Protection des interfaces de logiciel
Protection des interfaces de logiciel
Ce point juridique est utile ?

Face à une copie servile de l’interface d’un logiciel, si l’originalité de ladite interface n’est pas établie, reste à l’éditeur la possibilité d’agir sur le fondement du parasitisme.

Absence d’originalité

La SAS Agicap a revendiqué sans succès, au titre des caractéristiques originales du logiciel Agicap, une présentation spécifique de l’interface de son logiciel, orientée de façon à promouvoir et présenter les différentes fonctionnalités proposées par la solution Agicap et à en faciliter la compréhension pour les visiteurs du site (appelée User Interface, ou l’UI, le terme UI (acronyme de l’anglais : User Interface), interface utilisateur en français, désigne le positionnement des différents éléments graphiques) :

  • des fonctionnalités précises, spécialement mises en forme, optimisées et agencées entre elles pour correspondre aux attentes des petites entreprises dans leur gestion courante des affaires (appelée « User eXpérience », ou l’UX, le terme UX (acronyme de l’anglais : User eXperience), expérience utilisateur en français, désigne l’expérience vécue par l’utilisateur pendant son interaction)
  • une FAQ, faisant office de manuel d’utilisation du logiciel, spécialement structurée pour i) aider l’utilisateur lors de ses premières utilisations et ii) lui permettre de trouver rapidement des réponses pratiques et conviviales à toutes ses interrogations opérationnelles” (conclusions Agicap page 14).


Toutefois, ces caractéristiques ne consistent qu’en une liste de considérations générales et de définitions impropres à traduire un effort créatif portant l’empreinte de la personnalité de son auteur.


La SAS Agicap échoue, de ce fait, à démontrer l’originalité du logiciel “solution Agicap” et ses demandes principales fondées sur le droit d’auteur seront, en conséquence, rejetées.

La preuve de l’originalité

Pour rappel, conformément à l’article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial.


En application de l’article L.112-1 du même code, ce droit appartient à l’auteur de toute œuvre de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination.


La protection d’une œuvre de l’esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale, en ce sens qu’elle porte l’empreinte de la personnalité de son auteur et n’est pas la banale reprise d’un fonds commun non appropriable.

Lorsque la protection par le droit d’auteur est contestée en défense, l’originalité d’une œuvre doit être explicitée par celui qui s’en prétend l’auteur, seul ce dernier étant à même d’identifier les éléments traduisant sa personnalité.

L’action en parasitisme

Aux termes de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.


La concurrence déloyale doit être appréciée au regard du principe de la liberté du commerce, ce qui implique qu’un signe ou un produit qui ne fait pas l’objet de droits de propriété intellectuelle puisse être librement reproduit sous certaines conditions tenant à l’absence de faute, laquelle peut être constituée par la création d’un risque de confusion sur l’origine du produit dans l’esprit de la clientèle, circonstance attentatoire à l’exercice paisible et loyal du commerce.


L’appréciation de cette faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant en compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté de l’usage, l’originalité et la notoriété de la prestation copiée (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale, 10 juillet 2018, n°16-23.694).


Le parasitisme, qui n’exige pas de risque de confusion, consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre afin de tirer profit, sans rien dépenser, de ses efforts et de son savoir-faire, de la notoriété acquise ou des investissements consentis (en ce sens Cour de cassation, chambre commerciale économique et financière, 10 juillet 2018, n°16-23.694).

En l’espèce, la copie servile invoquée par la SAS Agicap des pages de son logiciel “solution Agicap” est établie par les constats d’huissier, desquels il résulte que le site internet accessible à l’adresse reprend à l’identique, à l’exception du remplacement du nom Agicap par le nom Trezy, certains ayant toutefois été omis lors de la copie, la plupart des pages du logiciel “solution Agicap”, en particulier celles intitulées “connecter une banque”, “changer la maille de saisie des objectifs”, “mettre à jour mon mot de passe et mes identifiants bancaires”, “catégoriser une opération bancaire”, “inviter un utilisateur”.


Ces constats de commissaire de justice établissent également que le site renvoie directement vers les pages de la FAQ du logiciel “solution Agicap” accessibles à l’adresse .


Il en résulte que la copie servile des pages du logiciel, de surcroît avec la dénomination sociale de la SAS Agicap qui n’a pas été intégralement remplacé, entraîne un risque de confusion dans l’esprit du consommateur qui caractérise un acte de concurrence déloyale, engageant la responsabilité civile de la SAS Trezy.



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