Prospection Téléphonique : décision du 9 novembre 2022 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 19/03822

·

·

,

Prospection Téléphonique : décision du 9 novembre 2022 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 19/03822

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

————————–

ARRÊT DU : 09 NOVEMBRE 2022

PRUD’HOMMES

N° RG 19/03822 – N° Portalis DBVJ-V-B7D-LD37

Madame [D] [K]

c/

SARL [O] & [O]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 14 juin 2019 (R.G. n°F 18/00081) par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LIBOURNE, Section Encadrement, suivant déclaration d’appel du 08 juillet 2019,

APPELANTE :

Madame [D] [K]

née le 04 Avril 1984 à [Localité 6] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Michèle BAUER, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SARL [O] & [O], prise en la personne de ses représentants légaux Messieurs [I] [O] et [H] [B] [O], co-gérants, domiciliés en cette qualité audit siège social [Adresse 2]

N° SIRET : 815 293 824

représentée par Me Nicolas CARTRON de la SELARL RODRIGUEZ & CARTRON, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 04 octobre 2022 en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Sylvie Hylaire, présidente et Madame Sylvie Tronche, conseillère chargée d’instruire l’affaire,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Madame [D] [K], né en 1984, a été engagée en qualité de chargée de clientèle, statut cadre par la SARL [O] et [O], société d’assurances, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 7 avril 2015.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective des agents d’assurances.

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de Mme [K] s’élevait à la somme de 2.000 euros.

Le 31 janvier 2017, Mme [K] a reçu en main propre une lettre d’avertissement.

Par lettre en date du 2 mars 2017, Mme [K] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 10 mars 2017 avec mise à pied à titre conservatoire.

Elle a ensuite été licenciée pour faute grave par lettre datée du 15 mars 2017.

A la date du licenciement, Mme [K] avait une ancienneté de 1 an et 11 mois et la société occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités outre des rappels de salaires, Mme [K] a saisi le 18 juin 2018 le conseil de prud’hommes de Libourne qui, par décision en date du 14 juin 2019, considérant que le licenciement de Mme [K] reposait sur une faute grave, a :

– débouté Mme [K] de l’ensemble de ses demandes,

– condamné la société [O] et [O] à payer à Mme [K] une indemnité de 3.000 euros pour procédure irrégulière et vexatoire,

– débouté la société [O] et [O] de ses demandes reconventionnelles,

– condamné la société [O] et [O] aux dépens.

Par déclaration du 8 juillet 2019, Mme [K] a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 11 août 2022, Mme [K] demande à la cour d’infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes sur le licenciement et l’exécution déloyale du contrat de travail et, statuant à nouveau, de :

– condamner la société [O] et [O] au paiement des sommes suivantes :

* 1.180 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

* 5.900 euros au titre de l’indemnité de préavis,

* 590 euros au titre de l’indemnité de congés payés sur préavis,

* 383,50 euros au titre des rappels de salaires sur mise à pied à titre conservatoire,

* 38,35 euros au titre des congés payés sur rappels de salaires durant la mise à pied à titre conservatoire,

* 16.000 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

* 10.000 euros au titre de dommages et intérêts pour préjudice subi du fait de l’exécution déloyale,

– confirmer partiellement le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il a considéré que la procédure est irrégulière et vexatoire,

– l’infirmer sur le montant des dommages et intérêts,

– condamner la société [O] et [O] à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier et vexatoire,

– condamner la société [O] et [O] au versement d’une indemnité de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre à supporter la charge des dépens,

– assortir les sommes des intérêts légaux de retard à compter de la saisine du conseil de prud’hommes,

– capitaliser les intérêts,

– débouter la société [O] et [O] de l’ensemble de ses demandes.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 30 août 2022, la société [O] et [O] demande à la cour de :

A titre liminaire,

– déclarer l’appel de Mme [K] irrecevable au sens de l’article 542 du code de procédure civile,

A titre principal,

– confirmer le jugement du 14 juin 2019 en ce qu’il a :

* jugé que le licenciement de Mme [K] repose sur une faute grave,

*débouté Mme [K] de l’ensemble de ses demandes à ce titre,

*débouté Mme [K] de sa demande relative à la prétendue inexécution déloyale de son contrat de travail,

*débouté Mme [K] de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

A titre incident,

– infirmer le jugement du 14 juin 2019 en ce qu’il a :

* jugé le licenciement de Mme [K] irrégulier et vexatoire,

* condamné la société [O] et [O] à lui payer la somme de 3.000 euros à ce titre,

* débouté la société [O] et [O] de ses demandes reconventionnelles,

* condamné la société [O] et [O] aux dépens ;

Ce faisant,

– débouter Mme [K] de ses prétentions sur son prétendu licenciement irrégulier et vexatoire,

– dire et juger son action et son appel abusifs,

– condamner Mme [K] à lui payer :

* 2.000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive,

* 4.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’à supporter les dépens,

En tout état de cause,

– juger n’y avoir lieu au cours des intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 1er septembre 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience du 4 octobre 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ainsi qu’à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1- Sur la recevabilité de l’appel

La société [O] et [O] soutient que par son appel, Mme [K] ‘n’a aucune critique sérieuse à opposer au jugement du 14 juin 2019 et semble simplement vouloir tenter une seconde fois son coup devant la Cour, sans même avoir daigné se présenter devant ses premiers juges. D’ailleurs son argumentation est rigoureusement la même que devant le Conseil de prud’hommes, sans changement. Cette démarche de Mme [K] ne semble pas correspondre au droit d’appel tel qu’énoncé par l’article 542 du code de procédure civile qui semble devoir se concevoir avant tout comme la critique argumentée et pertinente d’un jugement. Dès lors la Cour appréciera si l’appel de Mme [K] est recevable (…)’

***

L’article 542 du code de procédure civile dispose que l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel.

En vertu de l’article 562 du même code, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s’opérant pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

Selon l’article 901 du code de procédure civile, la déclaration d’appel doit contenir, outre les mentions prescrites par l’article 58, et à peine de nullité, notamment les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

En l’espèce, la déclaration d’appel de Mme [K] est ainsi libellée :

« l’appelante interjette appel en ce qu’il a : – Jugé que le licenciement de Madame [K] reposait sur une faute grave -Débouté Madame [D] [K] de l’ensemble de ses demandes -Condamné la Société [O] et [O] en la personne de son représentant légal à payer à Madame [D] [K] une indemnité de 3.000 euros pour procédure irrégulière et vexatoire. Elle demande à la Cour de statuer à nouveau: – Juger que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse- Condamner la SARL [O] et [O] au paiement de la somme de 1.180 euros au titre de l’indemnité de licenciement, 5.900 euros au titre de l’indemnité de préavis, 590 euros au titre des congés sur préavis, 383,50 euros au titre de rappels de salaire pour la mise à pied à titre conservatoire, 38,35 euros au titre des congés payés sur cette mise à pied conservatoire, 16.000 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse -juger que la procédure est irrégulière et vexatoire (confirmer partiellement le jugement du Conseil de Prud’hommes) mais accorder à Madame [K] 5.000 euros de dommages et intérêts pour le préjudice subi -Juger que la SARL [O] et [O] a exécuté de manière déloyale le contrat de travail et la condamner au règlement d’une somme de 10.000 euros au titre de dommages et intérêts, Condamner la SARL [O] et [O] à verser à Madame [K] la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du CPC ainsi que les entiers dépens de l’instance, assortir les sommes de condamnation des intérêts de retard à compter de la saisine du Conseil de Prud’hommes, capitaliser les intérêts ».

Il ressort de ces éléments que la déclaration d’appel de Mme [K] comporte mention des chefs du jugement dont elle relève appel, sans qu’aucune critique ne puisse être retenue, outre qu’en toute hypothèse, la sanction du non-respect des dispositions de l’article 901 n’est pas l’irecevabilité de l’appel.

La société sera déboutée de sa demande à ce titre.

2- Sur la rupture du contrat

La lettre de licenciement adressée le 15 mars 2017 à Mme [K] est ainsi rédigée :

« (‘)

nous avons eu à déplorer de votre part des agissements constitutifs d’une faute grave, relevant tant du contrat de travail, du règlement intérieur, de notes de services que des usages de l’entreprise.

En effet :

– Le portefeuille client dont vous avez la gestion doit être visité annuellement. Or, vos semainiers des douze derniers mois font apparaître que seuls 34 d’entre eux sur 102 ont été visités. Ce qui représente moins d’un client par semaine travaillée. Les 2/3 de votre portefeuille n’ont donc pas été visité. Les conséquences dommageables pour notre société sont importantes en terme d’image, d’engagement non-tenu, de multi équipement donc de fidélisation, de manque de recommandation, donc de développement commercial.

De plus, notre clientèle professionnelle ayant en permanence des évolutions de stocks, de nombre de véhicules, de salariés, de surfaces, par manque de visite, nous exposent à un défaut de conseil. Ces faits ont été portés à notre connaissance le 23 janvier 2017.

– La prospection hebdomadaire sur le terrain n’est pas réalisée.

– L’envoi postal hebdomadaire de plaquettes commerciales accompagnées d’une relance téléphonique systématique en vue d’obtenir des rendez-vous avec des prospects, n’est pas mise en oeuvre. Cette demande vous a été verbalisée à maintes reprises et notifiée les 22/03/2016 et 01/02/2017. Un fichier prospect vous a été transmis à cet effet. Votre action s’est limitée à 4 envois en 47 semaines travaillées. Votre attitude est bien évidemment pénalisante en terme de développement et de recherche de nouveaux clients. Les termes de votre contrat de travail ne sont pas respectés.

Ces 3 premiers manquements au contrat de travail ont pour conséquences directes de n’avoir fait souscrire que 7 nouveaux clients sur l’année.

– Vous persistez, malgré nos demandes, à refuser de mettre M. [O] [H] et Melle [Y] [E], assistante commerciale, en copie de vos mails professionnels. Attitude pénalisante quant au suivi des relations commerciales avec les clients de la société et du service que nous leur devons.

– Nous notons également l’absence de préparation de vos tournées hebdomadaires, donc de perspective de clients à visiter.

– Vous avez résilié un contrat d’assurance pour un véhicule terrestre à moteur soumis à obligation d’assurance auprès d’ALLIANZ pour le compte de la société DIRECT WINES France, à effet du 01/01/2017. Nous constatons que vous oubliez de garantir, lors de la mise en place de ce contrat auprès des MMA, un chariot élévateur, véhicule terrestre à moteur soumis à garanties obligatoires en dépit des instructions du client. Pire, malgré le rappel d’une de vos collègues proposant de vous aider, vous persistez à ne pas valider les prises de garanties du véhicule avec de plus une réponse désobligeante à l’égard du client. Vous n’avez pas non plus jugé utile de répondre aux relances clients à ce sujet. L’absence de garantie pour ce véhicule durant 1,5 mois est une faute grave qui aurait pu avoir des conséquences dramatiques pour le client et tout autant après une mise en cause de notre société. Ces faits ont été portés à notre connaissance le 16 février 2017.

– Les frais d’essence payés par la Société le sont pour une utilisation exclusivement professionnelle. Nous déplorons que vous enfreigniez cette règle, en faisant le plein du véhicule durant votre période de congés payés d’été et week-end, et ce à des fins exclusivement personnelles. Ces faits ont été portés à notre connaissance le 17 janvier 2017.

– Vous avez enregistré à plusieurs reprises, sur vos états de production, des affaires qui ne relèvent pas de votre production personnelle, mais de celle d’une de vos collègues.

Vous avez tenté de vous faire payer des commissions indues. Ces faits ont été portés à notre connaissance le 19 janvier 2017.

– Vous proférez des insultes à l’égard de vos employeurs, selon les termes suivants : PARANOS, FOUS…insultes pour le moins inacceptables. Ces faits ont été portés à notre connaissance le 10 février 2017.

– Vous notifiez que votre implication au travail est équivalente à celle d’employée de la Poste aux Antilles puisqu’il vous faut une journée pour faire un plan et demi. Ceci est à mettre en parallèle avec votre manque de travail que nous vous signifions en permanence. Ces faits ont été portés à notre connaissance le 10 février 2017.

– Depuis votre poste de travail professionnel, vous rédigez votre CV pour candidater chez un de nos concurrents et ce, durant vos horaires de travail. Ces faits ont été portés à notre connaissance le 10 février 2017.

– Votre mésentente avec certaines de vos collègues à de réelles conséquences sur le bon fonctionnement du service. Celles-ci regrettent de devoir traiter directement le mécontentement client et de passer trop de temps à la vérification de vos dossiers.

– Par mail, vous insultez de BRELE un de nos principaux fournisseurs. Ces faits ont été portés à notre connaissance le 10 février 2017.

– Nous avons également à déplorer vos graves insuffisances envers la SCEA [A] [V] et Fils:

– Vous n’avez pas jugée utile de recevoir, Mme [V] malgré votre présence à l’agence.

– Mme [V] a demandé à être recontactée, ce que vous ne faites pas.

Ces faits ont été portés à notre connaissance mi janvier 2017

– Vous égarez l’appel de cotisation du contrat GROUPAMA que Mme [V] vous a confiée.

– M. [A] [V] est passé à l’agence le 13/02/2017 pour récupérer les cartes vertes des véhicules [Immatriculation 5] et [Immatriculation 4] qui auraient dû lui être envoyées. Nous sommes stupéfiés de constater avec le client que vous avez oublié d’assurer ces deux véhicules depuis le 01/01/2016.

Ces faits ont été portés à notre connaissance le 13 février 2017.

– La SCEA [V] et Fils nous demande de vous dessaisir de la gestion de leur compte qui, à défaut, serait contraint à résilier leurs contrats. Ces faits ont été portés à notre connaissance le 01/03/2017.

Votre conduite met ainsi en cause la bonne marche du service.

Les explications recueillies, auprès de vous au cours de notre entretien du 10 mars 2017 n’ayant pas permis de modifier notre appréciation des faits, nous avons décidé de vous licencier. Compte tenu de la gravité des agissements fautifs qui vous sont reprochés, votre maintien dans l’agence s’avère impossible. Cette mesure prend donc effet immédiatement et votre solde de tout compte sera arrêté à la date d’envoi de la présente, sans indemnité de préavis ni de licenciement. La période pendant laquelle nous vous avons mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas rémunérée.

(…) ».

L’employeur ayant choisi de se placer sur le terrain d’un licenciement pour faute grave doit rapporter la preuve des faits allégués et démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié au sein de l’entreprise, étant en outre rappelé qu’aux termes de l’article L.’1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de 2 mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance.

– Sur les griefs au titre de la visite annuelle du portefeuille clients, de la prospection hebdomadaire, de l’envoi postal des plaquettes commerciales et des relances téléphoniques pour obtenir des rendez-vous avec de potentiels clients

Il est reproché à Mme [K] un manquement à ses obligations de mission et d’activités contractuelles en ce que sur la période du 4 janvier 2016 au 29 janvier 2017, elle n’a rendu visite qu’à 34 clients sur 102 que compte son portefeuille, elle n’a pas respecté la demi-journée hebdomadaire de prospection mise à sa charge, aucun compte rendu et autre remontée concrète de prospection n’ayant été réalisés, seuls 4 envois de plaquettes commerciales en 47 semaines ont été effectués alors qu’il lui incombait de procéder à l’envoi hebdomadaire de 30 plaquettes commerciales viticoles.

L’employeur verse au soutien de ses affirmations d’une part, un document intitulé «’dénombrement rendez-vous clients effectués par Mme [K] pour la période du 4 janvier 2016 au 29 janvier 2017’» duquel il ressort que seules 34 visites ont été effectuées et d’autre part, une lettre d’avertissement en date du 31 janvier 2017 rappelant à Mme [K] la nécessité de réaliser ses objectifs de production et constatant une insuffisance de sa part, ce qui constitue pour lui une faute professionnelle.

Mme [K], qui ne conteste pas avoir reçu une lettre d’avertissement, soutient avoir communiqué régulièrement à son employeur l’état d’avancement des visites du portefeuille clients, comme elle a pu le faire à l’occasion d’un entretien du 18 janvier 2017 avec son employeur, qui à l’issue, a établi un bilan et ne lui a jamais demandé de modifier son organisation. Elle considère que l’employeur s’est constitué une preuve à lui même en produisant un décompte de ses visites clients qu’elle n’a pas contresigné. S’agissant de la prospection hebdomadaire, elle explique qu’aucune remarque ne lui a été faite avant la lettre d’avertissement alors que tous les salariés organisaient la prospection suivant leurs possibilités. Ensuite d’une note dont elle a été destinataire le 1er février 2017, elle indique avoir appliqué les consignes imposées. Elle précise qu’aucun compte rendu et remontée concrète des prospections n’étaient exigés aux termes de son contrat de travail et que l’employeur ne rapporte pas la preuve de l’absence de prospection retenue à son encontre. Elle affirme qu’il en est de même concernant le grief tiré de l’absence d’envoi postal de plaquettes commerciales et de relances téléphoniques subséquentes.

***

Il résulte du contrat de travail liant les parties que les missions de la salariée sont ainsi définies : «'(…) développer, dans le cadre d’objectifs fixés, le chiffre d’affaire de l’agence, par ses actions commerciales. Entrent notamment dans le cadre de sa mission : la réalisation d’études de marché et la préparation des actions commerciales, (‘), la prospection d’un secteur géographique et d’une population définie, la présentation et l’argumentation d’offres (…), le suivi et la relance des clients (visite annuelle, relances des impayés,…) Mme [K] recherchera toute affaire nouvelle en toutes branches des MMA et pour les sociétés dont l’employeur est le courtier par la prospection sous toutes ses formes. Les principales activités sont : (…) visiter la clientèle existante, au moins une fois par an, pour toutes les affaires la concernant, à préparer ce travail (…) Mme [K] s’engage à respecter les objectifs mensuels. Ces objectifs seront déterminés chaque année unilatéralement par l’employeur. Pour l’année 2015, les objectifs sont précisés pour information dans un document joint au présent contrat. Mme [K] s’engage à produire à son employeur son état de production mensuelle, dûment complété et signé au plus tard le 1er de chaque mois (…)’».

Sont annexés divers avenants dont trois portant une clause d’objectif pour les années 2015, 2016 et 2017.

La lettre d’avertissement remise à la salariée le 31 janvier 2017 fait état de la non-réalisation des objectifs pour l’année 2016 et l’absence de respect des consignes données relatives à la prospection sur le terrain au rythme d’une demi-journée par semaine, à l’envoi postal de 30 plaquettes commerciales viticoles par semaine selon un listing prospect fourni suivi d’une relance téléphonique en vue d’une prise de rendez-vous.

La salariée verse un planning établi par ses soins pour la période du 28 décembre 2015 au 31 mars 2017 au soutien de ses affirmations selon lesquelles dès le lendemain de l’avertissement reçu et en application des consignes qui lui étaient données par mail du 1er février 2017, elle avait procédé chaque semaine à l’envoi des plaquettes commerciales le lundi, la prospection sur le terrain le mercredi matin et la prospection téléphonique le vendredi après midi.

Toutefois, il convient d’observer que cet emploi du temps n’établit pas l’effectivité de l’accomplissement de ces tâches dans la mesure où certaines d’entre elles y sont portées (prospection, envoi plaquettes, etc) sur des périodes pendant lesquelles il est établi qu’elle bénéficiait d’un arrêt maladie (du 2 au 3 février 2017, du 4 février au 17 février 2017 et du 18 février au 22 février 2017).

A la lecture de cet emploi du temps il semble que les tâches relatives à la prospection, à l’envoi des plaquettes et aux relances téléphoniques aient été inscrites par avance sans que l’on puisse en déduire, à défaut d’autres éléments qu’elles ont été réellement effectuées.

En l’état des pièces produites, le tableau produit par l’employeur étant considéré comme probant au regard des termes de la lettre d’avertissement, non contestée par la salariée qui n’en demande pas l’annulation, les faits qui lui sont reprochés sont justifiés, étant précisé qu’à la date supposée d’un entretien avec son employeur pour faire le bilan sur l’état d’avancement des visites de la clientèle, elle était en arrêt maladie tel que cela ressort de l’arrêt de travail prescrit autorisant les sorties à partir du 18 janvier 2017 (la date de début et de fin de l’arrêt étant illisibles) et de la mention portée sur son planning de travail ce jour-là.

– Sur le refus de mettre en copie M. [O] et Mme [E] de ses mails professionnels

L’employeur fait valoir qu’à l’issue de son entretien avec la salariée le 31 janvier 2017, il était convenu que cette dernière devait mettre en copie de ses mails professionnels Mme [E], assistante commerciale ainsi que M. [H] [O], ce qui n’a pas été suivi d’effet. Il verse au soutien de son assertion l’attestation de Mme [E], établie le 31 août 2018, selon laquelle «’Mme [K] oubliait de me mettre en copie des mails et échanges avec nos clients et ce malgré les instructions données par nos supérieurs hiérarchiques’».

La salariée conteste ce grief en indiquant qu’il a été formulé pour la première fois le 31 janvier 2017, qu’aucune consigne en ce sens n’avait été précisée antérieurement et qu’elle avait informé par la suite régulièrement tant ses employeurs que Mme [E] de l’avancée de ses dossiers, respectant ainsi les consignes.

***

La seule attestation de Mme [E] établie en août 2018 ne permet pas de retenir un quelconque manquement de la salariée à ce titre dans la mesure où il est impossible de déterminer si les oublis relatés sont antérieurs ou postérieurs à l’avertissement délivré à la salariée et aux consignes données à partir du 1er février 2017.

Aucun manquement à ce titre ne peut donc être retenu contre la salariée.

– Sur l’absence de préparation des tournées hebdomadaires

Selon l’employeur, la salariée s’est abstenue de préparer les tournées hebdomadaires contrairement aux stipulations de son contrat de travail selon lesquelles elle devait passer tous les matins au bureau afin de préparer ses itinéraires et plans de tournée à l’avance.

La salariée conteste à juste titre ce grief qu’aucun élément probant ne vient caractériser.

– Sur les frais d’essence

Il est fait grief à Mme [K] d’avoir effectué des pleins d’essence du véhicule mis à sa disposition par l’entreprise hors période de travail, soit le samedi 2 juillet 2016 et les 16 et 29 août 2016 alors qu’elle procédait à son déménagement et se trouvait en vacances.

Contestant ce reproche, la salariée prétend qu’il était convenu d’un usage mixte du véhicule mis à sa disposition ainsi que de la carte essence en contrepartie d’une somme mensuelle de 150 euros retenue sur son salaire pour l’utilisation du véhicule à titre privé.

***

A la lecture de l’avenant en date du 7 avril 2015, il apparaît que si la salariée peut effectivement bénéficier à titre privé du véhicule de l’entreprise, en revanche la carte essence est réservée à un usage strictement professionnel de sorte qu’en utilisant la carte essence pendant ses périodes de congés, Mme [K] a manqué à ses obligations.

– Sur l’enregistrement, pour son compte, d’affaires ne relevant pas de sa production personnelle

La société produit au soutien de ce grief un document intitulé «’mouvements de production du 2 janvier 2016 au 31 décembre 2016. Producteur : [Y] [E]’» ainsi qu’un document intitulé «’production [D] [K]’» desquels il résulterait que la salariée se serait attribuée quatre affaires nouvelles enregistrées par Mme [E] afin d’en recevoir les commissions correspondantes, ce que conteste la salariée qui explique que son assistante, Mme [E], de par son statut, n’a pas vocation à percevoir des commissions pour la conclusions desdits contrats.

***

Hormis des flèches tracées devant des noms de clients sur les deux documents produits, rien ne permet de corroborer les assertions de l’employeur selon lequel la salariée se serait attribuée ces quatre affaires nouvelles. Ce manquement ne peut en l’état être retenu.

– Sur les insultes à l’égard de son employeur et d’un fournisseur

L’employeur produit aux débats deux mails de la salariée adressés à des collègues de travail. Dans le premier, évoquant ses employeurs, elle indique «’ils sont paranos… bon courage chez les fous…’» et dans le second, concernant un fournisseur «’Oh! quelle bande de brêles ! ».

Sans contester la matérialité de ces faits, la salariée relève que pour le premier, les propos contenus dans un écrit non public ne sont en rien injurieux et pour le second, qu’il ne s’agit nullement d’une insulte proférée directement ou d’un dénigrement du fournisseur en cause.

***

Si ces écrits ne peuvent en effet en l’état constituer des injures, il n’en demeure pas moins qu’ils sont indélicats à l’égard tant de ses employeurs que du fournisseur visé et totalement inadaptés dans le cadre de relations professionnelles.

– Sur la non implication de la salariée au travail

Au soutien de cette affirmation, l’employeur verse un mail de la salariée en date du 14 novembre 2016 rédigé en ces termes : «’ne me tente pas, déjà une journée pour faire un plan et demi… j’ai l’impression de travailler à la poste aux Antilles ahah’».

La salariée invoque le ton humoristique de sa réponse, à un courriel d’une collègue lui proposant une sortie cinéma, qui selon elle ne nuit en rien à la qualité de son travail.

***

Ce seul élément est insuffisant à démontrer la non implication de Mme [K] dans son travail.

– Sur la rédaction d’un CV pour la concurrence avec les outils et pendant le temps de travail

L’employeur affirme que Mme [K] ne pouvait rédiger un CV et une lettre de motivation à partir de son poste de travail, durant ses heures de travail ce que conteste la salariée qui s’appuyant sur la charte informatique de l’entreprise soutient être autorisée à utiliser à des fins personnelles les postes informatiques de l’entreprise.

***

Contrairement à ce que prétend Mme [K] qui ne conteste pas la réalité des faits, il résulte de son contrat de travail qu’elle doit : «’réserver l’exclusivité de son activité professionnelle de son temps de travail et de sa production à son employeur’».

En cela, la salariée a manqué à ses obligations.

– Sur la mésentente avec certains de ses collègues

La société prétend que Mme [K] avait un comportement désinvolte, très négligé et manifestement déloyal générant une dégradation du fonctionnement de l’agence ainsi que des tensions ou démotivations chez certaines de ses collègues agacées de devoir suppléer ses carences ou assumer les mécontentements des clients.

Mme [K] indique avoir ignoré cet état de fait.

***

En l’absence d’élément probant, ce manquement ne peut être retenu à l’encontre de Mme [K].

– Sur l’oubli de garantir un chariot élévateur (client Direct Wines) et les insuffisances envers la SCEA [A] [V] et Fils

La société reproche à la salariée, en charge du suivi du client Direct Wines, d’avoir omis d’assurer pendant un mois et demi un chariot élévateur, soumis à l’assurance obligatoire, utilisé par les salariés de cette entreprise.

Elle verse aux débats :

– un mail de [R] [Z], comptable de l’entreprise adressé à [D] [K] et à [Y] [E] : «’nous avons bien reçu les cartes d’assurance pour nos véhicules. La résiliation du chariot Toyota immatriculé [Immatriculation 3] chez Allianz est à envoyer au plus tard le 31 octobre puisque l’assurance va jusqu’au 31 décembre 2016… comme cela toute notre flotte automobile sera chez vous (…)’»,

– un mail de Mme [E] adressé le 21 septembre 2016 à Mme [K] :’«'[D], tu as pu regarder ou tu veux que je le fasse ”»,

– le mail en réponse de Mme [K] du même jour : «’non, c’est bon merci, c’était déjà prévu… je ne vois pas de quoi elle se mêle…en revanche je veux bien que tu regardes les cartes vertes de [C] [S] stp car je n’aurais pas le temps le pense Merci!’»,

– un courriel adressé le 16 février 2017 à [H] [O] par Mme [E] :

«’ [R] [Z] nous relance à propos d’un chariot élévateur TOYOTA [Immatriculation 3] que nous aurions dû intégrer au 01.01.2017 dans la flotte DIRECT WINES… la résiliation a bien été faite mais pas l’intégration du chariot au 01.01, je l’ajoute de suite mais je lui dit quoi”»,

– le courriel de réponse de [H] [O] à Mme [E] «’merci d’ajouter au plus tôt ce chariot élévateur. Vous lui envoyez la carte verte et l’avenant d’ajout. Un véhicule terrestre à moteur circule sans assurance durant 1,5 mois malgré l’obligation légale d’assurance. Qui plus est, le client nous a rappelé par écrit de prendre la garantie à date. Heureusement que la cliente a pensé à revenir vers nous une seconde fois et qu’il n’y a pas eu de sinistre (…)’».

Pour contester ce motif, Mme [K] indique qu’il ne s’agit pas d’un oubli ou d’un refus de sa part de garantir le matériel en cause mais d’une erreur de numéro du contrat souscrit sur le véhicule dans le document de résiliation complété par le client. Elle soutient que le défaut d’assurance du chariot élévateur, faute commise par Mme [E], ne peut lui être imputable.

*

En l’état des pièces versées à la procédure, il est établi que la gestion de ce client relevait de Mme [K] ce qu’elle ne conteste d’ailleurs pas et qui ressort clairement du courriel adressé à son assistante, Mme [E], le 21 septembre 2016 aux termes duquel elle lui indique avoir prévu de s’en charger.

Par voie de conséquence, ce manquement, qui aurait pu avoir des conséquences importantes tant pour l’entreprise dont le véhicule n’était pas assuré que pour son employeur, est constitutif d’une faute grave commise par la salariée.

***

S’agissant de la SCEA [V] et Fils, la société [O] et [O] reproche à sa salariée deux séries de griefs :

– son comportement désinvolte et inadapté à l’égard de Mme [V] en s’abstenant de la recevoir alors qu’elle était présente dans l’agence, en ne la recontactant pas malgré sa demande en ce sens et en ayant omis de résilier’ malgré sa demande, un précédent contrat auprès de Groupama après avoir égaré l’appel de cotisation de ce dernier qui lui avait été remis pour procéder à la résiliation demandée,

– l’omission d’assurer deux véhicules, non couverts pendant plus d’un an.

La société produit une lettre en date du 1er mars 2017 du représentant légal de la SCEA [V] et Fils se plaignant de ces faits et demandant à ne plus voir ses contrats gérés par Mme [K].

La salariée conteste ce motif de licenciement en soutenant que d’une part, le 13 février 2017 lors de la visite de Mme [V], elle était en arrêt maladie, que d’autre part, il ne lui a jamais été demandé de souscrire de nouveaux contrats relatifs aux automobiles de ce client, et enfin, que l’appel de cotisation prétendument égaré ne lui jamais été remis.

***

Il résulte de la lecture du courrier de M. [V], particulièrement circonstancié et qu’aucun élément probant contraire ne vient contredire que Mme [K] avait la gestion des contrats d’assurance de la SCEA [V] et Fils ; M. [V] déclare : «'(…) lors du passage à l’agence de mon père le 13 février 2017 afin de récupérer les cartes vertes, non reçues par courrier, des véhicules immatriculés [Immatriculation 5] et [Immatriculation 4], nous avons constaté avec stupéfaction que ces deux véhicules n’étaient pas assurés depuis le 01/01/2016. nous vous avons confié la résiliation de nos contrats et avons également pris la précaution, courant novembre 2015 de vous contacter afin que Mme [K] procède à la validation des contrats d’assurances automobiles restant à valider. Etant donné l’extrême gravité des insuffisances évoquées et le manque de professionnalisme de Mme [D] [K] nous vous signifions notre souhait de changer au plus tôt d’interlocuteur au sein de votre cabinet. La reproduction de fautes de cette gravité nous contraindrait à interrompre nos relations professionnelles malgré la qualité de vos contrats et de votre service sinistre (…)’».

Il résulte de ce courrier que Mme [K], chargée de clientèle, est à l’origine du défaut d’assurance pendant plus d’un an de deux véhicules ce qui aurait pu avoir des conséquences graves en cas d’accident tant pour le client que pour son employeur.

Ces faits, d’une particulière gravité constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de la salariée au sein de la société.

Par voie de conséquence, il convient de confirmer la décision entreprise en ce qu’elle a jugé que le licenciement de Mme [K] reposait sur une faute grave et l’a déboutée de ses demandes.

3- sur l’irrégularité de la procédure de licenciement et la procédure vexatoire

L’article L.1235-2 du code du travail dispose que lorsqu’une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d’un salarié intervient sans que la procédure requise ait été observée ou sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.

La salariée sollicite la confirmation de la décision déférée en ce qu’elle a considéré que Mme [K], ayant découvert le 1er ars 2017 sur un poste informatique en libre accès sa lettre de licenciement avant qu’elle ne soit convoquée à l’entretien préalable à son éventuel licenciement ou informée d’une quelconque mesure disciplinaire envisagée à son encontre, avait fait l’objet d’une procédure irrégulière et vexatoire de la part de son employeur.

Elle verse à la procédure un procès-verbal de constat établi le 9 mars 2017 par un huissier de justice aux termes duquel il apparaît que Mme [K] lui a remis la copie d’un projet de courrier émanant de la SARL [O] et [O] à son intention se terminant par : «’face à l’ensemble de ces fautes nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour faute grave’».

Pour s’opposer à cette demande, l’employeur soutient qu’il s’agissait d’un simple projet et que dans le même temps un autre projet avait été rédigé qui se terminait par : «’néanmoins après avoir entendu vos arguments concernant les fautes qui vous sont reprochées, nous avons le plaisir de vous confirmer dans votre poste de travail’» ce que confirme Mme [N], secrétaire au sein de la société, dans son attestation du 31 août 2018 en indiquant que son supérieur hiérarchique lui avait demandé, avant qu’elle ne parte en congés et en prévision de son entretien avec Mme [K] le 10 mars, d’établir deux projets de courriers : l’un confirmant la salariée dans son poste et l’autre, confirmant son licenciement. Elle précise que ces courriers, ni datés ni signés, avaient été imprimés puis scannés par ses soins afin de les inclure dans le dossier personnel de M. [O].

Aucune irrégularité ne peut être retenue dans la mesure où d’une part, il est établi qu’il existait deux projets alternatifs de courrier non datés et non signés et d’autre part, que ces courriers n’étaient pas accessibles à tous comme le prétend la salariée puisqu’ils se trouvaient dans le dossier personnel de M. [O].

La décision entreprise sera donc infirmée sur ce point.

4- Sur l’exécution déloyale du contrat du travail

Mme [K] sollicite la condamnation de l’employeur à lui verser la somme de 10.000 euros à ce titre en arguant d’une surveillance constante des salariés par la mise en place d’un système de vidéo surveillance et d’un système de géolocalisation des salariés en temps réel, d’une pression exercée par son employeur, d’un avertissement disciplinaire, d’une mise à pied conservatoire, de son licenciement, d’une sanction pécuniaire en retenant de son solde, la franchise d’assurance relative au véhicule professionnel à hauteur de 290 euros et de l’absence de versement du complément de son salaire pendant son arrêt de travail du 2 au 22 février 2017.

Ces éléments sont contestés à juste titre par l’employeur qui produit les avenants relatifs à la vidéo surveillance/protection et géolocalisation signés par la salariée le 7 avril 2015 et le 2 mai 2016 sans qu’elle ait fait valoir une quelconque opposition comme elle pouvait le faire.

S’agissant de la pression et du stress permanent, l’employeur relève, également à raison, qu’aucun élément probant n’est versé en ce sens.

S’agissant de la retenue sur le solde de tout compte de la salariée du montant de la franchise afférente au véhicule de fonction qui avait été mis à sa disposition, elle est permise par application des dispositions de l’article L. 3251-2 du code du travail qui dispose que par dérogation aux dispositions de l’article L. 3251-1, une compensation entre le montant des salaires et les sommes qui seraient dues à l’employeur peut être opérée dans les cas de fournitures suivants : 1° Outils et instruments nécessaires au travail, matières ou matériaux dont le salarié a la charge et l’usage, sommes avancées pour l’acquisition de ces mêmes objets.

S’agissant du non versement du complément de salaire pendant l’arrêt de travail de la salariée, l’employeur fait également valoir à juste titre l’absence de diligences de Mme [K] pour lui transmettre les éléments nécessaires au versements de ses indemnités journalières. Il justifie avoir été contraint de lui adresser le 16 mars 2017 une lettre recommandée avec avis de réception avant de pouvoir régulariser la situation le 15 mai 2017.

S’agissant de l’avertissement disciplinaire reproché, il convient d’observer que Mme [K] ne l’a jamais contesté et ne le conteste toujours pas dans le cadre de la présente procédure.

S’agissant du licenciement, il est justifié.

Par conséquent, il convient de débouter Mme [K] de ses demandes à ce titre et de confirmer le jugement déféré de ce chef.

5- Sur la demande de la société au titre de la procédure abusive

Les premiers juges ont rejeté la demande reconventionnelle formée par l’employeur tendant à obtenir l’allocation de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile aux motifs de réclamations indemnitaires sans fondement ni cohérence de la part de la salariée, nuisant à son image, ce à quoi s’oppose Mme [K] en soutenant n’avoir qu’exercer son droit d’agir.

***

Le droit d’agir en justice et d’exercer une voie de recours ne dégénère en abus qu’en cas de faute caractérisée par l’intention de nuire de son auteur, sa mauvaise foi ou sa légèreté blâmable qui ne résultent pas du seul caractère infondé des prétentions.

La décision des premiers juges sera donc confirmée sur ce point.

6- Sur les autres demandes

Mme [K], partie perdante à l’instance et en son recours, sera condamnée aux dépens exposés en cause d’appel ainsi qu’à payer à la société la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Déboute la société [O] et [O] de sa demande au titre de l’irrecevabilité de l’appel,

Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions sauf en ce qu’elle a condamné la société [O] et [O] au paiement d’une indemnité de 3.000 euros pour procédure irrégulière et vexatoire et des dépens,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute Mme [D] [K] de sa demande au titre d’une procédure de licenciement irrégulière et vexatoire,

Condamne Mme [D] [K] aux dépens ainsi qu’à verser à la société [O] et [O] la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x