Protection de la clientèle de l’employeur  
Protection de la clientèle de l’employeur  

Passer des appels téléphonique aux clients de son employeur pour tenter de démarcher ces derniers est de nature à nuire aux intérêts économiques de l’employeur et rend impossible le maintien du salarié (attaché commercial) dans l’entreprise pendant la durée du préavis ; son licenciement pour faute grave est donc justifié.

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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2021

PRUD’HOMMES

N° RG 18/04591 –��N° Portalis DBVJ-V-B7C-KSSI

Monsieur D X

c/

SARL VISION SUD OUEST

Nature de la décision : AU FOND

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 juillet 2018 (R.G. n°F17/00636) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d’appel du 02 août 2018,

APPELANT :

Monsieur D X

né le […] à […] 1715, […]

représenté et assisté de Me Elise BATAIL, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SARL Vision Sud Ouest, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social 19, […]

N° SIRET : 415 155 605 00033

représentée et assistée de Me Jean-François FERRAND, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 octobre 2021 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Sophie Masson, conseiller chargé d’instruire l’affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame L M-N, présidente

Madame Sophie Masson, conseillère

Monsieur Rémi Figerou, conseiller

Greffier lors des débats : Evelyne Gombaud,

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur D X, né en 1962, a été engagé par la société à responsabilité limitée Vision Sud Ouest selon contrat à durée indéterminée à compter du 4 juin 2015 en qualité d’attaché commercial.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de publicité.

Par lettre en date du 14 avril 2016, M. X a été convoqué à un entretien préalable fixé au 22 avril 2016 avec mise à pied à titre conservatoire ; il a été licencié pour faute grave par lettre du 12 mai 2016.

M. X a, le 19 avril 2017, saisi le conseil de prud’hommes de Bordeaux en contestation de son licenciement, paiement de diverses sommes à titre d’indemnités et de rappel de commissions.

Par jugement prononcé le 10 juillet 2018, le conseil de prud’hommes a statué ainsi qu’il suit :

— constate et juge que le licenciement de Monsieur D X repose sur une faute grave ;

— déboute en conséquence M. X de sa demande de dommages et intérêts fondée sur un licenciement qui aurait été sans cause réelle et sérieuse ;

— le déboute également des demandes de paiement des salaires pendant la période de mise à pied conservatoire et d’indemnité de préavis ;

— condamne la SARL Vision Sud Ouest au versement des sommes de :

—  5.687,04 euros à titre de rappel sur commissions,

—  568,70 euros au titre des congés payés afférents,

—  800 euros à titre d’indemnité sur les dispositions de l’article700 du code de procédure civile ;

— rappelle que l’exécution provisoire est de droit, conformément à l’article R.1454-28 du code du travail ;

— condamne la SARL Vision Sud Ouest à remettre à M. X un bulletin de paye reprenant les condamnations salariales du présent jugement et toutes les sommes versées postérieurement au solde de tout compte ;

— déboute M. X de toutes ses autres demandes ;

— déboute la SARL Vision Sud Ouest de toutes ses demandes reconventionnelles ;

— condamne la SARL Vision Sud Ouest au paiement des dépens et des frais éventuels d’exécution.

M. X a relevé appel de cette décision par déclaration au greffe en date du 2 août 2018.

La société Vision Sud Ouest a formé un appel incident.

Par dernières conclusions communiquées le 10 septembre 2021 par le réseau privé virtuel des avocats, Monsieur D X demande à la cour de :

Vu les articles L.1235-1 et 5, L.3243-2, L.8221-5 et L.8223-1 du code du travail (dans leur version applicable au litige),

— infirmer le jugement entrepris en ce qu’il :

— a jugé que son licenciement reposait sur une faute grave,

— l’a débouté de sa demande de paiement de l’indemnité compensatrice de préavis et du rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire,

— l’a débouté de sa demande de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

— limité le montant de la condamnation de la société Vision Sud Ouest au rappel de salaire au titre des commissions à la somme de 5.687,04 euros, outre 568,70 euros

de congés payés afférents,

— débouté Monsieur X de « toutes ses autres demandes », savoir sa demande indemnitaire au titre du travail dissimulé ;

Et, statuant à nouveau,

— juger :

— que le licenciement de Monsieur X est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

— que la société Vision Sud Ouest reste devoir à Monsieur X des commissions sur ventes,

— que la société Vision Sud Ouest a intentionnellement dissimulé des sommes de salaires en les soustrayant aux obligations de déclaration et de paiement des charges afférentes ;

— en conséquence, condamner la société Vision Sud Ouest au paiement des sommes suivantes :

—  2.415,65 euros au titre de la mise à pied conservatoire outre 241,57 euros de congés payés,

—  5.092,40 euros à titre d’indemnité de préavis outre 509,24 euros de congés payés afférents,

—  38.700 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

—  7.498,73 euros à titre de rappels sur commissions outre 749,73 euros de congés payés,

—  15.000 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé,

—  3.000 euros d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, frais d’exécution éventuels et frais de recouvrement éventuels ;

— juger que la société Vision Sud Ouest a abusivement résisté à verser à M. X des sommes qu’elle reconnaît en partie lui devoir depuis octobre 2017 et qu’elle a été condamnée à lui verser ;

— en conséquence, condamner la société Vision Sud Ouest au paiement de la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Par dernières écritures communiquées le 15 septembre 2021 par le réseau privé virtuel des avocats, la société Vision Sud Ouest demande à la cour de :

Vu les articles L.1234-5 et suivants, L.1234-9 et suivants et L.3141-28 et suivants du code du travail,

— confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Bordeaux en date du 10 juillet 2018 en ce qu’il :

— constate et juge que le licenciement de Monsieur D X repose sur une faute grave,

— déboute en conséquence Monsieur D X de sa demande de dommages et intérêts fondée sur un licenciement qui aurait été sans cause réelle et sérieuse,

— le déboute également des demandes de paiement des salaires pendant la période de mise à pied conservatoire et d’indemnité de préavis,

— déboute Monsieur D X de toutes ses autres demandes, et notamment sa demande d’indemnisation pour un montant de 15.000 euros au titre du travail dissimulé,

Pour le reste,

— infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Bordeaux en date du 10 juillet 2018 en ce qu’il a condamné la société Vision Sud Ouest au versement de :

-5.687,04 euros à titre de rappel sur commissions,

-568,70 au titre de congés payés afférents,

-800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

— dire que la société Vision Sud Ouest doit verser à Monsieur D X la somme de 3.578,80 euros au titre des commissions et qui feront l’objet d’un bulletin de paye ;

— débouter Monsieur D X de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

— condamner Monsieur D X aux dépens et à verser à la société Vision Sud Ouest la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour J ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, il est, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, expressément renvoyé à la décision déférée et aux dernières conclusions écrites déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Sur le licenciement

L’article L.1232-1 du code du travail dispose :

« Tout licenciement pour motif personnel est motivé dans les conditions définies par le présent chapitre.

Il est justifié par une cause réelle et sérieuse.»

Selon l’article L.1235-1 du même code dans sa version applicable au litige :

« (…) A défaut d’accord, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

(…) Si un doute subsiste, il profite au salarié.»

Lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, il revient à l’ employeur d’en établir la réalité.

Au visa de ces textes, M. X fait grief au jugement déféré d’avoir retenu que son licenciement pour faute grave était justifié et fait valoir qu’aucun des trois griefs énoncés dans la lettre de licenciement n’est établi.

A cet égard, il faut rappeler que la lettre recommandée en date du 12 mai 2016, qui notifie à M. X son licenciement, indique :

« Les raisons de notre décision sont la détérioration évidente de nos relations professionnelles et notamment, la perte de confiance due à des agissements constitutifs d’une faute grave.

En effet, bien qu’à plusieurs reprises nous vous avons demandé d’exécuter votre travail selon vos obligations et nos directives.

Nous avons eu des remontées d’informations de plusieurs personnes nous informant de votre volonté de nuire en pillant les baux et donc le patrimoine de la société VISION, information que vous avez concédé sur le ton de la rigolade en précisant que vous en aviez parlé à vos collaborateurs.

Par ailleurs, un de nos concurrents nous a confraternellement informé par mail que vous l’aviez contacté pour lui servir de « prête nom » afin de reprendre les baux de la société VISION, vous avez d’ailleurs reconnu avoir eu un entretien téléphonique avec ce concurrent en question.

Nous ne pouvons cautionner d’aussi graves manquements à vos obligations professionnelles dans la mesure où une telle attitude est intolérable et nuit gravement au bon fonctionnement et à la réputation de notre société. Les explications recueillies auprès de vous lors de notre entretien n’ont pas permis de modifier cette appréciation.

Compte tenu de la gravité des faits, votre maintien dans l’entreprise s’avère impossible. (…)»

Il est constant en droit que, en vertu des dispositions de l’article L.1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi, tant par l’employeur que par le salarié ; que ce dernier est tenu à une obligation de loyauté qui implique, notamment, de ne pas sciemment commettre d’actes de nature à contrevenir à la bonne marche de l’entreprise qui l’emploie.

En l’espèce, la société Vision Sud Ouest produit tout d’abord un message électronique en date du 18 avril 2016, qui lui a été adressé par Monsieur D Z par l’intermédiaire de Madame F Y, et qui est ainsi rédigé : « Je te confirme avoir été contacté récemment par téléphone par D X. Celui-ci voulait m’annoncer qu’il quittait ta société pour s’installer à son compte et qu’il était à notre disposition pour servir de prête-nom si nous souhaitions détourner des baux de ta société. J’ai évidemment refusé.»

A cet égard, la société intimée établit que Mme Y et M. Z ont été ou sont les gérants de sociétés exerçant leur activité, comme Vision Sud Ouest, dans le domaine de la régie publicitaire.

Dans un courrier adressé le 14 avril 2016 à son employeur, M. X a admis avoir pris contact avec M. Z mais a nié que l’entretien ait pu porter sur le détournement des emplacements loués par la société Vision Sud Ouest ; cependant, la lettre de licenciement mentionne que, au cours de l’entretien préalable en date du 22 avril 2016, M. X, prié de s’expliquer sur le fait que son employeur avait été informé des démarches de ce salarié auprès d’autres régisseurs, a admis ce fait « sur le ton de la rigolade », ce qui n’a pas été démenti par M. X dans les suites du licenciement mais lors de sa saisine du conseil de prud’hommes onze mois J tard.

Il apparaît de surcroît que M. Z n’a pas été le seul à être démarché par M. X puisque, lorsque son employeur a évoqué dans un message électronique du 30 mars 2016 le fait que les concurrents de la société signalaient avoir été approchés par ce salarié pour « piller les baux de l’entreprise Vision« , l’appelant évoque également »les propos de nos concurrents ».

M. X produit en cause d’appel une attestation établie le 3 février 2021 par M. Z, donc postérieure aux débats devant le conseil de prud’hommes et par laquelle celui-ci, près de cinq années après avoir adressé à la société Vision Sud Ouest le message électronique relatant la démarche active de l’appelant visant à déposséder la société intimée de l’usage d’emplacements publicitaires, indique désormais qu’il a menti puisqu’il écrit : « Nous n’avons jamais évoqué la possibilité de prendre les baux de la société Vision. Aucun représentant de la société Vision ne m’a contacté à aucun moment.»

La cour retiendra pourtant que cette attestation, rédigée plusieurs années après les faits à la

demande de son ancien associé, ne peut sérieusement remettre en cause la véracité d’un message spontanément adressé directement au représentant légal de la société Vision Sud Ouest peu de jours après la démarche litigieuse, les termes de ce message étant eux-mêmes étayés par les autres éléments produits par l’employeur tels qu’examinés supra.

Une telle démarche de M. X, propre à nuire aux intérêts économiques de l’employeur, était de nature à rendre impossible son maintien dans l’entreprise pendant la durée du préavis ; son licenciement pour faute grave est donc justifié et la cour confirmera le jugement déféré de ce chef ainsi que, en conséquence, en ce qu’il a débouté M. X de ses demandes indemnitaires à ce titre.

2. Sur le rappel de commissions

M. X fait grief au premier juge d’avoir limité à la somme de 5.687,04 euros la condamnation de l’employeur au titre du rappel de commissions qui lui sont dues alors que sa demande de ce chef était de 7.498,73 euros.

La société Vision Sud Ouest reproche de son côté au conseil de prud’hommes de ne pas avoir limité sa condamnation à ce titre à la somme de 3.578,80 euros.

La cour observe tout d’abord que, au résultat des négociations entre les parties qui n’ont pas débouché sur la signature d’un contrat de travail écrit, il apparaît que l’employeur et le salarié ont, dans le cadre de leurs échanges électroniques en date du 19 mai 2015, arrêté les pourcentages suivants au titre des commissions à percevoir par M. X :

« 1- affichage longue conservation : 10 % sur les nouveaux contrats (sur la durée totale du contrat) ; renouvellements 3 %. 2- contrats Vision (reprise de clientèle) : inclus dans la partie fixe du salaire. 3- affichage temporaire : 10 % »

Au soutien de sa demande, M. X produit des documents relatifs à des ordres d’affichage temporaire au profit des sociétés et enseignes Brico Dépôt, K-stores, Bricorama, […], Renault, […], […], […] et I J ; 6 contrats comportent la signature de M. X mais non celle du co-contractant (campagne K-Stores, non discutée par l’intimée) ; 12 contrats comportent les signatures de M. X et du client ; enfin, 9 contrats ne mentionnent pas l’intervention de M. X en ce qui concerne les campagnes d’affichage de Brico Dépôt, Bricorama et Renault.

L’appelant produit également deux attestations, rédigées l’une par Madame G A, l’autre par Monsieur H B.

Mme A atteste de ce que M. X est à l’origine de la signature des bons de commande, au cours de l’année 2016, relatifs aux campagnes des annonceurs Bricorama, Renault et Brico Dépôt, commandées respectivement par les agences Vivaki, Publicis et GDA et explique que, en sa qualité d’attachée de direction de la société Vision Côte Basque jusqu’au 30 novembre 2016, elle centralisait les ventes nationales et émettait les bons de commande pour le compte des commerciaux.

Cette attestation est cependant démentie par les pièces produites par l’employeur, en particulier les échanges de messages électroniques entre Mme A et ses interlocuteurs au sein des trois agences de publicité Vivaki, Publicis et GDA, dont les termes mettent en évidence le fait qu’elle a été directement interrogée par ses différents contacts pour la recherche des emplacements ensuite précisément décrits dans le cadre des échanges quant à leur situation et leurs dimensions, ainsi que le fait qu’elle était en mesure de proposer un prix et de le négocier (campagne Brico Dépôt) et de donner un accord quant aux dates de ces campagnes d’affichage temporaire (campagne Bricorama).

Par ailleurs, M. X, répondant à l’argument de la société Vision Sud Ouest relatif à l’extrême précision des détails de l’attestation de M. B, qui n’est J salarié de la société intimée, admet que c’est sur ses indications que M. B a rédigé ce document, ce qui est d’ailleurs corroboré par le fait que M. B mentionne un taux de commission favorable à M. X qui est invalidé par les termes des messages électroniques échangés deux ans J tôt par la société Vision Sud Ouest et M. X lui-même et portant accord sur les taux de commission du salarié, ainsi qu’il a été indiqué supra ; il apparaît ainsi que M. B atteste de faits qu’il n’a pas personnellement constatés mais qui lui sont rapportés par l’appelant.

Il n’est donc pas rapporté la preuve de ce que le salarié est à l’origine de la signature de ces contrats et, par ailleurs, il est établi par l’intimée que les campagnes Pré Vert et I J, prévues dans la commune de Boé, n’ont pas été menées à bien en raison du retrait, ordonné par les autorités, des panneaux d’affichages non réglementaires.

Ainsi, infirmant le jugement déféré de ce chef, la cour ramènera la condamnation de l’employeur à la somme de 3.578,80 euros au titre des commissions restant dues, outre celle de 357,88 euros au titre des congés payés afférents.

3. Sur la demande au titre du travail dissimulé

M. X fait grief au jugement déféré d’avoir rejeté sa demande en paiement d’une indemnité de 15.000 euros pour travail dissimulé.

L’appelant explique qu’il a perçu un chèque de 1.306,70 euros le 15 juin 2016 qui n’a pas fait l’objet d’un bulletin de salaire et que cette somme a ensuite été portée au bulletin de salaire édité le 15 novembre 2018 en suite du paiement du rappel de commissions en exécution de la condamnation du jugement du 10 juillet 2018, sans qu’elle ait fait l’objet des contributions et cotisations sociales légales, ce qui traduit l’intention dissimulatrice de l’employeur au sens des articles L.8221-3 et suivants du code du travail.

Toutefois, ce seul retrait de la somme de 1.306,70 euros, non référencée comme rappel de commissions ou de frais divers et en effet portée au bulletin de salaire du 15 novembre 2018 à une ligne distincte des lignes relatives aux éléments salariaux sujets à cotisations, n’est pas susceptible d’établir l’intention dissimulatrice de l’employeur alors au surplus que la totalité des bulletins de salaire produits aux débats, y compris par M. X, démontre que la société Vision Sud Ouest se conforme à ses obligations à ce titre.

Le jugement déféré sera en conséquence confirmé de ce chef.

4. Sur la demande en dommages et intérêts pour résistance abusive

M. X forme en cause d’appel une demande en allocation de dommages et intérêts pour résistance abusive ; il explique qu’il a été nécessaire de faire intervenir un huissier de justice pour contraindre l’employeur à s’acquitter des sommes au paiement desquelles il a été condamné sous le bénéfice de l’exécution provisoire et dont il reconnaît pour partie le bien fondé.

La cour observe à cet égard que le conseil de prud’hommes de Bordeaux a en effet, le 10 juillet 2018, condamné avec exécution provisoire la société Vision Sud Ouest à payer à son salarié la somme principale de 5.687,04 euros ; que celle-ci ne s’est pas spontanément

exécutée puisque le salarié a été contraint de recourir aux diligences de Maître C, huissier de justice, qui indique dans un courrier daté du 19 octobre 2018 que l’employeur lui avait déclaré la veille être « dans l’attente du décompte de son expert comptable » pour procéder au paiement, argument inopérant dans le cadre d’une condamnation en justice. Il apparaît enfin que l’intimée n’a exécuté, de surcroît en partie, la décision prud’homale que le 11 mars 2019, soit plusieurs mois après la notification de cette décision -le 12 juillet 2018- par les soins du greffe du conseil de prud’hommes.

Ces éléments doivent être regardés comme la manifestation d’une résistance abusive qui ouvre droit à indemnisation, au profit de M. X, à hauteur de 1.000 euros, somme au paiement de laquelle sera donc condamnée l’intimée.

5. Sur les demandes accessoires

La cour confirmera les chefs dispositifs du jugement du 10 juillet 2018 relatifs à l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et à la charge des dépens.

Y ajoutant, la cour condamnera M. X, qui succombe en son appel, à verser à l’intimée une somme de 1.500 euros et à payer les dépens de l’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement prononcé le 10 juillet 2018 par le conseil de prud’hommes de Bordeaux, SAUF en ce qu’il a condamné la société Vision Sud Ouest à payer à Monsieur D X la somme de 5.687,04 euros à titre de rappel de commissions ainsi que la somme de 568,70 euros au titre des congés payés afférents ;

Statuant à nouveau de ce chef,

Condamne la société Vision Sud Ouest à payer à Monsieur D X les sommes suivantes :

—  3.578,80 euros au titre des commissions restant dues ;

—  357,88 euros au titre des congés payés afférents,

Y ajoutant,

Condamne la société Vision Sud Ouest à payer à Monsieur D X la somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Condamne Monsieur D X à payer à la société Vision Sud Ouest la somme de 1.500 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur D X à payer les dépens de l’appel.

Signé par Madame L M-N, présidente, présidente et par A.-Marie Lacour-K, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


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