Prospection Téléphonique : décision du 7 décembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/05544

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Prospection Téléphonique : décision du 7 décembre 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/05544

AFFAIRE PRUD’HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 19/05544 – N° Portalis DBVX-V-B7D-MQ2E

[W] ÉPOUSE [L]

C/

Société GL EVENTS EXHIBITIONS

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 18 Juillet 2019

RG : F18/00286

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 07 DECEMBRE 2022

APPELANTE :

[K] [W] épouse [L]

née le 17 mai 1978

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Romain MIFSUD de la SARL OCTOJURIS – MIFSUD – PESSON – AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Société GL EVENTS EXHIBITIONS

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON ayant pour avocat plaidant Me Céline VIEU DEL-BOVE de la SCP AGUERA AVOCATS, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 04 Octobre 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Joëlle DOAT, Présidente

Nathalie ROCCI, Conseiller

Anne BRUNNER, Conseiller

Assistés pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 07 Décembre 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente, et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat de travail à durée déterminée, Mme [K] [W] épouse [L]

a été embauchée par la société GL EVENTS EXHIBITIONS pour la période du

1er septembre 2006 au 30 avril 2007, renouvelée jusqu’au 28 février 2008, au poste de chargé de projet junior, statut ETAM, position 2.2, coefficient 310 de la convention collective des salariés des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs-conseils et sociétés de conseils (IDCC 1486).

Un contrat de travail à durée indéterminée a été conclu entre les parties le 18 février 2008 à effet du 1er mars 2008, pour le poste de chargée de projet junior, non cadre, position 2.3, coefficient 355.

Selon un avenant en date du 21 mars 2008, la salariée a reconnu avoir pris connaissance des horaires en vigueur au sein de la société et s’est engagée à ce que son temps d’activité recouvre les plages horaires ainsi définies.

Par avenant en date du 15 mai 2012, la salariée a été promue au poste de chargée d’affaires à compter du 1er mai 2012 et classée au statut cadre, position 2.1, coefficient 115.

La clause relative à la durée du travail a été modifiée et une convention de forfait en jours a été stipulée entre les parties sur la base de 218 journées travaillées assorties de jours de repos, conformément aux dispositions de l’article 3 de l’accord d’entreprise du

30 novembre 2007 relatif à l’organisation et à l’aménagement du temps de travail.

Un avenant au contrat de travail ‘dans le cadre d’un congé parental à temps partiel’ a fixé la durée hebdomadaire du travail de la salariée à 80 % pour la période du 2 juin au

31 juillet 2014.

La salariée a été placée en arrêt de travail du 5 mars 2017 au 31 mars 2017.

Par lettre du 25 avril 2017, Mme [L] a demandé à bénéficier d’une rupture conventionnelle, en indiquant qu’elle souhaitait se consacrer à d’autres projets professionnels. L’employeur n’a pas donné suite à cette demande.

Le 3 mai 2017, la salariée a de nouveau été placée en arrêt de travail successivement renouvelé jusqu’à la date de la visite de reprise du 6 novembre 2017 à l’issue de laquelle le médecin du travail a émis l’avis suivant :

« Salariée inapte à son poste de travail actuel ainsi qu’à tout poste dans cette entreprise.

L’étude de poste et des conditions de travail a été réalisée par le médecin du travail avec l’employeur le 25 octobre 2017.

L’état de santé de la salariée fait obstacle à tout reclassement dans un emploi (article R.4624-42 du code du travail) »

Une visite de pré-reprise avait été organisée le 19 octobre 2017 à la demande de la salariée concluant à une inaptitude probable.

Le 9 novembre 2017, la société a convoqué la salariée à un entretien préalable à son licenciement éventuel, fixé au 22 novembre 2017, auquel elle ne s’est pas présentée, puis l’a licenciée le 27 novembre 2017 pour inaptitude médicalement constatée par le médecin du travail.

Par requête du 2 février 2018, la salariée a saisi le conseil des prud’hommes de LYON en lui demandant de dire qu’elle relevait du statut cadre, position 3.1, coefficient 170 de la convention collective et de condamner la société à lui verser diverses sommes à titre de rappel de salaire consécutif, rappel de salaire à titre de primes contractuelles, rappel d’indemnité conventionnelle de licenciement ainsi qu’à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et dommages et intérêts pour non-respect des obligations en matière de santé et de sécurité des travailleurs.

Elle a demandé que son licenciement soit déclaré nul et que la société soit condamnée à lui payer des dommages et intérêts pour ‘licenciement sans cause réelle et sérieuse’, des dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement et une indemnité compensatrice de préavis.

Par jugement du 18 juillet 2019, le conseil des prud’hommes a :

– dit que Madame [L] ne relevait pas du statut cadre, position 3.1, coefficient 170 de la convention collective applicable ;

– prononcé la caducité de la convention de forfait ;

– dit que la SA GL EVENTS EXHIBITIONS n’a pas respecté les dispositions de la convention collective applicable ;

– condamné la SA GL EVENTS EXHIBITIONS à verser à Madame [L] les sommes suivantes :

– 1 700 euros de dommages et intérêts pour procédure de licenciement irrégulière ;

– 1 700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouté Madame [L] [K] de ses demandes plus amples ou contraires ;

– rejeté la demande d’exécution provisoire

– débouté la SA GL EVENTS EXHIBITIONS de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la SA GL EVENTS EXHIBITIONS aux dépens de l’instance.

Mme [L] a interjeté appel de ce jugement, le 30 juillet 2019.

Elle demande à la cour :

– d’infirmer le jugement en ce qu’il :

– a dit qu’elle ne relevait pas du statut cadre, position 3.1, coefficient 170 de la convention collective applicable 

– a prononcé la caducité de la convention de forfait 

– l’a déboutée de ses demandes plus amples ou contraires 

et, statuant de nouveau,

à titre principal,

– de dire qu’elle relevait du statut cadre, position 3.1, coefficient 170 de la convention collective applicable

– de fixer le salaire brut mensuel moyen à la somme de 3 169,34 euros

– de condamner la société GL EVENTS EXHIBITIONS au rappel de salaire correspondant au repositionnement, soit la somme de 36 768,38 euros outre 3 676,83 euros au titre des congés payés afférents

– de condamner la société GL EVENTS au rappel sur indemnité conventionnelle de licenciement selon sa reclassification à la somme de 1 323,19 euros

à titre subsidiaire,

– de dire que la convention de forfait est nulle

– de condamner la société GL EVENTS EXHIBITIONS à la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour les heures complémentaires effectuées pendant trois ans

– de condamner la société GL EVENTS EXHIBITIONS à la somme de 20 947,38 euros au titre du travail dissimulé

– de condamner la société GL EVENTS EXHIBITIONS à la somme de 5 000 euros au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail

– d’ordonner la remise des bulletins de paie conformes sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du prononcé du ‘jugement’

– d’ordonner la remise de l’attestation Pôle Emploi rectifiée sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du prononcé du ‘jugement’

– de condamner la société GL EVENTS EXHIBITIONS à la somme de 5 000 euros au titre du non-respect des dispositions de la convention collective applicable et des dispositions du code du travail en matière de santé et de sécurité des travailleurs

– de dire que son licenciement est nul

– de condamner la société GL EVENTS à la somme de 19 014 euros correspondant à 6 mois de salaire au titre du licenciement nul, à titre subsidiaire à la somme de

12 961,19 euros ou celle de 11 638 euros pour inaptitude d’origine professionnelle 

– de condamner la société GL EVENTS à la somme de 9 507euros correspondant à l’indemnité de préavis

– de condamner la société GL EVENTS EXHIBITIONS à lui verser la somme de

5 000 euros au titre de l’irrégularité de la procédure de licenciement

– de condamner la société GL EVENTS EXHIBITIONS à la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.

La société GL EVENTS EXHIBITIONS demande à la cour :

– de prononcer la nullité du jugement en ce que le conseil de prud’hommes a statué ultra petita en prononçant la caducité de la convention de forfait ;

– de déclarer irrecevables les demandes nouvelles de Madame [L] au paiement des sommes de :

5 000 euros au titre de dommages et intérêts pour les heures complémentaires effectuées pendant trois ans

20 947,38 euros au titre du travail dissimulé

– d’infirmer le jugement en ce qu’il a dit qu’elle n’a pas respecté les dispositions de la convention collective applicable  et l’a condamnée à verser à Madame [L] les sommes suivantes :

1 700 euros de dommages et intérêts pour procédure de licenciement irrégulière,

1 700 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamnée aux dépens de l’instance et déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

jugeant à nouveau,

– de débouter Madame [L] de l’ensemble de ses demandes

– à titre subsidiaire, de réduire à de plus justes proportions le montant des dommages et intérêts susceptibles d’être alloués à Madame [L]

– de la condamner au paiement de la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’instance et d’appel

– de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [L] de ses autres demandes et a dit qu’il n’y a pas lieu d’étendre l’exécution provisoire au-delà de celle de droit.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 septembre 2022.

SUR CE :

La société forme une demande en nullité du jugement au motif qu’il a statué ‘ultra petita’ en prononçant la caducité de la convention de forfait mais n’en tire pas les conséquences puisque dans la suite du dispositif de ses conclusions d’appel, elle demande l’infirmation du jugement.

Dans ces conditions, la cour n’est pas saisie de la demande de nullité.

Sur la demande de repositionnement

Mme [L] expose qu’elle était chargée de l’organisation du salon professionnel biennal de la restauration SIRAH à [Localité 3] et le salon professionnel biennal de la boulangerie-pâtisserie EUROPAIN à [Localité 5], qu’elle devait notamment vendre des surfaces d’exposition et des outils de communication, assumer la gestion d’un portefeuille de clients français et internationaux, prospecter de nouveaux clients, élaborer les commissions et factures pour les clients internationaux, ce qui représentait le suivi de plusieurs centaines de dossiers, qu’elle exerçait ses fonctions sous les ordres d’un chef de service et mettait en oeuvre ses connaissances acquises pendant ses études et après 11 années d’expérience professionnelle dans la société.

Elle estime qu’elle a été injustement positionnée au niveau 2.1 coefficient 115 prévoyant uniquement une pratique professionnelle d’au moins deux ans, alors qu’elle n’était pas une simple exécutante.

Elle sollicite un rappel de salaire représentant la différence entre le salaire mensuel de 3 301,40 euros, soit 120 % du salaire minimum conventionnel d’un cadre 3.1 coefficient 170 travaillant à 80 %, et celui de 2 148 euros qu’elle a effectivement perçu.

La société fait valoir :

– que l’action de la salariée n’est recevable que pour les salaires dont l’échéance est postérieure au 2 février 2015, compte tenu de la prescription triennale en matière de salaire 

– que Mme [L] ne verse aux débats aucun élément susceptible de démontrer qu’elle exerçait dans les faits des fonctions correspondant au coefficient 170 de la convention collective, lequel impliquait un degré de responsabilité et une ancienneté qu’elle ne possédait pas.

****

En cas de contestation sur la catégorie professionnelle dont relève le salarié, le juge doit rechercher la nature de l’emploi effectivement occupé par ce dernier et la qualification qu’il requiert. La charge de la preuve pèse sur le salarié qui revendique une autre classification que celle qui lui a été attribuée.

Le salarié ne peut prétendre obtenir la classification qu’il revendique que s’il remplit les conditions prévues par la convention collective.

Aux termes de l’avenant du 15 mai 2012 en vertu duquel Mme [L] a été positionnée au statut cadre, il est stipulé que dans le cadre de ses fonctions de chargée d’affaires, la salariée est placée sous la subordination hiérarchique de la responsable des ventes et devra périodiquement rendre compte à celle-ci, que les détails des responsabilités confiées au salarié, naturellement évolutives en ce qu’elles sont liées aux évolutions de l’activité, de l’organisation et des objectifs, sont décrites, à titre indicatif, dans la fiche descriptive de poste jointe en annexe au contrat initial.

La définition de la position 3.1 coefficient 170 de la classification des ingénieurs et cadres du 15 décembre 1987 est la suivante :

Ingénieurs ou cadres placés généralement sous les ordres d’un chef de service et qui exercent des fonctions dans lesquelles ils mettent en oeuvre non seulement des connaissances équivalant à celles sanctionnées par un diplôme mais aussi des connaissances pratiques étendues sans assurer toutefois dans leurs fonctions une responsabilité complète et permanente qui revient en fait à leur chef.

Pour revendiquer cette position et ce coefficient qui sont ceux du directeur opérationnel et commercial de la société, la salariée se prévaut de deux éléments : son diplôme de master en administration des affaires mention langues et affaires obtenu au titre de l’année universitaire 2005-2006 et la phrase suivante du compte-rendu de son entretien annuel de mars 2016 au titre de l’année 2015, au chapître résultats attendus pour la période à venir : ‘réussir le lancement d’Europain 2018 avec la participation à la stratégie et la motivation des exposants internationaux’.

Mme [L], qui a été promue en 2012 du statut des employés, techniciens et agents de maîtrise (ETAM) au statut de cadre, n’apporte aucune pièce relative aux tâches qu’elle a effectivement exercées à partir de cette date dans la société.

Selon la fiche de poste produite par l’employeur, le chargé d’affaires de la société GL Events Exhibitions est chargé de l’entretien et du développement du fonds de commerce constitué par les salons et plus particulièrement des salons et secteurs qui lui sont affectés à travers une mission de développement commercial intégrant notamment l’application des plans d’action commerciale, la vente de stands par prospection téléphonique, la gestion d’un portefeuille client, le suivi de l’exécution des commandes, l’établissement de reportings, dans le respect des procédures internes.

Il est précisé que, de façon générale, le salarié doit s’acquitter de toute mission s’inscrivant dans ses domaines d’intervention qui lui sont confiés par son supérieur hiérarchique et se conformer à toutes les instructions générales et particulières qui lui sont données par sa hiérarchie.

La salariée ne démontre pas que les fonctions ainsi décrites ne relevaient pas de la position 2.1 coefficient 115 ainsi définie : ingénieurs ou cadres âgés de 26 ans au moins ayant au moins deux ans de pratique dans la profession, qualités intellectuelles et humaines leur permettant de se mettre rapidement au courant des travaux d’études. Coordonnent éventuellement les travaux de techniciens, agents de maîtrise, dessinateurs ou employés travaillant aux mêmes tâches qu’eux dans les corps d’état étudiés par le bureau d’études, tandis que l’employeur justifie au moyen du bulletin de salaire de septembre 2018 correspondant que l’emploi de responsable de développement commercial de sa supérieure hiérarchique est classé à la position 2.3, soit en dessous de la position 3.1.

C’est à juste titre en conséquence que le conseil de prud’hommes a rejeté la demande de rappels de salaires consécutifs au placement à la position 3.1 coefficient 170 revendiquée.

Sur la demande subsidiaire en nullité de la convention de forfait

Mme [L] fait valoir que :

– compte-tenu de son positionnement au 2.1, elle ne pouvait pas bénéficier d’une convention de forfait

– aucun suivi de son temps de travail n’a été opéré et la société n’a mis en place qu’un seul entretien par an si bien que le suivi de la charge de travail n’a pas été effectué correctement

– elle a effectué de nombreuses heures complémentaires et supplémentaires, alors qu’elle travaillat à temps partiel depuis le 1er juin 2016

– en effet, c’est elle qui devait gérer les deux salons SIRHA et EUROPAIN et avait la charge du plus grand nombre de dossiers.

La société fait valoir :

– que cette demande est présentée pour la première fois en cause d’appel

– que la salariée ne démontre pas en quoi l’accord d’entreprise du 30 novembre 2007 n’est pas conforme aux exigences légales et jurisprudentielles

– que la salariée a bénéficié d’un planning individuel et d’une synthèse de ses journées de travail.

****

Les articles L. 3121-39 et suivants du code du travail, dans leurs rédactions applicables à la date de conclusion de la convention litigieuse, prévoient que les salariés ayant conclu une convention de forfait en jours ne sont pas soumis aux dispositions relatives à la durée légale hebdomadaire, à la durée quotidienne maximale de travail ni aux durées hebdomadaires maximales de travail respectivement prévues aux articles L. 3121-10, L. 3121-34 et L. 3121-35 et L. 3121-36 du même code.

L’article L. 3121-39 dispose que la conclusion de conventions individuelles de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche, qui détermine les catégories de cadres susceptibles de bénéficier de ces conventions individuelles de forfait ainsi que les modalités et les caractéristiques principales des conventions de forfait susceptibles d’être conclues.

L’avenant du 15 mai 2012 contient la clause suivante en ce qui concerne la durée du travail :

(…) La fixation d’une durée de travail exprimée en jours est apparue particulièrement adaptée conformément aux dispositions légales et conventionnelles plus particulièrement des dispositions de l’accord d’entreprise du 30 novembre 2007 relatif à l’organisation et à l’aménagement du temps de travail tant qu’elles seront applicables au sein de la société.

En accord avec la salariée, la durée de travail de cette dernière est appréciée pour une année civile complète de travail, sur la base de 175 journées travaillées assorties de repos.

Mme [L] ne présente aucun moyen de fait, ni de droit à l’appui de sa demande en nullité de la convention de forfait souscrite par elle, se contentant de soutenir que les cadres placés à la position 1.2 coefficient 115 ne pouvaient être soumis à une convention de forfait en jours.

Aucune des parties ne produit l’accord d’entreprise du 30 novembre 2007 en application duquel a été conclue la convention de forfait en jours litigieuse.

Dans ces conditions, il est impossible de vérifier la validité de ladite convention de forfait.

En tout état de cause, Mme [L] ne tire aucune conséquence de sa demande aux fins de nullité de la convention de forfait en jours, puisqu’elle ne sollicite pas le paiement d’un rappel d’heures complémentaires ou supplémentaires.

La demande en dommages et intérêts ‘pour les heures complémentaires effectuées pendant trois ans’ et la demande en paiement d’une indemnité pour travail dissimulé présentées pour la première fois en cause d’appel doivent être déclarée irrecevables.

Sur la demande de dommages et intérêts fondée sur l’exécution déloyale du contrat de travail

Mme [L] fait valoir qu’elle n’a pas bénéficié de la surprime correspondant au salon SIRHA alors que l’objectif qui avait été assigné avait été largement dépassé, ni de la prime intermédiaire déclenchée à 50 % d’obtention du chiffre d’affaires pour les objectifs Europain.

Elle fonde en outre sa demande de dommages et intérêts sur :

– le sous- positionnement conventionnel

– le non-respect de l’obligation de suivi de la charge de travail

– la nullité de la convention de forfait.

La société fait valoir que la salariée n’apporte aucun élément de preuve à l’appui de ses prétentions.

****

La seule pièce visée à l’appui de l’allégation de défaut de paiement d’une prime (sans précision de date ou de période) est la lettre de l’avocate de la salariée du 20 décembre 2017 qui écrit à l’employeur sur ce point : ‘Mme [L] m’indique qu’elle n’a pas bénéficié de la surprime correspondant au salon SIRHA alors même que l’objectif qui avait été assigné est largement dépassé.’

Le non-paiement d’une prime qui serait dûe à Mme [L] n’est pas démontré.

La demande en repositionnement de Mme [L] a été rejetée.

A supposer que la convention de forfait soit nulle, Mme [L] n’établit pas qu’elle a subi un préjudice en lien avec cette nullité.

L’existence d’un préjudice en lien avec le non-respect éventuel de l’obligation de suivi de la charge de travail n’est pas prouvée non plus.

La demande de dommages et intérêts doit être rejetée.

Sur la demande de dommages et intérêts fondée sur le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité

Mme [L] invoque les faits suivants :

– la surcharge de travail et nombreuses heures supplémentaires réalisées aux dépens de sa vie privée et familiale

– la dégradation de son état de santé

La société répond :

– que la salariée n’apporte pas d’élément de nature à démontrer qu’elle aurait alerté son employeur sur une telle situation

– que la salariée travaillait en contact avec les régions et non avec les entreprises ce qui représentait une charge de travail limitée

– que l’activité était plus intense durant deux mois tous les deux ans et qu’un renfort était alors apporté au chargé d’affaires pour le soulager

– que Mme [L] a elle-même demandé à se voir confier une mission de commercialisation auprès des prospects allemands

– que Mme [L] ne rapporte pas la preuve que son état de santé serait en lien avec ses conditions de travail, au contraire, il s’avère qu’elle a connu des problèmes personnels et familiaux qui ont impacté son état psychologique et moral.

****

Le tableau établi sur une feuille volante en pièce 4 de la salariée faisant figurer un nombre de dossiers pour chacun des six chargés d’affaires, allant de 14 ([E]) à 643 (Mme [L]) en passant par 470 ([C]) et un ou deux salons (deux pour Mme [L]), sans date, en l’absence de tout élément de comparaison et hors de tout contexte, de même que les tableaux annexés sont insuffisants à rapporter la preuve de ce que Mme [L] effectuait des heures complémentaires ou supplémentaires, dont le nombre n’est précisé nulle part, et qu’elle subissait une charge excessive de travail.

La seule circonstance que la salariée s’est vu prescrire à compter de juin 2015 des anxiolytiques et un traitement anti-dépresseur ne permet pas de caractériser un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité à son égard.

Sur le licenciement

Mme [L] soutient à titre principal que son licenciement est nul comme étant la conséquence des manquements volontaires de l’employeur susceptibles d’encourir la qualification de harcèlement, à savoir :

– l’augmentation permanente des objectifs de prospection

– la répartition très inégale de la charge de travail entre les chargées d’affaires

– le non-remplacement de collègues en congé maladie en supplément de la charge de travail initiale

– le manque de reconnaissance et de communication de la direction

– l’affectation de dossiers supplémentaires, de manière imprévisible et aléatoire, en dehors du champ défini préalablement, à gérer à brefs délais.

Elle fait observer à l’employeur que les alertes ont été orales puisque son bureau était situé juste à côté de celui de sa responsable, dans un openspace.

Elle soutient que la société ne produit qu’un seul entretien au titre de l’année 2015, non signé et non commenté par elle, qu’aucun entretien n’est produit pour l’année 2016, alors que la situation s’est gravement détériorée au cours de l’année 2016.

La société fait observer à juste titre que Mme [L] ne produit aucune pièce de nature à justifier la matérialité des griefs invoqués à l’appui du harcèlement moral allégué, qu’elle ne s’est jamais plaint de ses conditions de travail ni de sa charge de travail, et qu’elle n’a jamais contesté ses objectifs.

Il convient de rejeter la demande en nullité du licenciement.

Mme [L] soutient à titre subsidiaire qu’elle a fait l’objet d’un ‘burn out’ directement en lien avec sa charge excessive de travail, mais que la société parfaitement informée du caractère professionnel de l’inaptitude n’a pas appliqué la procédure de licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle de sorte qu’elle sollicite dans le corps de ses conclusions la ‘condamnation de la société à doubler l’indemnité de licenciement’.

Il a été dit ci-dessus que la société n’avait commis aucun manquement, si bien que l’inaptitude de Mme [L] n’a pas d’origine professionnelle.

Les demandes pécuniaires figurant au dispositif à ce titre doivent être rejetées.

Sur la demande de dommages et intérêts fondée sur l’irrégularité de la procédure de licenciement

La société soutient que, compte tenu de la rédaction de la déclaration d’inaptitude et conformément à l’article L. 1226-2-1 du code du travail, elle s’est trouvée dispensée de l’obligation de recherche de reclassement et que le conseil de prud’hommes ne pouvait déclarer irrégulière la procédure de licenciement.

Mme [L] fait valoir que la société ne lui a jamais notifié par lettre l’impossibilité de reclassement, ce qui lui a causé un préjudice distinct.

****

Le conseil de prud’hommes a considéré que le fait pour l’entreprise de ne pas avoir notifié à Mme [L] par écrit les motifs qui s’opposaient à son reclassement constituait une irrégularité de la procédure de licenciement.

Il ressort de la lettre de licenciement du 27 novembre 2017 que l’employeur a reproduit intégralement l’avis d’inaptitude émis par le médecin du travail selon lequel ‘l’état de santé de la salariée fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.’

Dans ces conditions, l’employeur a bien informé la salariée que son reclassement était impossible.

La procédure de licenciement est régulière.

Il convient de rejeter la demande en dommages et intérêts fondée sur l’irrégularité de la procédure de licenciement, le jugement étant infirmé en ce qu’il l’a accueillie.

Mme [L], partie perdante, doit être condamnée aux dépens de première instance et d’appel et à payer à la société GL Events Exhibitions la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le jugement sera donc infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l’indemnité de procédure.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :

 

CONFIRME le jugement, sauf en ce qu’il a prononcé la caducité de la convention de forfait en jours, condamné la société GL Events Exhibitions à payer à Mme [K] [L] des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par l’irrégularité de la procédure de licenciement et une indemnité de procédure et condamné cette société aux dépens

STATUANT à nouveau sur les chefs infirmés,

REJETTE la demande en paiement de dommages et intérêts fondée sur l’irrégularité de la procédure de licenciement

Y AJOUTANT,

DIT n’y avoir lieu à statuer sur la validité de la convention de forfait en jours

DÉCLARE irrecevables la demande en paiement de dommages et intérêts ‘pour les heures complémentaires effectuées pendant trois ans’ et la demande en paiement d’une indemnité pour travail dissimulé

CONDAMNE Mme [K] [L] aux dépens de première instance et d’appel

CONDAMNE Mme [K] [L] à payer à la société GL Events Exhibitions la somme de 1 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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