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Le nom commercial se définit comme la dénomination sous laquelle une personne physique ou morale exploite son fonds de commerce et dont il constitue un des éléments.
Dans le délai de deux mois suivant la publication d’une demande d’enregistrement de marque, une opposition peut être formée auprès du directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle à l’encontre d’une demande d’enregistrement en cas d’atteinte à un nom commercial, une enseigne ou un nom de domaine, dont la portée n’est pas seulement locale et s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public (L.712-4 du code de la propriété intellectuelle).
Le nom commercial ne doit pas être confondu avec le nom d’une « initiative », d’un « processus », d’un «programme» ou d’un « projet » qui ne constituent pas des antériorités opposables.
De même, les échanges de mails portant sur la recherche d’un nom pour intituler un projet à développer n’ont lieu qu’en interne et ne peuvent attester d’une exploitation du terme en tant que nom commercial en France.
Dans cette affaire, la quasi totalité des documents produits se rapporte à un projet développé au Royaume Uni, à partir d’une ligne de transformation «opérationnelle au Royaume Uni en juillet 2020», soit postérieurement au dépôt de la marque contestée, sans qu’aucune exploitation soit démontrée sur le territoire français antérieure au dépôt de la marque déposée, la seule présentation de ce projet sur un seul salon organisé au Royaume Uni, même en présence d’éventuelles sociétés françaises, étant insuffisante pour caractériser cet usage.
Les échanges de mails entre la requérante et la société DECATHLON en juin 2019 ou la présentation Power Point réalisée pour ces échanges ne permettent pas davantage d’attester d’un usage du terme POLYLOOP comme nom commercial sur le territoire national, dans la mesure où il n’apparaît sur aucune des pages de présentation mais est uniquement mentionné de manière isolée dans les mails comme un «système».
En conséquence, c’est à juste titre que l’INPI a considéré que la société MAINETTI ne justifiait pas d’un usage du terme POLYLOOP à titre de nom commercial ayant des effets en France et a rejeté l’opposition.
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 1
ARRET DU 25 MAI 2022
Numéro d’inscription au répertoire général : 21/16110 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEKGI
Décision déférée à la Cour : Décision du 21 Décembre 2021 -Institut National de la Propriété Industrielle – RG n° 201946KPH
DÉCLARANTE AU RECOURS
Société MAINETTI (UK) LIMITED
Société de droit britannique
[…]
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[…]
[…]
[…]
Représentée par Me François TEYTAUD de l’AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125
Assistée de Me Myriam MOATTY de l’ASSOCIATION COUSIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R159
EN PRESENCE DE :
M O N S I E U R L E D I R E C T E U R G É N É R A L D E L ‘ I N S T I T U T N A T I O N A L D E L A PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE
[…]
[…]
[…]
Représenté par Mme Caroline LE PELTIER, chargée de mission, munie d’un pouvoir général
APPELÉE EN CAUSE S.A.R.L. POLYLOOP
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de ROMANS sous le numéro 851 456 921
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[…]
[…]
Représentée par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151
Assistée de Me Florence BAUJOIN, avocat au barreau de STRASBOURG
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 29 mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Françoise BARUTEL, conseillère et Mme Déborah BOHÉE, conseillère.
Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre
Mme Françoise BARUTEL, conseillère
Mme Déborah BOHÉE, conseillère.
Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON
L’affaire a été communiquée au ministère public en la personne de Mme X d’ONOFRIO, avocat général
ARRÊT :
Réputé contradictoire•
• par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
• signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Vu la décision du 19 avril 2021 par laquelle le directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle (INPI) a rejeté l’opposition n°20-1946 formée 23 juin 2020 par la société MAINETTI sur la base du nom commercial POLYLOOP à la demande d’enregistrement 3 avril 2020 présentée par la société POLYLOOP,
Vu le recours formé le 19 juillet 2021 par la société MAINETTI contre cette décision,
Vu les dernières conclusions contenant l’exposé des moyens du recours signifiées par RPVA et notifiées à l’INPI par la requérante le 17 décembre 2021 qui demande à la cour de:
– Annuler la décision rendue par Monsieur le Directeur Général de l’INPI le 19 juillet 2021 N° OPP 20-1946 en ce qu’elle a rejeté l’opposition de la société MAINETTI à l’encontre de la demande d’enregistrement de la marque POLYLOOP n°4636578 ;
En conséquence,
– Juger l’opposition formée par la société MAINETTI recevable et bien fondée,
– Juger que la demande d’enregistrement de la marque POLYLOOP n°4636578 déposée le 3 avril 2020 pour l’ensemble des produits et services visés ci-dessus ne peut être enregistrée sans porter atteinte aux droits antérieurs de la société MAINETTI sur le nom commercial antérieur POLYLOOP.
– Ordonner la notification de l’arrêt à intervenir à Monsieur le Directeur Général de l’INPI conformément aux dispositions de l’article R. 411-42 du Code de la Propriété Intellectuelle
– Condamner la société POLYLOOP à payer à la société MAINETTI la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile
– Condamner la société POLYLOOP en tous les dépens de l’instance dont le montant sera recouvré par Maître TEYTAUD, Avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile.
Vu la convocation à l’audience du 29 mars 2022 adressée aux sociétés MAINETTI et POLYLOOP et au directeur général de l’INPI par lettres recommandées adressées le 13 octobre 2021,
Vu les observations écrites du directeur général de l’INPI transmises le 11 février 2022,
Vu les dernières conclusions notifiées via le RPVA le 21 mars 2022 et par lettre recommandé avec accusé de réception à l’INPI par la société POLYLOOP qui demande à la cour de:
– REJETER le recours en annulation de la société MAINETTI (UK) LTD à l’encontre de la Décision de Monsieur le Directeur Général de l’Institut National de la Propriété Industrielle du 19 avril 2021 statuant sur l’opposition n° OPP 20-1946 et ayant rejeté ladite opposition ;
– ORDONNER la notification de la décision à intervenir par le Greffe aux parties à l’instance et au Directeur Général de l’Institut National de la Propriété Industrielle, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ;
En tout état de cause :
– DEBOUTER la société MAINETTI (UK) LTD de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
– CONDAMNER la société MAINETTI (UK) LTD à payer à la société POLYLOOP la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– CONDAMNER la société MAINETTI (UK) LTD à tous les dépens de l’instance ;
La requérante, la société POLYLOOP et le représentant de l’INPI entendus en leurs observations orales reprenant leurs écritures et le ministère public entendu en ses réquisitions,
SUR CE :
Le 3 avril 2020, la société POLYLOOP a déposé la demande d’enregistrement n° 20 4 636 578 portant sur le signe verbal «POLYLOOP» destiné à distinguer les produits et services suivants: ‘ Classe 7 : machines de recyclage ; machines pour le traitement de matériaux ; machines pour le traitement de matériaux polymériques ;
‘ Classe 37 : installation, entretien, maintenance et réparation de machines, d’équipements et d’installations de recyclage ; installation, entretien, maintenance et réparation de machines, d’équipements et d’installations de traitement de matériaux et de traitement de matériaux polymériques.
‘ Classe 42 : Expertises (travaux d’ingénieurs) et études de projets techniques dans les domaines du recyclage et du traitement de matériaux et de matériaux polymériques; services de recherche et développement dans les domaines du recyclage et du traitement de matériaux et de matériaux polymériques ; recherche, développement et conception de machines, d’équipements et d’installations pour le recyclage, le traitement de matériaux et de matériaux polymériques ; essais de matériaux ; services d’analyses et de recherches industrielles ; services de contrôle de qualité.
Le 23 juin 2020, la société MAINETTI a formé opposition à l’enregistrement de ce signe sur la base du nom commercial POLYLOOP, sur le fondement d’un risque de confusion, faisant valoir un usage de ce nom pour les produits et services suivants « Cintres et accessoires de suspensions pour vêtements ; conception et fabrication de cintres pour vêtements ; conception et fabrication d’accessoires de suspensions améliorant l’apparence des cintres ; conception et fabrication d’étiquettes ; services de réutilisation et de recyclage de matériaux et plastiques (notamment du polyéthylène) ; outils de contrôle des stocks, de profilage et de présentation des produits, de placement en magasin ; solutions d’étiquetage électronique des articles ; conception et fabrication d’emballages ; l’ensemble de ces produits et services étant proposés notamment dans des gammes durables et avec l’utilisation de ressources renouvelables afin de réduire les impacts environnementaux».
Par décision du 19 avril 2021, le directeur général de l’INPI a rejeté l’opposition retenant le défaut de preuve d’une exploitation effective du terme POLYLOOP à titre de nom commercial en France.
La société MAINETTI soutient apporter la preuve de l’exploitation effective du nom commercial POLYLOOP en France avant le dépôt de la marque contestée. Elle souligne le risque de confusion existant entre ce nom commercial antérieur et la demande de marque contestée au regard tant de l’identité ou de la similarité de ses activités au regard des produits et services visés au dépôt et de l’identité des signes eux-mêmes.
Le directeur général de l’INPI maintient que les éléments de preuve versés par la société POLYLOOP ne permettent pas de caractériser, d’une part, un usage du signe antérieur du signe POLYLOOP à titre de nom commercial et, d’autre part, un usage de portée nationale sur le territoire français.
La société POLYLOOP, après une étude des pièces versées par la société MAINETTI, soutient également que la requérante ne démontre pas l’exploitation effective du terme POLYLOOP à titre de nom commercial en France.
Sur le bien-fondé du recours
En vertu de l’article L.712-4 du code de la propriété intellectuelle, «Dans le délai de deux mois suivant la publication de la demande d’enregistrement, une opposition peut être formée auprès du directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle à l’encontre d’une demande d’enregistrement en cas d’atteinte à l’un des droits antérieurs suivants ayant effet en France : (…)
4° Un nom commercial, une enseigne ou un nom de domaine, dont la portée n’est pas seulement locale, s’il existe un risque de confusion dans l’esprit du public (…)».
La cour rappelle que le nom commercial se définit comme la dénomination sous laquelle une personne physique ou morale exploite son fonds de commerce et dont il constitue un des éléments.
Or, comme l’a justement relevé l’INPI, les documents produits par la société MAINETTI permettent d’établir que le terme POLYLOOP n’est pas utilisé comme une dénomination sous laquelle la requérante exploite son fonds de commerce mais comme un «système de recyclage» (pièce 5, soit le seul article publié en français le 19 mars 2020), une «initiative» et plus précisément «MAINETTI dévoile une initiative mondiale pour rendre l’industrie du plastique plus circulaire» (pièce 9), un «processus mondial de recyclage du polyéthylène» ou un «programme»,et ne se rapportent donc pas à l’identification de son fonds de commerce, seul le nom commercial de MAINETTI étant au contraire mis en exergue sur l’ensemble de ces éléments.
Et, si sur des photographies illustrant son stand lors d’une conférence «IdentiPlast» organisée à Londres du 7 au 9 mars 2019, il est mentionné le terme «POLYLOOP» à côté du nom de la société MAINETTI, cette seule mention isolée est insuffisante à caractériser l’usage requis tel que défini.
De même, les échanges de mails en anglais entre les salariés de la société MAINETTI portant sur la recherche d’un nom pour intituler le projet à développer n’ont eu lieu qu’en interne et ne peuvent attester d’une exploitation du terme en tant que nom commercial en France.
En outre, si comme le note la requérante, l’usage du terme POLYLOOP concomitant à son nom MAINETTI n’exclut pas un autre usage à titre de nom commercial, il n’en demeure pas moins que l’ensemble des documents versé au débat ne permet nullement de retenir que la société MAINETTI a entendu exploiter son fonds de commerce sous le nom POLYLOOP, mais uniquement sous son propre nom commercial, qui constitue également sa dénomination sociale.
Au surplus, la quasi totalité des documents produits se rapporte à un projet développé au Royaume Uni, à partir d’une ligne de transformation «opérationnelle au Royaume Uni en juillet 2020», soit postérieurement au dépôt de la marque contestée, sans qu’aucune exploitation soit démontrée sur le territoire français antérieure au dépôt de la marque déposée, la seule présentation de ce projet sur un seul salon organisé au Royaume Uni, même en présence d’éventuelles sociétés françaises, étant insuffisante pour caractériser cet usage. Enfin, les échanges de mails entre la requérante et la société DECATHLON en juin 2019 ou la présentation Power Point réalisée pour ces échanges ne permettent pas davantage d’attester d’un usage du terme POLYLOOP comme nom commercial sur le territoire national, dans la mesure où il n’apparaît sur aucune des pages de présentation mais est uniquement mentionné de manière isolée dans les mails comme un «système».
En conséquence, c’est à juste titre que l’INPI a considéré que la société MAINETTI ne justifiait pas d’un usage du terme POLYLOOP à titre de nom commercial ayant des effets en France et a rejeté l’opposition.
Le recours contre la décision du directeur de l’INPI doit en conséquence être rejeté.
Sur les autres demandes
L’équité et la situation des parties commandent de rejeter les demandes formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Par arrêt contradictoire,
Rejette le recours formé par la société MAINETTI à l’encontre de la décision du directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle du 19 avril 2021, sous le n° OPP 20-1946,
Dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Dit que le présent arrêt sera notifié par le greffe aux parties et au directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle par lettre recommandée avec accusé de réception.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE