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République Française
Au nom du Peuple Français
C O U R D ‘ A P P E L D E D O U A I
RÉFÉRÉ DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 27 AVRIL 2023
N° de Minute : 55/23
N° RG 23/00033 – N° Portalis DBVT-V-B7H-UZVE
DEMANDERESSES :
S.E.L.A.R.L. HELP PARTNERS prise en la personne de Maître [G] [B] ès qualités d’administrateur provisoire de la SNC LABORATOIRE PRODENT
dont le siège social est au [Adresse 2]
[Localité 4]
S.N.C. LABORATOIRE PRODENT
dont le siège social est au [Adresse 6]
[Localité 3]
représentées par Me Virginie LEVASSEUR, avocate au barreau de Douai
DÉFENDEUR :
Monsieur [Z] [Y]
né le 26 mai 1984 à [Localité 7]
demeurant [Adresse 1]
[Localité 5]
représenté par Me Nicolas THOMAS, avocat au barreau de Lille
PRÉSIDENTE : Hélène CHATEAU, première présidente de chambre désignée par ordonnance du premier président de la cour d’appel de Douai du 21 décembre 2022
GREFFIER : Christian BERQUET
DÉBATS : à l’audience publique du 3 avril 2023
Les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’ordonnance serait prononcée par sa mise à disposition au greffe
ORDONNANCE : contradictoire, prononcée publiquement par mise à disposition au greffe le vingt-sept avril deux mille vingt-trois, date indiquée à l’issue des débats, par Hélène CHATEAU, présidente, ayant signé la minute avec Christian BERQUET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire
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EXPOSE DU LITIGE
Par contrat à durée indéterminée conclu le 1er décembre 2014, M. [Z] [Y] a été embauché par la S.N.C. Laboratoire Prodent en qualité de technicien prothésiste dentaire.
La relation de travail est régie par la convention collective nationale des prothésistes dentaires et des personnels des laboratoires de prothèse dentaire du 18 décembre 1978.
Par courrier du 7 août 2020, la société Labotaroire Prodent a notifié à M. [Y] sa mise à pied conservatoire.
Par courrier du 2 septembre 2020, la société Laboratoire Prodent a notifié à M. [Y] son licenciement pour faute grave.
M. [Y] a saisi le conseil de prud’hommes de Lille aux fins notamment de contester son licenciement pour faute grave pour avoir eu une violente altercation verbale et physique avec un autre salarié de l’entreprise.
La société Laboratoire Prodent n’était pas représentée à l’audience.
Par jugement du 2 février 2023, néanmoins qualifié de contradictoire, le conseil de prud’hommes a’:
– dit et jugé que la faute grave de M. [Y] n’est pas avérée’;
– dit et jugé que le licenciement de M. [Y] est dépourvu de cause réelle et sérieuse’;
– en conséquence, condamné la laboratoire Prodent à verser à M. [Y] les sommes de’:
* 1 726,81 euros au titre de rappel de salaires pour mise à pied conservatoire’;
* 172,68 euros au titre des congés pays y afférents’;
* 4 876,92 euros au titre du préavis et 487,69 euros au titre des congés y afférents’;
* 3 657,67 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement’;
* 14 630,70 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
* 4876,92 euros au titre du caractère vexatoire du licenciement’;
* 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
– rappelé que les condamnations prononcées emportent intérêts au taux légal à compter de’:
* la date de réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation pour le sommes de nature salariale’;
* du prononcé de la présente décision pour les sommes de nature indemnitaire’;
– ordonné la remise des documents de fin de contrat conformément au jugement à intervenir ainsi que le bulletin de salaire d’août 2020 rectifié’;
– ordonné l’exécution provisoire du jugement selon les dispositions de l’article R. 1454-28 du code du travail et fixé la moyenne des salaires des trois derniers mois à la somme de 2 438,45 euros’;
– condamné le laboratoire Prodent aux entiers frais et dépens de l’instance.
Par déclaration du 8 février 2023, la société Laboratoire Prodent a interjeté appel de ce jugement.
Par acte du 13 mars 2023, les sociétés Laboratoire Prodent et Help partners, cette dernière agissant en qualité d’administrateur provisoire de la SNC Laboratoire Prodent, ont fait assigner M. [Y] devant le premier président de la cour d’appel de Douai et demandent, au visa de l’article 514-3 du code de procédure civile, de’:
– dire recevable et bien fondée la société Laboratoire Prodent en ses demandes’;
– en conséquence, ordonner l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement du 2 février 2023′;
– condamner M. [Y] à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
– condamner M. [Y] aux entiers dépens.
Elles exposent qu’il existe un moyen sérieux d’infirmation du jugement en raison de’:
– la violation manifeste du principe du contradictoire car le jugement n’a été rendu que sur les seuls éléments versés par M. [Y]’;
– la faute grave de M. [Y] ayant justifié son licenciement, démontrée par la production du courrier de M. [X] dénonçant les insultes proférées par M. [Y] à son encontre.
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Elles ajoutent que l’exécution provisoire du jugement risque d’entrainer des conséquences manifestement excessives car’:
– le montant total de la condamnation exécutoire par provision s’élève à 32 440,12 euros bruts’;
– la société Laboratoire Prodent a sollicité un moratoire auprès de ses créanciers ;
– son solde bancaire s’élève à la somme de 12 669,59 euros’;
– il existe un risque de non-restitution des sommes versées en exécution du jugement en cas d’infirmation en appel.
A l’audience du 20 mars 2023 à laquelle l’affaire a été appelée, elle a été renvoyée à la demande des avocats.
A l’audience du 3 avril 2023 à laquelle l’affaire a été appelée et retenue,
Les sociétés Laboratoire Prodent et Help partners représentées par leur avocat ont maintenu les demandes énoncées dans l’assignation.
M. [Y], représenté par son avocat, demande, au visa des articles 514-3 et 524 du code de procédure civile, R 1454-28 et R 1454-14 du code du travail, de :
– juger irrecevable la demande de suspension d’exécution provisoire présentée par la société Laboratoire Prodent ou à tout le moins la rejeter,
– condamner la société laboratoire Prodent à lui payer la somme de 1500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les frais et dépens.
Il précise que contrairement à ce que soutient la société laboratoire Prodent, les condamnations prononcées par le conseil de prud’hommes ne sont exécutoires qu’à hauteur de la somme de 10’906 € bruts de cotisations et contributions sociales, dès lors que seules les condamnations relatives au rappel de salaire, aux congés payés y afférents, à l’indemnité de préavis et à l’indemnité conventionnelle de licenciement sont concernées par cette exécution provisoire, les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et ceux en réparation de caractère vexatoire du licenciement ainsi que l’indemnité d’article 700 du code de procédure civile n’étant pas en l’espèce revêtus de l’exécution provisoire.
Il ajoute que la société laboratoire Prodent ne justifie ni de moyen sérieux pour obtenir la réformation du jugement qui a été rendu alors même qu’elle ne s’est pas présentée à l’audience de jugement bien que régulièrement convoquée, ni de circonstances manifestement excessives eu égard au montant de la condamnation exécutoire par provision.
MOTIFS DE LA DECISION
Article R1454-14 du code du travail prévoit que :
«’Le bureau de conciliation et d’orientation peut, en dépit de toute exception de procédure et même si le défendeur ne comparaît pas, ordonner :
1° La délivrance, le cas échéant, sous peine d’astreinte, de certificats de travail, de bulletins de paie et de toute pièce que l’employeur est tenu légalement de délivrer ;
2° Lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable :
a) Le versement de provisions sur les salaires et accessoires du salaire ainsi que les commissions ;
b) Le versement de provisions sur les indemnités de congés payés, de préavis et de licenciement ;
c) Le versement de l’indemnité compensatrice et de l’indemnité spéciale de licenciement en cas d’inaptitude médicale consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle mentionnées à l’article’L. 1226-14′;
e) Le versement de l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article’L. 1243-8’et de l’indemnité de fin de mission mentionnée à l’article’L. 1251-32′;
3° Toutes mesures d’instruction, même d’office ;
4° Toutes mesures nécessaires à la conservation des preuves ou des objets litigieux.’../…»
L’article R1454-28 du code du travail prévoit que :
A moins que la loi ou le règlement n’en dispose autrement, les décisions du conseil de prud’hommes ne sont pas exécutoires de droit à titre provisoire. Le conseil de prud’hommes peut ordonner l’exécution provisoire de ses décisions.
Sont de droit exécutoires à titre provisoire, notamment :
1° Le jugement qui n’est susceptible d’appel que par suite d’une demande reconventionnelle ;
2° Le jugement qui ordonne la remise d’un certificat de travail, de bulletins de paie ou de toute pièce que l’employeur est tenu de délivrer ;
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3° Le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l’article’R. 1454-14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement.’
M. [Y] soulève donc à juste raison que ce ne sont pas les condamnations au paiement dans leur totalité qui sont revêtues de l’exécution provisoire, mais les seules condamnations au titre du rappel de salaire, des congés payés y afférents, de l’indemnité de préavis et de l’indemnité conventionnelle de licenciement, soit les sommes de 1726,81 euros, 172,68 euros, 4876,92 euros, 487,69 euros et 3657,67 euros, soit un total de 10 906 euros.
En application de l’article 514-3 du code de procédure civile, la société Laboratoire Prodent doit justifier pour obtenir la mainlevée de l’exécution provisoire de moyens sérieux de réformation de jugement et de circonstances manifestement excessives.
La société Laboratoire Prodent ne peut reprocher au conseil de prud’hommes d’avoir rendu sa décision sur la base des seules pièces versées aux débats par le salarié, alors même qu’elle avait fait choix de ne pas se présenter à l’audience de jugement, bien que convoquée.
Par ailleurs, force est de constater que la société Laboratoire Prodent ne se base pour justifier du licenciement pour faute grave de M. [Y] que sur la seule version apportée par M. [X], salarié de l’entreprise, qui se plaint d’avoir été agressé par M [Y] ce que ce dernier a toujours nié.
Il appartiendra à la chambre sociale de la cour d’appel de Douai, d’apprécier la légitimité de ce licenciement. Au vu des éléments qui viennent d’être rappelés, les moyens soulevés par la société Laboratoire Prodent n’apparaissent pas des moyens sérieux d’annulation ou de réformation de la décision de première instance au sens de l’article 514-3 du code de procédure civile.
La société Laboratoire Prodent partie perdante sera condamnée aux dépens en application de l’article 696 du code de procédure civile et sera condamnée en application de l’article 700 du code de procédure civile au paiement d’une indemnité de mille euros à Monsieur [Y].
PAR CES MOTIFS
Déboute la société laboratoire Prodent et la SELAL Help Partners de de sa demande d’arrêt d’exécution provisoire du jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Lille du 2 février 2023,
Condamne la société laboratoire Prodent aux dépens de la présente instance,
Condamne la société laboratoire Prodent à payer à Monsieur [Z] [Y] la somme de 1000 € d’indemnité d’article 700 du code de procédure civile.
Le greffier La présidente
C. BERQUET H. CHÂTEAU