendue de sa saisine puisque, par une simple lecture des textes susvisés, il pouvait vérifier la répression applicable dont tant la nature que la qualification, radicalement distincte de celles des autres infractions visées au deuxième desdits articles, lui étaient clairement indiquées”, qu’ “en particulier, il ne pouvait commettre d’erreur sur la nature et la durée des mesures coercitives dont il pouvait, le cas échéant, user à l’encontre des personnes mises en examen au regard des faits poursuivis” et que “de même en procédant à une lecture identique, les personnes mises en examen ne pouvaient se méprendre sur la nature et la qualification des faits qui leur étaient reprochés ni sur la peine qu’elles encouraient et elles étaient ainsi à même d’exercer utilement leurs droits de défense” ;
” alors qu’aux termes de l’article 50 de la loi du 29 juillet 1881, “si le ministère public requiert une information, il sera tenu, dans son réquisitoire, d’articuler et de qualifier les provocations, outrages, diffamations et injures à raison desquels la poursuite est intentée, avec indication des textes dont l’application est demandée, à peine de nullité du réquisitoire de ladite poursuite”, que l’indication des faits, des qualifications retenues et des textes applicables doit être suffisamment précise, qu’en l’espèce, le réquisitoire introductif du 24 mars 2000 cite de façon désordonnée un certain nombre de faits auxquels il ne donne, soit aucune qualification (le fait “d’avoir dans les mêmes circonstances, notamment chanté … “), soit des qualifications peu compréhensibles (“provocation à l’atteinte à la vie privée”, “d’avoir … incité des personnes” sans préciser à quoi et “d’avoir commis des actes à incitation à la haine raciale”) et pour lesquels il vise globalement les articles 23 et 24 de la loi du 29 juillet 1881, ce dernier texte prévoyant et réprimant sept délits de provocation non suivis d’effet à plusieurs crimes ou délits particuliers sanctionnés par des peines différentes et que ce réquisitoire laissait donc incertaine la base de la poursuite et était donc entaché de nullité” ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, par réquisitoire introductif, en date du 24 mars 2000, le procureur de la République a, au visa des articles 23 et 24 de la loi du 29 juillet 1881, ouvert une information contre personne non dénommée, d’une part, pour provocation à commettre une atteinte à la vie ou à l’intégrité de la personne à raison de propos et chants incitant à commettre des actes de violences et, d’autre part, pour provocation à la haine raciale à raison de plusieurs chants antisémites figurant dans le livret “solstice d’hiver vosgien 1999” ;
Attendu que, pour écarter le moyen de nullité pris de la violation de l’article 50 de la loi du 29 juillet 1881, la chambre de l’instruction retient, par les motifs repris au moyen, que le réquisitoire, qui reproduit ou désigne de manière précise les chants, paroles ou propos incriminés, ne pouvait laisser aucun doute dans l’esprit des personnes mises en examen quant à l’objet et au fondement de la poursuite ;
Attendu qu’en prononçant ainsi, la chambre de l’instruction a justifié sa décision ;
D’où il suit que le moyen doit être écarté ;