Appel et aide juridictionnelle

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Appel et aide juridictionnelle

 

N° RG 22/03946 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LSHI

N° Minute :

C3

Copie exécutoire délivrée

le :

à

la SCP LEGALP

Me Nicolas CHARMASSON

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

2ÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU MARDI 20 JUIN 2023

Appel d’une ordonnance (N° R.G. 22/00015) rendue par le Juge des contentieux de la protection de GAP en date du 28 juillet 2022, suivant déclaration d’appel du 03 Novembre 2022

APPELANTS :

M. [U] [J]

de nationalité Française

HLM [Adresse 5] , [Adresse 4]

[Localité 1]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/008422 du 19/10/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de GRENOBLE)

Mme [B] [F]

de nationalité Française

HLM [Adresse 5] , [Adresse 4]

[Localité 1]

représentés par Me Aurélie FABBIAN de la SCP LEGALP, avocat au barreau de HAUTES-ALPES

INTIMÉ :

Etablissement Public OFFICE PUBLIC DE L’HABITAT DES HAUTES ALPES ) prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Nicolas CHARMASSON, avocat au barreau de HAUTES-ALPES

COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Emmanuèle Cardona, présidente

M. Laurent Grava, conseiller,

Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère

DÉBATS :

A l’audience publique du 25 avril 2023, Anne-Laure Pliskine, conseillère, qui a fait son rapport, assistée de Caroline Bertolo, greffière, en présence de Sorenza Loizance, greffière stagiaire, a entendu seule les avocats en leurs conclusions les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile.

Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour.

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant acte sous seing privé du 15 février 2017, Monsieur [U] [J] a pris à bail auprès de l’OPH 05, un appartement d’habitation au [Adresse 3], [Adresse 5], à [Localité 1]. Le contrat de location a été régularisé le 15 novembre 2017 par Madame [B] [F], compagne de Monsieur [J].

Les locataires ont fait état de moisissures dans leur appartement, particulièrement préjudiciables compte tenu de leur état de santé.

Suite à une assignation en référé d’heure à heure, le bailleur a été autorisé par ordonnance du 25 janvier 2022 à faire citer ses locataires devant le juge des contentieux de la protection de Gap aux fins notamment de laisser pénétrer les entreprises mandatées par l’OPH 05 dans leur logement sous peine d’astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par ordonnance de référé en date du 28 juillet 2022, l’affaire ayant fait l’objet de plusieurs renvois, le juge du contentieux de la protection a :

-donné acte aux parties de ce que l’obstruction à l’entrée dans les lieux loués par Monsieur [J] et Madame [F] était levée et que les entreprises mandatées par l’OPH 05 pouvaient y pénétrer,

-constaté que l’obligation de pénétrer dans les appartements pour exécuter les travaux de réhabilitation de la [Adresse 5] à [Localité 1], n’est pas sérieusement contestable,

-rejeté la demande reconventionnelle en indemnisation présentée par les locataires,

-condamné Monsieur [J] et Madame [F] aux dépens,

-dit n’y avoir lieu en équité à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 3 novembre 2022, M.[J] et Mme [F] ont interjeté appel de l’ordonnance en ce qu’elle a:

-rejeté la demande reconventionnelle en indemnisation présentée par les locataires,

-condamné Monsieur [J] et Madame [F] aux dépens,

-dit n’y avoir lieu en équité à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs conclusions notifiées le 22 mars 2023, M.[J] et Mme [F] demandent à la cour de :

-réformer partiellement l’ordonnance de référé du 28 juillet 2022 du juge du contentieux de la protection de Gap en ce qu’elle a, à tort, rejeté la demande reconventionnelle en indemnisation présentée par les appelants et les a condamnés aux dépens.

Statuant à nouveau,

-condamner l’OPH 05 à payer à Monsieur [J] et Madame [F] une indemnité provisionnelle de 7 200 euros,

-condamner l’OPH 05 à payer à Monsieur [J] et Madame [F] une indemnité de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Les appelants font d’abord état de la recevabilité de leur appel compte tenu de la demande d’aide juridictionnelle qu’ils ont formulée.

Ils contestent l’absence d’indemnisation, rappelant que les travaux de réhabilitation prévus étaient conséquents au regard de la vétusté de l’immeuble et devaient durer 16 mois, qu’ils ont été constamment repoussés. Ils réfutent s’être opposés à une intervention dans leur logement, indécent au regard des normes en vigueur, et soulignent l’existence de leur préjudice de jouissance.

Dans ses conclusions notifiées le 30 mars 2023, l’OPH 05 demande à la cour de :

Vu l’article 490 du code de procédure civile,

Vu les pièces versées aux débats,

-déclarer irrecevable l’appel interjeté, le 03 novembre 2022, par Monsieur [U] [J] et Madame [B] [F],

Au fond si par extraordinaire, la Cour n’estimait pas devoir déclarer irrecevable l’appel interjeté par Monsieur [U] [J] et Madame [B] [F],

-confirmer en son intégralité, l’ordonnance du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Gap du 28 juillet 2022.

En conséquence,

-constater que les locataires n’apportent absolument pas la preuve de leur impossibilité de jouir de trois pièces de leur logement pendant quatre années, les désordres étant nécessairement évolutifs,

-constater que l’OPH 05 a entrepris dès 2020, d’importants travaux de réhabilitation et que le bailleur a tout fait pour garantir la jouissance paisible de l’ensemble de ses locataires,

-débouter Monsieur [U] [J] et Madame [B] [F] de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse où la Cour estimerait que les locataires ont subi un préjudice de jouissance,

-liquider le préjudice de jouissance de Monsieur [J] et de Madame [F] à 30 % du loyer résiduel pendant 9 mois soit la somme de 270 euros,

-dire qu’il n’y a pas lieu à indemnité au profit de l’une ou l’autre des parties sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’OPH 05 énonce que les locataires ont annoncé, dès le 4 novembre 2021, qu’ils s’opposeraient aux travaux de réfection destinés à supprimer les traces d’humidité et moisissures dans leur logement, que cette résistance a conduit l’OPH 05 à devoir reporter à plusieurs reprises les travaux envisagés.

Elle énonce qu’elle s’est préoccupée de la jouissance paisible de tous les locataires de la [Adresse 5] dès 2019 et que dans ce contexte d’humidité anormale des appartements, de très importants travaux de réhabilitation pour une durée d’au moins 16 mois ont été entrepris à compter de 2020, mais que la crise sanitaire COVID a cependant retardé lesdits travaux, ce dont l’OPH 05 ne saurait être tenue responsable.

Elle souligne que les locataires ne sont jamais plaints de leur condition de logement et ce, jusqu’au 04 novembre 2021, après avoir été informés par l’OPH 05 de ce que des travaux de réfection de leur appartement allaient être effectués et qu’il conviendrait, à ce titre, soit d’être présent pour ouvrir l’appartement aux entreprises, soit de remettre un double des clés au bailleur.

La clôture a été prononcée le 5 avril 2023.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l’appel

L’article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 dans sa rédaction actuellement en vigueur dispose que : « Lorsqu’une action en justice ou un recours doit être intenté avant l’expiration d’un délai devant les juridictions de première instance ou d’appel, l’action ou le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d’aide juridictionnelle s’y rapportant est adressée au bureau d’aide juridictionnelle avant l’expiration dudit délai et si la demande en justice ou le recours est introduit dans un nouveau délai de même durée à compter :

a) de la notification de la décision d’admission provisoire ;

b) de la notification de la décision constatant la caducité de la demande ;

c) de la date à laquelle le demandeur à l’aide juridictionnelle ne peut plus contester la décision d’admission ou de rejet de sa demande en application du premier alinéa de l’article 56 et de l’article 160 ou, en cas de recours de ce demandeur, de la date à laquelle la décision relative à ce recours lui a été notifiée ;

d) ou, en cas d’admission, de la date, si elle est plus tardive, à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné. Lorsque la demande d’aide juridictionnelle est déposée au cours des délais impartis pour conclure ou former appel ou recours incident, mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile et aux articles R. 411-30 et R. 411-32 du code de la propriété intellectuelle, ces délais courent dans les conditions prévues aux b, c et d. Par dérogation aux premier et sixième alinéas du présent article, les délais mentionnés ci-dessus ne sont pas interrompus lorsque, à la suite du rejet de sa demande d’aide juridictionnelle, le demandeur présente une nouvelle demande ayant le même objet que la précédente. »

En l’espèce, la décision a été signifiée le 24 août 2022 à domicile. Les appelants ont formé une demande d’aide juridictionnelle le 29 août 2022, soit dans le délai requis de un mois.

La décision leur octroyant l’aide juridictionnelle totale a été rendue le 19 octobre 2022. L’appel a ensuite été interjeté le 3 novembre 2022, soit de nouveau dans le délai de un mois à compter de la notification, l’appel est donc recevable.

Sur le préjudice de jouissance

Selon l’article 484 du code de procédure civile, l’ordonnance de référé est une décision provisoire rendue à la demande d’une partie, l’autre présente ou appelée, dans les cas où la loi confère à un juge qui n’est pas saisi du principal le pouvoir d’ordonner immédiatement les mesures nécessaires.

Il résulte de ce texte que le juge des référés n’a pas à se prononcer sur une question de fond. Il ne lui revient donc pas de condamner à des dommages et intérêts (Cass. 2ème civ. 11 décembre 2008, n° 07-20.255).

Aucune demande de provision n’a été formée.

Sur les dépens

Il résulte de la procédure qu’à plusieurs reprises, les travaux prévus par l’OPH ont été repoussés, sans que des motifs ne soient toujours donnés aux locataires, sachant que contrairement aux allégations de l’OPH, M.[J] avait dès 2018 fait état de problèmes d’humidité dans son logement (cf.page 3 du rapport d’expertise Polyexpert). Les appelants n’ont pas refusé que des entreprises interviennent, mais ont sollicité un courrier écrit précisant la date d’intervention, demande qui pouvait paraître légitime compte tenu des multiples reports d’intervention. M.[J] justifie du fait qu’il a attrapé le Covid début janvier 2022, qu’il ne pouvait donc risquer de contaminer d’autres personnes venant à son domicile, ce qui a décalé les différentes interventions puisqu’il a fait appel à son assurance juridique, un expert amiable devant intervenir le 14 janvier 2022 mais n’ayant pu le faire que le 24 janvier. Il était donc également légitime, compte tenu de l’inertie de l’OPH, qu’il ne souhaite pas que les traces d’humidité disparaissent suite à une remise en peinture.

En conséquence, il n’apparaissait pas nécessaire pour l’OPH de solliciter une décision par assignation d’heure à heure, a fortiori compte tenu des multiples renvois auxquels cette affaire a donné lieu.

L’OPH sera dès lors condamnée aux dépens.

Il ne sera pas fait application de l’article 700 du code de procédure civile, les appelants ne justifiant pas avoir exposé des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Déclare l’appel recevable ;

Infirme l’ordonnance déférée en ce qu’elle a rejeté la demande reconventionnelle en indemnisation présentée par les locataires et les a condamnés aux dépens ;

et statuant de nouveau ;

Dit que la demande de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance excède les pouvoirs du juge des référés ;

Confirme l’ordonnance déférée pour le surplus ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Dit n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l’Office public d’habitat 05 aux dépens.

Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière,Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

 


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