Marque des communes : décision du 29 février 2024 Tribunal judiciaire de Bordeaux RG n° 23/02850

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Marque des communes : décision du 29 février 2024 Tribunal judiciaire de Bordeaux RG n° 23/02850

29 février 2024
Tribunal judiciaire de Bordeaux
RG n°
23/02850

N° RG 23/02850 – N° Portalis DBX6-W-B7H-XUKN
PREMIÈRE CHAMBRE
CIVILE

79A

N° RG 23/02850 – N° Portalis DBX6-W-B7H-XUKN

Minute n° 2024/00

AFFAIRE :

Commune MIRAMONT DE GUYENNE

C/

Association BASTID’ART

Exécutoires délivrées
le
à
Avocats : la SELARL MAURIAC AVOCATS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 29 FEVRIER 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors du délibéré :

Madame Caroline RAFFRAY, Vice-Présidente,
Madame Patricia COLOMBET, Vice-Présidente,
Monsieur Ollivier JOULIN, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

Madame Hassna AHMAR-ERRAS, adjoint administratif faisant fonction de Greffier.

DEBATS :

A l’audience publique du 18 Janvier 2024 conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

Ollivier JOULIN, magistrat chargée du rapport, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés, et en a rendu compte dans son délibéré.

JUGEMENT:

Réputé contradictoire
Premier ressort,
Par mise à disposition au greffe,

DEMANDERESSE :

Commune MIRAMONT DE GUYENNE
Place de l’hôtel de Ville
47800 MIRAMONT DE GUYENNE

représentée par Maître Vincent MAURIAC de la SELARL MAURIAC AVOCATS, avocats au barreau de BORDEAUX, avocats plaidant

DEFENDERESSE :

Association BASTID’ART
Zone artisanale La Brisse
47800 MIRAMONT DE GUYENNE
Défaillant
N° RG 23/02850 – N° Portalis DBX6-W-B7H-XUKN

EXPOSE DU LITIGE

La commune de MIREMONT-DE-GUYENNE, ancienne bastide royale située dans le département du Lot-et-Garonne a développé des manifestations culturelles et d’animation touristique plus particulièrement orientées sur la tradition des saltimbanques, les spectacles de cirque, les arts vivants – cette tradition circassienne s’est concrétisée par la création en 1994, sur l’idée originale de [F] [D], directeur de l’école de Cirque “TROIS HUIT CIRCUS” d’un festival des arts de la rue qui a pris le nom, en 2004 de “Festival Bastid’Art”

A partir de 1996 l’animation réalisée par le comité d’action culturelle Miramontais sous la dénomination depuis 2004 de “festival Bastid’Art” a été confiée à l’association satellite de la Commune, qui est devenue l’association BASTID’ART en 2008.

Une convention municipale d’objectif votée en conseil municipal le 25 mai 2009 et signée le 10 juin 2009 a confié l’organisation du festival à l’association, lui mettant à disposition la dénomination Bastid’Art.

Le 28 janvier 2016 la commune a procédé à l’enregistrement de la marque verbale française FESTIVAL BASTID’ART n°4302984, en classes 41 et 43 pour désigner les services suivants: « Éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; informations en matière de divertissement ; informations en matière d’éducation ; mise à disposition d’installations de loisirs ; production de films cinématographiques ; location d’enregistrements sonores ; location de décors de spectacles ; organisation d’expositions à buts culturels ou éducatifs ; Services de restauration (alimentation) ; hébergement temporaire ; services de bars; services de traiteurs ».

Les relations entre la Commune et l’association se sont dégradées à partir de 2021, la première reprochant à la seconde de ne pas respecter les objectifs fixés dans la convention (représentations essentiellement dans la commune, de spectacles circassiens à un tarif accessible), aucun accord n’étant intervenu, la convention a été résiliée le 10 mai 2022 ;

L’association Bastid’Art a cependant poursuivi son activité d’organisation festivalière dans des communes voisines de PELLEGRUE et BOURGOUGNADE et a déposé le 12 octobre 2020 la marque figurative française n°4690701, déposée et enregistrée en classe 41 pour désigner les services suivants « Éducation ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles; informations en matière de divertissement ; mise à disposition d’installations de loisirs ; location de décors de spectacles ; organisation de concours (éducation ou divertissement); organisation d’expositions à buts culturels ou éducatifs ; réservation de places de spectacles»

La commune estimant qu’il existait un risque de confusion à fait délivrer une mise en demeure le 5 juillet 2022 enjoignant à l’association de cesser de faire usage de la marque et de la dénomination Bastid’Art.

Aucun accord n’a pu intervenir entre les parties.

***
Selon acte du 4 avril 2023 la commune de MIRAMONT-DE-GUYENNE dont le siège est situé en l’Hôtel de Ville, Place de l’Hôtel de Ville, à MIRAMONT DE GUYENNE (47800) prise en la personne de son représentant légal, domicilié es qualité audit siège, dûment habilité par délibération en date du 5 octobre 2020 a fait assigner l’association BASTID’ART, Association déclarée, enregistrée sous le numéro SIREN 484323332, dont le siège social est situé Zone artisanale La Brisse à MIRAMONT DE GUYENNE (47800), afin de voir :

– Juger la Commune de MIRAMONT-DE-GUYENNE recevable et bien fondée en son action;

A TITRE PRINCIPAL :

– Juger que l’Association BASTID’ART se rend coupable d’actes de contrefaçon par imitation
de la marque FESTIVAL BASTID’ART n°4302984 ;

En conséquence :

– Ordonner à l’Association BASTID’ART de cesser tout usage de tout ou partie de la
dénomination BASTID’ART ou toute autre dénomination voisine, sur quelque support que ce soit et à quelque titre que ce soit, en ce compris la modification de sa raison sociale, ainsi que la promotion qui en est faite, et ce à compter de la signification du jugement à intervenir et sous astreinte de 500 (cinq cents) euros par jour de retard, le Tribunal restant saisi pour statuer sur l’astreinte définitive ;

– Condamner l’Association BASTID’ART à verser à la Commune de MIRAMONT-DE-GUYENNE la somme forfaitaire de 20.000 (vingt mille) euros en réparation des préjudices résultant des actes de contrefaçon de la marque FESTIVAL BASTID’ART n°4302984 ;

A TITRE SUBSIDIAIRE :

– Juger que l’Association BASTID’ART se rend coupable d’actes de concurrence déloyale et
parasitaire à l’encontre de la Commune de MIRAMONT-DE-GUYENNE ;

En conséquence :

– Ordonner à l’Association BASTID’ART de cesser tout usage de tout ou partie de la
dénomination BASTID’ART ou toute autre dénomination voisine, sur quelque support que ce soit et à quelque titre que ce soit, en ce compris la modification de sa raison sociale, ainsi que la promotion qui en est faite, et ce à compter de la signification du jugement à intervenir et sous astreinte de 500 (cinq cents) euros par jour de retard, le Tribunal restant saisi pour statuer sur l’astreinte définitive ;

– Condamner l’Association BASTID’ART à verser à la Commune de MIRAMONT-DE-GUYENNE la somme forfaitaire de 20.000 (vingt mille) euros en réparation des préjudices résultant des actes de concurrence déloyale et parasitaire ;

En tout état de cause :

– Ordonner la publication judiciaire, aux frais de l’Association BASTID’ART, de la décision à intervenir sur :

– Son site Internet accessible via l’URL https://bastidart.org/ ;
– Sur la page FACEBOOK accessible via l’URL : https://www.facebook.com/bastid.art
– Dans trois journaux (y compris électronique), au choix de la demanderesse et aux frais avancés par l’Association BASTID’ART sur simple présentation d‘un devis, dans la limite de 5.000 (cinq mille) euros HT par insertion.

Et ce, pendant une durée de trois mois et sous astreinte de 500 (cinq cents) euros par jour de retard passé un délai de 30 jours à compter de la signification de la décision à intervenir.

– Condamner l’Association BASTID’ART à verser à la Commune de MIRAMONT-DE-GUYENNE la somme de 5.000 (cinq mille) euros au titre de l’article 700 du CPC ;

– Condamner l’Association BASTID’ART aux entiers dépens de l’instance dont distraction au
profit de la SELARL MAURIAC AVOCATS, Avocats aux offres de droit, conformément à l’article 699 du Code de procédure civile ;

– Dire et juger n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;

Au soutien de sa demande elle rappelle qu’elle est titulaire de la marque verbale Bastid’Art et que l’usage de cette marque sans son autorisation constitue une contrefaçon au sens des dispositions du Code de la propriété intellectuelle, un risque de confusion existant dans l’esprit du public entre les services qu’elle offre dans le cadre des activités d’animation dans la Commune et celles qui sont organisées par l’association.

L’association disposait de l’autorisation tacite de faire usage de la dénomination en raison d’une délégation temporaire à celle-ci de l’organisation du festival éponyme dans la Commune, la fin des relations contractuelles a marqué la fin de cette autorisation.

L’association entretient en outre la confusion en portant la mention d’un “28ème festival international des arts de la rue” avec la dénomination protégée de “Bastid’Art” pour développer une activité absolument similaire.

Elle estime son préjudice à 20.000 € et sollicite, à titre complémentaire, qu’il soit fait interdiction à l’association de faire usage de la dénomination Bastid’Art et donc de modifier sa raison sociale, et d’assortir la condamnation de mesures de publications.

***

L’association BASTID’ART régulièrement assignée selon acte du 22 mars 2023 n’a pas constitué avocat.

DISCUSSION

La commune justifie que le comité d’action culturelle Miramontais constitué sous forme d’association dont le siège était fixé à la mairie et dont les membres de la commission culture de la municipalité étaient membres de droit, est devenue depuis 2008 l’association BASTID’ART.
Cette association a créé le 6 août 1995 le 1er festival des arts de la rue (pièce 3) devenu depuis 2004 “Bastid’ Art”, toujours dans le cadre de l’association comité d’action culturelle de la ville.

Une convention d’objectif a été passée entre la commune et l’association Bastid’Art le 10 juin 2009 (pièce 8) permettant d’attribuer à la dite association un crédit de fonctionnement et des moyens matériels pour que cette dernière organise le festival annuel d’arts de la rue pour le compte de la Commune.

La Commune a déposé la marque Festival Bastid’Art qui a été enregistrée à l’INPI le 28 septembre 2016 (pièce 9).

L’association a déposé la marque semi figurative Bastid’Art Festival international des Arts de la rue” le 12 octobre 2020.

La commune a dénoncé la convention d’objectifs par courrier du 5 avril 2022 estimant que l’association Bastid’Art ne respectait pas les termes de la convention d’objectifs, le coeur des représentations n’étant plus la bastide, le caractère circassien n’étant pas respecté, la tarification ne rendant pas abordable l’accès aux spectacles.

En l’absence de réponse de l’association, la municipalité a résilié la convention le 10 mai 2022 par LRAR. (Pièce 11)

L’association déclarait dans la presse qu’elle se retirait de l’organisation de l’événement mais organisait un événement “Bastid’Art” au mois d’août 2022 chez un particulier, tandis qu’aux mêmes dates la commune organisait une programmation artistique (pièce non numérotée sous cote 12).

L’association faisant toujours état de sa dénomination “bastid’Art” s’inscrivait dans la continuité des actions culturelles inities par la Commune, en particulier en organisant le “28ème festival international des Arts de la rue Bastid’Art” en 2022.

Ainsi, l’association à laquelle avait été mis à disposition la dénomination Bastid’Art créée par la commission culture de la municipalité en 2008, dans la finalité d’organiser le festival international des arts de la rue lui-même créé en 1995 sous l’initiative de la Commune, ne pouvait sans porter atteinte aux droits antérieurs, continuer une activité identique et concurrente dans le même secteur géographique, dans le sillage des manifestations antérieures financées par une subvention et divers moyens matériels de la Commune sous la dénomination contrefaisante de Bastid’Art.

Il convient en conséquence de faire droit à la demande principale, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’examiner la demande subsidiaire.

Au regard du contexte, des éléments économiques présentés, il convient de fixer à 8.000 € le montant des dommages-intérêts qui devront être versés par l’association et à la somme de 3.000 € le montant de l’indemnité sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

A titre de dommages-intérêts complémentaires il sera fait droit aux demandes de publication dans deux journaux aux frais avancés par l’association pour un coût maximum de 2.000€ par insertion.

PAR CES MOTIFS

STATUANT par mise à disposition au greffe, jugement réputé contradictoire et en premier ressort ;

JUGE que l’Association BASTID’ART s’est rendue coupable d’actes de contrefaçon par imitation de la marque FESTIVAL BASTID’ART n°4302984 ;

ORDONNE à l’Association BASTID’ART de cesser tout usage de tout ou partie de la
dénomination BASTID’ART ou toute autre dénomination voisine, sur quelque support que ce soit et à quelque titre que ce soit, en ce compris la modification de sa raison sociale, ainsi que la promotion qui en est faite, et ce à compter de la signification du jugement à intervenir et sous astreinte provisoire de 500 (cinq cents) euros par jour de retard durant 60 jours passé un délai de 1 mois suivant la signification de la présente décision ;

CONDAMNE l’Association BASTID’ART à verser à la Commune de MIRAMONT-DE-GUYENNE la somme forfaitaire de 8.000 (huit mille) euros en réparation des préjudices résultant des actes de contrefaçon de la marque FESTIVAL BASTID’ART n°4302984 ;

ORDONNE, à titre d’indemnisation complémentaire la publication judiciaire, aux frais de l’Association BASTID’ART, de la décision à intervenir sur :

– Son site Internet accessible via l’URL https://bastidart.org/ ;
– Sur la page FACEBOOK accessible via l’URL : https://www.facebook.com/bastid.art
– Dans deux journaux (y compris électronique), au choix de la demanderesse et aux frais avancés par l’Association BASTID’ART sur simple présentation d‘un devis, dans la limite de 2.000 (deux mille) euros HT par insertion.

Et ce, pendant une durée de trois mois et sous astreinte provisoire de 500 (cinq cents) euros par jour de retard passé un délai de 30 jours à compter de la signification de la décision à intervenir.
CONDAMNE l’Association BASTID’ART à verser à la Commune de MIRAMONT-DE-GUYENNE la somme de 3.000 (trois mille) euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE l’Association BASTID’ART aux entiers dépens de l’instance dont distraction au
profit de la SELARL MAURIAC AVOCATS, Avocats aux offres de droit, conformément à l’article 699 du Code de procédure civile ;

DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la présente décision.

La présente décision est signée par Madame Caroline RAFFRAY, Vice-Présidente, et Madame Hassna AHMAR-ERRAS, adjoint administratif faisant fonction de Greffier.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

 


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